Colombie-Britannique

Les Travailleurs unis de l'alimentation et du commerce et les associations de taxis entament une poursuite judiciaire contre Uber et Lyft

Uber et Lyft sont de gigantesques sociétés multinationales de transport de personnes par covoiturage qui ont demandé des permis du Conseil de transport de passagers (PTB) afin d'exercer leurs activités en Colombie-Britannique. Uber, fondé en 2009 aux États-Unis, a déployé ses activités partout dans le monde. Son modèle d'affaire, tel que décrit dans Le Marxiste-Léniniste, vise à « détruire l'industrie du taxi et non à coexister avec elle. Il est conçu pour s'attaquer aux travailleurs sans emploi ou sous-employés, pour abaisser le niveau de vie de tous les chauffeurs et les normes de services d'une industrie réglementée et pour s'accaparer la valeur et la retirer de l'économie locale. »[1]

Dans le but de mettre un frein aux pratiques d'exploitation de ces deux sociétés, les Travailleurs unis de l'alimentation et du commerce (TUAC) et l'Association de taxis de Vancouver (ATV) ont déposé  des requêtes juridiques auprès de la Commission des relations de travail et du Conseil de transport de passagers (PTB) pour forcer Uber et Lyft à respecter les mêmes règlements que les autres compagnies de taxis en Colombie-Britannique doivent respecter. Des associations de taxis dans d'autres régions de la province ont entrepris des actions semblables.

Poursuite judiciaire des TUAC

Le 27 novembre, la section locale 1518 des TUAC a soumis une requête à la Commission des relations de travail à Vancouver pour que celle-ci décrète que les chauffeurs de Lyft et d'Uber sont des employés en vertu du Code des relations de travail de la Colombie-Britannique et qu'en vertu de ces règlements ils ont droit à des protections au même titre que les autres travailleurs de la Colombie-Britannique. (Uber et Lyft prétendent que leurs chauffeurs ne sont pas des employés mais des travailleurs autonomes). Les TUAC affirment aussi que Lyft et Uber contreviennent à des articles du code en exigeant de leurs chauffeurs qu'ils concluent un accord selon lequel ils ne seraient pas des employés et en exigeant d'eux qu'ils acceptent que « toute allégation d'une relation employeur-employé entre la compagnie et le chauffeur soit réglée par voie d'arbitrage commercial ». Ceci, soulignent les TUAC, n'est qu'une tentative de contourner les protections prévues par le code ».

Poursuite judiciaire par l'Association des taxis de Vancouver

L'Association des taxis de Vancouver (ATV) a entamé une poursuite judiciaire le 28 novembre auprès du Conseil de transport de passagers à Victoria, déclarant qu'en raison des conditions illégales imposées par Uber et Lyft à leurs chauffeurs potentiels, le Conseil ne devrait pas traiter les demandes de ces compagnies de transport de personnes par covoiturage jusqu'à ce que la question soit résolue. Entretemps, écrit l'ATV, celle-ci ne s'oppose pas à ce que le PTB émette des permis de transport de personnes par covoiturage  à d'autres demandeurs en décembre, car « aucun d'entre eux ne tente d'imposer des conditions à leurs chauffeurs qui entraveraient leur capacité de se protéger collectivement de modalités et de conditions d'emploi abusives ».

En septembre, l'ATV a demandé un contrôle judiciaire de la décision du PTB de soustraire les compagnies de transport de personnes par covoiturage aux règlements que sont tenues de respecter les compagnies de taxis actuelles : les décisions du Conseil ont fait en sorte que le nombre d'automobiles de ces compagnies est illimité, que les tarifs de ces compagnies ne sont pas plafonnés, et que leurs zones de transport régionaux sont plus étendues que celles des compagnies de taxi existantes.

La situation à laquelle font face les chauffeurs de taxi va aller en se dégradant si rien n'est fait pour arrêter Uber et Lyft.

Forum ouvrier a interviewé Kulwant Sahota, un porte-parole de l'Association des taxis de Vancouver. Il a dit que la Société d'assurance de la Colombie-Britannique a une entente avec Uber et Lyft selon laquelle ces dernières ne paient qu'une fraction de ce que paient les compagnies comme Yellow Cab pour assurer leurs véhicules. Uber et Lyft ne paieraient que 19 cents le kilomètre, tandis qu'un chauffeur de taxi standard doit payer 40 000 dollars par année pour ses assurances. Il a dit que l'ATV ne s'oppose pas aux autres compagnies locales de transport de personnes par covoiturage car celles-ci pourraient prêter main forte aux compagnies de taxi actuelles en étant sur la route aux heures de pointe. Cela serait avantageux pour tout le monde dans la vallée du Bas-Fraser, a-t-il ajouté, les passagers autant que les chauffeurs, en autant que les mêmes règlements s'appliquent à tout le monde pour ce qui est des tarifs, du nombre de véhicules sur la route et du coût des assurances.

Sahota a dit qu'il conduit des taxis pour Yellow Cab depuis 25 ans, et qu'il a passé 17 de ces années sur le quart de nuit. Il a dit qu'il était heureux de la récente lutte victorieuse des travailleurs du transport en commun et souligné que certains travailleurs du transport en commun étaient aussi des chauffeurs de taxi à temps partiel.

Il a expliqué que si Uber et Lyft bénéficient de permis en Colombie-Britannique auxquels ils imposent leurs propres termes, les conditions des chauffeurs de taxi de Vancouver et des chauffeurs de compagnies de transport de personnes par covoiturage vont devenir intenables. Les permis octroyés à ces compagnies, a-t-il dit, doivent être basés sur les mêmes modalités qui sont imposées aux compagnies de taxi actuelles. D'autres compagnies de covoiturage qui ont demandé des permis du Conseil ont accepté de se plier aux mêmes conditions. « Pourquoi en serait-il autrement pour Uber et Lyft ? » a-t-il demandé. Il a souligné qu'Uber « fait des affaires partout dans le monde et a des milliards de dollars à sa disposition. Si Uber n'est pas limité par un plafonnement des prix, il peut offrir un tarif beaucoup plus bas, ce qui mènera à l'élimination de toutes les compagnies de taxi existantes de la ville. À ce moment-là, il pourra exiger le tarif qu'il voudra et rémunérer les chauffeurs selon son bon vouloir. »

Tel que mentionné dans Le Marxiste-Léniniste, le modèle Uber se résume à s'accaparer la valeur des travailleurs qui la produisent et de leurs communautés. Partout où Uber est actif, le travail est à temps partiel et précaire, les salaires sont bien inférieurs à ce qui a été établi comme standard canadien, les revenus ne sont pas garantis, les heures de travail sont irrégulières, les avantages sociaux, les régimes de retraite et la protection par la commission d'indemnisation des travailleurs inexistants. Il s'agit de la façon néolibérale, à laquelle on attribue l'expression trompeuse d' « économie de partage  ».

La nécessité de restreindre le droit de monopole
et de défendre les droits de tous !

Un grand nombre d'organisations de la Colombie-Britannique s'opposent à l'invasion, par ces sociétés géantes de transport de personnes par covoiturage, de l'économie de la province. On doit rappeler au gouvernement provincial et aux conseils municipaux qu'ils ont le devoir de protéger les travailleurs et le peuple des pratiques destructrices de ces monopoles et ne doivent pas collaborer avec eux. La classe ouvrière et ses alliés dans tous les secteurs doivent appuyer la démarche juridique du TUAC et des associations de taxis afin de limiter le droit d'Uber et de Lyft d'agir illégalement pour perturber l'industrie du taxi en Colombie-Britannique. Une attaque contre un est une attaque contre tous ! Appuyons les poursuites judiciaires contre Uber et Lyft, et mettons tout en oeuvre pour développer le mouvement des travailleurs pour qu'il se dresse en opposition solide à la destruction néolibérale de sociétés comme celles-là !

Note

1. « Des restrictions pour le monopole Uber ! Défendons les droits de tous les travailleurs ! Notre sécurité est dans la défense des droits de tous ! », Le Marxiste-Léniniste, 12 février 2016


Cet article est paru dans

Numéro 28 - 4 décembre 2019

Lien de l'article:
Colombie-Britannique: Les Travailleurs unis de l'alimentation et du commerce et les associations de taxis entament une poursuite judiciaire contre Uber et Lyft - Anne Jamieson


    

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