Les travailleurs d'hôpitaux en grève en Alberta forcés de retourner au travail

Il faut abolir les pouvoirs illimités de la Commission des relations de travail de l'Alberta

Le lundi 26 octobre, les travailleurs d'hôpitaux, membres du Syndicat des employés provinciaux de l'Alberta (AUPE), ont déclenché une grève. Selon l'AUPE, les débrayages ont eu lieu dans près de 39 villes et municipalités et dans 49 endroits de travail en Alberta. En fin de soirée lundi, la Commission des relations de travail de l'Alberta (ALRB) a ordonné aux travailleurs de l'AUPE de retourner au travail, invoquant que leur action contrevenait au Code des relations de travail de l'Alberta. La vitesse à laquelle la décision a été prise contraste avec la lenteur des procédures lors des griefs des employés. [1]

Le Code des relations de travail de l'Alberta perpétue l'existence de la toute puissante ALRB. En vertu du code, tous les conflits de travail échappent à la compétence des tribunaux publics et les décisions sont prises par la Commission qui est composée de personnes nommées par le gouvernement.

Le but de l'ALRB est d'uniformiser et d'accélérer le règlement des conflits de travail afin d'établir une « paix industrielle » pour que les riches puissent continuer d'être payés sans interruption. À cette fin, l'ALRB a été dotée de vastes pouvoirs dictatoriaux. Elle peut mener des enquêtes et des audiences, émettre des ordonnances et des directives, faire des règlements, déterminer quels syndicats peuvent représenter quels travailleurs, décider quand une convention collective est en vigueur, exiger la production de dossiers et de documents et que des déclarations soient fournies, entrer dans les locaux des syndicats et les inspecter, interroger des employés, imposer des restrictions au piquetage, imposer des amendes, décertifier des syndicats, etc. La Commission a toutes les allures d'une instance législative qui fabrique ses propres règles comme bon lui semble.

On prétend que l'ALRB, qui est composée de 45 membres, est neutre et « équitable » envers les travailleurs parce que des syndicalistes en font partie (des membres de l'AUPE y siègent). Cependant, les représentants syndicaux à l'ALRB n'ont aucune indépendance et ne peuvent qu'appliquer les statuts du code. Ils n'ont aucun pouvoir de proposer ou d'amender des lois pour les rendre favorables aux travailleurs.

La Loi 32 antiouvrière, appelée Loi de 2020 sur la restauration de l'équilibre dans les endroits de travail en Alberta, a éliminé le pouvoir discrétionnaire de l'ALRB en ce qui concerne le dépôt devant un  tribunal d'une ordonnance au sujet d'une « grève ou d'un lockout illégaux ». La Commission est maintenant obligée de déposer l'ordonnance devant la cour à la requête d'une partie, qui, dans ce cas, serait les Services de santé de l'Alberta. Une fois déposée, l'ordonnance est exécutoire en tant que jugement ou ordonnance de la cour, ce qui signifie que ne pas se conformer à l'ordonnance peut être considéré comme un outrage au tribunal.

Une analyse objective du Code des relations de travail de l'Alberta démontre que les travailleurs ne peuvent pas s'appuyer sur les lois ou les commissions gouvernementales pour défendre leurs intérêts. Le code est un exemple du fait que les employeurs ont tout le pouvoir de l'État de leur côté tandis que la seule arme des travailleurs est la force de leur nombre et de leur organisation, comme l'ont démontré les actions du 26 octobre. Le gouvernement a peut-être réussi à imposer sa « règle de droit » au moyen de la décision de la commission qui devient automatiquement une décision des tribunaux. Mais le gouvernement n'a pas remporté une victoire devant le tribunal de l'opinion publique. Dans toute l'Alberta, un vaste appui et une vaste solidarité ont été exprimés pour les travailleurs d'hôpitaux. Les gens prennent la parole pour dénoncer le gouvernement et disent qu'utiliser la pandémie comme prétexte pour attaquer les travailleurs de cette façon est quelque chose d'entièrement méprisable.

Les travailleurs doivent bâtir leur propre opposition puissante sur la base de leur propre pensée, perspective et programme afin de défendre leurs propres droits et les droits de tous.

Note

1. Par exemple, en mai 2020, la section locale 401 des Travailleurs unis de l'alimentation et du commerce a demandé que la Commission des relations de travail de l'Alberta (ALRB) tienne une audience d'urgence et a requis des « mesures provisoires », soulignant le préjudice irréparable qui serait causé si les travailleurs devaient retourner au travail sans que leur syndicat puisse déterminer s'ils pouvaient le faire en toute sécurité. Forum ouvrier avait alors souligné:

« Il est difficile d'imaginer une situation plus lourde de dangers ou de dommages irréparables avec la moitié des travailleurs déjà atteints de la COVID-19, la mort d'une travailleuse et proche collègue, et d'autres qui sont gravement malades à l'hôpital, certains aux soins intensifs. Malgré l'urgence manifeste de l'affaire et une situation où 85 % des travailleurs avaient indiqué qu'ils pensaient qu'il n'était pas sécuritaire de travailler, l'ALRB a fixé la date de l'audience au 7 mai, trois jours après la réouverture de l'usine, et a nommé un médiateur pour rencontrer les parties durant la fin de semaine. » (Forum ouvrier, numéro du 7 mai 2020)


(Photos: FO, AUPE, Friends of Medicare)


Cet article est paru dans

Numéro 74 - Numéro 74 - 29 octobre 2020

Lien de l'article:
Les travailleurs d'hôpitaux en grève en Alberta forcés de retourner au travail: Il faut abolir les pouvoirs illimités de la Commission des relations de travail de l'Alberta - Dougal MacDonald


    

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