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Les conditions de vie au Nunavut
Appuyons fermement la lutte des travailleurs pour le respect et l’amélioration des conditions de vie de tous les résidents !
Forum ouvrier s’est récemment entretenu avec Jason Rochon, président du Syndicat des employés du Nunavut (SEN), au sujet des préoccupations et des priorités du syndicat pour la nouvelle année. Forum ouvrier salue les travailleurs du Nunavut qui luttent pour leurs droits et les droits de tous et toutes dans les conditions les plus difficiles.
Forum ouvrier : Quelles sont les priorités du SEN et les vôtres, en tant que président, pour 2022 ?
Jason Rochon : En un mot, notre priorité est que nos travailleurs soient traités avec le respect qu’ils méritent.
Notre syndicat représente plus de 5 000 travailleurs à tous les niveaux de gouvernement au Nunavut — municipal, y compris le logement, le gouvernement du Nunavut (GDN) et la Qulliq Energy Corporation (QEC) qui est la société d’électricité. Nous représentons toutes les catégories de fonctionnaires aux niveaux local et territorial.
En ce moment, nous avons des travailleurs qui n’ont pas eu de convention collective depuis septembre 2018, c’est-à-dire environ 4 000 employés du GDN. Nous venons de terminer une campagne pour un nouvelle entente équitable pour les travailleurs du GDN, car cela fait maintenant quatre ans qu’ils travaillent sans une entente et, durant cette période, le coût de la vie a tellement augmenté. Dans le cadre de cette campagne, que nous avons appelée « Here for Nunavut » (Nous sommes là pour Nunavut), nous avons demandé à nos membres d’envoyer des lettres à leur député à l’Assemblée législative. Nous avions une lettre en ligne et ils pouvaient ajouter leur nom et cliquer sur « envoyer ». Cette campagne d’envoi de courriels à nos députés visait à les inciter à revenir à la table des négociations. Nous avions également des annonces à la radio, des annonces imprimées et des annonces dans les médias sociaux. Nos annonces étaient bilingues, en anglais et en inuktitut.
Nos gens du GDN ont travaillé durant la COVID-19. À de nombreuses reprises ils ont ramené les cas de COVID-19 à zéro. Ce sont des travailleurs de première ligne. Ils sont les concierges des écoles, ils veillent à la propreté des hôpitaux, ils travaillent dans le domaine des finances et s’assurent que les gens sont payés. Ils ont eu affaire à un employeur qui a beaucoup d’emplois qui ne sont pas pourvus. À nos endroits de travail, lorsque nous regardons à droite et à gauche, nous voyons beaucoup de sièges vides. Nos gens font leur travail et plus encore, mais ils ne sont pas rémunérés en conséquence. Cela cause beaucoup de stress, beaucoup de maladies, beaucoup de toxicité parce que les gens s’épuisent.
Nos membres ont également dû faire face à des défis quotidiens, notamment le coût élevé de la vie, l’insécurité alimentaire et le manque d’accès aux services de santé mentale. Nous avons fait pression et lutté pour que le gouvernement revienne à la table et négocie une entente équitable. Nous avons intenté une action en justice contre lui pour avoir négocié de mauvaise foi. J’ai fait une vidéo publique et j’ai dit que j’abandonnerai la poursuite au nom de nos membres s’ils reviennent à la table et négocient une entente équitable et s’ils s’assurent que nous faisons passer nos membres et la population du Nunavut en premier.
Pour les travailleurs du GDN, un point de friction dans nos conventions collectives est l’indemnité de vie dans le Nord, qui n’a pas été augmentée depuis 12 ans[1]. C’est inexcusable, car nous savons que le coût de la vie ne cesse d’augmenter, surtout au cours des deux dernières années de la pandémie. Les gens ne peuvent pas faire de rattrapage. Nos membres sont en difficulté. Nous devons faire en sorte que nos membres puissent payer leurs factures et dormir la nuit sans avoir à s’inquiéter de leurs finances.
Nous avons besoin d’augmentations salariales. Un autre de nos points d’achoppement avec le GDN est le congé payé pour violence conjugale. Nous savons que les femmes, et toute personne prise dans une situation familiale où il y a de la violence, doivent avoir la possibilité de réussir et d’avoir une bonne qualité de vie. Si le congé payé pour violence conjugale permet de sauver une seule vie au Nunavut, cela en vaudra la peine.
Pendant des années, nos représentants élus nous ont dit, à maintes reprises, que la lutte contre la violence familiale était importante pour eux. Nous leur donnons maintenant l’occasion de joindre le geste à la parole.
Nous avons besoin d’action. Les belles paroles ne protègent pas les femmes, elles ne protègent pas les gens dans les relations conjugales. Elles ne permettent pas de mettre de la nourriture sur la table. Les enfants de nos membres vont à l’école le ventre vide, ils vont au lit le ventre vide. Les parents luttent, nos travailleurs luttent pour être en mesure de se loger. Nos membres travaillent dur et nous devons nous assurer que nos employeurs les respectent.
C’est une priorité essentielle pour nous en 2022.
Une autre priorité importante de la nouvelle année pour les membres que je représente est de parler aux membres, de m’assurer que j’ai des occasions de partager des histoires avec eux et d’entendre leurs histoires. Nous devons écouter les membres et avoir des liens réels avec eux, de sorte que lorsque j’ai l’occasion de les représenter auprès du gouvernement ou des médias, je sais exactement ce qu’ils ressentent et ce que je dois dire.
Nous allons être en communication constante avec nos membres. C’est un engagement que j’ai pris il y a trois mois lorsque j’ai été élu. Cela signifie l’envoi de courriels en masse à tous nos membres, la publication de messages sur nos médias sociaux et notre site web, des conseils pour traverser la pandémie, faire le point avec eux, etc. Nous avons des cours à venir, – parler des bases du syndicat, introduction aux syndicats, comprendre votre convention collective. Nous devons avoir les coordonnées les plus récentes de nos membres afin de pouvoir les mobiliser à court terme ou leur envoyer un message important.
Nous allons insister auprès de tous les employeurs du Nunavut qu’ils comblent les postes vacants.
Une autre priorité est de s’assurer que les employeurs répondent à nos préoccupations en matière de santé et de sécurité.
À cause de la COVID-19, le prix du panier d’épicerie a augmenté. Par exemple, les fermiers ont des difficultés. Cela signifie que le prix de la viande et des produits laitiers a augmenté. En outre, une grande partie de nos aliments sont acheminés par avion ou par bateau pendant l’été, ce qui nous oblige à payer des frais de transport et d’expédition supplémentaires, et le coût des produits alimentaires est très élevé. La pandémie a une incidence directe et indirecte sur le coût de la vie. Nos travailleurs du GDN, par exemple, reçoivent l’allocation du Nord du Nunavut en plus de leur salaire horaire pour compenser le coût élevé de la vie, mais notre employeur a gelé cette allocation pendant 12 ans. Nous savons que le coût de l’épicerie et le coût de la vie ont augmenté considérablement au cours des 12 dernières années. Ils le savent aussi, mais ils refusent de faire quoi que ce soit. Ils doivent agir, et de bien meilleure façon.
Ce sont donc nos et mes principales priorités en tant que président du Syndicat des employés du Nunavut pour 2022. Nos travailleurs doivent être traités avec le respect qu’ils méritent.
Note
1. L’indemnité du Nord du Nunavut (INN) est une prestation versée aux employés du gouvernement qui vise à compenser la différence du coût de la vie entre le Nunavut et les centres désignés du Sud et à égaliser la rémunération des employés du Nunavut qui font face à des conditions économiques différentes.
(Forum ouvrier, affiché le 29 janvier 2022)