30 mars 2017
Le Comité permanent sur le
commerce international se penche
sur l'industrie de l'acier
Spectacle honteux sur la colline
du parlement
- Rolf Gerstenberger -
PDF
Le Comité permanent sur le
commerce international se penche
sur l'industrie de l'acier
• Spectacle honteux sur la colline du parlement
- Rolf Gerstenberger
Ne touchez pas aux
pensions et aux avantages sociaux des travailleurs!
• Tous avec les mineurs de Wabush qui luttent
pour ce qui leur appartient de droit!
• Les retraités de Wabush Mines
s'opposent au vol de
leurs pensions et de leur assurance médicaments -
Entrevue avec Jim Skinner, membre du Comité des retraités
de Wabush
Le Comité permanent sur le
commerce international se penche
sur l'industrie de l'acier
Spectacle honteux sur la colline du parlement
- Rolf Gerstenberger -
Forum ouvrier a demandé à Rolf
Gerstenberger, président à
la retraite de la section locale 1005 du Syndicat des
métallos, de
commenter la discussion sur l'industrie sidérurgique tenue
le 9 mars
par le Comité permanent du commerce international sur la colline
parlementaire. Des membres des partis libéral, conservateur
et néo-démocrate ont assisté à la
réunion. Les conférenciers invités
étaient William Miller d'Amalgamated Trading Ltd, Joseph
Galimberti de
l'Association canadienne des producteurs d'acier, Ian Lee de
l'Université Carleton et de l'Institut Macdonald-Laurier et Ken
Neumann
et Shaker Jamal du bureau national des Métallos.
***
Rolf Gerstenberger : Toutes ces
absurdités à
propos du commerce inéquitable et de la nécessité
d'un commerce libre
et équitable servent à détourner la classe
ouvrière pour qu'elle ne
demande pas des solutions réelles à des problèmes
réels ici même. Les
solutions commencent ici, elles commencent par un projet
d'édification nationale. Ça ne peut débuter en
attaquant les autres
pour ce qu'ils font et en menant des guerres prédatrices pour
les voler
à des fins d'édification d'empire.
En un mot, la discussion a été un
spectacle honteux de tous les
acteurs concernés, en particulier ceux qui sont censés
représenter les
intérêts des travailleurs de l'acier. La lecture de la
transcription
officielle de 11 000 mots est tout à fait
exaspérante. Rien là-dedans
ne reflète la réalité que vivent les
métallos et leur industrie
productive. Rien n'est dit sur le cycle désastreux du secteur de
l'acier et des crises récurrentes ou sur la façon de
remédier à la
situation. Rien dans tout cela pour atténuer un tant soit peu
l'anxiété
que vivent nos retraités qui ont été
dépouillés de leurs avantages
sociaux ou pour soulager l'angoisse qu'ils ressentent à propos
de leurs
pensions. Rien
n'est dit sur les préoccupations spécifiques des
métallos à Stelco et
Algoma concernant la direction de leur industrie. Pour exonérer
l'oligarchie financière et les gouvernements des
désastres qu'ils ont
causés et ne pas les tenir responsables, le Comité
permanent a jeté de
la poudre aux yeux avec des histoires à propos de la Chine et
combien
les
Chinois sont responsables des problèmes auxquels nous sommes
confrontés
depuis au-delà de vingt ans.
M. Miller, d'Amalgamated Trading, a été
le seul à aborder ne
serait-ce que superficiellement la réalité du secteur
canadien de
l'acier, mais seulement du point de vue des importations en gros dans
l'ouest du pays. Il a dit qu'en l'absence d'une production importante
de l'acier en Colombie-Britannique, son entreprise importe presque tout
ce
qu'elle vend puisque le transport de l'acier en provenance d'Asie vers
la Colombie-Britannique est moins cher que celui de l'Ontario. Il a dit
que le prix du transport de l'acier en provenance d'Asie vers Vancouver
par voie maritime est de 45 $ à 50 $ la
tonne métrique alors que de
l'Ontario vers l'Ouest du Canada, il
s'élève à 120 $ la tonne métrique
par rail et à près de 200 $ par
camion.
Monsieur Miller a montré sans le vouloir
l'importance d'avoir une
industrie sidérurgique dans toutes les régions d'un pays
aussi vaste
que le Canada. Mais, bien sûr, ce n'est pas sa véritable
préoccupation
puisque, en tant que grossiste/importateur, il veut être
l'intermédiaire et ne veut surtout pas d'une industrie
sidérurgique
locale qui fournirait
directement des clients dans sa région ou d'une institution
d'État qui
joue un rôle important dans la gestion de l'ensemble de
l'industrie, en
particulier en apportant une stabilité aux prix du marché
et une
conformité entre l'offre et la demande sans crises
récurrentes. Miller
était aux audiences pour plaider pour les intérêts
privés étroits de
son
entreprise. Comme tous les autres, il n'a pas de vision de projet
d'édification nationale qui aurait un secteur de l'acier
canadien
indépendant dans toutes les régions et qui serait le
rempart d'une
économie dynamique et inter-reliée qui suffit à
ses besoins.
Tout projet
d'édification nationale au XXIe siècle doit comprendre
une intervention d'État robuste pour restreindre l'oligarchie
financière dans son pouvoir d'investir la richesse sociale
produite par
les travailleurs. Les magouilles de US Steel et d'autres qui
détruisent
nos forces productives et volent ce qui appartient de droit aux
travailleurs
canadiens devraient être considérées comme des
actes criminels. Il est
ridicule de ne pas faire correspondre la production à la demande
apparente
de l'économie canadienne pour l'acier. Les énormes
fluctuations des
prix du marché de l'acier qui ont peu ou pas de rapport avec son
prix
de production ne sont pas du tout nécessaires. Nous avons non
pas
un gouvernement des lois mais un gouvernement des pouvoirs de police,
qui comprennent le pouvoir judiciaire. Il utilise spécifiquement
la
détestée Loi sur les arrangements avec les
créanciers des compagnies
(LACC) pour rejeter sur le dos des travailleurs et des retraités
le
fardeau de leurs crises économiques hors contrôle à
la demande de
l'oligarchie financière internationale.
Dans son dernier jugement rendu devant les tribunaux de
la LACC
dans la cause d'Essar Algoma Steel, le juge Newbould a ordonné
à
l'aciérie de payer au débiteur-exploitant, les oligarques
dirigés par la Deutsche Bank, qui contrôlent le processus,
un montant
supplémentaire de 1,25 million $ pour un «
défaut
technique » parce qu'Algoma Steel n'a pas encore
soutiré 22,2
millions $ en concessions des métallos et employés
salariés, ce que le
tribunal lui a ordonné de faire d'ici le 22 mars. En outre,
pour
extorquer plus facilement ce qui appartient de droit aux travailleurs,
le juge a ordonné aux comités de négociation des
métallos
et des employés salariés d'Algoma d'être
séquestrés à Toronto sans
contact avec l'extérieur jusqu'à ce qu'ils acceptent ces
concessions.
Tout cela se passe au moment même où Algoma Steel est en
plein essor
parce que nous sommes dans l'une de ces remontées temporaires
dans le
secteur de l'acier.
Stelco, elle aussi placée sous la LACC, ressent
les effets de la
remontée alors que son argent en caisse devrait
atteindre 300
millions $ d'ici juin mais le juge responsable du dossier n'est
toujours pas prêt à rétablir notre droit à
des avantages sociaux à la
retraite même si c'est au nom d'une crise de liquidités
qu'il nous les
a enlevés
en premier lieu. Le juge est prêt à imposer une vente
à rabais
désastreuse à une autre bande d'oligarques
américains appelés Bedrock
qui veulent éliminer toute responsabilité sociale de
Stelco envers les
pensions, les avantages sociaux, la production d'acier, l'emploi et la
dépollution. Tout doit être retiré des livres
comptables, crient-ils,
pour
permettre aux oligarques de faire leur coup d'argent.
À Ottawa cependant, notre illustre groupe de
parlementaires et
d'invités veut ignorer tout cela et se cacher derrière
le tapage de
type impérialiste américain à l'effet que tous nos
problèmes sont la
faute des Chinois qui nous vendent de l'acier à bas prix. Ils se
plaignent que
quelqu'un leur
vend quelque
chose moins cher que ce que ça vaut ! Ils n'ont que faire
d'une édification nationale au Canada et d'une nouvelle
direction pour
l'économie sans crises. Qui représentent-il? Toutes
les principales
entreprises sidérurgiques au Canada sont détenues
à
l'étranger et elles ont toutes leurs propres
intérêts et préoccupations
qui n'ont rien à voir avec l'édification nationale au
Canada. Le nom de leur groupe devrait être l'Association des
oligopoles mondiaux de
l'acier parce qu'il n'a rien à voir avec les
intérêts des Canadiens à
créer ici quelque chose de stable et ayant de la valeur.
FO : Que penser des
représentants syndicaux?
RG : Leur réalité
ne
concorde
pas avec le monde imaginaire concocté dans les coulisses du
pouvoir.
Selon leurs quartiers généraux à Pittsburgh
et à la
Maison-Blanche, les compagnies américaines sont les victimes de
pratiques commerciales inéquitables, surtout celles du Mexique
et de la
Chine. Ça n'a pas de sens même en ce qui
concerne les
États-Unis
mais pourquoi répéter cela au Canada ? La simple
suggestion que
l'empire le plus destructeur, pillard et expansionniste que le monde
ait connu serait une victime défie le bon sens. L'empire qui
depuis
longtemps parcourt le monde à la recherche de ressources et
d'ouvriers
qu'il peut piller et exploiter même par des changements de
régimes et
la guerre se qualifie de victime.
Les pays en développement expédient des
produits bon marché aux
États-Unis en vertu de l'OMC et des accords de libre
échange et voilà
qu'une section de l'élite dominante cambrioleuse des
États-Unis se
plaint. Elle doit blâmer les autres pour les problèmes que
confrontent
les travailleurs des États-Unis parce que c'est la seule
explication
pathétique qu'elle peut donner à la crise
économique qui sévit aux
États-Unis mêmes. Les pays en développement sont
forcés d'acheter des
obligations américaines afin d'avoir en main les dollars
américains
nécessaires pour leur commerce international et pour
protéger leurs
propres monnaies de spéculateurs milliardaires américains
comme George
Soros. Pendant ce temps, une section de l'élite dominante
américaine
cambrioleuse trouve le moyen de se plaindre du niveau trop
élevé de la
dette
américaine, qu'elle n'a d'ailleurs aucune intention de
rembourser,
comme prétexte pour couper dans les programmes sociaux
destinés aux
sections les plus vulnérables des Américains. Elle ne
peut
même pas
organiser
un système de santé moderne digne de ce nom.
Selon le gouvernement du Canada et ceux qui ont
participé à cette
soi-disant discussion sur l'industrie de l'acier, le Canada n'existe
pas. Il est une partie intégrante d'une économie
nord-américaine. Nous
sommes supposés abandonner toute idée de
bâtir quelque chose de
valable ici au Canada, que nous pouvons contrôler, et remettre le
contrôle total de l'économie et de la
société à Trump et à ses hommes
de main comme le secrétaire au Commerce, Wilbur Ross, qui vont
s'occuper de nous. Pendant ce temps là, ils vont traiter les
Chinois
comme aime le faire l'impérialisme américain, par le
diktat, la
destruction et la guerre. L'Irak, la Libye et la Syrie nous montrent ce
que les
États-Unis réservent au monde entier. Nous, les
métallos, nous
connaissons très bien la façon de faire de Wilbur Ross et
jusqu'où peut
aller sa cruauté quand il s'agit de ses intérêts
privés. Il a profité
personnellement de la misère et de la destruction de l'industrie
sidérurgique aux États-Unis et au Canada.
Selon les ministres du gouvernement Trudeau, nous
devrions être
heureux des miettes qui tombent de la table de l'administration Trump
et abandonner toute aspiration à avoir notre propre secteur de
l'acier
et une économie nationale que nous contrôlons
nous-mêmes, qui ne
connaît pas les crises économiques et peut garantir le
bien-être et les
droits de tous.
Ignorer les besoins des
travailleurs
actifs et des retraités du Syndicat des Métallos est
inacceptable. Que
dire aussi de cette
diversion à propos de la construction d'un pont à
Montréal avec de
l'acier étranger quand on connaît toute la corruption qui
imprègne ces
projets d'infrastructure ? Le Québec n'a même plus
d'industrie
sidérurgique. Les oligopoles l'ont détruite. Le
Québec a déjà eu une
société d'État de production sidérurgique
mais elle a été privatisée et
détruite
dans la frénésie antisociale des derniers vingt ans.
Nous avons pris position contre la prise de
contrôle de Stelco par
US Steel en 2007 et n'avons pas gardé le silence quand USS
l'a détruite
comme nous l'avions prédit. Nous avons averti tout le monde qui
voulait
bien écouter que US Steel avait l'intention de détruire
Stelco en tant
que compétiteur et qu'il n'avait aucune intention de
respecter ses engagements publics et juridiques en vertu de la Loi
sur Investissement Canada
. Pourquoi les métallos de Hamilton et de Sault Ste.Marie
devraient-ils
participer à cette cabale insensée contre la Chine en
tant qu'ennemie
alors que US Steel, la Deutsche Bank et les fonds de placement
gigantesques provenant des États-Unis
nous crachent au visage et nous volent en plein jour ? Nous savons
bien
qui est l'ennemi parce qu'il est ici devant nous, et non
à 10 000
kilomètres d'ici ! Voilà ce que nos
représentants devraient être en
train de dire.
FO :
Que proposez-vous ?
RG : La section
locale 1005 du Syndicat des
Métallos demande la tenue d'une enquête publique sur la
LACC afin de
mettre à nu comment le pillage de tout ce qui revient de droit
à
nous et à nos communautés devient «
légal » et mettre de l'avant
que nos droits doivent être défendus et garantis.
Quel est le sens d'un État de droit qui vole directement les
travailleurs pour donner aux riches ?
Pour ce qui est des solutions à la crise du
secteur de l'acier, la
section locale 1005 du Syndicat des Métallos met de l'avant
des
propositions depuis 2004, mais aucun de ces grands personnages
à Ottawa
ou à Toronto n'a jamais daigné nous répondre ou
entretenir une
discussion avec nous. Ils nous ont tout simplement ignorés tout
en laissant la situation se détériorer. La section
locale 1005 a
soulevé le problème de l'anarchie qui règne dans
l'industrie et qui se
manifeste par la fluctuation brutale des prix et les fermetures
à
répétition et pourtant on nous sert toujours la
même réponse idiote :
c'est la main invisible du marché, il n'y a pas d'alternative.
Ce sont eux qui mènent la barque pendant qu'on se fait
dire de
laisser l'économie suivre son cours sans qu'elle soit soumise
à un
contrôle conscient.
Cette main invisible du marché n'est pas si
invisible que ça. En
fait, elle est très habile à piger l'argent directement
dans nos poches
pour le remettre aux riches. Pourtant, nous sommes censés nous
incliner et jouer
les
imbéciles et nous plaindre de la Chine sans jamais demander des
comptes
aux vrais coupables.
Le spectacle disgracieux offert par le comité
permanent démontre
une fois de plus, comme si nous avions besoin d'une nouvelle preuve,
à
quel point la classe ouvrière a besoin de sa propre politique
indépendante et de ses propres institutions pour parler et agir
en son
nom sur toutes les questions et sur toutes les tribunes. Les
travailleurs ne
veulent pas et n'ont pas besoin de ceux qui ne font que
répéter la
politique, les paroles, la vision et la ligne des oligarques dominants
cambrioleurs qui ont démontré dans le monde réel
qu'ils ne sont pas
aptes à gouverner. Il est clair qu'il revient aux travailleurs
eux-mêmes de mettre de l'avant un projet d'édification
nationale du 21e
siècle et
une nouvelle direction pour l'économie qui garantit les droits
et le
bien-être de nous tous. Nous, les travailleurs, pouvons et devons
exiger que ces oligarques rendent des comptes. Nous voulons une
enquête
publique sur la LACC et nous voulons nos emplois, nos régimes de
retraite et nos avantages sociaux ainsi que tout ce qui nous appartient
de
droit - à nous, à Hamilton et au Canada.
Ne touchez pas aux pensions et aux
avantages sociaux des travailleurs!
Tous avec les mineurs de Wabush qui luttent pour ce qui
leur appartient de droit!
Les mineurs de Wabush mènent une lutte
déterminée pour récupérer
les pensions, l'assurance médicaments et l'assurance vie que
Cliffs
Natural Resources leur a volées dans le cadre des pouvoirs de
police de
la Loi sur les arrangements avec les créanciers des
compagnies (LACC). La majorité des travailleurs
concernés vivent au
Labrador et les autres au Québec.
Les travailleurs et les retraités de Wabush
Mines se battent pour
ce qui leur revient de droit en vertu de contrats qu'ils ont conclus en
vendant leur capacité de travailler à l'employeur. Les
retraités ont un
besoin urgent des avantages sociaux qui leur reviennent de droit alors
qu'eux-mêmes et leurs conjoints et conjointes avancent en
âge et que
plusieurs travailleurs souffrent des effets de leurs dures
années à
la mine.Ces pensions et ces avantages sociaux ont été
négociés dans des
contrats à vie et leur appartiennent de droit en vertu de leurs
conventions collectives et des autres arrangements qui sont prescrits
par les lois du travail et les lois relatives aux régimes de
retraite.
L'oligopole américain a soutiré des
millions de dollars de profits
de l'économie locale et provinciale à même le
travail des mineurs
canadiens pour extraire le minerai de fer servant à la
production
d'acier. C'est une injustice criminelle que commettent les
autorités
canadiennes en permettant à Cliffs Natural Resources de se
retirer aux
États-Unis sans assumer ses engagements juridiques. Les
gouvernements
fédéral et provincial doivent forcer Cliffs à
assumer ses obligations
ou prendre des arrangements pour garantir les droits des
travailleurs
de Wabush.
Le 20 mai 2015, le juge Stephen Hamilton de
la Cour supérieure du
Québec à Montréal a eu recours aux pouvoirs de
police de la LACC pour
accorder protection aux actifs de Wabush de Cliffs au Labrador.
Quelques mois plus tôt, la cour avait accordé la
même protection aux
actifs du Lac Bloom au Québec. Cela fait partie du
plan de Cliffs de renier ses obligations légales envers les
travailleurs, les fournisseurs, les petits créanciers, les
municipalités environnantes et la dépollution. Cliffs a
recours à la
LACC pour mettre ses gigantesques actifs américains hors
d'atteinte des
travailleurs canadiens bien que ces actifs comprennent des profits
réalisés au Canada. En plus
d'avoir recours à la protection de la LACC pour se
débarasser de ses
obligations légales, Cliffs conspire pour liquider et vendre ses
installations minières productives au Labrador et se retirer aux
États-Unis avec tout ce qu'il peut.
Le 26 juin 2015, le juge Hamilton a
émis une autre ordonnance en
vertu de la LACC permettant cette fois à Cliffs de cesser de
faire tout
paiement de réduction de déficit des fonds de pension des
employés de
Wabush. Cliffs et les autorités étatiques savaient depuis
longtemps que
les fonds de pension étaient sous-financés et que
s'ils étaient liquidés sans l'injection de ces paiements
spéciaux ils
ne pourraient pas assurer aux retraités les prestations qu'ils
avaient
négociées dans des accords ayant force de loi.
Le juge a aussi autorisé l'oligopole à
cesser ses paiements pour
l'assurance vie et l'assurance médicaments des retraités.
L'impact
cumulatif de ces mesures dans la vie des travailleurs et des
retraités
de Wabush est énorme et le Comité des retraités de
Wabush réclame
justice pour tous les travailleurs visés et demande des comptes
à
l'oligopole
et aux gouvernements. La situation que vivent les mineurs de Wabush est
un exemple de plus de l'injustice que représentent les pouvoirs
de
police de la LACC et de la nécessité d'y mettre un terme.
Tous les
accords qui sont conclus entre les travailleurs, l'État et les
employeurs privés en échange de la capacité de
travailler des
travailleurs doivent
être honorés et garantis pour la vie.
Les oligarques américains et leurs
co-conspirateurs dans l'État
canadien doivent rendre des comptes et les droits de tous les anciens
travailleurs de Cliffs doivent être honorés et garantis.
Les retraités s'opposent au vol de leurs
pensions
et de leur assurance médicaments
« Toutes ces
choses ont été négociées dans des contrats
à vie
et doivent nous être restituées »
- Entrevue avec Jim Skinner, membre du
Comité des retraités de Wabush -
Forum ouvrier
s'est
entretenu récemment avec Jim Skinner, un membre du Comité
des retraités
de Wabush, au sujet de la lutte que mènent les travailleurs et
les
retraités contre les décisions du tribunal de la LACC et
pour faire
valoir leurs droits. Jim est l'ancien président de la section
locale
6285 du Syndicat des Métallos représentant les
travailleurs de Wabush
Mines au Labrador.
***
Forum ouvrier : Peux-tu nous
parler du contexte dans lequel se mène la lutte actuelle des
travailleurs et des retraités de Wabush Mines?
JS : Cliffs a
fermé la mine pour une durée
indéterminée en février 2014 et
annoncé sa fermeture définitive en
octobre de la même année. Il faut comprendre que Cliffs
s'est départi
de ses actifs canadiens. Il a séparé la division
américaine de la
division canadienne. Puis il a annoncé qu'il se placerait sous
la protection de la faillite et à ce moment-là les
gouvernements
n'ont pas agi. La protection de la LACC a été
accordée à Cliffs et tout
le monde pensait qu'il s'agirait d'une restructuration suivie d'une
reprise d'activités de Cliffs. En fait, ils ont
procédé à la
liquidation de leurs actifs.
En vertu de la LACC, qui est une loi
fédérale, les procédures
doivent se tenir dans la province où l'entreprise a son bureau
chef.
Dans le cas de Wabush, le bureau chef est à Montréal,
alors les
procédures se tiennent à la Cour supérieure du
Québec. Nous (au Labrador) sommes
situés très loin de cette cour. Nous avons bien un avocat
du Syndicat
des
Métallos et le personnel non syndiqué est
représenté par Koskie Minsky
mais c'est quand même très difficile d'obtenir
l'information dont nous
avons besoin.
En examinant la loi qui gouverne les régimes de
retraite à
Terre-Neuve-et-Labrador nous nous sommes rendus compte qu'elle nous
protège plus que la loi du Québec. Le gouvernement de
Terre-Neuve-et-Labrador a présenté une requête pour
une interprétation
en vue de porter en appel la décision de la Cour de ne pas tenir
ces
procédures à
Terre-Neuve puisque de l'avis général la loi de
Terre-Neuve protège
plus les travailleurs. Si nous gagnons notre cause de « fiducie
réputée » à Terre-Neuve nous pourrons
peut-être intenter une poursuite
en justice et récupérer nos pertes de pensions parce
qu'alors nous
aurions le statut de créancier protégé. En ce
moment, nous ne sommes pas des
créanciers protégés. Les banques et les
entreprises passent avant les travailleurs.
[ Selon
les
avocats
des retraités
de Wabush, l'expression « fiducie
protégée » signifie que l'argent des
retraités n'est pas considéré comme faisant partie
des actifs de
l'employeur parce qu'on assume qu'il est gardé en fiducie pour
les
membres du régime de retraite, ce qui veut dire qu'il serait
protégé
même en cas de procédures de faillite. Il semble que la
loi de
Terre-Neuve-et-Labrador soit plus explicite à ce sujet que celle
du
Québec - Note de FO ]
La LACC accorde une période de temps pendant
laquelle l'entreprise
peut se restructurer et décider de ce qui va advenir de ses
actifs.
Cela fait deux ans maintenant que la protection de la LACC est
prolongée dans le cas de Cliffs et la plus récente
prolongation nous
mène à juin 2017. Probablement qu'elle va être
prolongée encore par
après parce que Cliffs cherche à vendre ses actifs et
à envoyer les
recettes des ventes aux États-Unis.
En plus, Cliffs était
également
propriétaire des installations du Lac Bloom au Québec.
Ils les ont
achetées pour 4,3 milliards $ et les ont revendues
pour 10,3
millions $. Nous ne l'acceptons pas parce qu'un des membres du
Conseil d'administration de Champion [ Champion a acheté la
mine du Lac Bloom en 2015 - Note de FO
] est aussi vice-président de Cliffs. C'est une vente de feu et
nous
pensons qu'il y a collusion dans cettte affaire. Cependant, nous ne
pouvons pas poursuivre Cliffs pendant qu'il est sous la protection de
la LACC.
FO : Peux-tu nous
parler de ce que vivent les retraités de Wabush en ce
moment ?
JS : En 2015,
nous avons été informés,
avec neuf jours d'avis, que nous allions perdre notre assurance vie et
notre assurance médicaments. Ils ont le droit en vertu de la
LACC de ne
pas payer ce qu'ils doivent et cela comprend leurs obligations en ce
qui a trait aux pensions et à l'assurance vie et l'assurance
médicaments. Le juge a autorisé cela.
Bien sûr, sans nouvel argent dans les fonds de
pensions, ceux-ci
allaient faire faillite. On parle de 3000 retraités qui
reçoivent leur
pension chaque mois, alors le gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador a
ordonné que les fonds de pension soient liquidés. Ils ont
procédé à une
évaluation, en ont conclu que les fonds avaient un
déficit
de 50 millions $, et les retraités syndiqués se
sont retrouvés avec une
coupure de 21 % et le personnel non syndiqué avec une
coupure de 25 % (
ce sont deux régimes séparés). Nous nous opposons
à cette coupure.
Le
surintendant des régimes de retraite de Terre-Neuve-et-Labrador
avait
le pouvoir d'ordonner
à Cliffs de mettre l'argent nécessaire dans les fonds
avant qu'il se
place sous la protection de la LACC. Il y avait une fenêtre
d'environ 6
mois qui le permettait. Le gouvernement aurait dû exiger que
Cliffs
fasse ses paiements de réduction de déficit du fonds
de pension avant qu'ils
puissent se placer sous la LACC. Maintenant les gouvernements
fédéral et provincial se blâment mutuellement pour
ce qui s'est produit.
Les mots me manquent pour décrire la situation
désespérée dans
laquelle nos retraités se trouvent aujourd'hui. Nous avons des
gens qui
meurent parce qu'ils n'ont pas les moyens d'acheter leurs
remèdes. Nous
avons des gens qui souffrent du coeur et qui doivent choisir entre
garder leur maison, mettre de la nourriture sur la table ou acheter
tous leurs remèdes, ou encore les prendre de temps en temps
seulement,
ou couper les comprimés en deux. Il y a des veuves qui n'ont pas
d'argent pour acheter quelque médicament que ce soit. Elles ont
demandé
de l'aide du gouvernement mais celui-ci jusqu'à maintenant n'a
rien
fait.
FO : Parle-nous du
travail que vous faites pour obtenir justice.
JS : Nous avons
formé un comité à Wabush
qui fait des représentations auprès des deux niveaux de
gouvernement et
tient les membres informés. Ce que nous disons, c'est que toutes
ces
choses ont été négociées dans des contrats
à vie et doivent nous être
restituées. Si je prends mon cas, quand j'ai pris ma retraite
j'ai
reçu une lettre me disant combien d'argent je recevrais chaque
mois et
ce que seraient mes avantages sociaux à la retraite. Et si je
venais à
mourir, ces avantages seraient transférés à ma
conjointe. Tous les
travailleurs qui ont pris leur retraite ont reçu une lettre
semblable.
Mais sous la LACC, il n'y a pas de lois. Nous sommes
forcés de
nous
appuyer sur nos représentants élus pour protéger
ce que nous avons
négocié et protéger les lois du pays mais quand
nous sommes dans cette
situation, comme l'ont vécu les travailleurs de Stelco et bien
d'autres, ces représentants nous laissent tomber. Nous vivons
dans une
société libre et élisons ces gens mais à
chaque fois ils nous
abandonnent.
Nous demandons que notre
assurance vie et notre
assurance médicaments soient restaurées. Il s'agit d'un
contrat à vie.
Nous disons que le gouvernement doit protéger ce contrat et
forcer
Cliffs à faire les paiements qui s'imposent à tous leurs
retraités.
Quand vous vieillissez et prenez votre retraite, c'est de plus en plus
difficile
d'obtenir une assurance médicale. Dans la plupart des cas les
compagnies refusent de vous l'accorder et s'ils vous l'accordent cela
vous coûte les yeux de la tête. Les gouvernements doivent
également
forcer la compagnie à payer ce qu'elle doit aux régimes
de ratraite.
En plus de cela, la compagnie, comme c'est le cas de
toute mine, a
versé une garantie de 50 millions $ pour la
dépollution. Nous demandons
que la compagnie ne puisse pas récupérer ce montant parce
que tout ce
qu'ils récupèrent en ce moment en vendant les
équipements et les autres
actifs est placé sous le contrôle du contrôleur,
lequel est lui-même contrôlé par le juge de la Cour
supérieure. Nous
demandons qu'au moins une partie de ce montant serve à
rembourser les
travailleurs et non les entreprises et les banques.
Cliffs essaie en ce moment de trouver un acheteur pour
les
installations de Wabush qui va prendre à son compte ses
obligations
environnementales, espérant ainsi récupérer une
partie de cette
garantie et l'envoyer faire grossir son compte en banque aux
États-Unis. Ce serait incorrect et criminel de la part de notre
gouvernement d'autoriser une
telle chose. C'est pourtant ce qui se produit en ce moment. Cliffs ne
cesse de faire grossir son compte en banque. Les seuls qui font de
l'argent en ce moment, c'est Cliffs en vendant ses actifs et les
avocats qui prolongent indûment les procédures.
Les deux niveaux de gouvernement doivent intervenir. Il
faut que
les lois fédérales comme provinciales protègent
les droits des
travailleurs. Nous devons faire en sorte que les gouvernements
protègent les travailleurs et non les multinationales qui
viennent
piller nos resources puis s'en vont en nous laissant en plan.
Dès les premiers
jours, nous avons fait circuler une pétition
demandant au gouvernement fédéral de modifier la LACC de
façon à faire
des travailleurs des créanciers garantis. Le gouvernement nous a
répondu qu'il ne peut pas faire ces changements à cause
de nos
partenaires des traités de libre-échange. Il nous a
démontré de la
sympathie mais
nous ne cherchons pas la sympathie. Nous voulons nous assurer que ce
qui nous arrive n'arrivera pas à d'autres.
Nous faisons des représentations
régulières auprès de nos députés.
Nous les éduquons parce que beaucoup d'entre eux ne connaissent
pratiquement rien à la LACC, aux faillites ou à la
liquidation ou à la
situation dans laquelle nous sommes.
FO : Tu veux ajouter
quelque chose en conclusion ?
JS : Nous disons à
tout le monde que si vous
n'êtes pas affectés en ce moment, joignez-vous à
nous, éduquez-vous,
aidez-nous à faire passer ces changements pour que vous ne soyez
pas
touchés à votre tour.
Ces choses vont continuer à se produire tant que
les gouvernements
vont permettre aux multinationales ou aux compagnies locales ou
à
quelque companie que ce soit de s'en prendre aux travailleurs. Il faut
que cela change. Un contrat qui est négocié doit avoir
force de loi et
être protégé. Je n'ai rien à apprendre
là-dessus aux travailleurs de
Hamilton et des régions environnantes parce que cela fait des
années
qu'ils se battent là-dessus. Ils savent de quoi je parle et j'ai
beaucoup appris d'eux.
C'est ensemble que nous sommes plus forts.
NUMÉROS
PRÉCÉDENTS | ACCUEIL
Site web: www.pccml.ca
Email: forumouvrier@cpcml.ca
|