Forum ouvrier

Numéro 42 - 10 mai 2021

Éducation

Ce que les enseignants et les travailleurs de l'éducation apprennent
en affrontant la pandémie

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Où en sont les choses dans le réseau scolaire du primaire et secondaire en Ontario - Enver Villamizar


Éducation

Ce que les enseignants et les travailleurs de l'éducation apprennent en affrontant la pandémie

Laura Chesnik est enseignante au primaire en Ontario et une des hôtes de l'Éducation est un droit.

Un des principaux aspects de notre travail depuis le Premier Mai de l'année dernière a été de lever la pression exercée sur nos pairs selon laquelle notre rôle dans cette pandémie est d'être de bons critiques du gouvernement. Nous devons trouver les moyens de mettre en place des solutions en discutant de notre situation et de comment nous pouvons changer les choses.

En Ontario, le premier enjeu auquel nous avons fait face après le premier confinement en mars 2020 a été de comment affirmer notre droit à des conditions de travail sécuritaires alors que nous savons que le virus se propage dans nos communautés et qu'il va pénétrer dans nos écoles si nous ne sommes pas très vigilants. Dans notre balado « L'éducation est un droit », nous avons entrepris d'en discuter sans détours et de voir comment ce problème se présente en éducation : ce que signifie refuser un travail dangereux, comment le refuser et ce qui arrive lorsque nous le faisons. Pour les éducateurs, le droit de refus est un peu différent de ce qu'il est dans d'autres secteurs. Il existe des exceptions en vertu de la Loi sur l'éducation et nous avons une « obligation de diligence » envers nos élèves, ce qui veut dire qu'il faut s'assurer qu'ils sont supervisés avant que nous fassions un refus de travail. Cela créait de l'hésitation, comme quoi nous ne pouvions pas faire un refus. Il y avait aussi un sentiment qu'en refusant, nous abandonnerions notre obligation de diligence envers nos étudiants. Il y a aussi la pression exercée par la Loi sur la santé et la sécurité au travail qui ne nous autorise pas à exercer un refus sur la base d'une crainte ou d'une préoccupation générale. Le refus doit répondre à une préoccupation spécifique que vous ressentez personnellement, qui vous affecte directement. C'est comme si nous devions pouvoir prouver que le virus est dans l'air que nous respirons avant de pouvoir exercer un refus de façon légitime selon les arrangements en place. Il y avait donc aussi cette pression qu'il n'est pas possible ou qu'il ne vaut pas la peine de dire Non et de tenter de faire mettre en place des mesures de sécurité adéquates.

Au début de l'année scolaire, le ministère du Travail rejetait constamment les choses du revers de la main, prétendant que sans des preuves en main démontrant que le virus est présent dans l'école, il n'y avait pas de raison valable d'exercer un refus. Les refus ont été transformés en soi-disant « doléances ». On prenait note des doléances, mais au moyen de formulaires où la doléance n'était même pas documentée de façon adéquate. Par exemple, malgré le fait bien connu que le virus se propage via les aérosols, il était dit dans le formulaire que rien n'indiquait que le virus se propageait dans l'air par les systèmes de ventilation. En plus d'affirmer qu'il n'existait pas de preuve que le virus se propageait dans les écoles, le gouvernement refusait de faire des tests de dépistage de masse dans les endroits de travail pour savoir si la COVID-19 avait pénétré dans les écoles et comment elle se propage.

Nous pouvons constater que les arrangements actuels en ce qui concerne la santé et la sécurité, où tout repose sur l'individu — le travailleur ou le superviseur — ne nous protègent pas à moins que nous soyons organisés. Le système est conçu pour maintenir chacun dans l'isolement, faisant en sorte que cela devient un « choix » de défendre ses droits ou non. En fait, c'est en examinant les choses ensemble que nous pouvons apprécier que c'est une responsabilité sociale de refuser un travail dangereux et de le rendre sécuritaire. Et pourtant, tout le système fonctionne dans le sens que toi, en tant qu'individu, tu dois avoir une crainte légitime par rapport à ta propre santé et ta sécurité personnelle et que tu ne peux pas refuser « pour d'autres ». Le but est d'empêcher un NON en tant que réponse collective à des conditions qui sont dangereuses en repoussant chacun dans son petit îlot, où le choix devient personnel. Cependant, à mesure que les gens prennent position, cela devient un enjeu pour tout le monde et prendre position est le point de départ.

Nous avons constaté que même s'il paraissait impossible au début de même envisager de prendre les choses en main dans ces circonstances, il y a toujours une voie vers l'avant, il suffit de continuer d'en parler, d'argumenter et de voir ce qui est possible.

Nous avons donc commencé à discuter ouvertement de comment cette question de refus se présente, ce que refuser signifie, que la question n'est pas le refus en soi ou de suivre la démarche officielle. Il s'agit de refuser d'accepter quelque chose qui est inacceptable et de s'efforcer de trouver des alternatives en affirmant notre droit de conscience et notre liberté d'expression.

Nous nous sommes informés nous-mêmes et avons informé notre auditoire des expériences de gens qui avaient pris position partout dans la province et nous avions aussi notre propre expérience par rapport à tout ce processus. Nous avons réalisé, en fait, qu'un refus et même une menace de refus fait bouger beaucoup de choses. Par exemple, cela porte les conditions à l'attention des parents, des autres membres du personnel et de l'administration. Cela ne permet pas au silence sur la situation de continuer. Et cela révèle l'absurdité de la situation selon laquelle il y a des éclosions dans les écoles mais les inspecteurs du ministère du Travail disent qu'il n'y a aucune preuve de la présence du virus dans les écoles et le ministre de l'Éducation s'entête à soutenir que les écoles ne sont pas une source de transmission.

Notre façon maintenant d'aborder le problème est que ce n'est pas une question de choix d'accepter des conditions dangereuses ou pas. Nous avons le devoir de ne pas accepter des conditions qui ne sont pas sécuritaires et nous devons assumer cette responsabilité sans hésiter pour nous-mêmes, pour nos collègues, pour nos étudiants et pour la société dans son ensemble.

Les enseignants et les travailleurs de l'éducation dans différents endroits de la province ont maintenant commencé à prendre position collectivement dans leurs endroits de travail et refusent d'entrer au travail si ce n'est pas sécuritaire et si des mesures ne sont pas prises pour rendre les lieux sécuritaires. Certains ont décidé d'exercer un refus en tant que groupe, d'autres ont décidé de faire connaître leurs préoccupations et de menacer de refuser de travailler si elles ne sont pas prises en compte. Ces actions ont fait en sorte que des changements se sont produits dans les endroits de travail, notamment la mise en place de comités pour s'occuper de la sécurité, des comités non officiels mais qui permettent aux travailleurs d'avoir leur mot à dire sur ce qui doit être fait. Souvent, les administrateurs et les parents ont appuyé la démarche, remerciant même les gens qui refusaient de travailler ou qui menaçaient de le faire.

Les positions prises par les médecins, les infirmières, les scientifiques et d'autres professionnels ayant une expertise pertinente qui prennent la parole et revendiquent des changements pour rendre les écoles plus sécuritaires, pour qu'il y ait des tests de masse, des ratios élève/enseignant réduits, une meilleure ventilation, ou pour fermer les écoles et subvenir aux besoins des familles ont aussi changé les choses. Les enseignants et les travailleurs de l'éducation en sont ressortis beaucoup plus confiants que nous ne sommes pas seuls à être préoccupés, que les professionnels de la santé et les scientifiques assument aussi leur responsabilité. C'est une seule lutte.

Notre expérience nous montre qu'en mettant à l'ordre du jour les problèmes à l'intention de tout le monde et en trouvant les moyens de s'informer l'un l'autre, rien n'est impossible. Le travail du Centre ouvrier pour que cela se produise à l'échelle nationale est très important. Nous constatons, à partir de notre propre expérience et de l'expérience des autres partout au pays, qu'il est possible de trouver des solutions, mais ce processus commence lorsque nous décidons de ne pas accepter ce qui est inacceptable.

(Photos : OSSTF, S. Osborne, C. Spagnuolo)

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Où en sont les choses dans le réseau scolaire du primaire et secondaire en Ontario


Piquetage à Windsor durant les grèves d'une journée des enseignants et des travailleurs en éducation, le 21 février 2020

Enver Villamizar est enseignant au secondaire en Ontario et un des hôtes de l'Éducation est un droit.

Les écoles de l'Ontario ont été fermées indéfiniment depuis le 12 avril, ce qui était le début de la relâche scolaire. Il est important de noter que les classes et le personnel spécialisé en orthopédagogie poursuivent leurs activités dans les écoles, et qu'il en est de même des concierges et d'autres membres du personnel d'entretien, ainsi que de certains membres du personnel administratif et de bureau. Dans un cas, tous les membres, sauf un, d'une équipe entière de concierges d'une école qui était « fermée » ont été infectés par la COVID-19. L'affirmation que les écoles sont toutes fermées et que tout va bien se heurte au fait que les protections requises lorsque les gens se rassemblent n'ont pas été systématiquement mises en place, de sorte que même lorsque la plupart des étudiants et des membres du personnel ne sont pas présents, le virus pénètre dans les écoles.

Avant ce dernier confinement, toutes sortes de discussions avaient surgi sur l'opportunité de refuser de travailler à la fin de la relâche scolaire, comment exercer un refus et ce que cela signifie pour l'ensemble de la population et du personnel scolaire. La menace de refus massifs de travailler est une préoccupation pour les conseils scolaires, les syndicats et le gouvernement. C'est probablement l'une des raisons pour lesquelles certains conseils scolaires ont fermé leurs écoles avant que le gouvernement n'agisse, car le système tient à un fil pour le moment, avec un manque d'enseignants suppléants, des personnes en congé, etc. Tout refus peut forcer la fermeture d'une école et quelques fermetures peuvent fermer tout un conseil. Devant la possibilité de refus de travail, certains conseils scolaires ont donc fermé toutes leurs écoles par mesure préventive.

En réponse aux revendications persistantes des éducateurs, le gouvernement a annoncé qu'ils pouvaient désormais tous prendre rendez-vous pour une première dose du vaccin, et ceux qui n'avaient pas de congé de maladie payé ont désormais accès à trois jours de congés de maladie payés. Cela semble une mise en scène pour dire que maintenant tout va bien et que le reste dépend de vous. Ce n'est pas un plan visant à assurer la vaccination en temps opportun des enseignants et des travailleurs de l'éducation, sur leur lieu de travail, par exemple, ce qui signifierait une garantie et qu'ils n'auront pas à faire la queue ou à attendre le moment où la vaccination devient disponible pour eux.

Une grande revendication maintenant est que, à moins que des changements ne soient apportés pour que le personnel enseignant soit complètement vacciné, ait des masques N95 et d'autres ÉPI nécessaires, que la ventilation soit réglée, non pas à l'échelle de l'école mais dans chaque classe, avec suffisamment de congés de maladie en place pour tout le personnel et les parents qui doivent s'isoler à la maison, les écoles ne peuvent pas rouvrir pour tout le monde.

L'annonce récente du gouvernement de l'Ontario qu'il paiera trois jours de congé de maladie liés à la COVID du 19 avril au 25 septembre 2021 est une tentative de paraître répondre aux demandes de la population. Mais c'est trop peu trop tard, largement considéré comme un acte d'opportunisme politique pour étouffer le tollé croissant contre son refus de tenir compte des conseils même de ses propres médecins-conseils. Cela ne peut pas être considéré comme une tentative sérieuse de faire en sorte que les gens puissent se conformer aux protocoles de santé publique tels que rester à la maison s'ils sont symptomatiques, attendent les résultats d'un test ou ont été en contact étroit avec une personne infectée. Et tandis que le gouvernement essaiera de prétendre qu'il a fait sa part pour permettre aux personnes malades de rester à la maison, il refuse d'aborder la question de comment empêcher les gens de tomber malades, ce qui est le point de départ de sa responsabilité sociale.

(Photo : M. Simon, OnParActionNetwork)

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