Dans l’actualité le 24 mars
Actualités liées à l’Ukraine
L’agence internationale chargée du système des noms de domaine défend son mandat malgré les pressions
La demande de l’Ukraine de couper la Russie de certaines parties essentielles de l’Internet a été rejetée au début mars par l’ICANN (Internet Corporation for Assigned Names and Numbers), une organisation à but non lucratif qui supervise le système de noms de domaine (DNS) de l’Internet. Le PDG de l’ICANN, Goran Marby, a confirmé le mandat de l’organisation en déclarant qu’elle devait « maintenir la neutralité et agir en faveur de l’Internet mondial ».
« Notre mission ne s’étend pas à la prise de mesures punitives, à l’émission de sanctions ou à la restriction d’accès contre des segments de l’Internet – quelles que soient les provocations, a écrit Goran Marby dans sa réponse au vice-premier ministre ukrainien Mykhailo Fedorov. L’ICANN applique ses politiques de manière cohérente et en accord avec les processus documentés. Apporter des changements unilatéraux éroderait la confiance dans le modèle multipartite et les politiques conçues pour soutenir l’interopérabilité de l’Internet mondial. »
Le 28 février, l’Ukraine a demandé à l’ICANN de révoquer les domaines de premier niveau russes tels que .ru et .su, de « contribuer à la révocation des certificats SSL » de ces domaines et de fermer les serveurs racine du DNS en Russie. Mykhailo Fedorov a fait valoir que les « mesures demandées aideront les utilisateurs à rechercher des informations fiables dans des zones de domaine alternatives, empêchant ainsi la propagande et la désinformation ».
Les experts ont prévenu que le fait d’accéder à la demande de l’Ukraine porterait préjudice aux civils russes, aurait peu d’impact sur le gouvernement et l’armée russes et ne permettrait pas d’atteindre l’objectif de lutte contre la propagande. Goran Marby s’est rangé à cette opinion et a répondu à Mykhailo Fedorov :
« Comme vous l’avez indiqué dans votre lettre, votre souhait est d’aider les utilisateurs à rechercher des informations fiables dans les zones de domaines alternatifs et d’empêcher la propagande et la désinformation. Ce n’est que grâce à un accès large et sans entrave à l’Internet que les citoyens peuvent recevoir des informations fiables et une diversité de points de vue. Quelle que soit la source, l’ICANN ne contrôle pas l’accès ou le contenu d’Internet. ».
L’ICANN elle-même n’a « aucune autorité de sanction, a écrit Marby. Essentiellement, l’ICANN a été conçue pour s’assurer que l’Internet fonctionne, et non pour que son rôle de coordination soit utilisé pour l’empêcher de fonctionner. »
Concernant la demande de révocation des domaines de premier niveau, Goran Marby a écrit que « les politiques convenues au niveau mondial ne prévoient pas que l’ICANN prenne des mesures unilatérales pour déconnecter ces domaines comme vous le demandez. Vous pouvez comprendre pourquoi un tel système ne peut pas fonctionner sur la base de demandes d’un territoire ou d’un pays concernant les opérations internes à l’intérieur d’un autre territoire ou pays. Une telle modification du processus aurait des effets dévastateurs et permanents sur la confiance et l’utilité de ce système mondial ».
En réponse à la demande de fermeture des serveurs racine du DNS en Russie, Goran Marby a déclaré que le « système de serveurs racine est composé de nombreux noeuds répartis géographiquement et gérés par des opérateurs indépendants ». Concernant l’autre demande de l’Ukraine, Marby a écrit que l’ICANN n’a « pas la capacité de révoquer les certificats SSL spécifiques pour les domaines que vous avez mentionnés. Ces certificats sont produits par des opérateurs tiers et l’ICANN n’est pas impliquée dans leur émission ».
Dans son refus de la demande de l’Ukraine, Goran Marby a invoqué la nature décentralisée d’Internet. « Aucun acteur n’a la capacité de le contrôler ou de le fermer. Le rôle principal de l’ICANN, à travers les fonctions de l’Internet Assigned Numbers Authority (IANA), est d’assurer l’attribution cohérente et unique d’identifiants Internet conformément aux politiques mondiales », a écrit Marby.
« Ces politiques ont été élaborées par une communauté multipartite comprenant des experts techniques, des entreprises, des universitaires, la société civile, des gouvernements et d’autres parties prenantes qui ont travaillé en collaboration pour résoudre les défis politiques et techniques par consensus », poursuit Marby. C’est un modèle qui a permis à l’Internet de prospérer pendant des décennies, et cette approche large et inclusive de la prise de décision favorise l’intérêt public mondial et rend l’internet résilient face à la prise de décision unilatérale. » […]
(Jon Brodkin, arstechnica.com, 4 mars 2022)
LML Quotidien, affiché le 24 mars 2022.
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