Le premier ministre du Québec
demande aux travailleurs d'ABI
de faire de nouvelles concessions
Tous à la défense des droits et de la
dignité des travailleurs d'ABI
Le 1er avril, le premier ministre François
Legault a
rencontré séparément les représentants des
travailleurs en
lockout de Bécancour et ceux de la direction d'Alcoa, dont le
président de sa division d'aluminium venu directement de
Pittsburgh. Il a affiché le tweet suivant à la suite de
ces
rencontres :
« Rencontres avec le président du syndicat
d'ABI de Bécancour
et avec le président d'Alcoa, propriétaire principal
d'ABI. ABI
est en conflit de travail depuis 15 mois. La direction offre un
salaire moyen de 92 000 $ par année aux 900 employés. Le
syndicat
doit faire des compromis. »
Le syndicat et la direction n'ont jamais parlé
des salaires comme étant une question en litige en ce moment.
L'enjeu principal est l'objectif d'Alcoa de détruire toute norme
négociée en ce qui a trait au régime de retraite
et aux conditions de travail, en particulier le droit des travailleurs
de préserver les emplois syndiqués plutôt que d'en
perdre une grande partie à la sous-traitance selon la vision
néolibérale de la flexibilité et de la concurrence
mondiale. Alcoa cherche à détruire toute présence
organisée des travailleurs à la défense de leurs
droits et de ceux qui les remplacent quand ils partent à la
retraite.
Le président de la section locale 9700 du
Syndicat des
Métallos, Clément Masse, a dit que le syndicat a
présenté
clairement sa cause au premier ministre et qu'il n'a jamais
mentionné les salaires comme une question en litige. Le premier
ministre n'a pas parlé des salaires lui non plus avec le
syndicat
ou de compromis à faire avec la compagnie. Malgré cela,
le
premier ministre a affiché son tweet et a déclaré
à la presse que
le syndicat n'était pas raisonnable et que des emplois à
92 000
dollars par année pourraient bien disparaître.
C'est inadmissible de la part du premier ministre de
chercher
à discréditer les justes positions du syndicat pour
adopter la
méthode de provocation et le diktat pour des concessions de
l'oligopole étranger. Cela crée un
déséquilibre encore plus grand
entre les oligarques mondiaux d'Alcoa et les travailleurs et
renforce le diktat de la compagnie au lieu de créer la
possibilité de tenir des négociations. Cela
démontre la situation
difficile dans laquelle se trouvent les travailleurs d'ABI, la
communauté, le Québec et, plus largement, les
travailleurs du
Canada et dans le monde.
En faisant ses commentaires sur les salaires, qu'il
espère que les travailleurs au salaire minimum vont comparer
avec
ce qu'ils gagnent, le premier ministre du Québec essaie de miner
le grand mouvement d'appui aux travailleurs d'ABI et de
déformer les enjeux du conflit. Sa déclaration absurde
sur les
salaires chez ABI, qui sont essentiellement les mêmes salaires
qu'on retrouve dans les autres alumineries du Québec et du
Canada, n'a rien à voir avec le conflit actuel et constitue une
abdication de sa responsabilité de guider les deux parties vers
une résolution du conflit mutuellement avantageuse.
Le pragmatisme néolibéral requiert que
toutes les normes
soient détruites au nom de la flexibilité et de la
concurrence.
Alcoa veut transformer les conditions dans lesquelles la
compagnie engage et utilise et déploie les travailleurs, sans
être limitée par des ententes ayant une portée
légale et ayant
été négociées et approuvées par les
travailleurs. Qu'on pense par
exemple au protocole de retour au travail qu'Alcoa voulait dicter
aux travailleurs et que ceux-ci ont massivement rejeté en
assemblée générale le 11 mars dernier. Non
seulement ce
protocole étendait-il officiellement sur 10 mois la
période
pendant laquelle les travailleurs allaient rentrer au travail,
mais il pouvait être suspendu ou même annulé par
l'entreprise si
elle le jugeait bon, selon des critères qu'elle-même
invoquerait
quand elle le voudrait. Autrement dit, il n'y avait pas de
véritable protocole de retour au travail, seulement un diktat de
la compagnie. Le conflit aurait été déclaré
terminé, et les
travailleurs théoriquement rappelés au travail, mais en
fait ils
pouvaient ne pas être rappelés du tout, sans parler du
fait que
pendant tout ce temps les cadres et les sous-traitants allaient
faire leur travail comme s'il n'existait pas de main-d'oeuvre
syndiquée protégée par des normes légales
et une convention
collective.
Alcoa a obtenu des arrangements semblables dans
l'État de
l'Australie occidentale. Le tribunal australien des relations de
travail (le Fair Work Commission) a accueilli favorablement la
demande d'Alcoa de mettre fin à la convention collective de 1
500
travailleurs sous prétexte qu'elle n'assurait pas à la
compagnie
la « flexibilité » néolibérale requise
pour être compétitive sur
les marchés mondiaux. Le syndicat et la convention collective de
ces travailleurs ont été déclarés nuls et
non avenus et ces
travailleurs travaillent maintenant selon les seules normes
minimales en vigueur dans les lois du travail en Australie, sans
une protection organisée sous leur contrôle.[1] La position
dominante qu'occupe Alcoa dans ce
secteur à l'échelle mondiale lui permet de fermer
certaines
installations tout en maintenant sa production à partir d'autres
installations, afin d'imposer son diktat, lequel est renforcé
par
les gouvernements néolibéraux qui servent ses
intérêts
privés.
Alcoa essaie de justifier son refus total de
négocier avec
les travailleurs d'ABI et leur syndicat, et ses demandes de
concessions dans les conditions de travail et le rôle du syndicat
au nom de la flexibilité et de la concurrence que le premier
ministre vient maintenant d'appuyer publiquement.
L'intervention du premier ministre Legault ne doit pas
passer. Elle place le peuple dans une position intenable d'absence de
contrôle sur ses ressources et de voix au chapitre sur la
direction de l'économie, ce qui, en dernière analyse,
signifie toutes les affaires politiques. Elle place le gouvernement et
les pouvoirs de police de l'État au service de l'oligarchie
financière mondiale, en opposition aux droits et au
bien-être du peuple.
Cette voie de pouvoir sans restriction de ces oligopoles
et de leur dictature économique et politique n'est pas
acceptable. Les travailleurs, les jeunes et les étudiants du
Québec et du Canada appuient la lutte des travailleurs d'ABI
à la défense de leurs droits et de leur dignité.
Cette lutte et son résultat auront de grandes
répercussions sur le peuple et la direction du pays.
Note
1. Lire « La
résiliation 'légale' des conventions collectives -
l'exemple
australien », Pierre Chénier, dans le numéro du
28
février 2019
de Forum ouvrier.
(Photos: Chantier politique, Syndicat
des Métallos)
Cet article est paru dans
Numéro 11
- 4 avril 2019
Lien de l'article:
Le
premier ministre du Québec
demande aux travailleurs d'ABI : Tous à la défense des
droits et de la dignité des travailleurs d'ABI
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