Forum ouvrier

Numéro 54 - 7 juin 2021

Des activités militantes marquent la Journée des travailleurs accidentés de l'Ontario 2021

Faisons une seule voix avec les travailleurs accidentés et refusons d'être réduits au silence!

J'étais une travailleuse et je ne serai pas oubliée
Les Femmes d'inspiration tiennent leur 16e vigile annuelle


Des activités militantes marquent la Journée des travailleurs
accidentés de l'Ontario 2021

Faisons une seule voix avec les travailleurs accidentés et refusons d'être réduits au silence!

Le Réseau ontarien des groupes de travailleurs accidentés (ONIWG) a organisé deux événements en ligne, avec une très bonne participation, à l'occasion de la Journée des travailleurs accidentés de l'Ontario, pour célébrer son travail et sa force collective dans la lutte pour les droits des travailleurs accidentés. Femmes d'inspiration a organisé une vigile la veille de la Journée des travailleurs accidentés et un rassemblement a été organisé le 1er juin. Cette année est le 38e anniversaire de la première journée des travailleurs accidentés de 1983, lorsque 3 000 travailleurs accidentés et leurs alliés se sont rassemblés à Queen's Park pour présenter leurs revendications lors d'une enquête publique sur le régime d'indemnisation.

Pour la deuxième année consécutive, les travailleurs accidentés ont été forcés de se réunir en ligne en raison d'une pandémie qui a montré l'importance pour la société tout entière de la lutte pour des conditions de travail sécuritaires pour tous les travailleurs et pour une indemnisation entière et en temps requis pour tous ceux qui se blessent ou deviennent malades en raison de leur travail.

Plus de 176 participants se sont inscrits au rassemblement en ligne de la Journée des travailleurs accidentés le 1er juin tandis que d'autres y ont participé sur Facebook en direct. Les participants provenaient de plusieurs régions de l'Ontario et certains se sont joints à partir d'autres provinces et d'aussi loin que l'Australie.

Dans le cadre des activités de la journée, avant la réunion, les travailleurs accidentés ont visité les bureaux de plus de 40 députés et affiché sur leurs portes et fenêtres leurs revendications

pour une indemnisation juste et entière lorsqu'ils se blessent ou deviennent malades au travail. Un diaporama des visites a été présenté à la réunion. Le programme a reçu une forte dose d'énergie de la chanson entraînante de Heather Cherron, « Extra, Extra » sur la situation des travailleurs occasionnels, d'une vidéo produite pour la Journée des travailleurs accidentés de 2020, « La normalité ne suffit pas » et des messages de solidarité de travailleurs de l'Australie marquant leur deuxième Journée des travailleurs accidentés.


Des travailleurs accidentés visitent les bureaux des députés à Mississauga-Centre
et à Thunder Bay.

La présidente de l'ONIWG Janet Paterson a été le maître de cérémonie. Elle a débuté la réunion en disant que les travailleurs accidentés n'ont aucun intérêt à revenir au « tout continue comme avant » qui existait avant la pandémie car ni le gouvernement ni la CSPAAT n'ont assumé leur responsabilité de prendre soin des travailleurs qui se blessent ou deviennent malades au travail et que cette situation doit changer. L'année de la pandémie a créé une situation où les travailleurs de plusieurs secteurs ont été confrontés à la possibilité de devenir malades au travail non pas d'une maladie professionnelle qui peut prendre des années à se manifester, mais comme un danger immédiat. Cela a mis en lumière la nécessité, à l'échelle de la société tout entière, que les travailleurs soient couverts par la CSPAAT, exercent leur droit de refuser de travailler lorsque les conditions de travail ne sont pas sécuritaires, aient des congés de maladie payés, et que les travailleurs migrants ne soient pas oubliés mais aient accès aux mêmes prestations et avantages que les autres travailleurs et à des conditions de travail adéquates.

Merv King, coordonnateur du Programme des travailleurs accidentés du Syndicat des Métallos et membre de la Première Nation Timiskaming a appelé tout le monde, dans sa reconnaissance du territoire, à réfléchir à qui sont les gardiens de la terre sur laquelle ils se trouvent. La lutte des peuples autochtones et celle des travailleurs accidentés sont des luttes pour la dignité et la justice. Il a appelé à une minute de silence en l'honneur des 215 enfants dont on a trouvé la sépulture non identifiée sur le terrain du pensionnat autochtone de Kamloops.

Maryam Nazemi a transmis au rassemblement la lumière de la vigile organisée par les Femmes d'inspiration la veille de celui-ci, comme c'est la coutume de le faire, cette fois-ci de façon symbolique. Elle a dit qu'une des choses que les travailleurs ont apprises de la pandémie de la COVID-19, c'est l'importance de protéger tous les travailleurs, en commençant par leur garantir l'accès au régime d'indemnisation des travailleurs, ce qui n'est pas le cas actuellement. Les travailleurs ont le droit à des conditions de travail saines et sécuritaires et à chaque jour ils doivent pouvoir quitter leur endroit de travail dans le même état de santé que lorsqu'ils y sont arrivés, a-t-elle ajouté.

La présidente de la Fédération du Travail de l'Ontario, Patty Coates, a prononcé un mot de salutations au rassemblement. Elle a souligné que le mouvement des travailleurs accidentés était devenu plus fort et s'était développé en dépit des difficultés causées par la pandémie. Sue James, des Retraités de General Electric de Peterborough, a parlé de la question de la lutte pour les droits des travailleurs qui sont devenus malades au travail. (Voir sa présentation plus bas).

Une partie du rassemblement, présentée par Sang-Hun Mun de Travailleurs accidentés en action pour la justice a été consacrée à la lutte des travailleurs migrants qui défendent leurs droits, plus particulièrement dans le contexte de la pandémie de la COVID-19. Treize travailleurs migrants sont décédés en Ontario depuis le début de la pandémie, a-t-il souligné, et le minimum qui est requis pour défendre le droit de ces travailleurs à la santé et la sécurité à l'endroit de travail, c'est le statut permanent. Il a transmis le message d'un des travailleurs agricoles qui a été blessé à Hamstead Heath en 2012 dans un accident de camionnette qui a tué dix travailleurs migrants et en a blessé trois autres alors qu'ils revenaient de travailler. Un autre travailleur migrant, qui travaille comme ramasseur de poulets, a décrit les conditions de travail difficiles auxquelles sont confrontés les travailleurs agricoles migrants - dont se rendre au travail dans des camions bondés ayant de 13 à 16 personnes à bord — qui font en sorte qu'il a contracté la COVID-19 deux fois en quatre mois. Il a dit que l'élément le plus important pour permettre aux travailleurs migrants de défendre leurs droits est le statut de résident permanent. En tant que résidents permanents, a-t-il précisé, nous pourrions exiger des avantages sociaux et des droits comme ceux des travailleurs canadiens, sans craindre d'être expulsés pour avoir pris la parole.

Deux infirmières se sont adressées au rassemblement, Angela Precanin de l'Association des infirmières et infirmiers de l'Ontario, et Carolina Jiminez du Réseau pour un travail et un système de santé décents. Angela a parlé des milliers de travailleurs de la santé qui ont été infectés de façon évitable par la COVID-19 en raison d'une pénurie d'ÉPI et d'un manque de regroupement en cohorte approprié. Carolina Jiminez a dénoncé le gouvernement Ford pour son refus et sa négligence à créer une banque d'au moins 10 congés de maladie payés et de 14 jours additionnels en temps d'urgence sanitaire, ajoutant que même le piètre deux jours qu'il a maintenant accordés ne couvrent que la période de la pandémie.


Des travailleurs accidentés visite les bureaux des député provinciaux de Spadina-Fort
York (à gauche) et Dufferin-Caledon

Le dernier orateur, Fred Hahn, président du SCFP Ontario, a terminé le rassemblement sur une note des plus énergique. Il a parlé de la situation difficile que ses membres, dont plusieurs sont dans les soins de santé, avaient traversée au cours de la dernière année, alors qu'au moins douze d'entre eux sont morts de la COVID-19. La plupart de ceux qui sont morts étaient des travailleurs noirs ou racialisés, a-t-il dit. La pandémie a changé notre tolérance envers le racisme et nos revendications pour le futur. Elle a montré que nous sommes tous interreliés, a-t-il dit, et lorsque les travailleurs réalisent que nous sommes nettement plus nombreux qu'ils ne le sont, et lorsque nous aurons mis de côté ce qui sert à nous diviser, plus rien ne pourra nous arrêter. Pour ce qui est du régime d'indemnisation des accidentés du travail, il a dit qu'il faut le reprendre en mains et le refaçonner en un régime d'indemnisation et non un régime d'assurances. Pour y arriver, il faut d'abord en finir ave le gouvernement ontarien actuel sans présumer pour autant que les Libéraux résoudront les problèmes, puisqu'ils ont eu 15 ans pour le faire, ni que le NPD est une panacée. Ce sera l'activisme des travailleurs accidentés et de tout monde s'organisant ensemble qui amènera un changement réel. Commémorons et pleurons les morts, et luttons farouchement pour les vivants !

(FO, ONIWG)

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J'étais une travailleuse et je ne serai pas oubliée

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Voici le texte du discours prononcé par Sue James au rassemblement de la Journée des travailleurs accidentés. Sue James est la coordonnatrice d'un projet, avec les retraités de General Electric et leurs familles, sur l'exposition passée aux produits chimiques toxiques à l'usine GE de Peterborough.

Ceci est mon histoire mais malheureusement elle reflète le vécu de nombreux regroupements de travailleurs de l'Ontario et comment ils sont morts au fil des décennies.

J'étais une travailleuse et je ne serai pas oubliée. Ils ne peuvent pas m'enlever mes souvenirs et tout ce dont j'ai été témoin.

Je me tiens devant l'usine où j'ai travaillé pendant 40 ans et où mon père a travaillé avant moi. Elle est fermée maintenant et a cessé de fonctionner après plus de 125 ans. Elle est vide et un témoignage de son héritage toxique. Gravés dans ma mémoire sont mes collègues, mes amis et les membres de ma famille qui ont été les plus touchés par de multiples agents cancérigènes pendant une longue période et qui en ont subi les conséquences, tout comme leurs familles. Gravées dans mon esprit sont l'odeur âcre du soudage et la fumée bleue qui accompagnent ce processus, l'odeur âcre des PCB, des époxydes, du trycloroéthylène, des PVC et des résines durcies à la sortie des fours, des fluides rances du traitement des métaux, de la graisse, de l'huile et des solvants qui pouvaient vous faire couler des larmes ou vous couper le souffle. Le bruit des ponts roulants au-dessus de nos têtes avec des sirènes hurlantes, des chariots élévateurs en mouvement constant, des camions de transport au diesel en marche et qui attendent leur chargement, des métaux broyés et de la poussière flottant dans l'air si le soleil réussissait à se frayer un chemin à travers la crasse sur les vitres.

Aucun équipement de protection, sans système de ventilation approprié. Nous avions confiance que tout irait bien, mais malheureusement, cette confiance a été détruite et nous continuons d'être trahis par nos anciens employeurs et le système d'indemnisation de l'Ontario. J'étais une travailleuse... Nous ne serons pas oubliés. Quel que soit le secteur dans lequel vous travaillez ou avez travaillé, nous avons été témoins d'accidents et de décès et avons vu les employeurs choisir le profit plutôt que les vies humaines.

Une maladie professionnelle est un événement ou une exposition qui survient sur le lieu de travail qui cause ou contribue à une condition ou aggrave une condition préexistante.

Les réclamations pour maladies professionnelles sont regroupées en quatre grandes catégories : maladies à longue période de latence, perte auditive due au bruit, expositions et effets chroniques, et expositions et effets aigus.

Il est difficile de saisir l'ampleur réelle du problème, car les statistiques officielles ne dénombrent qu'une fraction des cas de maladie professionnelle suspectée chaque année. « Elles sont fondamentalement erronées, car elles n'incluent que les réclamations pour maladie acceptées par les commissions provinciales d'indemnisation. » Selon l'Association des commissions des accidents du travail du Canada, qui recueille les statistiques de ces commissions, les maladies professionnelles tuent entre 500 et 600 Canadiens par année.

De nombreux épidémiologistes disent que cela représente moins de 10 % du nombre réel de décès.

En janvier 2020, le Dr Paul Demers a terminé son rapport « Utilisation de données et de principes scientifiques afin de déterminer les liens de causalité entre le cancer et le travail ». Dans ce rapport, il a énuméré plusieurs recommandations qui traitent du processus décisionnel de réclamations complexes à court, moyen et long terme. A ce jour rien n'a changé. Les travailleurs accidentés continuent d'être pris au piège dans un cycle d'inaction.

Va-t-on un jour briser le schéma mortel consistant à étudier la question et à répondre par des platitudes plutôt que d'agir sur ces recommandations ? Je suis profondément offensée par le traitement réservé aux travailleurs par les pouvoirs en place.

Les liens qui nous unissent ne seront jamais rompus, car nous sommes liés par le chagrin, la perte et la douleur, tout comme les générations d'activistes qui nous ont précédés, celles d'aujourd'hui et celles qui suivront. Redresser ce navire ne peut pas être un processus silencieux, alors en ce 1er juin 2021, Journée des travailleurs accidentés, veuillez vous joindre ensemble en une seule voix et refuser d'être réduits au silence. Réclamez votre droit à un système d'indemnisation juste et équitable... Joignez-vous à moi pour dire... Nous sommes en colère et nous n'allons plus accepter cela ! Il n'y aura pas de paix jusqu'à ce que JUSTICE SOIT FAITE À TOUS les travailleurs accidentés.

(Photos : FO,STTP,ONIWG)

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Les Femmes d'inspiration tiennent
leur 16e vigile annuelle


Les Femmes d'inspiration participent à la marche de la Journée internationale des femmes
à Toronto en 2018.

Plus de 80 personnes ont participé cette année à la 16e vigile annuelle organisée par le groupe de soutien des travailleurs accidentés Femmes d'inspiration. Il s'agissait de la deuxième vigile tenue en ligne en raison de la pandémie.

En ouvrant le programme, Maryam Nazemi, une des fondatrices de la vigile, a souligné l'importance cruciale que tous les travailleurs soient couverts pour les accidents de travail, soulignant qu'actuellement en Ontario, quelque 1,7 million de travailleurs n'ont pas de couverture, ce qui les laisse sans protection lorsqu'ils sont blessés ou deviennent malades au travail. Bon nombre des travailleurs désignés comme essentiels pendant la pandémie ne sont pas couverts par la CSPAAT. S'ils sont considérés comme essentiels, pourquoi ne travaillent-ils pas dans des lieux de travail salubres et sécuritaires, avec un ÉPI approprié, des tests de dépistage, des jours de maladie payés et des congés pour se faire vacciner, a-t-elle demandé. Maryam se bat depuis dix-sept ans pour un programme d'indemnisation des accidents du travail qui couvre tous les travailleurs depuis qu'elle s'est blessée à un endroit de travail qui n'était pas couvert.

Cette revendication a également été abordée par Cynthia Ireland de la section locale 1750 du SCFP, représentant les employés de la CSPAAT. Elle a souligné que beaucoup de ceux qui ne sont pas couverts sont des travailleurs dans des domaines tels que les soins personnels, qui courent des risques plus élevés de tomber malade au travail pendant la pandémie. Elle a annoncé qu'une campagne de couverture universelle pour étendre l'indemnisation des accidents du travail à tous les travailleurs et à tous les endroits de travail sera lancée le 29 juillet.

Gagandeep Kaur, une membre-organisatrice du STTP à Peel qui travaille avec le Centre des travailleurs d'entrepôts a parlé du travail qu'ils font pour organiser les travailleurs précaires afin de défendre leurs droits dans les conditions de la pandémie. Alors que dans des lieux de travail comme Postes Canada, les travailleurs bénéficient de la protection d'un syndicat, des milliers de personnes travaillent dans des entrepôts similaires par le biais d'agences de recrutement de personnel à temps partiel sans organisation de défense collective. Quelque 45 % des colis d'Amazon passent par la région de Peel, a-t-elle dit, et il y a eu plus de 500 éclosions de COVID-19 sur les lieux de travail dans la région. Les employés d'entrepôt n'ont pas d'espace pour la distanciation sociale, les employeurs enfreignent les consignes de sécurité et les tests de dépistage n'ont jamais été facilement accessibles. Les travailleurs n'ont eu accès aux vaccins que lorsqu'ils se sont tenus debout ensemble et les ont exigés. Elle a souligné que les problèmes mis en lumière par la pandémie existaient bien avant qu'elle ne commence et a conclu que la crise de la pandémie a rapproché les travailleurs et que si nous nous tenons et nous organisons ensemble, nous pouvons renverser la tendance en notre faveur.

La présidente de la Fédération du travail de l'Ontario, Patti Coates, a salué la vigile et a souligné la priorité immédiate d'avoir tous les travailleurs de la province couverts par un programme d'indemnisation qui prend soin d'eux rapidement et équitablement. Deux des Femmes d'inspiration, Heather Cherron et Alicia, ont complété le programme par leurs chansons.

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