Numéro 25 - 26
février 2016
Mépris des monopoles
ferroviaires
pour la sécurité des travailleurs et du public
Le Canadien Pacifique veut couper 1000
autres emplois malgré l'état critique des conditions de
travail
Mépris
des
monopoles
ferroviaires pour la sécurité des
travailleurs et du public
• Le Canadien Pacifique veut couper 1000 autres
emplois malgré l'état critique des conditions de travail
• Une lutte sans répit pour la
sécurité ferroviaire - Entrevue avec Doug
Finnson, président de la
Conférence ferroviaire de Teamsters Canada
Mépris des monopoles ferroviaires
pour la sécurité des travailleurs et du public
Le Canadien Pacifique veut couper 1000 autres emplois
malgré l'état critique des conditions de travail
Les compressions irresponsables dans la main-d'oeuvre du
Canadien Pacifique se poursuivent bien que les conditions de travail
aient atteint un point de rupture. La détérioration des
conditions de travail au CP en Colombie-Britannique est telle que
Transports Canada, dans un geste sans précédent, a
émis une ordonnance le 14 janvier les
qualifiant de « menace immédiate à la
sécurité des opérations ferroviaires ».
Dans sa lettre, Transports Canada exige aussi que des changements
soient apportés à la répartition du travail au CP.
Une semaine plus tard, soit le 21 janvier, le CP a
annoncé qu'il allait éliminer 1 000 emplois en 2016.
Cela s'ajoute aux 7 000 emplois qui ont déjà
été éliminés au CP depuis 2012, quand une
nouvelle administration américaine a pris le contrôle de
la compagnie, menée par un ancien PDG du Canadien National,
Hunter
Harrison. On estime que rien qu'en 2015, le CP a coupé 12 %
de sa main-d'oeuvre. CP emploie maintenant près de 13 000
personnes au Canada et aux États-Unis.
Selon les nouveaux gestionnaires du CP,
l'élimination d'emplois est un élément clé
de la lutte féroce qu'ils mènent contre leurs concurrents
pour le transport de marchandises au Canada. Cela veut dire de moins en
moins de travailleurs, plus d'opérations contrôlées
à distance et des trains plus longs, plus rapides et aux charges
plus lourdes,
transportant souvent des matériaux dangereux comme le
pétrole et le gaz. CP a dit aussi que l'élimination
d'emplois est nécessaire afin de s'ajuster aux volumes de
marchandise qui sont plus faibles en raison de la chute des prix des
matières premières.
L'ordonnance du 14 janvier de Transports Canada
mentionne que les conditions au CP font en sorte que « le
repos nécessaire est réduit, ce qui crée une
fatigue excessive » ce qui abaisse le niveau de vigilance
des équipages. Selon Transports Canada, cette situation
prévaut « en différents endroits de
Colombie-Britannique dont, mais pas uniquement, Robert Banks, Coquitlam
et Kamloops ».
La lettre exprime de
nombreuses objections aux pratiques du CP qui représentent une
menace pour la sécurité. Par exemple, le CP ne
reconnaît pas le temps de déplacement des travailleurs,
quand ils travaillent loin de chez eux, entre leurs lieux de repos et
les terminaux comme étant du temps de travail, ce qui oblige les
travailleurs à être en
poste et de service avant le début de leur quart de travail.
Transports Canada dit aussi que le CP oblige les travailleurs à
accepter des remplacements de dernière minute sans leur allouer
une période formelle de repos par après, suite à
quoi ils sont appelés à se représenter au travail
sans que la pause compte comme du temps de travail.
Transports Canada dit aussi que les travailleurs sont
tenus de prévoir quand ils vont être appelés
à l'ouvrage alors que les horaires de train qui sont
affichés à leur intention sont inexacts et changent
constamment. Les travailleurs disent être sur appel
24 heures par jour, 7 jours par semaine, et souffrir de
fatigue excessive
chronique.
Face à des dangers aussi flagrants pour la
sécurité, Transports Canada a ordonné que des
changements soient apportés pour qu'il y ait davantage de
périodes de repos et moins d'instabilité dans les
horaires des équipages. L'ordonnance cependant ne vise que
certaines régions de la Colombie-Britannique bien qu'on sache
que ces problèmes
existent partout au pays. Cela fait des années que Transports
Canada vérifie les rapports des monopoles ferroviaires sur leurs
pratiques de gestion, et c'est la première fois, selon les
travailleurs, qu'il émet une ordonnance comme celle-là.
Cela montre bien à quel point la situation est critique.
Une lutte sans répit pour la
sécurité ferroviaire
- Entrevue avec Doug Finnson,
président de la Conférence
ferroviaire de Teamsters
Canada -
Forum ouvrier,
un supplément du Marxiste-Léniniste,
a interviewé récemment le président de la
Conférence ferroviaire de Teamsters Canada, Doug Finnson, sur la
lutte que les travailleurs ferroviaire mènent sans relâche
pour protéger leur sécurité et celle du public.
LML reproduit cette entrevue ci-dessous afin
d'informer les lecteurs des pratiques dangereuses qui sont mises en
oeuvre par les monopoles ferroviaires et de la lutte des travailleurs
pour les forcer à rendre des comptes.
Forum ouvrier : Dans une entrevue
récente à la radio, tu as soulevé un certain
nombre de problèmes qui existent à présent
relativement à la sécurité ferroviaire. Tu as
parlé, par exemple, du Système de gestion de la
sécurité (SGS), le système en vertu duquel les
entreprises ferroviaires élaborent elles-mêmes leur
système de sécurité et Transports Canada
vérifie leurs rapports.
Doug Finnson : Le SGS est quelque
chose de privé à l'accès privilégié
et qui est inaccessible à quiconque ne fait pas partie d'une
entreprise ferroviaire. Le SGS doit être accessible et comprendre
des règlements et des responsabilités envers la
formation. De la façon dont il fonctionne à
présent, vous n'y avez pas
accès, personne n'y a accès. Nous ne sommes même
pas certains de ce que le SGS contient spécifiquement parce
qu'il est privé. C'est seulement une fois que nous aurons eu
accès au système et pu l'étudier comme il faut que
nous allons pouvoir évaluer ce qui se passe de façon
précise. De par le Code du travail, nous avons un comité
directeur en
politique de santé et de sécurité. On penserait
que ce comité a accès au SGS mais non. Notre directeur
législatif national est responsable de la sécurité
de toutes les entreprises ferroviaires au Canada, une grosse
responsabilité, et pourtant il n'y a pas accès.
Même si vous poursuivez les entreprises en vertu des lois
d'accès à l'information, vous ne
pouvez pas y avoir accès.
FO : Tu as parlé aussi de la
sécurité au CP en ce qui concerne les Systèmes de
contrôle de locomotive à distance. Qu'est-ce que le CP
veut en faire en ce moment ?
DF : Le plan du CP, tel que je le
comprends, est d'enlever les ingénieurs de locomotive des
équipes de trains de marchandises à l'intérieur
d'un rayon de 30 milles à l'extérieur de nos villes. Ce
sont des équipes qu'on appelle communément des
« road switchers » des équipes qui
travaillent sur des
locomotives de manoeuvre. Habituellement, dans une grande ville comme
Calgary ou Montréal, il y a des clients qui sont situés
aux limites de la ville ou tout juste à l'extérieur. Ces
clients sont desservis par les « road switchers »
qui vont chercher ou livrer des wagons sur ce qu'on appelle une voie de
service. Une équipe de train de
marchandises comprend un ingénieur de locomotove, un chef de
train et un agent de train. Les « road
switchers » font des allers-retours toute la journée.
Ils travaillent habituellement des quarts de 8 heures.
Le CP veut que
dorénavant ces équipes travaillent sans ingénieur
de locomotive, avec seulement le chef de train et l'agent de train, qui
sont aussi nos membres. Il veut qu'ils fassent leurs manoeuvres
à partir du sol. L'ingénieur de locomotive va être
remplacé par un système de contrôle à
distance, une ceinture portable qui se porte autour du
corps et qui est attachée par devant. Enlever l'ingénieur
de locomotive est un gros problème. C'est lui qui fait face
à la route, il voit tout, et la plupart du temps il est le
membre le plus expérimenté de l'équipe. La
compagnie veut s'en départir simplement pour sauver de l'argent,
rien d'autre. Elle veut transférer le travail aux plus jeunes
qui n'ont
pas autant d'expérience et maintenant, en plus de faire leur
propre travail, ils vont devoir faire celui de l'ingénieur de
locomotive. On parle ici de wagons qui sont remplis de pétrole
brut, de propane, d'essence. Le CP veut qu'il n'y ait aucune
restriction quant aux types de produits que ces trains vont
transporter. Aucune restriction sur la longueur
des trains, leur poids, les produits qu'ils transportent, que ce soit
du pétrole, du gaz ou d'autres matières dangereuses.
Ces systèmes de contrôle à distance
existent déjà dans les gares de triage depuis 15-20 ans.
Ils servent à la manoeuvre d'un petit nombre de wagons et sont
utilisés sur des manoeuvres à basse vitesse pour
assembler des wagons. C'est rare qu'ils soient utilisés pour
assembler une grande quantité de wagons parce qu'il y a eu
beaucoup d'accidents
dans les gares de triage. Le CP veut maintenant les utiliser sur la
route, dans un rayon de 30 milles, et les faire desservir des clients
comme des producteurs de potasse ou de charbon ou encore de
pétrole et de gaz. La compagnie veut utiliser cette technologie
à l'extérieur des gares de triage afin d'éliminer
des emplois.
Nous essayons d'empêcher la compagnie
d'éliminer les ingénieurs de locomotives sur ces
équipes et, si nous ne réussissons pas, alors nous
demandons qu'un arbitre impose des conditions qui vont protéger
la sécurité des travailleurs et du public, des limites
quant à la longueur, au poids et à la vitesse du train,
et décide que ce sont des
travailleurs expérimentés qui doivent faire ces
manoeuvres. Il s'agit d'une opération qui est dangereuse
potentiellement et la compagnie veut l'instaurer à
l'échelle du pays. Elle veut le faire partout et étendre
cette pratique l'an prochain.
FO : Veux-tu ajouter quelque chose
en conclusion ?
DF : Nous espérons que le
nouveau ministre va donner au personnel de sécurité de
Transports Canada ce dont ils ont besoin pour faire un bon travail dans
le secteur ferroviaire. Le gouvernement précédent, selon
le point de vue des travailleurs, était dans la manche de la
grande entreprise. Le gouvernement a le pouvoir
d'éliminer le secret et de nous montrer ce que le SGS contient.
Il a le pouvoir de rendre cela public.
Au CP, nous vivons une culture de la peur qui a
été imposée par la haute direction. Il s'agit
essentiellement de la même haute direction qui a
créé la culture de la peur qui règne maintenant au
CN et refait la même chose au CP. Nos gens se font
congédier constamment pour des choses très mineures. Des
travailleurs avec 35-36 années de
service et à quelques mois de la retraite sont
congédiés, sans raison à notre avis. Au lieu de
leur donner une réprimande ou une mesure disciplinaire, la
compagnie congédie ce travailleur ayant 36 années de
service, de bon service, un honnête travailleur dur à
l'ouvrage. Elle le congédie et détruit sa carrière
à quelques mois de la retraite.
Savez-vous qu'au CP, pendant toute l'année 2015,
la compagnie n'a pas été capable une seule fois de
justifier ces congédiements en arbitrage ? Elle n'est pas
capable de défendre ses décisions.
Je tiens à dire en terminant que les travailleurs
ferroviaires membres des Teamsters sont un groupe qui se tient, nos
membres sont forts, le syndicat est fort et nous allons continuer de
nous battre parce que c'est la chose à faire.
Lisez Le
Marxiste-Léniniste
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