Forum ouvrier

24 avril 2020

Les travailleurs de la santé intensifient leur lutte pour
se protéger et protéger le public

Une préoccupation tout à fait pressante

Nouvelle-Écosse
Une action immédiate est requise pour protéger les aînés et les travailleurs au manoir Norwood - Syndicat des employés du gouvernement de la Nouvelle-Écosse
Un appel des travailleurs au public pour qu'il demande au gouvernement de fournir des équipements de protection individuelle

Québec
Lettre au premier ministre des finissants en soins infirmiers

Ontario
Les infirmières des soins de longue durée dénoncent les conditions de travail intenables

Saskatchewan
Les travailleurs annoncent des gains dans la protection des résidents de soins de longue durée

Colombie-Britannique
Les conditions des travailleurs de la santé et des personnes âgées - Entrevue, Rhonda Bruce, assistante en réadaptation et vice-présidente régionale (Intérieur), Syndicat des employés d'hôpitaux


Les travailleurs de la santé interviennent pour se protéger et protéger le public

Une préoccupation tout à fait pressante

Une des préoccupations les plus pressantes durant la pandémie de COVID-19 est le nombre de décès stupéfiant parmi les personnes âgées et les travailleurs de la santé à cause de cette maladie. Il est urgent que les résidences pour personnes âgées et les centres de soins de longue durée disposent d'un personnel suffisant et de conditions de travail adéquates pour tout le personnel, y compris un équipement de protection complet. Il est également urgent d’apporter des solutions durables à ces problèmes dans le secteur de la santé. Avec ce numéro, Forum ouvrier continue de s’intéresser au rôle dirigeant que jouent les travailleurs de la santé dans cet effort.

Les travailleurs de la santé sont la première ligne de défense pour la santé et la sécurité des personnes âgées dans les établissements de soins continus. Leurs revendications et solutions doivent être prises au sérieux et mises en œuvre pour résoudre la crise d'une manière qui favorise le peuple. Pendant des années, les travailleurs et les familles ont dénoncé les situations dans les maisons de retraite qui, maintenant, avec la pandémie, provoquent de telles tragédies. En brisant le silence sur les conditions qui existent dans ces endroits et sur le mépris officiel des revendications et solutions des travailleurs, nous voulons nous assurer que les gouvernements ne s'en tirent pas avec des mea culpa télévisés mais sans mettre fin à la privatisation des soins aux personnes âgées dans l’ensemble et sans augmenter les investissements dans les programmes sociaux.

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Nouvelle-Écosse

Une action immédiate est requise pour protéger les aînés et les travailleurs au manoir Norwood

Les infirmières du Syndicat des employés du gouvernement de la Nouvelle-Écosse (NSGEU) redéployées au manoir Northwood font état de préoccupations extrêmement graves concernant la santé et la sécurité des personnes âgées vulnérables en raison d'un contrôle médiocre des infections et de protocoles inadéquats de sécurité dans l'établissement.

L'arrêté ministériel du gouvernement a obligé les infirmières et autres travailleurs de la santé à quitter l'infirmerie d'Halifax et à se présenter à l'épicentre de l'épidémie de COVID-19 à Northwood. Les membres du NSGEU travaillent au 11 Manor, une unité au 11e étage avec une capacité de 16 et une occupation de 12 résidents, et au 1 Centre, une unité au rez-de-chaussée avec une capacité de 22-23 lits qui est entièrement occupée. Les deux unités ont des cas positifs à la COVID-19.

Un membre du personnel a décrit les conditions au manoir Northwood comme « horribles » et noté qu'il ne faut pas aller loin pour comprendre pourquoi le virus est si répandu dans cet établissement, étant donné le manque d'équipement de protection individuelle (ÉPI) et l'absence de protocoles de base de contrôle des infections.

« Nos membres nous disent que c'était comme entrer dans une zone de guerre », a déclaré le président du NSGEU, Jason MacLean.

« Ils veulent désespérément aider ces aînés dans leur période de besoin criant. Mais pour la sécurité de ces aînés et du personnel, cela doit être fait correctement, sinon les choses vont continuer de se détériorer. »

Voici une liste de quelques-unes des préoccupations que ces travailleurs de première ligne ont porté à notre attention :

- absence de mesures de contrôle des infections pour protéger les personnes âgées et les travailleurs de première ligne vulnérables ;
- manque d'ÉPI approprié disponible sur les deux unités ;
- absence de nettoyage systématique et approfondi de ces unités ;
- regroupement des personnes âgées à la fois déclarées négatives et positives dans certaines unités, ce qui ajoute à la confusion de savoir qui est positif ou négatif ;
- manque de brassards pour identifier les patients nécessitant des médicaments ;
- manque de « salles propres » (un espace qui n'est pas accessible aux patients où le personnel peut porter des ÉPI en toute sécurité sans risque de contamination) ; et
- manque de poubelles pour éliminer correctement les ÉPI contaminés, ce qui fait que les travailleurs doivent les transporter à travers l'unité, contaminant potentiellement les zones « propres ».

Le lundi 20 avril, le NSGEU a fait part de ces préoccupations au premier ministre, au ministre de la Santé et du Bien-être et au médecin hygiéniste en chef, mais les membres du NSGEU continuent de signaler des situations qui mettent en danger les aînés et les travailleurs.

« Nos infirmières et nos travailleurs de la santé de première ligne ont mis leur propre santé et leur vie en danger en allant travailler à l'épicentre de la crise de la COVID-19, et ils se sentent trahis par notre gouvernement », a déclaré MacLean.

Le NSGEU demande au gouvernement de prendre les mesures suivantes pour s'assurer que nos membres puissent continuer de prodiguer les soins nécessaires aux résidents et au personnel du manoir Northwood :

- autoriser ces travailleurs à obtenir des masques N95, car ce sont des unités avec des patients atteints de la COVID-19 ;
- veiller à ce que des fournitures d'ÉPI soient disponibles à l'entrée de chaque chambre, afin que le personnel puisse répondre en toute sécurité à un patient en crise ;
- assurer une présence accrue et soutenue du contrôle des infections pour éduquer le personnel et garantir le respect des protocoles ;
- permettre à ces unités d'élaborer un modèle de soins et de personnel adapté au ratio de patients et à l'acuité ;
- retirer les humidificateurs de toutes les chambres des patients ;
- s'assurer que les unités sont nettoyées en profondeur par le personnel responsable du nettoyage et ensuite entretenues par des nettoyages réguliers quotidiens ;
- établir des salles propres pour enfiler les ÉPI, les pauses et tabuler les données ; et
- fournir des sacs jaunes pour s'assurer que les ÉPI contaminés sont éliminés correctement et qu'il y a suffisamment de réceptacles dans chaque chambre de patient.

Les travailleurs de la santé de première ligne du NSGEU restent déterminés à collaborer avec le gouvernement pour lutter contre la COVID-19 et protéger les personnes âgées vulnérables au manoir Northwood, mais elles doivent être appuyées et se sentir en sécurité au travail.

« Le premier ministre McNeil doit apprendre à travailler en collaboration avec les travailleurs, à entendre et à respecter les préoccupations qu'ils expriment. Ce sont des professionnels qualifiés et ils savent ce qui est nécessaire pour les protéger, ainsi que les patients », a déclaré MacLean.

« En forçant nos membres à travailler sans que les protocoles de sécurité appropriés soient en place, le gouvernement les oblige essentiellement à compromettre leur permis d'exercer leur métier légalement. »

Le NSGEU et les autres syndicats représentant les travailleurs de la santé de première ligne disposaient déjà du protocole de bon voisinage et avaient conclu un accord supplémentaire avec le gouvernement pour appeler des volontaires à se redéployer temporairement au manoir Northwood. L'ordre du premier ministre de forcer les travailleurs à entrer dans le manoir n'était pas nécessaire et, sans les précautions appropriées, pourrait mettre davantage de vies en danger.

De plus, la direction n'a pas informé les travailleurs de la santé de leur redéploiement : ils l'ont appris par les médias sociaux et les médias de masse.

Nous rendons ces préoccupations publiques maintenant parce que nous avons épuisé toutes les autres voies pour régler les problèmes de sécurité et les préoccupations des résidents et de nos membres.

(22 avril 2020. Traduit de l'anglais par Forum ouvrier)

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Un appel des travailleurs au public pour qu'il
demande au gouvernement de fournir des équipements de protection individuelle

Dans un communiqué de presse émis le 16 avril, la section de Nouvelle-Écosse du Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP) lance l'appel au public de demander que le gouvernement provincial fournisse aux travailleurs de la santé de première ligne tous les équipements de protection individuelle qui leur sont nécessaires.

Le communiqué de presse indique :

« Les travailleurs de la santé travaillent pour nous tous et font tout ce qui est possible pour garder en sécurité les résidents de la Nouvelle-Écosse. Ils sont en première ligne de la pandémie de la COVID-19, travaillant nuit et jour pour enrayer sa propagation et soigner ceux qui sont infectés. Cependant, il n'existe toujours pas de protocole permettant aux travailleurs d'obtenir les équipements de protection individuelle appropriés (ÉPI). Ils ont besoin de votre aide pour les obtenir.

« Ils ont besoin de vous pour dire au gouvernement de la Nouvelle-Écosse de voir à que nos travailleurs de la santé de première ligne aient les ÉPI appropriés pour pouvoir faire leur travail en sécurité. »

Le communiqué de presse est accompagné d'un message courriel que les gens peuvent envoyer au gouvernement. Ce message se lit :

« Nos travailleurs de la santé font passer les patients avant tout. Et pendant la pandémie de la COVID-19, ils sont aux premières lignes et travaillent nuit et jour pour enrayer sa propagation.
« À chaque heure, ils gardent les gens en sécurité et sauvent des vies. Trop de travailleurs de la santé de première ligne travaillent sans les équipements de protection individuelle (ÉPI) dont ils ont besoin pour nous protéger tous. Ils sont envoyés aux premières lignes de cette pandémie sans les bons outils qui leur permettent d'être en sécurité et de garder les Néo-Écossais en sécurité eux aussi.

« Protéger les travailleurs de première ligne nous protège tous. C'est le temps que le gouvernement de la Nouvelle-Écosse intervienne.

« Le gouvernement doit fournir un meilleur accès aux ÉPI à tous les travailleurs de la santé et faire confiance au jugement de ces professionnels quand il est question d'évaluer le niveau requis pour se garder eux-mêmes et garder le public en sécurité. L'Ontario, l'Alberta, la Colombie-Britannique et le Nouveau-Brunswick ont tous conclu des ententes avec leurs travailleurs de la santé, et le gouvernement de la Nouvelle-Écosse doit suivre leur exemple.

« Le gouvernement doit appliquer le principe de précaution qui a été établi dans le sillage de l'épidémie du SRAS. Selon ce principe, lorsqu'il existe une incertitude scientifique sur les causes possibles d'une transmission, nous devons pécher par excès de prudence. C'est pourquoi nous devons faire en sorte que les travailleurs de la santé soient munis de masques respirateurs N95 ajustés à leur visage quand ils interagissent avec des cas possibles ou confirmés de la COVID-19.

« Les Néo-Écossais sont tous dans le même bateau, unis. Chacun de nous fait sa part pour aider à aplanir la courbe. Cependant, quand nos travailleurs de la santé tombent malades, ils ne peuvent pas soigner les patients, les résidents et les clients, et cela augmente le péril pour nous tous.

« En tant que député à l'assemblée législative provinciale, je vous demande d'agir immédiatement pour protéger les infirmières et les travailleurs de la santé de première ligne. Tous les travailleurs de la santé doivent avoir les ÉPI dont ils ont besoin pour faire leur travail en toute sécurité. »

Pour signer le message, visiter le site protectnsfrontline.ca

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Québec

Lettre au premier ministre des finissants
en soins infirmiers

Lettre au premier ministre du Québec François Legault et à toute son équipe extraordinaire

De la part de la relève de la profession infirmière

Monsieur Legault, votre point de presse du 15 avril à 13 h m'a fait tomber en bas de ma chaise, comme plusieurs de mes collègues d'ailleurs. Personnellement, il m'a fait perdre confiance en votre façon de gérer cette crise en CHSLD et même de la considération que vous portez à la vocation infirmière. Seriez-vous en train de paniquer ?

Car à vous entendre, vous semblez occulter que le Québec possède une quantité non négligeable de personnel compétent actuellement en attente de venir en aide et qui se propose gracieusement depuis le début de la pandémie.

Monsieur le premier ministre, savez-vous combien nous avons d'étudiants finissants en soins infirmiers et sciences infirmières compétents pour les soins que vous suppliez d'obtenir en CHSLD ?

En effet, monsieur le premier ministre, il y en a beaucoup. Et ceux-ci ont déjà plus que le niveau d'infirmier auxiliaire et une formation de préposé aux bénéficiaires à jour. À partir de mai, dès l'officialisation de leur graduation, ils seront des candidats à la profession infirmière et feront les tâches d'infirmières autorisées dans nos milieux en attendant leur examen de l'ordre professionnel en automne.

Savez-vous ce que fait toute cette belle main d'oeuvre pas chère et en santé en ce moment et encore pour les quatre prochaines semaines ?

Elle suit des cours improvisés en ligne trop souvent de mauvaises qualités. Elle fait des travaux compensateurs de stages qui ne compensent en rien l'expérience essentielle d'un stage. Tout cela dans des conditions d'inégalités sociales épouvantables, sans aucune cohérence entre les établissements d'enseignement. De plus, ils n'ont aucune garantie de graduer comme prévu en mai, car leur ordre professionnel (l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec) n'a pas encore validé ou prévu quoi que ce soit d'officiel à leur égard pour leur permettre d'accéder à la profession en début mai comme prévu (en raison de l'annulation du dernier stage de leur formation d'étude supérieure de trois ans).

De plus actuellement, vous exhortez leurs professeurs à les abandonner pour rejoindre les CHSLD, force majeure l'obligeant, menaçant ainsi fortement leur diplomation déjà incertaine.

Monsieur le premier ministre, si la situation est tellement critique et exige maintenant de demander à des médecins spécialistes aux salaires hors de nos moyens, qui n'ont pas les qualifications pour exercer comme infirmiers et infirmières, de venir dans les CHSLD, ne serait-il pas temps de faire comme beaucoup d'autres pays et de vous pencher sur cette question de nos finissants infirmiers ?

Respectueusement, monsieur le premier ministre, vous semblez croire à tort et maladroitement que le travail d'une infirmière est en dessous de celui d'un médecin et non parallèle et complémentaire. Comme si un médecin se devait de maîtriser la formation infirmière avant de devenir un médecin. Comme si un pont existait à l'université après les études d'infirmières pour poursuivre en médecine avec des cours crédités. Malheureusement, en plus d'être dégradante pour la profession infirmière, votre perception est complètement fausse et décalée de la réalité.

Contrairement à vos propos exprimés lors du précédent point de presse, la plupart de nos médecins ne sont pas « surqualifiés » pour ce poste, mais plutôt non formés pour l'exécuter. La plupart ne savent pas faire de prise de sang, poser de cathéter, faire des soins de stomies, des pansements spécialisés, etc., et n'ont pas appris les techniques infirmières qui nécessitent au minimum une formation solide de trois ans combinée à des expériences de stage pour être maîtrisées. Contrairement à nos finissants en soins et sciences infirmières, ils n'ont pour la plupart jamais appris à maîtriser et pratiquer la mobilisation de façon sécuritaire des usagers et les principes du PDSB (principes pour le déplacement sécuritaire des bénéficiaires).

Avec votre plan qui fait bien jaser, vous utilisez l'argent du contribuable, notre argent, pour payer des médecins un prix exorbitant alors qu'ils ne feront au plus que la moitié du travail des infirmières, car, monsieur le premier ministre, n'espérez pas qu'ils pourront en faire beaucoup plus avec leurs précieuses compétences médicales. Pour la très grande majorité, ils ne savent même pas installer et régler une pompe à perfusion intraveineuse.

Et c'est bien normal. Ce n'est pas leur métier, ils ne l'ont pas appris. Leurs compétences indispensables sont ailleurs. Vous ne demanderiez pas à des infirmières de faire le travail des médecins. Eh bien, c'est la même chose. La hiérarchisation des professions de la santé est un préjugé social coriace. S'il vous plait, monsieur le premier ministre, ne nourrissez pas ce préjugé qui est à la base de la rémunération défaillante de nos professionnels de la santé et du manque de reconnaissance de ces précieuses professions au sein du réseau. Ne soyez pas le véhicule de ces fausses croyances d'une autre époque.

Monsieur Legault et toute votre équipe : pour la sécurité de nos bénéficiaires, de nos chers aînés, par souci d'efficacité et pour le respect de la profession infirmière qui n'est pas la base de la profession de médecin, mais bien une profession parallèle à part entière complète et complémentaire à la médecine, et pour ne pas mettre nos précieux médecins dans l'inconfortable position de devoir admettre qu'ils n'ont pas les compétences requises pour remplacer efficacement une infirmière aguerrie, je vous demande de considérer l'option de demander l'aide de nos finissants infirmiers et, dans la foulée, de leur créditer les 3-4 semaines de cours inconsistants et décousus qu'ils doivent actuellement suivre en ligne au lieu de répondre à l'urgence actuellement vitale.

Monsieur Legault, premier ministre du Québec, donnez enfin aux CHSLD la main-d'oeuvre compétente et efficace qu'ils attendent en économisant nos budgets, en limitant nos dépenses et en permettant à nos finissants ainsi qu'à leurs professeurs de mettre à profit leurs compétences infirmières - une profession, une vocation, encore trop peu connue et reconnue.

Cordialement et probablement très maladroitement,

Des finissants infirmiers et infirmières du Québec.

(15 avril 2020)

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Ontario

Les infirmières des soins de longue durée dénoncent les conditions de travail intenables

Le 15 avril, l'Association des infirmières de l'Ontario (ONA) a émis un communiqué de presse pour dénoncer les conditions de travail des infirmières et de tous les travailleurs de la santé des résidences de soins de longue durée, les qualifiant d'« inimaginables ». On y souligne que le personnel de soins de santé exige un accès immédiat à l'équipement de protection individuelle (ÉPI) afin d'arrêter la propagation de la COVID-19 aux résidents vulnérables.

« Comme les médias l'ont indiqué, des douzaines d'établissements de soins de longue durée partout en Ontario annoncent des flambées de la COVID-19 ainsi que des décès, écrit la présidente de l'ONA Vicki McKenna, infirmière licenciée. Nos pensées sont avec les résidents et leurs familles, et avec le personnel qui dispense les soins quotidiennement — et qui par conséquent s'attachent de près à leurs résidents. Nos infirmières et nos travailleurs de la santé dans ce secteur font tout ce qu'ils peuvent alors que des douzaines d'entre eux ont été eux-mêmes infectés. »

On souligne dans le communiqué de presse que les résidences de soins de longue durée souffraient d'une pénurie de personnel avant la pandémie et sont maintenant en état de crise. On y fait valoir que l'ONA exige des changements et des ÉPI pour tous les travailleurs depuis le début de la pandémie et qu'elle va continuer d'exiger des mesures du gouvernement jusqu'à ce qu'il agisse pour protéger les Ontariens parmi les plus vulnérables.

Voici quelques changements revendiqués par l'ONA :

- Un accès immédiat à l'équipement de protection individuelle, y compris des masques N95, lorsque le personnel soigne des résidents soupçonnés ou confirmés d'avoir la COVID-19 — si le personnel n'est pas en sécurité, les résidents ne le seront pas.

- Une stratégie immédiate pour isoler les résidents malades de la COVID-19 des résidents non infectés — ainsi que l'isolement l'un de l'autre des membres du personnel soignant de chacun de ces groupes — afin de prévenir la contamination des ÉPI et réduire la propagation du virus à l'intérieur des résidences de soins de longue durée.

L'ONA revendique aussi depuis quelque temps que les travailleurs à temps partiel et occasionnels dans les résidences de soins de longue durée soient limités à un établissement en augmentant les horaires à temps partiel à ceux des temps pleins ou en remboursant le manque à gagner salarial. La déclaration informe qu'en raison de la pression exercée par les travailleurs de la santé, le gouvernement ontarien a commencé à agir face à leurs revendications.

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Saskatchewan

Les travailleurs annoncent des gains dans la protection des résidents de soins de longue durée

Le 17 avril, le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP) en Saskatchewan a annoncé qu'après plusieurs semaines de pression du SCFP et d'autres syndicats de la santé, le gouvernement de la Saskatchewan a finalement annoncé une politique de port du masque continu pour les travailleurs de la santé, ainsi qu'une transition vers un seul lieu de travail pour les travailleurs en soins aigus et de longue durée.

« Les résidences de soins de longue durée ont été au coeur des flambées importantes de la COVID-19 dans d'autres provinces et représentent la plus grande part des décès attribués au virus, a dit la présidente de la section locale 5430 du SCFP, Sandra Seitz. Le fait d'empêcher qu'un travailleur se retrouve dans plusieurs établissements différents va contribuer à arrêter la propagation de la COVID-19 en limitant le mouvement entre les établissements de soins aux aînés. »

Dans le communiqué, on souligne que la COVID-19 a mis en évidence certains des problèmes les plus graves dans le système de santé : le sous-financement et la pénurie de personnel

« Le personnel de soins de longue durée est insuffisant depuis des années. La COVID-19 a exacerbé ces problèmes, et nos membres travaillent plus souvent qu'autrement en nombre insuffisant, a dit Seitz. Avec des protocoles de distanciation physique pour les résidents dans les salles à manger par exemple et la nécessité d'une hygiène accrue, il est nécessaire d'avoir plus de personnel, pas moins. »

« La politique de port du masque continu est un début, mais le gouvernement doit prendre des mesures pour veiller à ce qu'elle soit mise en oeuvre dans tout le secteur de la santé et dans tous les services communautaires », ajoute-t-elle.

Le communiqué de presse informe aussi que la section 5430 du SCFP a signé une entente de principe qui protègera ses membres lors du redéploiement. L'entente fixe les protections suivantes pour les travailleurs et les résidents :

- Empêcher les travailleurs de travailler dans plusieurs établissements tout en garantissant le maintien de leurs heures.

- Créer un bassin de main-d'oeuvre pour le redéploiement en réponse aux besoins de santé dus à la COVID-19 avec des paramètres clairs qui protègent le public et les travailleurs.

- Pas de nouvelles mises à pied pour la durée de l'entente.

- Les employés redéployés seront protégés de toutes dépenses occasionnées, y compris l'hébergement lorsque nécessaire.

- Tous les employés redéployés recevront une orientation et une formation en fonction de la situation à l'établissement qui les accueille dont une orientation et une formation sur l'équipement de protection individuelle (ÉPI) ainsi que l'accès au dit ÉPI avant de commencer à travailler.

« Nous avons vu une hausse importante de travail précaire dans notre système de santé. Plusieurs de nos membres sont forcés de travailler à différents emplois, dans différentes juridictions, afin d'essayer de travailler l'équivalent d'un travail à temps plein, a dit Sandra Seitz. Cette entente de principe va offrir une certaine protection à nos membres qui vivent des changements dans leur environnement de travail en raison de la COVID-19. »

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Colombie-Britannique

Les conditions des travailleurs
de la santé et des personnes âgées

Au 22 avril, il y avait 19 éclosions dans des établissements de soins de longue durée et de vie assistée en Colombie-Britannique et les travailleurs prennent des mesures dans toute la province pour prévenir d'autres éclosions. Cela ne concerne pas seulement la vulnérabilité des aînés qui vivent dans ces résidences. Depuis des décennies, les travailleurs et les familles des résidents sonnent l'alarme sur les conditions dans les foyers de soins de longue durée et les foyers d'aide, en particulier ceux qui sont dans le privé. Les conditions « normales » sont caractérisées par le non-remplacement des travailleurs absents, des heures supplémentaires excessives et des milliers d'heures de travail non rémunérées effectuées par les visiteurs et les bénévoles. La perte soudaine de l'apport des membres de la famille et de bénévoles pendant la pandémie a encore aggravé la situation. Les travailleurs en soins de longue durée s'expriment pour faire savoir ce dont ils ont besoin pour faire leur travail en toute sécurité, pour protéger leurs résidents, leurs familles, leurs communautés et eux-mêmes.

Forum ouvrier a interviewé Rhonda Bruce, une travailleuse de première ligne en soins de longue durée en Colombie-Britannique. Elle est assistante en réadaptation et membre de l'exécutif provincial du Syndicat des employés d'hôpitaux de la Colombie-Britannique (HEU).

Forum ouvrier : Quelles mesures ont été prises dans vos lieux de travail pour faire face à la COVID-19 ?

Rhonda Bruce : Ce qu'ils ont fait dans les hôpitaux, c'est qu'ils ont renvoyé de nombreux patients chez eux et fait des préparatifs pour prendre soin des patients atteints de la COVID-19. De nombreux hôpitaux sont utilisés à moins de 50 % de leur capacité. Certains établissements de soins de longue durée ont des éclosions de rhume ou de grippe. Ce qui a changé, c'est qu'avant une épidémie, il devait y avoir trois résidents présentant des symptômes pendant trois jours pour déclarer une épidémie et maintenant s'ils ont un résident avec un rhume, ils ferment l'établissement aux visiteurs et introduisent des mesures spéciales de contrôle des infections. De nombreux sites de la province ont été déclarés en situation d'épidémie parce que c'est la saison du rhume et de la grippe. Dès que quelqu'un a froid, on ferme les portes, ce qui signifie qu'il n'y a plus de programme de loisirs. De nombreux sites ont des salles à manger centrales qui sont généralement assez bondées. La plupart des résidents mangent dans les salles à manger, mais sont séparés lorsqu'une épidémie est déclarée. Au lieu de manger dans une salle à manger, les résidents mangent dans leur chambre ou ailleurs. Même avec le personnel de loisirs et autre redéployé pour aider, il n'y a pas assez de personnel pour cela ou pour le nettoyage supplémentaire qui est nécessaire, etc. Les programmes de loisirs n'ont pas lieu. Les gens doivent également organiser des appels vidéo avec la famille avec les résidents afin qu'ils puissent voir leur famille car aucun visiteur ne vient.

FO : Vous êtes donc en mode préparatoire pour la COVID-19. Les travailleurs ont-ils ce dont ils ont besoin ?

RB : Nous avons des problèmes à certains endroits. Le ministère de la Santé a déclaré qu'il allait s'occuper de tous nos travailleurs qui ont besoin des services de garde mais cela ne se fait pas toujours. Je connais le cas d'une jeune mère qui a un enfant en bas âge et pas de garderie. Elle a essayé d'obtenir un congé spécial. Nous avons prévu un congé spécial dans notre convention collective et cette travailleuse dispose d'une banque de congés spéciaux. Ils ont refusé de le lui accorder. Elle a eu quatre jours où elle n'a pas eu de membre de sa famille pour l'aider à s'occuper de ses enfants parce que son service de garde a été annulé. C'est stressant chaque jour pour les parents de jeunes enfants. Ensuite, bien sûr, il y a beaucoup de notes de service des autorités sanitaires et les gestionnaires donnent différentes interprétations des notes de service et donnent parfois des instructions erronées aux travailleurs concernant l'équipement de protection individuelle (ÉPI). La semaine dernière, un travailleur en diététique dans l'un des foyers de soins de longue durée a déclaré qu'on lui avait dit de changer de gants après chaque service auprès d'un patient. La personne qui offre ce service a des gants et ne touche jamais le résident, donc cela n'a aucun sens et ils vont simplement gaspiller les ÉPI et ne pourront pas les avoir quand ils sont vraiment nécessaires. Ce protocole s'applique au personnel qui nourrit les résidents, qui doit bien sûr changer de gants et se laver les mains entre chaque résident.

De nombreux hôpitaux et établissements de soins de longue durée partagent entre eux des employés occasionnels et ont un groupe flottant de personnel - des travailleurs qui se rendent dans différentes zones de l'hôpital ou de la résidence ou même entre les établissements selon les besoins. Il y a eu récemment le cas d'une infirmière qui effectuait un travail de première ligne - triage de première intervention dans un service d'urgence - qui, le lendemain, est allée travailler dans un établissement de soins de longue durée. C'est jouer avec le feu. Si cette infirmière est la première personne à s'occuper d'un patient chez qui elle découvre la COVID-19 et qui devient infecté, elle l'apportera directement aux personnes âgées vulnérables du foyer de soins de longue durée. Jusqu'à présent, bien que la province ait limité le mouvement du personnel entre les établissements de soins de longue durée, il n'y a aucune restriction quant au déplacement du personnel entre les hôpitaux, les foyers de groupe et les soins de longue durée.

FO : Quelle était la situation avant la pandémie de la COVID-19 et les mesures pour s'y préparer ?

RB : Dans toute la Colombie-Britannique, les travailleurs doivent faire des heures supplémentaires pour presque chaque quart de travail parce qu'il n'y a pas assez de personnel. Il n'y a jamais eu assez de personnel. Nous avons beaucoup de travailleurs occasionnels et la plupart d'entre eux veulent du travail à temps plein. Ils doivent travailler dans trois ou quatre endroits, où ils peuvent obtenir leurs heures, car ils ont besoin de gagner leur vie.

FO : Quelle est la raison pour laquelle plus de postes à temps plein et à temps partiel ne sont pas créés ?

RB : Parce que l'employeur économise sur les avantages sociaux. Les occasionnels n'ont aucun avantage social. Très souvent, les gens prennent des postes à temps partiel, qui ont des avantages sociaux, puis ils acceptent plus de travail. Tous les établissements de soins de longue durée ne sont pas couverts par la convention collective de la Facilities Bargaining Association (FBA), où des salaires et des avantages sociaux selon les normes de l'industrie sont en place, en vertu d'une convention-cadre pour la province. Il existe d'autres centres de soins de longue durée dans la région qui sont privés et où les salaires sont inférieurs. Dans les sites exploités par le secteur privé à but lucratif où les salaires sont bien inférieurs à ceux de l'entente sur les établissements, les travailleurs font de leur mieux pour trouver un emploi ailleurs. Ils peuvent même travailler à temps plein mais s'ils obtiennent un emploi dans un centre couvert par la FBA, ils partiront. Il y a toujours beaucoup de travailleurs qui quittent ces sites lorsqu'ils trouvent du travail dans un site couvert par la convention collective de la FBA.

FO : Qu'est-ce que le syndicat revendique?

RB : Il y a des choses qui peuvent être faites en ce moment. Les travailleurs qui en ont besoin devraient pouvoir utiliser leur banque de congés spéciaux. Nos employeurs pourraient s'assurer que nous ayons des repas, du café de temps en temps, un financement accru pour les uniformes et les chaussures en raison des nouvelles règles, des vestiaires appropriés. Les gens qui ne sont pas en première ligne ne comprennent pas ce que cela signifie dans la situation dans laquelle nous nous trouvons. Nous travaillons au bord du précipice depuis si longtemps et cette situation est encore pire, nous avons donc besoin de soutien et les employeurs doivent nous écouter. Nous voulons tous faire cesser cela. Nous sommes tous engagés envers les résidents dont nous prenons soin. Notre convention collective est respectée. Le syndicat plaide vraiment pour nous. En tant que cadre supérieur provincial du HEU en première ligne, j'ai encore du travail à faire. Je passe la majeure partie de ma journée à faire de la santé-sécurité au travail, à donner de la formation sur les ÉPI, etc. et à répondre constamment aux questions. Mon supérieur travaille avec moi. Je ne peux pas imaginer ce que c'est pour les travailleurs de l'Ontario et du Québec où les conventions collectives ne sont pas respectées. Comment pouvez-vous faire un effort supplémentaire dans ces conditions ?

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