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Les tribunaux américains jugent en faveur des intérêts privés
Une injonction des tribunaux contre les travailleurs du rail
Burlington Northern Santa Fe (BNSF) a eu recours aux tribunaux à la fin de janvier pour obtenir une injonction pour rendre illégale une grève des travailleurs contre la politique d’assiduité de la compagnie. Pour aller en grève dans le secteur du transport ferroviaire, les travailleurs doivent se conformer à la disposition du Railway Labor Act (Loi du travail sur les chemins de fer) qui stipule qu’une grève ne peut se faire que s’il y a conflit « majeur ». Si les propriétaires de compagnies ferroviaires contestent le fait que le conflit est dû à des problèmes majeurs, c’est aux tribunaux de trancher.
Dans le cas de BNSF, le juge a accordé l’injonction, appuyant le point de vue de la compagnie, que ce que les syndicats soulevaient comme problème ne représentait qu’un « conflit mineur ». Ci-joints se trouvent des extraits de la décision du 25 janvier.
« Le rôle de la cour n’est pas de décider si les normes d’assiduité de la nouvelle ‘politique de visibilité’ du plaignant, la compagnie ferroviaire BNSF (‘BNSF’), est mauvaise ou non. Le rôle de la cour est plutôt de déterminer si le conflit syndical actuel est un conflit ‘majeur’ ou ‘mineur’ en vertu du Railway Labor Act . (‘RLA’).
« À ce stade des délibérations, la cour n’a pas à décider, sur une base juridique, si ce conflit est soit majeur ou mineur. Plutôt, la cour ne fait que décider si ‘il y a une probabilité marquée que le demandeur ait raison quant au fond’. Daniels Health Sci. LLC c. Vascular Health Scis., LLC, 710 F.3d 579, 582 (5e circa 2013). En vertu des pratiques passées de BNSF, celle-ci a établi une probabilité marquée compte tenu que les normes de sa politique d’assiduité sont ‘vraisemblablement justifiées par les dispositions de la convention collective telles que signées par les deux parties’, rendant le conflit mineur.
« La cour considère donc que BNSF a démontré une probabilité marquée que toute initiative des syndicats [des actions entreprises par les travailleurs telles la grève – note de la rédaction] contreviendrait à la RLA.
« Et sans une injonction provisoire interdisant une ‘grève illégale ayant lieu dans le cadre d’un conflit mineur’, BNSF encourrait des dommages substantiels, immédiats et irréparables. Les syndicats, pour leur part, n’encourront aucun dommage en raison d’une injonction provisoire leur ordonnant de ne pas troubler la paix que cette cour, ou un arbitre, ne pourrait rectifier. Les dommages à la compagnie étant plus considérables, il est nécessaire d’imposer une injonction. Tout indique aussi qu’une grève ne ferait qu’exacerber notre crise de chaîne d’approvisionnement actuelle, ce qui porterait préjudice au grand public, et pas uniquement à BNSF. Une injonction provisoire servira l’intérêt public, plutôt que son contraire. Par conséquent, la cour considère qu’il est nécessaire d’octroyer une injonction provisoire.
« Par conséquent, la cour ORDONNE que, pour la durée de cette injonction provisoire, les syndicats SMART-TD et BLET – ainsi que leurs sections locales, agents, employés, membres et toute personne agissant de concert ou participant avec chacun d’eux — soient PROVISOIREMENT CONTRAINTS et qu’il leur soit INTERDIT d’autoriser, d’encourager, d’inciter ou encore de participer à des grèves, des arrêts de travail, du piquetage, des ralentissements de travail, prendre des congés de maladie de façon collective et toute autre initiative contre BNSF ou ses filiales ferroviaires basés sur un quelconque conflit lié aux normes d’assiduité. »
Accompagnant la décision de la cour est une panoplie d’ordonnances imposées aux syndicats les obligeant à tout faire pour « empêcher et décourager leurs sections locales, agents, employés, membres ou toute personne agissant de concert avec eux d’agir de façon à contrevenir à cette injonction. »
Tentant de placer sa décision dans un contexte historique, le juge cite Harry Truman, qui, dans une lettre, aurait écrit en 1946 : « Je suis convaincu [que les patrons] aimeraient briser les syndicats et que les syndicats aimeraient les briser, faisant en sorte que les deux vont probablement se battre pour un certain temps pour ensuite arriver à une entente. Ainsi, les deux sont perdants et, à long terme, c’est l’homme de la rue qui se ramasse avec la facture. » Il cite aussi John F. Kennedy, qui aurait dit : « Ne négocions jamais par peur mais n’ayons jamais peur de négocier », et Lyndon Baines Johnson, qui aurait cité cette phrase du Livre d’Isaïe, verset 1 :18 : « Allez, raisonnons ensemble. »
Absent est une évaluation de l’urgence et de la validité des préoccupations des travailleurs pour leur propre vie. BNSF a simplement déclaré que l’histoire était de son côté et qu’elle confirmait la probabilité marquée de ses arguments. Les chemins de fer sont des infrastructures essentielles qu’il faut protéger contre la lutte des travailleurs pour leurs droits sous le prétexte de ne pas faire encore plus de torts à la chaîne d’approvisionnement. Pourquoi les travailleurs craignent-ils de négocier avec BNSF qui, après tout, ne fait qu’imposer une politique décidée sans eux et sans prendre en compte les questions qui les préoccupent, qui ne sont rien de moins que des questions de vie ou de mort ?
C’est tout à fait odieux et il en ressort la nécessité pour les travailleurs d’examiner de très près ce qui se passe et d’intensifier leur lutte à la défense de leurs droits et des droits de tous et toutes, ainsi que pour le renouveau démocratique, pour que les peuples soient investis du pouvoir de prendre les décisions sur toute question qui affecte leur vie.
(Forum ouvrier, affiché le 28 février 2022)
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