24 avril 2020
Les travailleurs
de la santé intensifient leur lutte pour
se protéger et protéger le public
Une préoccupation
tout à fait pressante
Nouvelle-Écosse
• Une action immédiate est
requise pour
protéger les aînés et les travailleurs au manoir
Norwood -
Syndicat des employés du gouvernement de la
Nouvelle-Écosse
• Un appel des
travailleurs au public pour
qu'il demande au gouvernement de fournir des
équipements de protection
individuelle
Québec
• Lettre au premier
ministre des finissants en
soins infirmiers
Ontario
• Les infirmières des
soins de longue durée
dénoncent les conditions de travail intenables
Saskatchewan
• Les travailleurs
annoncent des gains dans la
protection des résidents de soins de longue
durée
Colombie-Britannique
• Les conditions des
travailleurs de la santé
et des personnes âgées - Entrevue,
Rhonda Bruce, assistante
en réadaptation et vice-présidente régionale
(Intérieur), Syndicat des
employés d'hôpitaux
Les travailleurs de la santé
interviennent pour se protéger et protéger le
public
Une préoccupation tout à fait pressante
Une des préoccupations les plus pressantes durant
la pandémie de COVID-19 est le nombre de décès
stupéfiant parmi les personnes âgées et les
travailleurs de la santé à cause de cette maladie.
Il est urgent que les résidences pour personnes
âgées et les centres de soins de longue durée
disposent d'un personnel suffisant et de
conditions de travail adéquates pour tout le
personnel, y compris un équipement de protection
complet. Il est également urgent d’apporter des
solutions durables à ces problèmes dans le secteur
de la santé. Avec ce numéro, Forum ouvrier continue
de s’intéresser au rôle dirigeant que jouent les
travailleurs de la santé dans cet effort.
Les travailleurs de la santé sont la première
ligne de défense pour la santé et la sécurité des
personnes âgées dans les établissements de soins
continus. Leurs revendications et solutions
doivent être prises au sérieux et mises en œuvre
pour résoudre la crise d'une manière qui favorise
le peuple. Pendant des années, les travailleurs et
les familles ont dénoncé les situations dans les
maisons de retraite qui, maintenant, avec la
pandémie, provoquent de telles tragédies. En
brisant le silence sur les conditions qui existent
dans ces endroits et sur le mépris officiel des
revendications et solutions des travailleurs, nous
voulons nous assurer que les gouvernements ne s'en
tirent pas avec des mea culpa télévisés
mais sans mettre fin à la privatisation des soins
aux personnes âgées dans l’ensemble et sans
augmenter les investissements dans les programmes
sociaux.
Nouvelle-Écosse
Une action immédiate est requise pour protéger
les aînés et les travailleurs au manoir Norwood
- Syndicat des employés du
gouvernement de la Nouvelle-Écosse -
Les infirmières du Syndicat des employés du
gouvernement
de la Nouvelle-Écosse (NSGEU) redéployées au
manoir Northwood font état
de préoccupations extrêmement graves concernant la
santé et la sécurité
des personnes âgées vulnérables en raison d'un
contrôle médiocre des
infections et de protocoles inadéquats de sécurité
dans l'établissement.
L'arrêté ministériel du gouvernement a obligé les
infirmières et autres travailleurs de la santé à
quitter l'infirmerie
d'Halifax et à se présenter à l'épicentre de
l'épidémie de COVID-19 à
Northwood. Les membres du NSGEU travaillent
au 11 Manor, une unité
au 11e étage avec une capacité de 16 et
une occupation
de 12 résidents, et au 1 Centre, une
unité au rez-de-chaussée
avec une capacité de 22-23 lits qui est
entièrement occupée. Les
deux unités ont des cas positifs à la COVID-19.
Un membre du personnel a décrit les conditions au
manoir
Northwood comme « horribles » et noté qu'il
ne faut pas aller loin
pour comprendre pourquoi le virus est si répandu
dans cet
établissement, étant donné le manque d'équipement
de protection
individuelle (ÉPI) et l'absence de protocoles de
base de contrôle des
infections.
« Nos membres nous disent que c'était comme
entrer dans
une zone de guerre », a déclaré le président
du NSGEU, Jason
MacLean.
« Ils veulent désespérément aider ces aînés dans
leur
période de besoin criant. Mais pour la sécurité de
ces aînés et du
personnel, cela doit être fait correctement, sinon
les choses vont
continuer de se détériorer. »
Voici une liste de quelques-unes des
préoccupations que
ces travailleurs de première ligne ont porté à
notre attention :
- absence de mesures de contrôle des infections
pour
protéger les personnes âgées et les travailleurs
de première ligne
vulnérables ;
- manque d'ÉPI approprié disponible sur les deux
unités ;
- absence de nettoyage systématique et
approfondi de ces unités ;
- regroupement des personnes âgées à la fois
déclarées négatives et
positives dans certaines unités, ce qui ajoute à
la confusion de savoir
qui est positif ou négatif ;
- manque de brassards pour identifier les
patients nécessitant des
médicaments ;
- manque de « salles propres » (un espace
qui n'est pas accessible
aux patients où le personnel peut porter des ÉPI
en toute sécurité sans
risque de contamination) ; et
- manque de poubelles pour éliminer correctement
les ÉPI contaminés, ce
qui fait que les travailleurs doivent les
transporter à travers
l'unité, contaminant potentiellement les zones «
propres ».
Le lundi 20 avril, le NSGEU a fait part de
ces
préoccupations au premier ministre, au ministre de
la Santé et du
Bien-être et au médecin hygiéniste en chef, mais
les membres du NSGEU
continuent de signaler des situations qui mettent
en danger les aînés
et les travailleurs.
« Nos infirmières et nos travailleurs de la santé
de
première ligne ont mis leur propre santé et leur
vie en danger en
allant travailler à l'épicentre de la crise de la
COVID-19, et ils se
sentent trahis par notre gouvernement », a
déclaré MacLean.
Le NSGEU demande au gouvernement de prendre les
mesures
suivantes pour s'assurer que nos membres puissent
continuer de
prodiguer les soins nécessaires aux résidents et
au personnel du manoir
Northwood :
- autoriser ces travailleurs à obtenir des
masques
N95, car ce sont des unités avec des patients
atteints de la
COVID-19 ;
- veiller à ce que des fournitures d'ÉPI soient
disponibles à l'entrée
de chaque chambre, afin que le personnel puisse
répondre en toute
sécurité à un patient en crise ;
- assurer une présence accrue et soutenue du
contrôle des infections pour
éduquer le personnel et garantir le respect des
protocoles ;
- permettre à ces unités d'élaborer un modèle de
soins et de personnel
adapté au ratio de patients et à l'acuité ;
- retirer les humidificateurs de toutes les
chambres des patients ;
- s'assurer que les unités sont nettoyées en
profondeur par le
personnel responsable du nettoyage et ensuite
entretenues par des
nettoyages réguliers quotidiens ;
- établir des salles propres pour enfiler les
ÉPI, les pauses et tabuler les données
; et
- fournir des sacs jaunes pour s'assurer que les
ÉPI contaminés sont
éliminés correctement et qu'il y a suffisamment
de réceptacles dans
chaque chambre de patient.
Les travailleurs de la santé de première ligne du
NSGEU
restent déterminés à collaborer avec le
gouvernement pour lutter contre
la COVID-19 et protéger les personnes âgées
vulnérables au manoir
Northwood, mais elles doivent être appuyées et se
sentir en sécurité au
travail.
« Le premier ministre McNeil doit apprendre à
travailler
en collaboration avec les travailleurs, à entendre
et à respecter les
préoccupations qu'ils expriment. Ce sont des
professionnels qualifiés
et ils savent ce qui est nécessaire pour les
protéger, ainsi que les
patients », a déclaré MacLean.
« En forçant nos membres à travailler sans que
les
protocoles de sécurité appropriés soient en place,
le gouvernement les
oblige essentiellement à compromettre leur permis
d'exercer leur métier
légalement. »
Le NSGEU et les autres syndicats représentant les
travailleurs de la santé de première ligne
disposaient déjà du
protocole de bon voisinage et avaient conclu un
accord supplémentaire
avec le gouvernement pour appeler des volontaires
à se redéployer
temporairement au manoir Northwood. L'ordre du
premier ministre de
forcer les travailleurs à entrer dans le manoir
n'était pas nécessaire
et, sans les précautions appropriées, pourrait
mettre davantage de vies
en danger.
De plus, la direction n'a pas informé les
travailleurs
de la santé de leur redéploiement : ils l'ont
appris par les
médias sociaux et les médias de masse.
Nous rendons ces préoccupations publiques
maintenant
parce que nous avons épuisé toutes les autres
voies pour régler les
problèmes de sécurité et les préoccupations des
résidents et de nos
membres.
Un appel des travailleurs au public pour qu'il
demande au gouvernement de fournir des équipements
de protection
individuelle
Dans un communiqué de presse émis le 16
avril, la
section de Nouvelle-Écosse du Syndicat canadien de
la fonction publique
(SCFP) lance l'appel au public de demander que le
gouvernement
provincial fournisse aux travailleurs de la santé
de première ligne
tous les équipements de protection individuelle
qui leur sont
nécessaires.
Le communiqué de presse indique :
« Les travailleurs de la santé travaillent pour
nous
tous et font tout ce qui est possible pour garder
en sécurité les
résidents de la Nouvelle-Écosse. Ils sont en
première ligne de la
pandémie de la COVID-19, travaillant nuit et jour
pour enrayer sa
propagation et soigner ceux qui sont infectés.
Cependant, il n'existe
toujours pas de protocole permettant aux
travailleurs d'obtenir les
équipements de protection individuelle appropriés
(ÉPI). Ils ont besoin
de votre aide pour les obtenir.
« Ils ont besoin de vous pour dire au
gouvernement de la
Nouvelle-Écosse de voir à que nos travailleurs de
la santé de première
ligne aient les ÉPI appropriés pour pouvoir faire
leur travail en
sécurité. »
Le communiqué de presse est accompagné d'un
message
courriel que les gens peuvent envoyer au
gouvernement. Ce message se
lit :
« Nos travailleurs de la santé font passer les
patients
avant tout. Et pendant la pandémie de la COVID-19,
ils sont aux
premières lignes et travaillent nuit et jour pour
enrayer sa
propagation.
« À chaque heure, ils gardent les gens en sécurité
et sauvent des vies.
Trop de travailleurs de la santé de première ligne
travaillent sans les
équipements de protection individuelle (ÉPI) dont
ils ont besoin pour
nous protéger tous. Ils sont envoyés aux premières
lignes de cette
pandémie sans les bons outils qui leur permettent
d'être en sécurité et
de garder les Néo-Écossais en sécurité eux aussi.
« Protéger les travailleurs de première ligne
nous
protège tous. C'est le temps que le gouvernement
de la Nouvelle-Écosse
intervienne.
« Le gouvernement doit fournir un meilleur accès
aux ÉPI
à tous les travailleurs de la santé et faire
confiance au jugement de
ces professionnels quand il est question d'évaluer
le niveau requis
pour se garder eux-mêmes et garder le public en
sécurité. L'Ontario,
l'Alberta, la Colombie-Britannique et le
Nouveau-Brunswick ont tous
conclu des ententes avec leurs travailleurs de la
santé, et le
gouvernement de la Nouvelle-Écosse doit suivre
leur exemple.
« Le gouvernement doit appliquer le principe de
précaution qui a été établi dans le sillage de
l'épidémie du SRAS.
Selon ce principe, lorsqu'il existe une
incertitude scientifique sur
les causes possibles d'une transmission, nous
devons pécher par excès
de prudence. C'est pourquoi nous devons faire en
sorte que les
travailleurs de la santé soient munis de masques
respirateurs N95 ajustés
à leur visage quand ils interagissent avec des cas
possibles ou
confirmés de la COVID-19.
« Les Néo-Écossais sont tous dans le même bateau,
unis.
Chacun de nous fait sa part pour aider à aplanir
la courbe. Cependant,
quand nos travailleurs de la santé tombent
malades, ils ne peuvent pas
soigner les patients, les résidents et les
clients, et cela augmente le
péril pour nous tous.
« En tant que député à l'assemblée législative
provinciale, je vous demande d'agir immédiatement
pour protéger les
infirmières et les travailleurs de la santé de
première ligne. Tous les
travailleurs de la santé doivent avoir les ÉPI
dont ils ont besoin pour
faire leur travail en toute sécurité. »
Pour signer le message, visiter le site protectnsfrontline.ca
Québec
Lettre au premier ministre des finissants
en soins infirmiers
Lettre au premier ministre du Québec François
Legault et
à toute son équipe extraordinaire
De la part de la relève de la profession
infirmière
Monsieur Legault, votre point de presse
du 15 avril
à 13 h m'a fait tomber en bas de ma chaise,
comme plusieurs de mes
collègues d'ailleurs. Personnellement, il m'a fait
perdre confiance en
votre façon de gérer cette crise en CHSLD et même
de la considération
que vous portez à la vocation infirmière.
Seriez-vous en train de
paniquer ?
Car à vous entendre, vous semblez occulter que le
Québec
possède une quantité non négligeable de personnel
compétent
actuellement en attente de venir en aide et qui se
propose
gracieusement depuis le début de la pandémie.
Monsieur le premier ministre, savez-vous combien
nous
avons d'étudiants finissants en soins infirmiers
et sciences
infirmières compétents pour les soins que vous
suppliez d'obtenir en
CHSLD ?
En effet, monsieur le premier ministre, il y en a
beaucoup. Et ceux-ci ont déjà plus que le niveau
d'infirmier auxiliaire
et une formation de préposé aux bénéficiaires à
jour. À partir de mai,
dès l'officialisation de leur graduation, ils
seront des candidats à la
profession infirmière et feront les tâches
d'infirmières autorisées
dans nos milieux en attendant leur examen de
l'ordre professionnel en
automne.
Savez-vous ce que fait toute cette belle main
d'oeuvre
pas chère et en santé en ce moment et encore pour
les quatre prochaines
semaines ?
Elle suit des cours improvisés en ligne trop
souvent de
mauvaises qualités. Elle fait des travaux
compensateurs de stages qui
ne compensent en rien l'expérience essentielle
d'un stage. Tout cela
dans des conditions d'inégalités sociales
épouvantables, sans aucune
cohérence entre les établissements d'enseignement.
De plus, ils n'ont
aucune garantie de graduer comme prévu en mai, car
leur ordre
professionnel (l'Ordre des infirmières et
infirmiers du Québec) n'a pas
encore validé ou prévu quoi que ce soit d'officiel
à leur égard pour
leur permettre d'accéder à la profession en début
mai comme prévu (en
raison de l'annulation du dernier stage de leur
formation d'étude
supérieure de trois ans).
De plus actuellement, vous exhortez leurs
professeurs à
les abandonner pour rejoindre les CHSLD, force
majeure l'obligeant,
menaçant ainsi fortement leur diplomation déjà
incertaine.
Monsieur le premier ministre, si la situation est
tellement critique et exige maintenant de demander
à des médecins
spécialistes aux salaires hors de nos moyens, qui
n'ont pas les
qualifications pour exercer comme infirmiers et
infirmières, de venir
dans les CHSLD, ne serait-il pas temps de faire
comme beaucoup d'autres
pays et de vous pencher sur cette question de nos
finissants
infirmiers ?
Respectueusement, monsieur le premier ministre,
vous
semblez croire à tort et maladroitement que le
travail d'une infirmière
est en dessous de celui d'un médecin et non
parallèle et
complémentaire. Comme si un médecin se devait de
maîtriser la formation
infirmière avant de devenir un médecin. Comme si
un pont existait à
l'université après les études d'infirmières pour
poursuivre en médecine
avec des cours crédités. Malheureusement, en plus
d'être dégradante
pour la profession infirmière, votre perception
est complètement fausse
et décalée de la réalité.
Contrairement à vos propos exprimés lors du
précédent
point de presse, la plupart de nos médecins ne
sont pas «
surqualifiés » pour ce poste, mais plutôt non
formés pour
l'exécuter. La plupart ne savent pas faire de
prise de sang, poser de
cathéter, faire des soins de stomies, des
pansements spécialisés, etc.,
et n'ont pas appris les techniques infirmières qui
nécessitent au
minimum une formation solide de trois ans combinée
à des expériences de
stage pour être maîtrisées. Contrairement à nos
finissants en soins et
sciences infirmières, ils n'ont pour la plupart
jamais appris à
maîtriser et pratiquer la mobilisation de façon
sécuritaire des usagers
et les principes du PDSB (principes pour le
déplacement sécuritaire des
bénéficiaires).
Avec votre plan qui fait bien jaser, vous
utilisez
l'argent du contribuable, notre argent, pour payer
des médecins un prix
exorbitant alors qu'ils ne feront au plus que la
moitié du travail des
infirmières, car, monsieur le premier ministre,
n'espérez pas qu'ils
pourront en faire beaucoup plus avec leurs
précieuses compétences
médicales. Pour la très grande majorité, ils ne
savent même pas
installer et régler une pompe à perfusion
intraveineuse.
Et c'est bien normal. Ce n'est pas leur métier,
ils ne
l'ont pas appris. Leurs compétences indispensables
sont ailleurs. Vous
ne demanderiez pas à des infirmières de faire le
travail des médecins.
Eh bien, c'est la même chose. La hiérarchisation
des professions de la
santé est un préjugé social coriace. S'il vous
plait, monsieur le
premier ministre, ne nourrissez pas ce préjugé qui
est à la base de la
rémunération défaillante de nos professionnels de
la santé et du manque
de reconnaissance de ces précieuses professions au
sein du réseau. Ne
soyez pas le véhicule de ces fausses croyances
d'une autre époque.
Monsieur Legault et toute votre équipe :
pour la
sécurité de nos bénéficiaires, de nos chers aînés,
par souci
d'efficacité et pour le respect de la profession
infirmière qui n'est
pas la base de la profession de médecin, mais bien
une profession
parallèle à part entière complète et
complémentaire à la médecine, et
pour ne pas mettre nos précieux médecins dans
l'inconfortable position
de devoir admettre qu'ils n'ont pas les
compétences requises pour
remplacer efficacement une infirmière aguerrie, je
vous demande de
considérer l'option de demander l'aide de nos
finissants infirmiers et,
dans la foulée, de leur créditer les 3-4
semaines de cours
inconsistants et décousus qu'ils doivent
actuellement suivre en ligne
au lieu de répondre à l'urgence actuellement
vitale.
Monsieur Legault, premier ministre du Québec,
donnez
enfin aux CHSLD la main-d'oeuvre compétente et
efficace qu'ils
attendent en économisant nos budgets, en limitant
nos dépenses et en
permettant à nos finissants ainsi qu'à leurs
professeurs de mettre à
profit leurs compétences infirmières - une
profession, une vocation,
encore trop peu connue et reconnue.
Cordialement et probablement très maladroitement,
Des finissants infirmiers et infirmières du
Québec.
Ontario
Les infirmières des soins de longue durée
dénoncent les
conditions de travail intenables
Le 15 avril,
l'Association des
infirmières de l'Ontario (ONA) a émis un
communiqué de presse pour
dénoncer les conditions de travail des infirmières
et de tous les
travailleurs de la santé des résidences de soins
de longue durée, les
qualifiant d'« inimaginables ». On y souligne
que le personnel de
soins de santé exige un accès immédiat à
l'équipement de protection
individuelle (ÉPI) afin d'arrêter la propagation
de la COVID-19 aux
résidents vulnérables.
« Comme les médias l'ont indiqué, des douzaines
d'établissements de soins de longue durée partout
en Ontario annoncent
des flambées de la COVID-19 ainsi que des décès,
écrit la présidente de
l'ONA Vicki McKenna, infirmière licenciée. Nos
pensées sont avec les
résidents et leurs familles, et avec le personnel
qui dispense les
soins quotidiennement — et qui par conséquent
s'attachent de près à
leurs résidents. Nos infirmières et nos
travailleurs de la santé dans
ce secteur font tout ce qu'ils peuvent alors que
des douzaines d'entre
eux ont été eux-mêmes infectés. »
On souligne dans le communiqué de presse que les
résidences de soins de longue durée souffraient
d'une pénurie de
personnel avant la pandémie et sont maintenant en
état de crise. On y
fait valoir que l'ONA exige des changements et des
ÉPI pour tous les
travailleurs depuis le début de la pandémie et
qu'elle va continuer
d'exiger des mesures du gouvernement jusqu'à ce
qu'il agisse pour
protéger les Ontariens parmi les plus vulnérables.
Voici quelques changements revendiqués par
l'ONA :
- Un accès immédiat
à l'équipement de
protection individuelle, y compris des masques
N95, lorsque le
personnel soigne des résidents soupçonnés ou
confirmés d'avoir la
COVID-19 — si le personnel n'est pas en sécurité,
les résidents ne le
seront pas.
- Une stratégie immédiate pour isoler les
résidents
malades de la COVID-19 des résidents non infectés
— ainsi que
l'isolement l'un de l'autre des membres du
personnel soignant de chacun
de ces groupes — afin de prévenir la contamination
des ÉPI et réduire
la propagation du virus à l'intérieur des
résidences de soins de longue
durée.
L'ONA revendique aussi depuis quelque temps que
les
travailleurs à temps partiel et occasionnels dans
les résidences de
soins de longue durée soient limités à un
établissement en augmentant
les horaires à temps partiel à ceux des temps
pleins ou en remboursant
le manque à gagner salarial. La déclaration
informe qu'en raison de la
pression exercée par les travailleurs de la santé,
le gouvernement
ontarien a commencé à agir face à leurs
revendications.
Saskatchewan
Les travailleurs annoncent des gains dans la
protection
des résidents de soins de longue durée
Le 17 avril, le Syndicat canadien de la
fonction
publique (SCFP) en Saskatchewan a annoncé qu'après
plusieurs semaines
de pression du SCFP et d'autres syndicats de la
santé, le gouvernement
de la Saskatchewan a finalement annoncé une
politique de port du masque
continu pour les travailleurs de la santé, ainsi
qu'une transition vers
un seul lieu de travail pour les travailleurs en
soins aigus et de
longue durée.
« Les résidences de
soins de longue durée
ont été au coeur des flambées importantes de la
COVID-19 dans d'autres
provinces et représentent la plus grande part des
décès attribués au
virus, a dit la présidente de la section
locale 5430 du SCFP,
Sandra Seitz. Le fait d'empêcher qu'un travailleur
se retrouve dans
plusieurs établissements différents va contribuer
à arrêter la
propagation de la COVID-19 en limitant le
mouvement entre les
établissements de soins aux aînés. »
Dans le communiqué, on souligne que la COVID-19 a
mis en
évidence certains des problèmes les plus graves
dans le système de
santé : le sous-financement et la pénurie de
personnel
« Le personnel de soins de longue durée est
insuffisant
depuis des années. La COVID-19 a exacerbé ces
problèmes, et nos membres
travaillent plus souvent qu'autrement en nombre
insuffisant, a dit
Seitz. Avec des protocoles de distanciation
physique pour les résidents
dans les salles à manger par exemple et la
nécessité d'une hygiène
accrue, il est nécessaire d'avoir plus de
personnel, pas moins. »
« La politique de port du masque continu est un
début,
mais le gouvernement doit prendre des mesures pour
veiller à ce qu'elle
soit mise en oeuvre dans tout le secteur de la
santé et dans tous les
services communautaires », ajoute-t-elle.
Le communiqué de presse informe aussi que la
section 5430 du SCFP a signé une entente de
principe qui protègera
ses membres lors du redéploiement. L'entente fixe
les protections
suivantes pour les travailleurs et les
résidents :
- Empêcher les travailleurs de travailler dans
plusieurs
établissements tout en garantissant le maintien de
leurs heures.
- Créer un bassin de main-d'oeuvre pour le
redéploiement
en réponse aux besoins de santé dus à la COVID-19
avec des paramètres
clairs qui protègent le public et les
travailleurs.
- Pas de nouvelles mises à pied pour la durée de
l'entente.
- Les employés redéployés seront protégés de
toutes
dépenses occasionnées, y compris l'hébergement
lorsque nécessaire.
- Tous les employés redéployés recevront une
orientation
et une formation en fonction de la situation à
l'établissement qui les
accueille dont une orientation et une formation
sur l'équipement de
protection individuelle (ÉPI) ainsi que l'accès au
dit ÉPI avant de
commencer à travailler.
« Nous avons vu une hausse importante de travail
précaire dans notre système de santé. Plusieurs de
nos membres sont
forcés de travailler à différents emplois, dans
différentes
juridictions, afin d'essayer de travailler
l'équivalent d'un travail à
temps plein, a dit Sandra Seitz. Cette entente de
principe va offrir
une certaine protection à nos membres qui vivent
des changements dans
leur environnement de travail en raison de la
COVID-19. »
Colombie-Britannique
Les conditions des travailleurs
de la santé et des personnes âgées
- Entrevue, Rhonda Bruce,
assistante en
réadaptation et vice-présidente régionale
(Intérieur), Syndicat des
employés d'hôpitaux -
Au 22 avril,
il y avait 19
éclosions dans des établissements de soins de
longue durée et de vie
assistée en Colombie-Britannique et les
travailleurs prennent des
mesures dans toute la province pour prévenir
d'autres éclosions. Cela
ne concerne pas seulement la vulnérabilité des
aînés qui vivent dans
ces résidences. Depuis des décennies, les
travailleurs et les familles
des résidents sonnent l'alarme sur les conditions
dans les foyers de
soins de longue durée et les foyers d'aide, en
particulier ceux qui
sont dans le privé. Les conditions «
normales » sont caractérisées
par le non-remplacement des travailleurs absents,
des heures
supplémentaires excessives et des milliers
d'heures de travail non
rémunérées effectuées par les visiteurs et les
bénévoles. La perte
soudaine de l'apport des membres de la famille et
de bénévoles pendant
la pandémie a encore aggravé la situation. Les
travailleurs en soins de
longue durée s'expriment pour faire savoir ce dont
ils ont besoin pour
faire leur travail en toute sécurité, pour
protéger leurs résidents,
leurs familles, leurs communautés et eux-mêmes.
Forum ouvrier a interviewé Rhonda Bruce,
une
travailleuse de première ligne en soins de longue
durée en
Colombie-Britannique. Elle est assistante en
réadaptation et membre de
l'exécutif provincial du Syndicat des employés
d'hôpitaux de la
Colombie-Britannique (HEU).
Forum ouvrier : Quelles
mesures ont
été prises dans vos lieux de travail pour faire
face à la
COVID-19 ?
Rhonda Bruce : Ce qu'ils ont fait
dans les
hôpitaux, c'est qu'ils ont renvoyé de nombreux
patients chez eux et
fait des préparatifs pour prendre soin des
patients atteints de la
COVID-19. De nombreux hôpitaux sont utilisés à
moins de 50 %
de leur capacité. Certains établissements de soins
de longue durée ont
des éclosions de rhume ou de grippe. Ce qui a
changé, c'est qu'avant
une épidémie, il devait y avoir trois résidents
présentant des
symptômes pendant trois jours pour déclarer une
épidémie et maintenant
s'ils ont un résident avec un rhume, ils ferment
l'établissement aux
visiteurs et introduisent des mesures spéciales de
contrôle des
infections. De nombreux sites de la province ont
été déclarés en
situation d'épidémie parce que c'est la saison du
rhume et de la
grippe. Dès que quelqu'un a froid, on ferme les
portes, ce qui signifie
qu'il n'y a plus de programme de loisirs. De
nombreux sites ont des
salles à manger centrales qui sont généralement
assez bondées. La
plupart des résidents mangent dans les salles à
manger, mais sont
séparés lorsqu'une épidémie est déclarée. Au lieu
de manger dans une
salle à manger, les résidents mangent dans leur
chambre ou ailleurs.
Même avec le personnel de loisirs et autre
redéployé pour aider, il n'y
a pas assez de personnel pour cela ou pour le
nettoyage supplémentaire
qui est nécessaire, etc. Les programmes de loisirs
n'ont pas lieu. Les
gens doivent également organiser des appels vidéo
avec la famille avec
les résidents afin qu'ils puissent voir leur
famille car aucun visiteur
ne vient.
FO : Vous êtes donc en mode
préparatoire pour la COVID-19. Les travailleurs
ont-ils ce dont ils ont
besoin ?
RB : Nous avons des problèmes à
certains
endroits. Le ministère de la Santé a déclaré qu'il
allait s'occuper de
tous nos travailleurs qui ont besoin des services
de garde mais cela ne
se fait pas toujours. Je connais le cas d'une
jeune mère qui a un
enfant en bas âge et pas de garderie. Elle a
essayé d'obtenir un congé
spécial. Nous avons prévu un congé spécial dans
notre convention
collective et cette travailleuse dispose d'une
banque de congés
spéciaux. Ils ont refusé de le lui accorder. Elle
a eu quatre jours où
elle n'a pas eu de membre de sa famille pour
l'aider à s'occuper de ses
enfants parce que son service de garde a été
annulé. C'est stressant
chaque jour pour les parents de jeunes enfants.
Ensuite, bien sûr, il y
a beaucoup de notes de service des autorités
sanitaires et les
gestionnaires donnent différentes interprétations
des notes de service
et donnent parfois des instructions erronées aux
travailleurs
concernant l'équipement de protection individuelle
(ÉPI). La semaine
dernière, un travailleur en diététique dans l'un
des foyers de soins de
longue durée a déclaré qu'on lui avait dit de
changer de gants après
chaque service auprès d'un patient. La personne
qui offre ce service a
des gants et ne touche jamais le résident, donc
cela n'a aucun sens et
ils vont simplement gaspiller les ÉPI et ne
pourront pas les avoir
quand ils sont vraiment nécessaires. Ce protocole
s'applique au
personnel qui nourrit les résidents, qui doit bien
sûr changer de gants
et se laver les mains entre chaque résident.
De nombreux hôpitaux et établissements de soins
de
longue durée partagent entre eux des employés
occasionnels et ont un
groupe flottant de personnel - des travailleurs
qui se rendent dans
différentes zones de l'hôpital ou de la résidence
ou même entre les
établissements selon les besoins. Il y a eu
récemment le cas d'une
infirmière qui effectuait un travail de première
ligne - triage de
première intervention dans un service d'urgence -
qui, le lendemain,
est allée travailler dans un établissement de
soins de longue durée.
C'est jouer avec le feu. Si cette infirmière est
la première personne à
s'occuper d'un patient chez qui elle découvre la
COVID-19 et qui
devient infecté, elle l'apportera directement aux
personnes âgées
vulnérables du foyer de soins de longue durée.
Jusqu'à présent, bien
que la province ait limité le mouvement du
personnel entre les
établissements de soins de longue durée, il n'y a
aucune restriction
quant au déplacement du personnel entre les
hôpitaux, les foyers de
groupe et les soins de longue durée.
FO : Quelle était la situation
avant
la pandémie de la COVID-19 et les mesures pour s'y
préparer ?
RB : Dans toute la
Colombie-Britannique, les
travailleurs doivent faire des heures
supplémentaires pour presque
chaque quart de travail parce qu'il n'y a pas
assez de personnel. Il
n'y a jamais eu assez de personnel. Nous avons
beaucoup de travailleurs
occasionnels et la plupart d'entre eux veulent du
travail à temps
plein. Ils doivent travailler dans trois ou quatre
endroits, où ils
peuvent obtenir leurs heures, car ils ont besoin
de gagner leur vie.
FO : Quelle est la raison pour
laquelle plus de postes à temps plein et à temps
partiel ne sont pas
créés ?
RB :
Parce que l'employeur
économise sur les avantages sociaux. Les
occasionnels n'ont aucun
avantage social. Très souvent, les gens prennent
des postes à temps
partiel, qui ont des avantages sociaux, puis ils
acceptent plus de
travail. Tous les établissements de soins de
longue durée ne sont pas
couverts par la convention collective de la
Facilities Bargaining
Association (FBA), où des salaires et des
avantages sociaux selon les
normes de l'industrie sont en place, en vertu
d'une convention-cadre
pour la province. Il existe d'autres centres de
soins de longue durée
dans la région qui sont privés et où les salaires
sont inférieurs. Dans
les sites exploités par le secteur privé à but
lucratif où les salaires
sont bien inférieurs à ceux de l'entente sur les
établissements, les
travailleurs font de leur mieux pour trouver un
emploi ailleurs. Ils
peuvent même travailler à temps plein mais s'ils
obtiennent un emploi
dans un centre couvert par la FBA, ils partiront.
Il y a toujours
beaucoup de travailleurs qui quittent ces sites
lorsqu'ils trouvent du
travail dans un site couvert par la convention
collective de la FBA.
FO : Qu'est-ce que le syndicat
revendique?
RB : Il y a des choses qui peuvent
être
faites en ce moment. Les travailleurs qui en ont
besoin devraient
pouvoir utiliser leur banque de congés spéciaux.
Nos employeurs
pourraient s'assurer que nous ayons des repas, du
café de temps en
temps, un financement accru pour les uniformes et
les chaussures en
raison des nouvelles règles, des vestiaires
appropriés. Les gens qui ne
sont pas en première ligne ne comprennent pas ce
que cela signifie dans
la situation dans laquelle nous nous trouvons.
Nous travaillons au bord
du précipice depuis si longtemps et cette
situation est encore pire,
nous avons donc besoin de soutien et les
employeurs doivent nous
écouter. Nous voulons tous faire cesser cela. Nous
sommes tous engagés
envers les résidents dont nous prenons soin. Notre
convention
collective est respectée. Le syndicat plaide
vraiment pour nous. En
tant que cadre supérieur provincial du HEU en
première ligne, j'ai
encore du travail à faire. Je passe la majeure
partie de ma journée à
faire de la santé-sécurité au travail, à donner de
la formation sur les
ÉPI, etc. et à répondre constamment aux questions.
Mon supérieur
travaille avec moi. Je ne peux pas imaginer ce que
c'est pour les
travailleurs de l'Ontario et du Québec où les
conventions collectives
ne sont pas respectées. Comment pouvez-vous faire
un effort
supplémentaire dans ces conditions ?
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