82e Anniversaire de la naissance de Hardial Bains
Hardial Bains
15 août 1939 – 24 août 1997
Une esquisse biographique
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Hardial Bains est né en Inde en 1939 à Chak 6, qui se trouve aujourd’hui au Pakistan. Son père était un communiste bien connu qui a été persécuté sans relâche, travaillant dans la clandestinité ou emprisonné pour ses activités anticoloniales et progressistes et sa résistance aux atrocités commises par le Raj britannique. Hardial a grandi à Mahilpur, dans le district de Hoshiarpur. La famille de sept frères et soeurs a souffert de la persécution aux mains des Britanniques. Hardial a pu enfin rencontrer son père pour la première fois à l’âge de neuf ans. Sa mère, qui a dû porter le lourd fardeau d’élever une famille sans source de revenus, n’a jamais failli à la tâche ; au contraire, a veillé à ce que tous ses enfants reçoivent une éducation. Les frères et soeurs aînés d’Hardial ont ainsi pu subvenir aux besoins de la famille lorsqu’ils étaient assez âgés et ses soeurs ont été les premières femmes admises au collège de Mahilpur.
D’aussi loin qu’il se souvienne, Hardial était actif en politique. À l’âge de huit ou neuf ans, il s’est joint au mouvement communiste et s’est battu pour la libération de l’Inde de la domination britannique.
Hardial a rejoint l’aile étudiante du Parti communiste indien en quatrième année, devenant ainsi le plus jeune membre de tout le pays, et il l’est resté longtemps. Se remémorant cette période tumultueuse, Hardial a écrit : « Il y avait une condition d’âge pour les membres mais, étant relativement grand pour mon âge et généralement exubérant et énergique, personne ne m’a demandé mon âge. Plus tard, j’ai été le plus jeune secrétaire au niveau du district. »
Hardial a voyagé à travers l’Inde en accomplissant de nombreux exploits pour organiser le peuple contre le pouvoir oppresseur du Raj. Très tôt, il a acquis le surnom « Leader », un titre qui lui a convenu toute sa vie. Par ses écrits et son exemple, Hardial a enseigné qu’un leader est la personne qui fait tout ce qui est nécessaire pour que les autres puissent apporter leur contribution à la cause de la paix, de la liberté, de la démocratie et de l’émancipation de l’humanité. Il a toujours accordé une attention première à son travail au prix de sacrifices personnels et au détriment de sa carrière de scientifique, de professeur et de chercheur. Sa famille, tant en Inde qu’au Canada, l’a soutenu dans toute son activité, tout comme le Parti qu’il a créé et les partis fraternels avec qui il a consacré beaucoup de temps à trouver des solutions communes aux problèmes communs. Il a toujours été très reconnaissant du soutien de sa famille, de ses pairs et de gens partout dans le monde.
Hardial a commencé son travail politique au Canada peu après avoir émigré en 1959. Arrivé à Victoria, en Colombie-Britannique, il a immédiatement commencé à se familiariser avec la vie au Canada et avec l’économie et l’histoire du Canada. Il s’est intégré aux travailleurs de l’industrie du bois et a appris des Ghadri Babas qui se sont battus pour la liberté des Indiens et contre les lois d’exclusion racistes imposées par les Britanniques au Canada et ailleurs. Après avoir déménagé à Vancouver, il a poursuivi des études supérieures en microbiologie à l’Université de la Colombie-Britannique de 1960 à 1965 et a travaillé comme technicien de laboratoire pour le gouvernement de la Colombie-Britannique de 1960 à 1961. Il s’est plongé dans le mouvement politique de la jeunesse et des étudiants en plein essor et a été élu président de la Fédération des étudiantes et étudiants de la Colombie-Britannique en 1964.
Le travail qu’il a accompli durant cette période se caractérise par la construction de l’organisation qui regroupe les forces sociales ayant intérêt à apporter le changement exigé par l’époque. En 1963, il a rassemblé des jeunes tournés vers l’avenir dans les Internationalistes. Les Internationalistes ont lutté pour établir un climat de discussion académique sur le campus de l’Université de la Colombie-Britannique, contre le sectarisme dégénéré de la politique de factions et la collaboration idéologique avec la classe dominante, qu’Hardial identifiera plus tard comme les trois « i » : impérialisme, ignorance et impuissance.
Hardial a enseigné au Trinity College de Dublin, en Irlande, de 1965 à 1967 dans le cadre d’un programme d’échange. Son manuel d’enseignement était encore utilisé par le département lorsqu’il a visité l’université 25 ans plus tard.
Pendant son séjour en Irlande, Hardial a introduit la méthode consistant à organiser des réunions de démocratie de masse en plein air, auxquelles un grand nombre d’étudiants assistaient pour discuter des affaires courantes et prendre position d’une manière qui favorisait leurs intérêts et répondait à leurs préoccupations. Il a fondé les Internationalistes d’Irlande à Dublin pour diriger ce travail et a organisé le programme d’étude Nécessité de changement afin d’impliquer les jeunes dans l’analyse de leurs conditions pour tirer les conclusions qui s’imposent. La série de conférences qu’il a données dans le cadre de ce programme a conduit à la tenue de l’importante conférence Nécessité de changement à Londres, en Angleterre, du 1er au 10 août 1967. L’analyse Nécessité de changement adoptée par la conférence est résumée dans la célèbre brochure portant le même titre qui s’est vendue à des milliers d’exemplaires à l’époque. Elle a été rééditée en 1998 avec une préface de l’auteur et demeure très en demande à ce jour.
Hardial est ensuite retourné au Canada, arrivant à Montréal le 1er mai 1968. De nombreux jeunes révolutionnaires de la Colombie-Britannique et de tout le pays l’ont rejoint à Montréal et ensemble, sous la direction d’Hardial, ils ont effectué un travail d’organisation révolutionnaire tous azimuts. Le 7 mai, les Internationalistes, fondés à l’Université de la Colombie-Britannique en 1963, étaient réorganisés en un mouvement marxiste-léniniste de la jeunesse et des étudiants, conformément aux conclusions de l’analyse Nécessité de changement qui révélait le besoin d’une force organisée basée sur le centralisme démocratique. Hardial a continué d’élaborer et d’enrichir l’analyse sur la base de l’expérience acquise au cours de ce travail. L’Institut d’études idéologiques Nécessité de changement, créé en 1967, a ensuite été enregistré sous le nom de Centre d’études idéologiques pour lequel Hardial a travaillé professionnellement en tant que directeur pour le reste de sa vie. Jusqu’à ce jour, l’institut continue d’élaborer l’analyse de Nécessité de changement et la théorie révolutionnaire requise par le mouvement révolutionnaire.
Au cours de cette période, Hardial Bains a également été le fer de lance de la fondation de nombreuses organisations qui ont lutté pour les droits démocratiques du peuple, notamment la défense des droits de tous les travailleurs, du droit du peuple québécois à l’autodétermination et des droits ancestraux des peuples autochtones. Son travail de soutien aux luttes de libération des peuples de l’Inde, de la Corée, du Vietnam et de la péninsule indochinoise, de Cuba, de la Grèce et de tous les peuples du monde a permis d’avancer leur contenu anti-impérialiste. Son travail a permis de régler les comptes avec le chauvinisme anglo-canadien, l’anticommunisme, le révisionnisme moderne et l’opportunisme de tout acabit, ainsi que l’exceptionnalisme américain. Plus important encore, Hardial a été le fer de lance de la fondation du Parti communiste du Canada (marxiste-léniniste) en 1970 et en est resté le dirigeant national jusqu’à sa mort en 1997.
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Les organisations qu’il a fondées ont toujours joué un rôle crucial dans l’organisation des travailleurs, des femmes et des jeunes, de manière à contribuer de façon décisive à la solution des problèmes auxquels le peuple est confronté à tout moment. En 1969, il a fondé à Montréal le Comité pour la défense des droits démocratiques du peuple et en 1968-1969 les mouvements étudiants révolutionnaires et les Intellectuels et Ouvriers patriotes du Québec, tout en construisant les instruments de la presse du Parti qui paraissait quotidiennement en deux langues depuis le début. Hardial a également regroupé les Indiens résidant à l’étranger et a réorganisé le Parti hindustani ghadar en 1969 sur la base du centralisme démocratique et des principes révolutionnaires suivant l’appel des martyrs indiens à transformer en victoire les sacrifices consentis dans la lutte pour la libération de l’Inde. Parmi les organisations fondées partout au Canada sous sa direction, citons le Comité de défense indien en 1973, le Front du peuple contre la violence raciste et fasciste en 1980 et l’Organisation des peuples antillais. Il a également travaillé en étroite collaboration avec les femmes et les jeunes pour la défense de leurs droits. Ce qui lui tenait le plus à coeur était le travail parmi les travailleurs pour développer l’opposition ouvrière sur la base de la politique indépendante de la classe ouvrière, afin qu’ils puissent résoudre à leur avantage les problèmes auxquels le mouvement ouvrier et communiste et la société sont confrontés.
Hardial accordait une grande attention aux questions culturelles, notamment aux festivals sportifs, à la musique et à la littérature. Il a aidé les organisations de travailleurs culturels au Canada et en Grande-Bretagne et a lui-même contribué à des chansons et des poèmes qui ont inspiré tous ceux qui luttaient à se battre, sans se décourager. Comme le souligne une phrase de l’un de ses poèmes gravée sur le monument du Parti au cimetière Beechwood : « Que la marche continue car la route est claire. Que l’être humain moderne fasse l’histoire. Quelque chose nous appelle, allons de l’avant. »
La lutte idéologique contre la révision ou l’interprétation dogmatique des principes communistes est comme un fil rouge qui traverse toute la vie politique d’Hardial Bains. Nombre de ses écrits traitent de l’abandon des idéaux progressistes et du socialisme au coeur du conflit dans l’ancienne Union soviétique et en Europe de l’Est et de la trahison de la cause des peuples dans divers pays du monde. La lutte contre cet abandon a été un trait saillant de ses activités depuis les années 1960.
Dans ce contexte, Hardial a également joué un rôle important en aidant les partis et organisations communistes qui ont vu le jour dans le monde entier dans les années 1960, 1970 et par après. Son internationalisme était tel qu’il ne s’ingérait jamais dans les affaires intérieures des autres, tout en encourageant les habitants de chaque pays à être leurs propres modèles et à se tenir debout. Il a aidé à organiser des séminaires internationaux sur des problèmes communs, comme le communisme et les droits humains. Il a grandement contribué à renforcer les relations de travail afin d’analyser et d’évaluer les développements mondiaux et de veiller à ce que la discussion politique nécessaire à tous soit organisée.
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Hardial Bains était très admiré parmi ses collègues et ceux qu’il rencontrait au cours de ses activités politiques pour son dévouement au progrès de l’humanité et son adhésion aux principes les plus avancés. L’élite dirigeante canadienne détestait sa politique et l’a pris pour cible dans le cadre de la fameuse Opération Chaos menée par la CIA américaine. Il a été continuellement calomnié et diffamé. Il a dû se battre contre plusieurs poursuites frauduleuses visant à le criminaliser et à le discréditer et a déjoué plusieurs tentatives d’assassinat, notamment des sorties de route forcées de la voiture dans laquelle il se trouvait ou le feu mis au réservoir d’essence de sa voiture et d’autres mesures désespérées. Il a fait l’objet d’un mandat d’Interpol lors de la proclamation de la Loi sur les mesures de guerre en 1970 et s’est vu refuser la citoyenneté canadienne jusqu’en 1988, ce qui a entraîné le déni des droits pour son épouse et ses enfants. Il a également été privé de son passeport par le gouvernement indien de 1975 à 1977, pendant l’état d’urgence déclaré par Indira Gandhi. Il était sous la surveillance constante du FBI et s’est vu refuser l’entrée aux États-Unis.
Avec l’effondrement de l’Union soviétique en 1989-1990 et la fin de la division bipolaire du monde, Hardial s’est lancé dans un travail audacieux pour créer les conditions pour que le peuple s’investisse du pouvoir de décider et puisse résoudre en sa faveur la crise globale, avec la crise économique à la base. Son travail pour le renouveau démocratique du processus politique donne la direction dont le corps politique a besoin aujourd’hui. Il a présenté un mémoire au nom du PCC(M-L) à la Commission royale sur la réforme électorale et le financement des partis en 1990. Plus tard, en 1992, il a dirigé le Comité « Votez Non le 26 octobre », qui a été le fer de lance de l’effort pour faire échouer le référendum réactionnaire sur l’Accord de Charlottetown, par lequel la classe dirigeante a tenté de réformer la Constitution du Canada tout en maintenant le corps politique divisé, les travailleurs dans une position inférieure, les peuples autochtones opprimés et les droits de la nation québécoise niés. Le Non ! l’a emporté face à l’ensemble des forces de l’establishment qui incitaient le peuple à voter oui. Pour aider la campagne du Non, Hardial a publié deux livres traitant du problème constitutionnel au Canada : La substance du Rapport du consensus sur la constitution et Pour faire face à l’avenir. Il a ensuite publié un troisième livre, Un pouvoir à partager, en 1993, pour tracer une voie vers l’avant. Un pouvoir à partager met l’accent sur la nécessité de procéder à un renouveau démocratique du processus politique. Grâce à l’élan et à l’unité acquis lors de la campagne réussie pour rejeter l’Accord de Charlottetown, Hardial a été le fer de lance de la fondation du Conseil national du renouveau, qui a mené à la création du Parti du renouveau canadien en tant qu’association politique non partisane pour poursuivre le travail d’investir les Canadiens du pouvoir de décider de leurs affaires.
En 1995, Hardial Bains a lancé l’Initiative historique, un projet d’édification nationale qui appelle la classe ouvrière à se constituer en la nation et à investir le peuple du pouvoir souverain. Son travail théorique se concentre sur la nécessité de régler les comptes avec la vieille conscience de la société de manière à permettre l’émergence de la personnalité démocratique moderne. Sa vie a été écourtée en 1997 lorsqu’il est décédé d’un cancer. Hardial incarnait cette personnalité démocratique, avec son amour social et sa lutte pour une société humanisée adaptée aux êtres humains et à la nature. Bien que sa vie ait été écourtée par un cancer en 1997, sa vie et son œuvre se perpétuent dans le cœur et l’esprit de tous ceux qui l’ont connu.