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1er juin 2017

Le gouvernement du Québec adopte une loi spéciale pour briser
la grève des travailleurs de la construction

Intensifions la lutte à la défense des
droits des travailleurs et des
droits de tous

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Manifestation des travailleurs de la construction devant l'Assemblée nationale
à Québec le 29 mai 2017 (FTQ)

Le gouvernement du Québec adopte une loi spéciale pour briser la grève des travailleurs de la construction
Intensifions la lutte à la défense des droits des travailleurs et des droits de tous
Ingérence de l'État en faveur des employeurs
Trouver des solutions pratiques, des mécanismes qui permettent aux travailleurs d'exercer leurs droits sans répression de l'État - Richard Goyette, avocat en droit social et ancien directeur-général de la FTQ-Construction

Les conséquences de la guerre commerciale pour l'industrie forestière
L'empire américain s'empare de Tembec Inc.
Concentration de la richesse sociale et du contrôle dans le secteur forestier


Le gouvernement du Québec adopte une loi spéciale pour briser
la grève des travailleurs de la construction

Intensifions la lutte à la défense des droits des travailleurs et des droits de tous


À l'Assemblée nationale à Québec le 29 mai 2017

À trois heures du matin le 30 mai, le gouvernement du Québec a adopté une loi spéciale qui brise la juste grève des travailleurs de la construction. La loi 142, Loi assurant la reprise des travaux dans l'industrie de la construction ainsi que le règlement des différends pour le renouvellement des conventions collectives, a été adoptée par un vote de 76-21. Les députés du Parti libéral et de la CAQ ont voté en sa faveur, alors que les députés du Parti québécois, qui a lui-même adopté une loi spéciale de retour au travail contre les travailleurs de la construction en 2013, et les députés de Québec solidaire ont voté contre.

Les travailleurs de la construction ont vivement protesté contre l'adoption de la loi le jour même de son dépôt devant l'Assemblée nationale avec des pancartes et slogans qui dénonçaient la dictature qui tient lieu de relations de travail. L'Alliance syndicale de la construction a annoncé qu'elle étudie les recours pour contester la loi en cour comme étant inconstitutionnelle. De nombreux syndicats ont dénoncé la loi, la déclarant une attaque inacceptable et illégale au droit des travailleurs de se battre pour leurs demandes et de négocier leurs conditions.

La loi a imposé le retour au travail de tous les travailleurs de la construction le 31 mai, sous peine d'amendes sévères pour les travailleurs individuels, représentants syndicaux et syndicats qui continueraient la grève ou feraient des ralentissements de travail sur les chantiers. Elle décrète une augmentation de salaire de 1,8 % jusqu'à ce qu'une nouvelle convention survienne, ce qui est bien en dessous des demandes syndicales et même en dessous de la dernière offre patronale. La loi créée un frauduleux « espace de négociation », qui est nié en essence même par la loi briseur de grève et le fait que les travailleurs se voient retirer la possibilité légale de faire la grève et de mener toute action sur les chantiers pour faire quelque pression que ce soit sur les employeurs. L'« espace de négociation » impose en fait la médiation puis l'arbitrage où la ministre se voit donner le pouvoir de déterminer elle-même les matières qui seront soumises à l'arbitre et où elle fixe par la loi les critères de la décision de l'arbitre. Ceux-ci comprennent la soi-disant « flexibilité de l'organisation du travail », un euphémisme pour la déstabilisation encore plus grande des horaires de travail et de la vie des travailleurs de la construction. La lutte contre cette déstabilisation était au centre de la grève des travailleurs de la construction et c'est ce que le gouvernement vient briser.

Les porte-paroles du gouvernement Couillard y sont allés de toutes les insultes possibles contre les travailleurs de la construction pendant le soi-disant débat à l'Assemblée nationale, déclarant que leur grève à la défense de leurs droits cause un « préjudice social » à la population et même aux sinistrés des inondations qui attendent leur nouveau logement. Cette tentative méprisable de dresser la population contre les travailleurs de la construction luttant pour des conditions qui répondent à leurs besoins en santé et sécurité et tranquilité d'esprit au travail et stabilité dans leur vie est inacceptable et ne doit pas passer. C'est aussi une façon méprisable de détourner l'attention de la responsabilité gouvernementale dans ces sinistres par manque notamment d'actions préventives et par insistance sur la privatisation des services gouvernementaux qui abandonne à eux-mêmes les intervenants d'urgence.

Ce frauduleux débat parlementaire a été aussi l'occasion de déclarer qu'il faut « réformer le régime de négociation » des travailleurs de la construction, ce qui veut dire préparer une réforme de la loi pour y incorporer l'interdiction de la grève dans la construction en l'entourant d'un « espace de négociation » sous la conduite de l'État qui la rend illégale ou impossible. Le gouvernement utilise cette loi spéciale comme loi de transition pour rendre à toute fin pratique illégale toute lutte effective des travailleurs de la construction pour négocier leurs conditions et avoir leur mot décisif à dire et un contrôle sur leurs conditions de travail et leur vie. Cela ne doit pas passer.

Les attaques de l'État contre les droits des travailleurs et les droits de tous s'intensifient pour soumettre les travailleurs et le peuple au diktat des oligopoles privés. La lutte pour les droits des travailleurs et de tous s'intensifie elle aussi en défendant tous ensemble ceux qui sont attaqués et en privant l'élite dominante de son pouvoir de priver le peuple de ses droits.

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Ingérence de l'État en faveur des employeurs


  Montréal le 24 mai 2017

Même avant que les travailleurs de la construction débutent leur grève le 24 mai, le gouvernement Couillard a dit qu'il allait passer une loi spéciale de retour au travail dès les premiers jours de la grève. Pourquoi les organisations qui représentent les employeurs négocieraient-elles quand elles savent que la grève va être déclarée illégale ? Si le pouvoir légal des travailleurs, déjà fortement réglementé par l'État, de retirer leur force de travail pour gagner leurs demandes ou faire échec à des concessions qu'ils jugent inacceptables est condamné à l'avance par la certitude d'une loi spéciale, quelle pression les travailleurs peuvent-ils exercer à la table de négociation ?

Selon l'Alliance syndicale qui représente les cinq syndicats de la construction, l'Association de la construction du Québec avait retiré ses demandes de plages-horaires plus étendues et d'horaires variables et de samedis de travail à temps simple en échange de retraits de la part de l'Alliance de demandes importantes comme celle d'une mesure de sécurité d'emploi dans la construction. Deux jours avant le dépôt de la loi, elle a tout de suite remis sa demande sur la table selon l'Alliance.

La grève est censée dans le régime actuel être un moment où les travailleurs et les employeurs s'infligent un dommage économique qui les pousse à négocier pour en arriver à une entente. Le gouvernement du Québec a déjà décidé que les travailleurs de la construction n'ont pas le droit d'infliger le dommage économique prévu par la loi parce qu'ils travaillent pour le public, un argument qui est utilisé uniquement pour attaquer les travailleurs et nier leurs droits. La loi de criminalisation de la grève des travailleurs devient la seule option et les travailleurs se trouvent cernés de toutes parts. Pourquoi alors les organisations d'employeurs négocieraient-elles avec les travailleurs de la construction ?

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Trouver des solutions pratiques, des mécanismes
qui permettent aux travailleurs d'exercer leurs
droits sans répression de l'État


Piquetage des travailleurs de la construction à Montréal le 24 mai 2017

Forum ouvrier reproduit ci-dessous des extraits de l'intervention qu'a faite Richard Goyette lors de la conférence organisée par le Parti marxiste-léniniste du Québec le 7 mai sur le thème : « Pour une constitution moderne qui investit le peuple et non la couronne du pouvoir décisionnel ». Il y explique comment l'État utilise ses institutions pour s'assurer que les travailleurs ne puissent pas agir à la défense de leurs droits tels la santé et la sécurité sur les chantiers.

***

Dans la constitution, on le sait, cela date de Montesquieu, la division des pouvoirs, le législatif, le judiciaire, l'exécutif, tout le monde connaît cela. Mais de quelle façon cela agit, de quelle façon a-t-on l'idée que c'est moderne ? Prenons l'exemple des chartes, très rapidement, pour les syndicats. Les chartes garantissent le droit d'association mais les grosses corporations se déguisent, prennent des cas de travailleurs et plaident du côté d'un individu qui dit le droit d'association cela comprend aussi le droit de la dissociation. Donc parce que la liberté est grande au Canada et que chaque citoyen peut faire ce qu'il veut, il a donc le droit de détruire son syndicat ou son association. Or, d'idées qui semblent modernes, égalitaires, intéressantes, on s'en sert comme des armes au profit de qui ? Pas besoin de répondre.

Criminalisation du droit de refus

En santé-sécurité, on ne va pas demander du salaire mais on va demander à des gens de vivre. Alors récemment, on a fait exercer des droits de refus par des travailleurs de la construction. Vous savez encore, avec 5 % de la main-d'oeuvre on a 25 % des décès, le plus haut taux d'accidents et on fait exercer un droit de refus par des travailleurs sur un chantier parce que c'est dangereux.

La Commission de la construction intervient, qui est un autre appareil, parce que c'est une loi très répressive la loi des relations de travail dans la construction parce qu'il semblerait qu'on est des méchants, et on n'a pas le droit selon cette loi de faire de l'intimidation. On s'adresse à la CNESST (Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail), qui est du domaine de l'administratif, mais découlant de l'exécutif, on s'entend, parce qu'elle relève du ministre du Travail. Même si on fait affaire avec la CNESST, la Commission de la construction du Québec envoie des inspecteurs pour voir si nos gars ou nos filles qui ont fait leur droit de refus, pour voir s'ils n'ont pas fait de l'intimidation. Alors c'est dangereux pour toi de travailler, tu veux arrêter de travailler et tu t'es peut-être intimidé toi-même, en te disant, faudrait que j'arrête de travailler parce que c'est dangereux. Et là il ne faut pas oublier, si on intimide, c'est des amendes et cela peut même être des plaintes criminelles. Cela veut dire qu'aujourd'hui, tu ne peux pas dire à tes confrères de travail, le représentant syndical ne peut pas arriver et dire « c'est dangereux, on sauve nos vies, on fait attention et on arrête de travailler ». Il y a une enquête de la commission. On a pu les faire reculer, mais il va falloir s'assurer que vraiment les pouvoirs sont étanches et que tout cela est pour le peuple, au niveau des décisions, et en arrière de cela bien sûr, est la question de qui cette constitution sert-elle, cette structure-là, qu'est-ce qu'elle protège ? Donc, on parle du droit de rester en vie, et là on n'est pas dans le droit international et dans les gros débats : est-ce que je peux le matin me lever ? Est-ce que je peux finir ma journée sinon vivant, du moins pas invalide ? Est-ce que je demande quelque chose de compliqué ? Cela met donc en cause la question de l'exécutif et du législatif, de celui qui fait la loi, qui a mis des clauses de répression.

Criminalisation au nom de l'interdiction du placement syndical

Je vais vous en donner une autre clause de répression dans la loi. C'est vrai qu'on est méchant nous, supposément. On faisait le placement sur les chantiers, il semble qu'on intimidait les patrons. J'ai remarqué qu'aux États-Unis, ce sont les patrons qui font cela. Ceux qui sont allés en Californie récemment, il y a des gens qui montent dans le pick-up le matin puis qui choisissent les travailleurs, toi tu rentres, toi tu rentres, toi non. C'est ce que les patrons ont voulu réintégrer dans l'industrie de la construction.

Il y a eu, dans la région de la Gaspésie, pour aider les travailleurs parce qu'il y a beaucoup de chômage régional, et on aimerait bien qu'en Gaspésie ce sont les gens de la Gaspésie qui travaillent minimalement. Ce serait comme bien. Or, le représentant syndical s'est rendu pour appuyer ses travailleurs de la région afin qu'ils rentrent sur le chantier plutôt que ceux qui sont choisis par des multinationales allemandes. Et on n'a pas le droit de faire le placement. Mais les journalistes étaient là. Ils ont dit au représentant syndical, oui mais pour le spectacle, si tu en as des travailleurs de la région, donne-nous la liste. Et le représentant syndical a pris un papier et un crayon, il a donné cela aux travailleurs pour qu'ils écrivent leur nom, il a donné cela au maitre-d' oeuvre devant les journalistes. Il est poursuivi pour avoir fait du placement illégal, alors que ce sont les journalistes qui le lui ont demandé. Il risque son emploi pour 5 ans.

Les codes d'éthique

Une autre bonne façon de rendre les syndicats inutiles maintenant c'est les codes d'éthique. Quand vous êtes sur le conseil d'administration de la CNESST, de la Commission de la construction ou que vous êtes appelé partout, cela vous prend un code d'éthique. Et on vous explique c'est quoi la moralité. Maintenant que vous travaillez pour un organisme public, vous devez défendre les intérêts de l'organisme. Mais si je siège à la CNEEST est-ce que je protège la caisse, qui dépense de l'argent pour les travaillleurs qui n'ont pas d'allure, qui se blessent et qui se tuent ? On ne se le cachera pas, aujourd'hui on a un accident et c'est toujours notre faute. On a tellement de bons moyens de protection. Or, si je ne défends pas la caisse qui est la mission, on peut dire que tu ne peux pas représenter ton organisme, tu es un méchant représentant syndical, tu dois défendre la caisse. C'est tellement vrai que quelqu'un m'a appelé récemment au sujet du nombre de décès qui sont survenus par accidents mortels en 2016. Et imaginez-vous qu'on a reçu seulement la veille, le 27, parce que le 28 c'est la journée de deuil pour les travailleurs -- on a eu la veille le nombre de décès. Pourquoi ? Parce que les membres du conseil d'administration sont tenus à la confidentialité. Il y en a 80 de morts. Ils ne peuvent même pas dire qu'il y en a eu 80. C'est confidentiel. Ben voyons donc. Un mort, ce n'est pas confidentiel. Les journalistes quand il y a un mort, ils en parlent. Mais nous, c'est notre monde qu'on défend, pour lesquels on lutte devant les tribunaux pour qu'ils soient payés, on ne peut pas le savoir !

Provocation de la violence

Encore une fois, la structure de l'État. Le choix que je prends dans l'organisation du pouvoir. Tu peux avoir de très beaux textes, mais cela ne veut rien dire si cela ne se traduit pas dans une pratique réelle et je devrais savoir qui a le contrôle de la pratique. On a souvent dit, il y a une grande différence entre le pouvoir d'État et l'appareil ... Je peux bien être au gouvernement mais cela ne veut pas dire que je contrôle l'appareil. Et j'en donnais des exemples. Construction encore une fois. On est le seul groupe qui ne bénéficie pas de la Loi des mesures anti briseurs de grève. Je vais vous dire pourquoi. Il y a présentement entre 150 000 et 160 000 travailleurs de la construction qui bon an mal an travaillent au Québec. Ils sont tous dangereux, ils travaillent dans nos écoles, nos maisons, nos hôpitaux. Ils sont très dangereux. C'est tout simplement que le gouvernement sait très bien que quand tu vas brasser la cage de la construction, ça va sauter. Tu as juste à dire « Ça prend une loi spéciale, c'est une gang de violents ! » comme si on pouvait contenir 140 000 salariés, 30 000 employeurs, pas de loi anti-briseur de grève, donc tout le monde continue à travailler, tu es obligé de vider les chantiers carrément. Parce que pour le monde c'est leur pain et leur beurre. Cela n'est pas le condo je ne sais pas où ! C'est le pain et le beurre de tous les jours. Donc, ils savent. Mais coïncidence, le gouvernement est 60 % payeur dans l'industrie de la construction : génie civil, institutionnel. Cela veut dire que lui-même est intéressé à ce que cela se règle vite. C'est pour cela aussi qu'on n'a pas droit à la rétroactivité.

Conclusion

Donc, pour me résumer, de la façon dont je conçois cela, constitution moderne qui investit le peuple et non la couronne du pouvoir décisionnel, c'est quand on va se mettre à tenter de trouver des solutions pratiques à ce débat-là, afin de s'assurer -- là je rêve en couleur -- qu'il y ait des mécanismes qui empêchent de vicier un système. Cela, ça veut dire que ce n'est pas juste la constitution mais qui détient le pouvoir. Et tant que ce sera n'importe qui qui détient le pouvoir, tant que c'est encore de plus en plus dans l'ombre, de plus en plus délocalisé, de plus en plus international, et que nous sommes de plus en plus gérés par des pactes internationaux, d'être capables d'identifier le pouvoir et de le localiser, c'est tout un contrat. Je voulais tout simplement vous donner quelques réflexions sur de quelle manière au niveau du pouvoir ouvrier, on navigue présentement entre « Le meilleur des mondes » et « 1984 ». Et même si on semble vivre dans un monde doux, où on peut se permettre à peu près n'importe quoi, il ne faut surtout pas que tu dépasses la ligne du n'importe quoi. Tant que tu consommes Mais même au niveau de la pensée remarquez encore plus le contrôle de l'État et on le vit de plus en plus au quotidien. Merci.

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Les conséquences de la guerre commerciale pour l'industrie forestière

L'empire américain s'empare de Tembec Inc.

Un argument irrationnel pathétique en faveur de l'édification d'empire

Tembec Inc., une enterprise forestière basée au Québec, a annoncé le 25 mai qu'elle va être achetée par le monopole américain Rayonier Advanced Materials dans une « prise de contôle » amicale d'une valeur de 807 millions $US. Le PDG James Lopez essaie de justifier la décision de vendre la société forestière canadienne Tembec à des intérêts américains en disant que l'entreprise n'était pas capable de prospérer en tant que « producteur autonome ». Il a dit que les nouveaux droits compensatoires imposés par les États-Unis sur les exportations de bois-d'oeuvre vont forcer Tembec à payer des droits à l'avance pendant plusieurs années ce qui va le forcer à réduire ses investissements dans ses 17 usines au Québec et de l'Ontario. Comme « producteur autonome », a dit le PDG, Tembec n'est pas capable de se défendre contre l'édification d'empire américaine et n'a d'autre choix que d'être absorbé encore plus dans la Forteresse Amérique du Nord. Selon Lopez, Tembec a besoin d'une compagnie américaine aux poches pleines d'argent pour affronter la tempête jusqu'à ce qu'un accord sur le bois-d'oeuvre soit conclu et que la vie reprenne son cours normal.

Est-ce vrai ? Est-ce que ses remarques résistent à l'examen et sont sensées ? Le PDG semble avoir abandonné toute idée d'édification nationale pour se jeter dans les bras de l'édification d'empire comme seule alternative. En fait, la soumission à l'édification d'empire américaine s'est produite il y a belle lurette et les actions de Lopez le confirment alors que sa prétention d'être un producteur autonome est absurde. Aucune entreprise d'importance n'a été un producteur autonome depuis la fusion des secteurs financiers et industriels au début du vingtième siècle lorsque l'économie a été mise sous la domination de l'oligarchie financière impérialiste.

Le fait que Tembec dépende tellement des exportations vers les États-Unis et souffre chaque fois que l'Empire américain attaque et impose des droits compensatoires sur l'importation de bois d'oeuvre canadien montre que la compagnie n'oeuvre pas au sein d'une économie indépendante et n'a rien d'une entreprise autonome. Tembec et le secteur forestier sont dominés par l'oligarchie financière et empêtrés jusqu'au cou dans le système impérialiste d'État des États-Unis.

Le PDG Lopez ne reconnaît pas l'alternative de l'édification nationale parce que depuis le début du 20e siècle toutes les relations sociales dans le monde capitaliste sont dictées par le système impérialiste d'États et leur édification d'empire. Les intérêts et la nature de classe des bâtisseurs d'empires ne leur permettent pas de voir une alternative. Peut-être les grands capitalistes veulent-ils obtenir une meilleure entente au sein de l'empire afin de favoriser leurs intérêts privés mais cela n'a rien à voir avec l'édification nationale en opposition à l'édification d'empire.

Il n'existe pas de producteur autonome au sein de l'économie moderne socialisée de production industrielle de masse. La production, la distribution et la consommation sont inter-reliées et ont besoin que toutes les composantes de l'économie fonctionnent en coopération pour le bénéfice mutuel de l'ensemble et de toutes ses parties. L'édification nationale à l'ère moderne se doit d'avoir un objectif unifié consistant à servir l'ensemble et les producteurs véritables, un objectif qui est en contradiction avec l'édification d'empire des oligarques. Les oligarques s'engagent dans des conflits continuels et des guerres afin de servir leurs intérêts privés et ils écrasent sur leur chemin leurs rivaux et les travailleurs et causent des crises économiques récurrentes.

À quel point Tembec est-il « autonome » alors que l'oligarchie financière détient 487 millions $ de la dette de la compagnie ? Est-ce que Tembec est autonome alors que sa propre propriété de capital-actions est institutionnelle à 90 % et que le holding bâtisseur d'empire Fairfax Financial en détient 20 % ? Comment Tembec peut-il être autonome alors qu'il dépend entièrement des matériaux, de la machinerie et de l'infrastructure que d'autres produisent et ne peut opérer sans une classe ouvrière moderne que la société reproduit, maintient et éduque ? Le PDG Lopez profère un tissu de propos irrationnels pour excuser l'inexcusable.

Rayonier, la compagnie basée en Floride qui a initié la prise de contrôle, est plus petite que Tembec en ce qui a trait à la production et au nombre de travailleurs. Le fait qu'elle soit plus petite n'empêche pas les détenteurs de la dette de détenir un montant deux fois plus grand chez Rayonier que chez Tembec. Son revenu brut annuel est un peu plus bas que celui de Tembec et se monte à un peu moins d'un milliard de dollars. Rayonier a 1200 travailleurs qui produisent de la valeur dans deux usines, beaucoup moins que Tembec qui en a 3 000 dans 19 usines. Cela veut dire que la valeur totale produite chez Rayonier est en grande partie une valeur transférée à partir de valeur déjà produite. Ses usines de produits chimiques sont des usines de pointe qui utilisent de grandes quantités de matériaux déjà produits et raffinés qui doivent être achetés et raffinés davantage au moyen d'une technique avancée et d'un équipement coûteux. Cela signifie que la pression à la baisse sur son taux de profit est forte car l'investissement total de richesse sociale en matériaux et en équipements est élevé comparativement au nombre de travailleurs engagés.

Où Rayonier va-t-il trouver l'argent pour financer l'achat d'une compagnie de dimension comparable alors qu'il supporte déjà une dette de 800 millions $ et un capital-actions de 650 millions ? Il va le trouver auprès de la même oligarchie financière de Forteresse Amérique du Nord qui possède et contrôle déjà Tembec et Rayonier. Il est clair que les mêmes bâtisseurs d'empires, qui contrôlent déjà les deux compagnies, ont décidé d'avance que l'entente va servir leurs intérêts privés .

Le PDG Lopez cherche à jeter de la poudre aux yeux des travailleurs par ses propos, à leur dire qu'il n'existe pas d'alternative à l'édification d'empire et que le contrôle sur leur travail et leur vie va échapper encore plus à leurs endroits de travail et à leurs communautés. En cette ère de l'impérialisme, il prêche à la classe ouvrière d'oublier tout ce qui concerne l'édification nationale et l'édification d'une économie viable qui subvient à ses besoins et est sous le contrôle et la direction des travailleurs au sein d'un Québec et d'un Canada indépendants. Ça ne peut pas se faire, abandonnez tout cela vous aussi comme l'a fait Lopez avec Tembec et d'autres bien avant lui ! C'est justement là que le bât blesse parce que dans cette ère de l'impérialisme et de l'édification d'empire la seule alternative réelle viable n'est pas la capitulation mais l'édification nationale dirigée par la classe ouvrière visant à investir le peuple de la souveraineté et à placer l'économie socialisée sous le contrôle des producteurs véritables.

L'édification nationale doit avoir son propre objectif qui est de servir le peuple et de garantir ses droits et son bien-être et d'ouvrir la voie à l'émancipation de la classe ouvrière. L'édification nationale ne peut fleurir qu'en opposition à l'édification d'empire et en privant les oligarques de leur pouvoir de priver le peuple de ses droits.

Le PDG Lopez veut que les travailleurs pensent de façon irrationnelle et gobent ses propos insensés à l'effet qu'ils ne pourront jamais contrôler leur travail et leur vie et fournir à l'économie une direction prosociale positive au sein d'un projet d'édification nationale sous leur direction. Bien au contraire M. Lopez, l'édification nationale peut et doit être accomplie pour le bien de l'humanité. Pas par vous ou par tout autre bourgeois impérialiste mais par la classe ouvrière.

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Concentration de la richesse sociale et du contrôle dans le secteur forestier

L'oligarchie financière consolide Tembec Inc. au sein de Rayonier Advanced Materials

L'oligarchie financière a orchestré un conflit commercial dans le secteur du bois d'oeuvre. Le gouvernement des États-Unis a répondu favorablement à la demande d'une section puissante de l'oligarchie qui contrôle la Forteresse Amérique du Nord pour imposer une taxe sur les exportations de bois d'oeuvre canadien vers les États-Unis. C'est la cinquième fois depuis les années 1980 que l'oligarchie financière utilise cette tactique pour faire augmenter le prix du bois, pousser les plus petits concurrents canadiens à fermer leurs portes, consolider le secteur entre un plus petit nombre de mains et utiliser son pouvoir et son contrôle élargis pour attaquer les droits de la classe ouvrière et ses communautés forestières.

Plus de 3 000 travailleurs de Tembec extraient le bois et produisent de la cellulose de grande pureté, du bois d'oeuvre et de la pâte et papier dans 17 usines au Québec et en Ontario. De plus, Tembec possède une usine de produits chimiques aux États-Unis et une autre en France.

Les nouveaux tarifs douaniers imposés par les États-Unis ont forcé Tembec Inc à payer rétroactivement au 31 janvier 2017 une taxe préliminaire de 19,88 % sur les exportations de bois d'oeuvre vers les États-Unis. En entrevue au Globe and Mail , le président directeur général de Tembec, James Lopez, a dit que, pareillement aux autres entreprises forestières canadiennes, Tembec s'est vu imposer le mois dernier une taxe sur ses exportations vers les États-Unis. Dans un tel scénario, a-t-il dit, où son entreprise demeurait un « producteur autonome » et devait payer ses tarifs pendant plusieurs années pendant que dure le conflit, elle allait devoir freiner ses investissements dans ses usines. Lopez a ajouté que, face à une telle situation, l'exécutif et les dirigeants de l'entreprise ont accepté une prise de contrôle « amicale » par Rayonier Advanced Materials, basé en Floride. La prise de contrôle comprend l'achat ou l'échange de toutes les actions, se montant à 320 millions $, qui représentent le capital-actions des propriétaires et la prise en main de la dette d'une valeur de 487 millions $. [Note : Tous les chiffres sont en devises américaines.]

Le prix des actions de Tembec qui a été convenu dans cette prise de contrôle représente une prime de 37 % du prix des actions négociées avant l'annonce publique de la vente. Tous ceux qui détiennent des actions de Tembec recevront le prix le plus élevé en espèces ou en actions de Rayonier. Fairfax Financial, un oligopole dont le siège est à Toronto, est le principal propriétaire institutionnel des actions de Tembec dont il en détient 20 %. Fait intéressant, Fairfax détient également des actions de Rayonier, dont le cours de l'action a bondi de 12 % lors de l'annonce de l'acquisition de Tembec. Les dirigeants de Fairfax Financial ont rapidement annoncé qu'ils appuient entièrement la concentration de la propriété et du contrôle de Tembec au sein de Rayonier.

Avec la prise de contrôle de Tembec, les revenus bruts annuels de Rayonier atteindront 2 milliards $, soit le double de ce qu'ils sont présentement. Comme c'est le cas des actions de Tembec dont elles sont propriétaires, les institutions de l'oligarchie financière détiennent plus de 90 % des actions de Rayonier évaluées en bourse à environ 650 millions $. Les dettes actuelles de l'entreprise se chiffrent à plus de 800 millions $. Rayonier a deux usines dans le sud des États-Unis comprenant 1 200 travailleurs qui produisent une variété de produits chimiques.

Comme on pense que Produits forestiers Résolu, une entreprise beaucoup plus grosse basée au Québec, pourrait être la prochaine cible d'acquisition sur la liste des prises de contrôle forestières de l'oligarchie, il semble selon les rapports qu'après l'annonce de la prise de contrôle de Tembec par Rayonier, les spéculateurs se soient immédiatement précipités pour acheter en bourse des actions de Résolu, ce qui a fait grimper le prix de ses actions de près de 7 %. Fairfax Financial est également le plus important détenteur d'actions de Produits forestiers Resolu dont il en contrôle plus de 34 % sur le marché des actions.

Le Globe and Mail fait remarquer que la prise de contrôle de Tembec dans le secteur forestier canadien laisse « aux investisseurs canadiens peu d'entreprises cotées en bourse, au-delà des compagnies géantes comme West Fraser Timber et Canfor Corp ». La consolidation de la propriété et du contrôle de Tembec au sein de Rayonier et la relocalisation de son siège social vers le sud des États-Unis met fin à la saga d'édification nationale des travailleurs forestiers du XIXe et XXe siècles au Témiscaming et dans de nombreuses autres villes forestières du Québec et de l'Ontario où les usines et les installations originales de Tembec ont été construites grâce au labeur et aux sacrifices des travailleurs. Le contrôle et la voix au chapitre sur la direction du secteur forestier ont échappé de plus en plus aux producteurs véritables et aux autres personnes de leurs communautés, en même temps que l'espoir de réinvestir dans l'économie locale la valeur ajoutée produite par les travailleurs.

L'édification d'empire mondiale des oligarques prive la classe ouvrière québécoise et canadienne de sa capacité à mettre de l'avant son propre projet d'édification nationale afin d'investir le peuple de la souveraineté et d'utiliser la valeur qu'elle produit pour garantir ses moyens de subsistance, ses droits et son bien-être de même que les intérêts généraux de la société canadienne. Comment priver les oligarques de la Forteresse Amérique du Nord du pouvoir de priver la classe ouvrière de sa capacité à mettre de l'avant un projet moderne d'édification nationale est un problème que les travailleurs prennent en main pour le résoudre. Joignez-vous à ce travail !

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