Le Marxiste-Léniniste

Numéro 16 - 13 février 2016

La destruction de Stelco par US Steel

Qu'est-ce que le contrôleur contrôle exactement?

La destruction de Stelco par US Steel
Qu'est-ce que le contrôleur contrôle exactement? - Rolf Gerstenberger 
La pensée centrée sur le capital et son pouvoir de priver


La destruction de Stelco par US Steel

Qu'est-ce que le contrôleur contrôle exactement?

Quand les procédures frauduleuses en vertu de la LACC ont débuté, US Steel a nommé Alex Morrison de la firme comptable et d'investissement Ernst and Young contrôleur de la cour pour son escapade dans la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies (LACC). Le plus récent rapport de Morrison nous amène à nous demander ce que le contrôleur contrôle exactement ?

Morrison écrit que l'ancienne aciérie Stelco, que US Steel a systématiquement saccagée depuis qu'il en a pris le contrôle en 2007, a perdu 144 millions $ en 2015. Les expéditions d'acier de Hamilton et de Nanticoke ont chuté de 22 % pendant l'année par rapport à l'année précédente qui avait été aussi désastreuse. Ceci, combiné à la chute des prix de l'acier, a réduit de 87 millions $ les revenus de l'usine de Hamilton et d'un renversant 652,3 millions $ ceux de Lake Erie Works.

Morrison y va de l'observation idiote que les problèmes du secteur mondial de l'acier et la chute des expéditions, qui sont aggravés par la chute des prix, freinent toujours la compagnie. Ces descriptions simplistes du contrôleur ne sont d'aucune valeur. Ou bien le contrôleur fait montre d'une ignorance totale du travail de sape que US Steel a fait contre Stelco, lequel est responsable de ce désastre permanent, ou bien il cherche à jeter de la poudre aux yeux. USS a détruit la capacité de Stelco de fabriquer de l'acier, et le monopole américain ne se gêne pas pour l'avouer. Lorsqu'il parle des pertes énormes du dernier trimestre de 2015, le contrôleur met délibérément de côté le fait que US Steel a recherché et reçu l'approbation du tribunal de la LACC pour ravir à Stelco ses contrats pour l'industrie automobile pour ce trimestre et pour l'avenir.

Le contrôleur ne fait pas mention de la vieille devise de Stelco : quand le dollar canadien tombe en dessous de 88 cents par rapport au dollar américain, Stelco n'a aucun mal à concurrencer les entreprises d'acier américaines. Le dollar en ce moment est juste au-dessus de 70 cents. Stelco devrait être en train de plumer tous les fabricants d'acier qui ne sont pas canadiens, surtout ceux qui produisent aux États-Unis et même les entreprises chinoises. Mais U.S. Steel a forcé Stelco à vivre de ses seuls vieux contrats et sa filiale captive n'est pas en position d'en trouver de nouveaux.

Le contrôleur déclare avec une pointe d'enthousiasme que Stelco a perdu 144 millions $ en 2015, comme pour prouver qu'elle mérite d'être sous la protection frauduleuse de la LACC, mais il ne dit pas pourquoi les usines fonctionnent à une infime portion de leur capacité et sont condamnées à « perdre de l'argent ». À mon avis, le contrôleur, US Steel et la LACC dans son ensemble devraient être eux-mêmes contrôlés, pour conspiration en vue de commettre une fraude contre les Canadiens.

Les métallos vétérans savent qu'à Stelco nous avions l'habitude de fabriquer plus de 140 types d'acier et des centaines de produits. Tout ceci a commencé à se désintégrer avec l'Accord de libre-échange nord-américain et l'« intégration » dans le marché mondial américain et l'entreprise de destruction nationale des gouvernements libéraux et conservateurs de Chrétien, Martin et Harper. Juste avant que US Steel ne ferme nos hauts fourneaux, nous fabriquions une dizaine de types d'acier environ. USS bien sûr a réduit en cendres tout ce qu'il restait de notre fabrication de l'acier.

Les commentaires du contrôleur sur le prix de l'acier nous rappellent la dernière aventure de Stelco dans le Far West de la LACC en 2004. Les métallos à ce moment-là, et c'est la même chose aujourd'hui, faisaient face à l'incohérence qui vient de ne pas avoir un régime cohérent de détermination des prix. Quant aux maîtres de l'industrie, ils écartent cette question des prix comme quelque chose d'impossible à contrôler, comme un phénomène naturel qui ne peut que nous dévaster, comme le feu avant que l'humanité ait appris à le maîtriser.

Le contrôleur rapporte, comme si de rien n'était, que le prix de l'acier est tombé de 700 $ à 350 $ la tonne en quelques mois et que les fabricants d'acier sont en train d'y laisser leur chemise. Et il n'y aurait rien qu'on puisse faire ! C'est de la destruction nationale, pas de l'édification nationale !

Rappelons-nous 2004, quand Stelco a demandé à se placer sous la frauduleuse LACC, et que le prix de la bande d'acier laminée à chaud était en dessous de 300 $ la tonne alors que six mois plus tard elle se vendait à plus de 1000 $ la tonne. Les travailleurs de Hamilton ont alors reçu la prime de performance ISP pour la première fois en dix ans, tout cela pendant que Stelco était sous la LACC ! Cette fois-ci malheureusement, c'est une entreprise américaine qui contrôle Stelco et il n'y aura pas de prime même si les prix montent. Cette affaire frauduleuse de la LACC doit cesser et on doit aborder de front les problèmes de l'industrie de l'acier. Les travailleurs qui souffrent de cette destruction nationale, qui est commise délibérément, méritent mieux.

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La pensée centrée sur le capital et
son pouvoir de priver

On lit dans un reportage du Pittsburgh Tribune-Review que « US Steel Corp va surveiller chaque dollar au moment où le fabricant d'acier établi dans notre ville s'acharne à couper ses coûts et à conserver son argent liquide en attendant la fin du ralentissement prolongé dans l'industrie, sur lequel il n'a aucun pouvoir ».

Le choix de l'expression « aucun pouvoir » pour décrire la situation dans laquelle US se trouve soulève des questions. Si US Steel n'a aucun pouvoir, où le pouvoir réside-t-il ? Le journal ne dit rien là-dessus parce que la question de qui détient le pouvoir au sein d'une économie est importante si l'on veut lui donner une nouvelle direction qui va solutionner ses problèmes. Le journal comme d'autres parmi l'élite impérialiste ne veulent pas d'une discussion au sujet d'une nouvelle direction et sur comment s'engager sur une voie centrée sur l'être humain qui résout les problèmes et les contradictions existantes en faveur du peuple. Ils préfèrent décrire une situation qui apparaît hors de notre contrôle et pour laquelle il n'existe aucune solution et personne ayant le pouvoir de faire quelque chose. On peut décrire cela comme un état d'anti-conscience dans lequel ils cherchent à garder le facteur humain, surtout la classe ouvrière, aux prises avec un sentiment d'impuissance face à la possibilité d'agir pour changer sa condition et sans direction. Si les élites dirigeantes n'ont pas le pouvoir de changer la situation, quelle possibilité la classe ouvrière a-t-elle de faire quoi que ce soit, cherche-t-on à faire croire au peuple.

Le journal poursuit dans cette veine en citant le chef de la direction financière David Burritt qui dit que « nous ne savons pas combien de temps la récession dans l'industrie va durer, mais nous savons que nous gérons notre entreprise de manière à maintenir une bonne situation en ce qui a trait à l'argent liquide et à être prêts à agir promptement quand la reprise va commencer ».

Le CFO souhaite une reprise alors qu'il préserve l'argent liquide en ne dépensant rien pour renouveler les moyens de production et en s'attaquant aux réclamations des travailleurs et en les mettant à pied par milliers. Lorsqu'ils font face à des problèmes, les êtres humains s'attendent à mieux de leur part et de la part de leurs dirigeants que des attaques à leur bien-être et des appels impuissants à des jours meilleurs.

Selon le journal, ces cris de désespoir ont été poussés « un jour après que US Steel ait affiché une perte de près de 1 milliard $ pour le quatrième trimestre et fait des prévisions pessimistes pour l'année. Les investisseurs ont abandonné les actions de l'entreprise mercredi, faisant baisser sa valeur de 14 % , ou 1,10 $, à 6,67 $ ».

L'article continue de décrire les mauvaises conditions, ajoutant à l'impression d'ensemble de morosité et d'impuissance. « La chute des prix de l'acier, causée en partie par l'arrivée massive de produits importés bon marché et par la faible demande en tuyaux de la part des foreurs pétroliers et gaziers, a poussé la compagnie à fermer des installations en Alabama, dans l'Illinois, au Texas et au Minnesota et à mettre à pied des milliers de travailleurs. Les prix de l'acier ont chuté de 28 % depuis un an. » C'est sans parler du saccage de ses opérations canadiennes.

Une première indication que quelque chose pourrait être fait qui aiderait à résoudre la crise a été soulevée et aussitôt abandonnée lorsque Andrew Lane, un analyste financier, a dit que « en dernière analyse, le moteur de la rentabilité va être le prix de l'acier ». Cependant, lui-même et le journal ont refusé d'analyser comment les bas prix pourraient être élevés à un niveau de rentabilité. Au lieu de cela, ils sont vite retournés à leur thème de l'absence de pouvoir, en disant que « US Steel n'exerce aucun contrôle [sur le prix de l'acier] » et en ajoutant avec dépit que « l'autre moteur de rentabilité », « les volumes de produits tubulaires, qui dépendent des prix du pétrole, sont une autre variable sur laquelle la direction de l'entreprise n'exerce aucun contrôle ».

La boucle est bouclée : pas de contrôle, un grand pessimisme, aucun pouvoir de régler les problèmes, rien que l'impuissance de la part de cette pensée centrée sur le capital qui ne voit rien d'autre que la poursuite de la même direction qui va de crise en crise, la conscience antihumaine et antisociale des élites impérialistes dirigeantes.

La classe ouvrière rejette entièrement cette ligne de l'impuissance. Une autre voie est possible, une pensée puissante centrée sur l'humain est possible. Le pouvoir de traiter un problème vient du pouvoir de priver les élites dirigeantes de leur pouvoir d'empêcher les êtres humains de résoudre les problèmes et les contradictions auxquels ils font face.

Le pouvoir de priver du peuple a à voir avec la faculté d'abstraction, une faculté propre aux êtres humains. Un pouvoir social prive le peuple de la compréhension de ce qui manque pour résoudre les problèmes. Il est nécessaire d'éliminer l'influence de ce pouvoir de classe qui empêche le peuple d’utiliser sa faculté d'abstraction pour ainsi ouvrir la voie aux possibilités immenses qui existent de résoudre les problèmes et de réaliser le renouveau et le progrès.

Le pouvoir qui empêche le peuple de résoudre les problèmes à ce moment dans l'histoire est le pouvoir de priver que possède l'élite impérialiste, le pouvoir de priver le peuple de sa faculté d'abstraction et de résolution des problèmes. L'élite impérialiste dirigeante détient le pouvoir de priver, et une partie de ce pouvoir est d'empêcher la classe ouvrière de prendre conscience de son immense pouvoir latent de résoudre les problèmes qui lui vient de la force du nombre, de sa position de classe en tant que producteur véritable de tous les biens et services et de sa pensée centrée sur l'être humain. Le pouvoir du facteur humain/conscience sociale, une fois libéré, va transformer le monde et une de ses grandes réalisations sera une nouvelle direction prosociale de l'économie permettant de résoudre ses multiples problèmes.

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