Le Marxiste-Léniniste

Numéro 119 - 12 septembre 2016

Le gouvernement Trudeau lance une
«consultation sur la sécurité nationale »

Exigeons l'abrogation de la loi C-51!

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Manifestation à Ottawa le 14 mars 2015 dans le cadre d'une journée d'action
nationale contre C-51

Le gouvernement Trudeau lance une «consultation sur la sécurité nationale »
Exigeons l'abrogation de la loi C-51!
C-51 doit être abrogé, pas modifié - Peggy Morton
La frime des consultations et la frime de l'équilibre de la sécurité et des droits
- Christian Legeais



Le gouvernement Trudeau lance une «consultation sur la sécurité nationale »

Exigeons l'abrogation de la loi C-51!

La Loi antiterroriste de 2015, loi C-51, a été adoptée par le Parlement canadien le 5 mai 2015 et est entrée en vigueur le 18 juin 2015. Elle permet aux agences de sécurité d'État de se livrer à toutes sortes d'activités criminelles et de violer les droits des citoyens et résidents sous prétexte de défendre leur sécurité. Elle a provoqué beaucoup de discussion dans toutes les couches de la population lorsqu'elle a d'abord été déposée par le gouvernement de Stephen Harper le 30 janvier 2015. Au moment de son adoption à la Chambre des communes par les conservateurs aidés des libéraux, les Canadiens avaient déjà rendu un verdict à son sujet. C'est presque l'ensemble des secteurs de la société -- travailleurs, peuples autochtones, experts en matière de droits et de sécurité, journalistes et d'autres -- qui ont exigé que le projet de loi soit retiré parce qu'il était contraire à l'état de droit. Il y a eu des centaines de manifestations et autres actions de protestation dans toutes les régions du pays auxquelles ont participé les Canadiens de tous les milieux.

Plus de 200 000 personnes ont signé des pétitions exigeant le retrait de la loi C-51. Quarante-trois organisations, dont le Parti marxiste-léniniste du Canada, et 94 experts en matière de droits et de sécurité ont signé une lettre ouverte dans laquelle ils exigeaient « le retrait immédiat et inconditionnel » du projet de loi. Tous les signataires rejetaient également la proposition des libéraux de modifier la loi s'ils étaient élus et soutenaient que « des amendements ne sauront réparer une législation aussi dangereuse et aussi étendue ».

Au moins 106 professeurs de droit ont exprimé leur mécontentement face au projet de loi, dont l'Association du barreau canadien. Au moins 22 citoyens influents, dont d'anciens premiers ministres, juges de la Cour suprême et ministres de la justice et de la sécurité publique, se sont exprimés contre le projet de loi C-51. Douze commissaires à la vie privée ont fait connaître leurs objections au projet de loi, comme l'ont fait aussi de nombreux groupes de défense des libertés civiles et des droits humains : Journalistes canadiens pour la liberté d'expression, OpenMedia, Association pour les libertés civiles de la Colombie-Britannique, Amnistie internationale, Conseil national des musulmans canadiens, Association pour la liberté d'information et la vie privée de la Colombie-Britannique et bien d'autres. Une centaine d'organisations du Québec engagées dans la défense des droits ont signé une lettre ouverte dénonçant le projet de loi. Une lettre de Journalistes canadiens pour la liberté d'expression demandant au gouvernement Harper d'abroger la loi a été signée par plus de 100 organisations et personnes.

Une soixantaine d'entreprises ont demandé la révocation de C-51, dont la Fondation Mozilla (qui produit le fureteur Firefox), Tucows (distributeur de logiciels) et Shopify (fournisseur de plate-forme de magasinage en ligne).

Le gouvernement Trudeau refuse de reconnaître cette réalité parce qu'il a le pouvoir de faire ce qui convient le mieux à son plan politique. Ce mépris de l'opinion des gens n'augure rien de bon pour ce qui est des consultations que ce gouvernement dit vouloir entreprendre. Les consultations ne vont servir qu'à justifier l'injustifiable.

Ensemble, soutenons avec force la revendication du peuple que le projet de loi C-51, maintenant devenu Loi antiterroriste de 2015, soit abrogé dans son entièreté et ensemble affirmons que notre sécurité est dans la défense des droits de tous et toutes !

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C-51 doit être abrogé, pas modifié


Manifestation à Vancouver le 18 avril 2015 dans le cadre de la Journée d'action nationale contre le projet de loi C-51

Le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Ralph Goodale, accompagné de la ministre de la Justice, Jody Wilson Raybould, a tenu une conférence de presse à Edmonton le 8 septembre 2016 pour lancer une « consultation en ligne sur la sécurité nationale ». Le gouvernement a publié également un document « Notre sécurité, nos droits : Livre vert sur la sécurité nationale de 2016 » et déclare que : « Ce Livre vert a pour but d'engager une discussion et un débat au sujet du cadre de sécurité nationale du Canada, afin d'informer des changements de politique qui seront apportés à la suite du processus de consultation. »[1] Cette consultation se déroulera jusqu'au 1er décembre 2016 et comprendra des rencontres et des discussions ouvertes dont les détails n'ont pas encore été annoncés.

Dans la Lettre de mandat du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, le premier ministre Trudeau invitait le ministre, en collaboration avec la ministre de la Justice, à « travailler à la révocation des éléments problématiques du projet de loi C-51 et adopter de nouvelles mesures législatives renforçant la reddition de compte en matière de sécurité nationale et mieux équilibrer la sécurité collective avec les droits et les libertés ».

Certains des « éléments problématiques » que le gouvernement libéral dit viser avec ses nouvelles mesures législatives sont :

- garantir que tous les mandats du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) respectent la Charte canadienne des droits et libertés  ;
- obliger le gouvernement à examiner toutes les demandes d'appel des personnes figurant sur la liste d'interdiction de vol ;
- instituer un examen obligatoire de l'ensemble des dispositions de la Loi antiterroriste après trois ans ;
- clarifier les définitions trop vagues comme « propagande terroriste » ;
- mettre sur pied un comité de surveillance de la sécurité nationale rassemblant tous les partis.

Cependant, tout semble indiquer que les libéraux vont utiliser ces consultations pour élargir les pouvoirs de police par des mesures législatives, en particulier en ce qui concerne le partage de l'information. Une des priorités qu'ils se donnent est « la sensibilisation communautaire et à la lutte contre la radicalisation en créant le Bureau de sensibilisation communautaire et en nommant un coordonnateur ou une coordonnatrice de lutte contre la radicalisation ».

De plus, le ministre Goodale a déclaré qu'il voulait un « débat plus large » sur le droit à la vie privée des Canadiennes et des Canadiens et le cryptage. Ce sont là les exigences des cercles dirigeants et des organismes de sécurité, qui demandent un accès « porte dérobée » aux communications personnelles ou un accès légal pour casser le cryptage des dispositifs électroniques. L'exemple plus largement discuté a été la tentative récente du bureau américain d'enquête fédéral (FBI) pour forcer Apple à fournir une porte dérobée pour déverrouiller l'iPhone. Cela touche également l'espionnage industriel et géopolitique féroce auquel se livrent les agences d'espionnage, y compris Centre de la sécurité des télécommunications (CST) canadien. Ainsi, en 2013, il a été révélé que le CST surveillait les communications du ministère des Mines et de l'Énergie du Brésil avec un logiciel appelé « Olympia » pour casser le chiffrement.

Rien de tout cela ne répond aux graves violations des droits que contient la loi C-51 qui soutient les opérations occultes et le terrorisme d'État contre les Canadiens et contre les peuples des pays étrangers. Le Livre vert fait complètement fi des violations graves des droits qui ont été constatées par le juge Bruce de la Cour suprême de la Colombie-Britannique qui dans son jugement du 29 juillet 2016 tient la GRC responsable de l'organisation d'un « complot terroriste » avec lequel elle a envoyé deux personnes en prison.

L'« examen » apparaît d'autant plus cynique quand on sait que les nouveaux pouvoirs policiers qui seront soumis à l'examen sont déjà utilisés. Des agences fédérales ont confirmé qu'elles utilisent les pouvoirs de partage de renseignements entre les agences et ministères pour enfreindre le droit à la vie privée des Canadiens. Le directeur du SCRS, Michael Coulombe, a admis que l'agence se livre à des opérations clandestines dans le cours desquelles elle utilise les nouveaux pouvoirs de perturbation prévus dans la loi antiterroriste. La loi C-51 accorde au SCRS des pouvoirs de perturbation pour intervenir contre ce qu'elle définit comme « des menaces à la sécurité du Canada », dont l'utilisation de « moyens illégaux » pour « entraver la capacité du gouvernement fédéral en matière de stabilité économique ou financière du Canada » ou de ses infrastructures. La définition est si vague qu'elle pourrait inclure des barrages routiers, des protestations contre des projets qui portent atteinte à l'environnement, des actions des peuples autochtones et des arrêts de travail.

De plus, la loi C-51 contient des dispositions permettant l'autorisation préalable par un juge de violations des droits de la personne dans le cadre d'une audience secrète où seule la partie gouvernementale est représentée et pour laquelle il n'y a pas de processus d'appel. C'est tout à fait incompatible avec l'état de droit.

Par ailleurs, l'article 810.011 du Code criminel est amendé de manière à abaisser considérablement le seuil de condition pour l'arrestation et la détention d'une personne qui n'est accusée d'aucun méfait devant un tribunal et prolonge la période de détention. La loi permettait déjà ce type de détention préventive. Le juge peut obliger une personne à consentir à « un engagement de ne pas troubler l'ordre public », lui enlever son passeport, lui imposer un couvre-feu, l'obliger à participer à un programme de traitement, à porter un bracelet électronique et à respecter différentes restrictions.

La sécurité des Canadiens et des Canadiennes n'est pas protégée en détruisant l'état de droit. Parler d'un équilibre entre les droits et la sécurité quand en réalité la loi n'a rien à voir avec la protection des droits qui appartiennent à chacun du fait qu'il est un être humain est une fraude. Les lois du projet de loi C-51 doivent être abrogées, pas amendées.

Note

 1. Voir le document Notre sécurité, nos droits : Livre vert sur la sécurité nationale de 2016 , cliquer ici.

(Avec des informations de : iPolitics, Ottawa Citizen, CBC News, Edmonton Journal)

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La frime des consultations et la frime de
l'équilibre de la sécurité et des droits


Manifestation sur la Colline du parlement le 30 mai 2015 pour demander l'abrogation de la Loi C-51 peu après son adoption.

Les libéraux disent : « Nous annulerons les dispositions problématiques du projet de loi C-51, et présenterons de nouvelles mesures législatives qui ramèneront l'équilibre entre notre sécurité collective et nos droits et libertés. »[1]

Définition de « équilibre » : Juste proportion entre des éléments opposés, entre des forces antagonistes, d'où résulte un état de stabilité, d'harmonie : Une période d'équilibre politique. ( Linternaute )

Définition de « frime » et « frimer » : apparence trompeuse destinée à faire illusion. Faire l'important dans l'unique objectif d'impressionner et d'épater quelqu'un ou un groupe de personnes. Se donner de l'importance. ( Larousse )

La prétention des libéraux qu'ils équilibreront la sécurité et les droits est de la frime. En fait, toutes les lois antiterroristes adoptées par les libéraux en 2001 et 2002 sont des violations flagrantes des droits humains qui perdurent et s'accumulent jusqu'à aujourd'hui, mais elles ne sont pas considérées comme constituant un déséquilibre. Bien évidemment, nulle part les libéraux n'expliquent quand cette soi-disant rupture d'équilibre dans notre sécurité collective a été introduite dans la législation. Malgré cela, l'application continue de leurs propres lois et de toutes les violations flagrantes qui sont contenues dans la loi C-51 sont déclarées être un rétablissement de l'équilibre.

Un autre grave problème est que dans toute la discussion autour de C-51, rien n'est dit sur les accords, ententes, protocoles officiels ou secrets avec les États-Unis et d'autres puissances conclus depuis 2001 qui visent l'intégration du Canada à la Forteresse Amérique du Nord impérialiste des États-Unis. Toutes ces ententes violent la souveraineté du Canada et ne reconnaissent même pas les droits et libertés aussi limités soient-ils de la Charte des droits et libertés.

Les libéraux parlent de « consulter des experts » et de « connaître l'opinion des Canadiennes et des Canadiens ». Pourtant, lorsque le Parti libéral a voté en Chambre pour C-51, il savait ce que disaient les Canadiennes et les Canadiens par leur nombreuses manifestations et leurs nombreux articles contre C-51. Les libéraux savaient également ce que disaient les experts.

Cela montre que l'un des buts de la frime des consultations que tiennent maintenant les libéraux est d'imposer l'idée que les droits sont une question de définition. Ils ne reconnaissent pas que les droits appartiennent à l'être humain à cause de son humanité et qu'ils ne peuvent ni être donnés, enlevés ou abandonnés de quelque manière que ce soit. Le gouvernement Trudeau présente la sécurité comme une question d'équilibre, mais le fait demeure que sans la défense des droits de tous, il ne peut y avoir de sécurité pour tous. C'est la défense des droits de tous qui doit être le point de départ de toute consultation sur comment assurer la sécurité des Canadiens.

Note

1. Site web du Parti libéral du Canada

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