12 septembre 2024
Élection partielle fédérale dans LaSalle—Émard—Verdun le 16 septembre
La peur du changement de l’élite politique
• La peur du changement de l’élite politique
• Demandes persistantes de démocratisation du processus électoral
• L’éditorial sentencieux de La Presse
• Un autre qui exprime son mépris pour le projet du plus long bulletin de vote
• Le vitriol de l’ancien directeur général des élections
Élection partielle fédérale dans LaSalle–Émard–Verdun le 16 septembre
La peur du changement de l’élite politique
Il n’est pas surprenant que ceux qui défendent le système électoral, peu importe à quel point il écarte le peuple, n’aiment pas du tout le Projet du plus long bulletin de vote et le fait qu’un si grand nombre de candidats se présentent à l’élection partielle dans LaSalle–Émard–Verdun (LEV) le 16 septembre. Le bulletin de vote pour cette élection mesurera près d’un mètre de long (30,5 x 96,5 cm) parce qu’il y a le nom de 91 candidats à y inscrire.
Cela semble avoir exaspéré certains défenseurs du statu quo. Il n’est pas rare qu’on tente de dresser les électeurs contre le Projet en disant que cela rallonge le temps nécessaire pour voter et que le décompte causera des problèmes aux électeurs et aux employés d’Élections Canada. Bien qu’ils ne puissent avancer aucun argument pour justifier leur ingérence dans l’élection – une utilisation flagrante de leurs privilèges et de leur pouvoir pour influencer le résultat -, ils qualifient le Projet du bulletin le plus long de perturbateur, de frivole, de nuisible, d’infantile et ainsi de suite et exigent que des méthodes soient trouvées pour y mettre un terme.
Bien qu’ils disposent de suffisamment de pouvoir et d’argent, en grande partie en provenance des coffres de l’État, pour trouver de nouveaux moyens de supprimer les tentatives des Canadiens de jouer un rôle dans le processus politique d’une manière qui leur soit favorable, ces tentatives ne manqueront pas de se retourner contre eux. Les efforts des citoyens de ce pays pour démocratiser le processus électoral finiront par l’emporter parce qu’il est si manifestement antidémocratique !
Voyons ce que l’élection partielle de LEV révèle cette fois-ci sur la méthode de comptage des votes du scrutin uninominal à un tour. Le Parti marxiste-léniniste du Canada (PMLC) propose un programme sérieux de démocratisation du processus électoral et présente Norman Chouinard comme candidat à cette élection partielle pour inciter les citoyens de LEV à se joindre à cet important travail. Le PMLC s’efforce également d’aider divers autres candidats du Projet du bulletin de vote le plus long à se faire connaître, ainsi que d’autres candidats indépendants et des « tiers partis » qui soulèvent des questions spécifiques.
Dans l’état actuel des choses, le Projet du plus long bulletin de vote rassemble de plus en plus d’adhérents et devient une force de plus en plus organisée.
Demandes persistantes de démocratisation du processus électoral
Il y a 91 candidats inscrits pour l’élection partielle fédérale dans LaSalle–Émard–Verdun (LEV) du 16 septembre. De ce nombre, 79 font partie du Projet du bulletin de vote le plus long. Cela signifie que 87 % des candidats se présentent sous la même bannière pour exprimer leur opposition au mode de scrutin uninominal à un tour et pour permettre aux citoyens de s’impliquer.
Les Canadiens réclament depuis longtemps une nouvelle loi électorale qui leur donne le pouvoir de décider plutôt que de le donner à des partis cartellisés qui usurpent des positions de pouvoir et des privilèges au moyen d’une loi électorale conçue pour écarter le peuple du pouvoir. Pendant des années, les détenteurs du pouvoir et des privilèges ont ignoré l’exigence des Canadiens de jouer un rôle direct dans le gouvernement. Ils ont même modifié la loi électorale à maintes reprises pour protéger et renforcer leurs privilèges et marginaliser les citoyens et ceux qui tentent d’intervenir dans les élections en se présentant comme candidats ou en participant sous la catégorie appelée « tiers ».
Quelles que soient les mesures prises par les élites, dans tout le pays, des personnes de tous horizons et de toutes convictions politiques continuent de s’opposer au mode du scrutin uninominal à un tour. Ils le font parce que les gouvernements de partis que cette méthode de comptage des voix crée n’exercent pas en réalité les mandats qu’ils revendiquent. Quelle que soit la « majorité » des voix qu’ils parviennent à réunir, elle est loin de représenter la majorité des électeurs ayant droit de vote. Les tentatives des élites de balayer le manque de représentativité sous le tapis sont en vain.
Le Projet du bulletin le plus long mérite des félicitations pour avoir donné aux citoyens la possibilité de dénoncer cette méthode frauduleuse qui consiste à réclamer des majorités qui représentent le peuple. Les citoyens se présentent comme candidats, expriment directement leur opposition au système électoral non représentatif et donnent aux électeurs d’une circonscription l’occasion de faire de même.
Plus cela va, plus la crise profonde dans laquelle les institutions démocratiques de ce pays sont embourbées montre la nécessité pour la classe ouvrière et le peuple de prendre les choses en main. L’élection présidentielle américaine montre également à quel point la démocratie américaine est devenue dysfonctionnelle.
L’éditorial sentencieux de La Presse
Le journal montréalais La Presse a publié le 3 août un éditorial exprimant son mépris évident pour le Projet du plus long bulletin de vote, qui présente 79 des 91 candidats à l’élection partielle fédérale de LaSalle–Émard–Verdun (LEV), qui a lieu le 16 septembre. À part le ton sentencieux et l’échec à illustrer son propos tel qu’exprimé dans le titre : « Les candidats bidon qui se moquent de nos élections », l’éditorial en dit long sur la nature très antidémocratique du système électoral conçu pour empêcher le peuple d’accéder au pouvoir.
La Presse dit trouver « tout à fait paradoxal qu’un groupe qui veut rendre le système électoral plus démocratique utilise une méthode brimant l’exercice de la démocratie pour arriver à ses fins ». À part dire que la participation d’un si grand nombre de candidats gêne le processus, le journal n’explique pas en quoi le Projet du bulletin le plus long nuit à l’exercice de la démocratie. Son objectif est révélé lorsqu’il ajoute : « Mais le plus grave, c’est qu’en polluant les bulletins de vote avec une foule de candidats bidon, on sème la confusion chez les électeurs qui ont plus de mal à faire leur choix. […] À une époque où notre démocratie est menacée par l’ingérence de pays étrangers, il n’y a pas de blague à faire avec le processus électoral. »
L’éditorial de La Presse est problématique à plusieurs égards. Entre autres, il y a cette insistance sur le fait que les élections offrent aux citoyens un « choix » de candidats. Si le choix est trop grand, les citoyens ne s’y retrouveront pas, dit-il. Par une arrogance typiquement élitiste, l’éditorialiste qui a écrit cet article ne tient pas compte de ce que pensent réellement les citoyens et de leur capacité à voir clair dans le système électoral qui est le vrai bidon. Elle devrait aller faire du travail de masse avec les candidats du Projet du bulletin le plus long : elle verrait ce que les gens ont à dire sur les partis cartellisés, leurs candidats et leurs gouvernements ! Elle ose dire que les citoyens sont « confus » par la présence de tant de candidats parce qu’il n’est pas dans l’intérêt de ceux que la rédaction sert de les écouter et d’écouter ce qu’ils ont à dire.
Mais ce qui est le plus révélateur, c’est l’arrogance et le ton moralisateur des élites qui justifient leur loi électorale en s’érigeant en protecteurs vertueux des citoyens contre les tentatives prétendument frivoles de les embrouiller avec des candidats gênants. Lors du travail de masse pour recueillir des signatures sur les formulaires de mise en candidature des 79 candidats du Projet du bulletin de vote le plus long dans LEV, tout le monde était impatient de signer. Tous ont exprimé avec force ce qu’ils pensaient du système électoral. Beaucoup ont expliqué en détail ce que signifie pour eux de se voir confié comme seul rôle de voter pour un candidat d’un parti cartellisé ayant suffisamment de pouvoir, de privilèges et d’argent pour se vendre, être repris par les médias monopolistiques et les sondages qui déclarent qu’ils s’intéressent aux enjeux que les électeurs jugent importants.
Les citoyens de LEV se moquent de cette présomption que les électeurs sont désorientés ou que le rôle des médias monopolisés est de protéger les électeurs vulnérables ! Et pour comble, on leur dit qu’ils ont besoin d’être protégés contre ces citoyens ordinaires qui ont le courage et l’audace de présenter un projet qui appelle les électeurs à voter contre le mode de scrutin uninominal à un tour ! Au grand dam de La Presse, le projet est novateur et a donné aux résidents de la circonscription un moyen important de participer à la réalisation des changements qui s’imposent, comme ils l’ont toujours fait lorsque l’occasion leur en est donnée. Et ce n’est qu’un début, un recommencement !
À ce stade, alors que les citoyens s’organisent pour faire du renouveau démocratique du processus électoral une réalité, la crise dans laquelle le système électoral actuel est enlisé contribue grandement à le discréditer et à persuader les citoyens d’agir pour le reléguer à l’histoire une fois pour toutes.
Les démonstrations horribles de pouvoir et de privilège nous donnent une idée de quoi sont faites ces élites qui sont perçues comme étant intéressées, voire menteuses, tricheuses, vendeuses, magouilleuses. Comme le disent les citoyens et les résidents qui ne font pas partie des machines électorales des partis cartellisés, ce sont ces candidats des élites qui dérangent, et non ceux qui défendent le renouveau démocratique.
Un autre qui exprime son mépris pour
le projet du plus long bulletin de vote
Suite à l’éditorial publié par La Presse le 3 août, exprimant son mépris total pour le Projet du plus long bulletin de vote dans l’élection partielle fédérale de LaSalle–Émard–Verdun (LEV) qui aura lieu le 16 septembre prochain, un autre génie s’est manifesté pour exprimer son mécontentement face au fait qu’il y a 91 candidats sur le bulletin de vote : Yves-François Blanchet, chef du Bloc québécois. La jeunesse québécoise n’en revient pas de l’amour de Blanchet pour les institutions libérales imposées au Québec par le gouvernement impérial britannique en 1840. C’est à cette époque qu’il a imposé ses institutions et son système électoral pour concentrer le pouvoir dans les mains d’une classe dominante de propriétaires avec l’infâme Acte d’Union. L’intention était, entre autres, d’éteindre la souveraineté du peuple québécois une fois pour toutes.
Puisque ce parti prétend représenter les intérêts du Québec, qu’est-ce qui pousserait son chef à défendre un système électoral et un mode de scrutin hérités des bâtisseurs de l’empire britannique pour empêcher le peuple d’accéder au pouvoir ? Quelle bêtise ! Les Britanniques ont proclamé l’Acte d’Union en 1840 afin d’imposer le système qu’ils appellent « gouvernement responsable » à leurs dominions en Amérique du Nord. Ils l’ont fait après avoir réprimé par la force la tentative de formation de la République du Québec en 1837-1838 dans le Bas-Canada et par la suite de la République à deux étoiles pour laquelle les patriotes du Haut-Canada se sont également battus au cours de la même période. Les élites représentant le pouvoir oligarchique de l’Empire britannique de l’époque ont pris la moitié du territoire du Québec – connu à l’époque sous le nom de Bas-Canada – et l’ont donné à l’Ontario – appelé à l’époque Haut-Canada. Elles ont imposé au Québec la moitié de la dette de l’Ontario. Les Britanniques ont imposé le premier Parlement du Canada, dont les deux factions étaient si divisées qu’il ne pouvait fonctionner. De là est née l’idée de confédérer les quatre dominions britanniques du Canada, ce qui a conduit à l’imposition de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique en 1867, qui tient le Québec dans ses griffes depuis.
À quoi pense Yves-François Blanchet ? Logiquement, on s’attendrait à ce que le chef du Bloc québécois, créé pour défendre les intérêts du Québec, épouse une conception de l’édification nationale qui confère la souveraineté au peuple, et non à un État contrôlé par une classe dirigeante basée sur un système de règles appelé Roi au Parlement. Qu’il veuille ou non prêter allégeance à ce monarque étranger déclaré chef d’État du Canada, c’est précisément le système électoral qu’il soutient qui prive le peuple de son droit à se gouverner lui-même. Il est le dernier à défendre les institutions canadiennes qui sont le principal obstacle aux aspirations de ceux qui défendent les intérêts et la souveraineté de la classe ouvrière et du peuple québécois.
Néanmoins, le chef du Bloc a attaqué le Projet du bulletin de vote le plus long comme suit : « Quand l’activisme remplace les institutions, quand l’activisme remplace la science, quand l’activisme remplace la Justice. […] C’est une tendance lourde dans notre société. »
Lui qui se pose en défenseur des institutions, de la science et de la justice, qu’a-t-il à dire sur la crise dans laquelle ces trois domaines s’enfoncent, vraisemblablement à cause de l’« activisme » ? Rien. Il en est réduit à décrire quelques preuves de la crise dans laquelle le système électoral est enlisé, après quoi ce ne sont pas les institutions et ceux qu’elles servent qu’il remet en cause, mais « l’activisme ». Il dit :
« Il y a des politiciens qui ont instrumentalisé le mépris pour l’engagement politique aux fins de leur propre réélection ou pour entraîner des adversaires dans leur propre turpitude lorsque leur popularité s’est effondrée. Certains acteurs média jouent aussi la carte du mépris des politiciens, peut-être pour rehausser leur propre portée, leur propre prestige, et aujourd’hui, des partis politiques systématisent la ‘politique sale’ en faisant fi de la vérité pour déployer des campagnes de dénigrement et influencer les plus vulnérables des électeurs. J’espère qu’il ne faut pas échapper la démocratie pour réaliser combien elle est précieuse… »
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Et voilà. Lui aussi est un protecteur des « électeurs les plus vulnérables ». La vie de ces « électeurs » – comme on appelle les citoyens du pays – ne serait pas rendue difficile parce qu’ils subissent l’offensive néolibérale antisociale la plus brutale que le pays ait jamais connue. Ils ne seraient pas désavantagés par le fait que les institutions dites démocratiques se sont révélées corrompues, gouvernent par décret et foulent aux pieds leurs revendications sur tous les plans. Non, les « électeurs » seraient vulnérables parce que les activistes exigent que ces institutions rendent des comptes. Les « électeurs » sont vulnérables parce qu’ils exigent que l’État et ses institutions accordent la priorité aux besoins du peuple, et non à ceux des riches qui font fortune au nom des grands idéaux qu’ils citent lorsqu’ils détruisent l’environnement social et naturel.
Yves-François Blanchet ne s’est certainement pas fait d’amis avec ces commentaires pseudo-intellectuels absurdes. Se moquer des efforts de centaines et de milliers de personnes au Québec et au Canada qui font tout leur possible pour défendre la cause de la justice sociale, la voie de la paix, de la liberté et de la démocratie dans le monde, les droits de tous et l’environnement social et naturel est un choix politique désespéré s’il en est.
Le vitriol de l’ancien directeur général des élections
Un autre serviteur indigné de l’État canadien s’est manifesté lors du passage à la radio au Québec de l’ancien directeur général des élections du Canada, Jean-Pierre Kingsley, qui a fustigé le Projet du bulletin de vote le plus long avec beaucoup d’ardeur. Selon lui, « ce qui est le plus regrettable de cette initiative, c’est qu’on fait payer les électeurs finalement. Ça crée une confusion, je dirais, extrême. En plus, ça rend le bulletin de vote très difficile à manipuler auprès de l’agent électoral. Les travailleurs électoraux, dans les bureaux de vote, sont obligés de décortiquer tout cela par la suite ».
Jean-Pierre Kingsley est monté au front à son tour pour défendre les institutions démocratiques du Canada, qui sont manifestement en proie à une profonde crise existentielle. S’il doit utiliser son prestige en tant qu’ancien directeur général des élections du Canada, il devrait peut-être savoir qu’il ne faut pas plaider la cause de ceux qui ont des privilèges et du pouvoir et qui pratiquent la politique de l’autruche. Ces forces ne peuvent se résoudre à reconnaître que la démocratie canadienne est confrontée à une profonde crise existentielle car cela pourrait mettre en péril leur position de privilège et de pouvoir.
Pourquoi ne pas informer les Canadiens qu’en effet, les questions soulevées par le Projet du bulletin de vote le plus long sur le manque de représentativité et de représentation en raison de la méthode uninominale de comptage des votes et des personnes qui contrôlent le pouvoir politique au Canada sont à l’ordre du jour du corps politique au Canada depuis au moins l’élection fédérale de 1988. À cette élection, une majorité d’électeurs ont voté pour des candidats qui se disaient opposés à l’ALÉNA, mais les progressistes-conservateurs de Brian Mulroney ont déclaré qu’ils avaient reçu le « mandat » de mettre en oeuvre l’accord commercial avec les États-Unis de toute façon.
Tout de suite après cette élection, la Commission Lortie sur la réforme électorale et le financement des partis a été créée et a déclaré dans son rapport de 1992 : « … Mais bon nombre de citoyens et citoyennes demeurent insatisfaits du fonctionnement de notre démocratie électorale, et plusieurs sont venus en témoigner éloquemment aux audiences publiques de la Commission. Loin de se contenter d’ajustements législatifs superficiels, ils réclament une réforme en profondeur centrée sur les principes mêmes et la finalité de la démocratie électorale. »
Jean-Pierre Kingsley pourrait expliquer que depuis lors, les amendements à la Loi électorale du Canada se sont succédé et n’ont fait qu’accroître la marginalisation du peuple.
Il n’est pas faux de penser que l’ancien gardien de ce qu’on appelle des élections libres et équitables s’inquiète de voir qu’elles ne sont ni libres ni équitables. En fait, au cours de son mandat de 1990 à 2007, il a exprimé à plusieurs reprises son inquiétude devant le fait que, même si la démocratie canadienne était présentée comme la plus libre et la plus équitable de toutes, ce n’était pas le cas. Dans ses recommandations au Parlement après les élections de novembre 2007, il a demandé que le temps d’antenne gratuit qui est alloué de manière préférentielle aux partis à la Chambre des communes soit divisé de manière égale entre tous les partis enregistrés. Il a fait référence au rapport de la commission Lortie, selon lequel « en toute équité, les concurrents devraient disposer d’un accès raisonnable aux médias qui permettent le mieux de diffuser leur message auprès des électeurs et électrices ». « De même, écrivait-il dans sa recommandation, le public a le droit d’être informé de façon ‘juste et objective’. »
Les directeurs généraux des élections qui ont suivi Jean-Pierre Kingsley ont fait les mêmes propositions, mais elles ont été
rejetées par le cartel des partis à la Chambre. Après sa retraite, lorsque Justin Trudeau a refusé de tenir sa promesse de mettre fin à la méthode du scrutin uninominal à un tour, Jean-Pierre Kingsley a déclaré à la CBC : « « Un grand nombre de Canadiens ont dit que 39,5 % des votes donnent 54 % des sièges […]. Beaucoup de gens commencent à penser que tout cela n’est pas cohérent. Il y a quelque chose qui ne va pas. »
Qu’est-ce qui a changé ? Jean-Pierre Kingsley pourrait peut-être nous dire quels changements sont intervenus qui justifient que les Canadiens condamnent le Projet du bulletin de vote le plus long.
Les Canadiens exigent depuis très longtemps la démocratisation du processus électoral et le Canada a vu dans des commissions royales, des comités parlementaires, des études indépendantes et des sondages enregistrer à maintes reprises le peu d’estime des gens pour les gouvernements, les partis cartellisés, les politiciens de ces partis cartellisés et les institutions telles que la Chambre des communes ainsi que le Sénat. Il est également vrai que les résultats d’une élection après l’autre démontrent la vérité en ce qui concerne les gouvernements formés avec de faibles pourcentages des votes exprimés et qui prétendent avoir un mandat pour gouverner.
Enfin, le rejet par la population des stratagèmes pour payer les riches et des mesures prises par les gouvernements pour criminaliser la dissidence n’a en rien diminué aujourd’hui, alors que les portes tournantes entre les PDG et les dirigeants des intérêts privés les plus intéressés, d’une part, et les ministres et les hauts fonctionnaires de l’État, d’autre part, changent de place aussi rapidement qu’ils changent de costume. De même, ce que le monde entier voit se dérouler dans la campagne électorale présidentielle aux États-Unis, dont le Canada est tributaire, n’est guère une approbation des institutions démocratiques en crise.
Mais non, cet ancien directeur général des élections propose des changements plus ciblés, tels que l’obligation pour les candidats de présenter 100 signatures d’électeurs qui n’ont pas déjà soutenu un autre candidat, et l’interdiction pour les agents officiels de représenter plus d’un candidat. Une telle modification de la Loi électorale ne serait pas surprenante compte tenu de toutes les autres qui ont été conçues pour protéger les partis cartellisés et leurs positions de privilège et de pouvoir.
Une autre proposition vise à ce que la Loi électorale exige à nouveau une caution de 1000 dollars des candidats, comme c’était le cas auparavant, mais qui a été annulée lorsque les tribunaux l’ont jugée anticonstitutionnelle. « Ce qu’ils font actuellement est légal. Mais ce n’est pas légitime », de déclarer Jean-Pierre Kingsley lors d’un entretien avec La Presse en juin. Il a fait écho au rapport d’Élections Canada à la suite de l’élection partielle de 2022 à Mississauga-Lakeshore, où les candidats se sont également présentés avec le projet du bulletin le plus long. Le rapport soulignait que « tout porte à croire que certains candidats à l’élection partielle ont agi de concert ». Le rapport indique que cela « soulève la question de savoir si les candidats briguaient réellement les suffrages de leur propre chef ».
Semer le doute sur l’intégrité de ceux qui tentent d’apporter les changements nécessaires tient de la lâcheté, mais ce n’est pas nouveau. Comment les Canadiens osent-ils s’organiser plutôt que de se satisfaire de voter une fois tous les quatre ou cinq ans ? Le fait est que les gens sont tout à fait capables de trouver de nouvelles façons créatives de gagner le droit de s’exprimer en leur propre nom et qu’ils continueront à le faire.
Le vrai problème est que le système électoral n’est pas représentatif de ce que veulent les Canadiens. Il a été conçu dès le départ pour les tenir à l’écart du pouvoir en autorisant quelqu’un qu’ils ne connaissent pas et sur lequel ils n’exercent aucun contrôle à prendre des décisions en leur nom. Les députés ne sont pas les seuls concernés. Leurs partis ne sont là que pour présenter le vernis d’une démocratie composée d’un parti au pouvoir et d’un ou plusieurs partis d’opposition qui, ensemble, sont censés représenter l’ensemble du corps politique. Entre-temps, il est devenu normal que les abstentionnistes représentent un pourcentage de l’électorat similaire à celui qui vote pour l’un ou l’autre de ces partis et qu’ils ne comptent même pas !
L’astucieux ministre canadien de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales monte au front
Dominic LeBlanc, ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales, cité dans Le Devoir du 28 août, s’est dit ouvert à modifier la Loi électorale pour « limiter le nombre de candidatures frivoles qui perturbent le vote, mais seulement si cela lui est recommandé par Élections Canada ».
Belle façon de fuir vos responsabilités, M. LeBlanc ! Tout le monde sait que le rôle d’Élections Canada est de mener des élections et de s’assurer qu’elles sont ce qu’on appelle libres et équitables, selon la définition de la Loi électorale qui, comme on peut s’y attendre, n’est ni libre ni équitable. Mais laissons cela de côté pour le moment. Le fait est que le rôle d’Élections Canada n’est pas censé être ce que l’on appelle politique. Les décisions politiques sont censées être du ressort de la Chambre des communes, et non de l’organisme de l’État chargé de conduire une élection une fois qu’elle a été convoquée par le premier ministre en vertu de ses pouvoirs de prérogative. Cependant, avec le soutien total des agences de renseignement, Élections Canada est de plus en plus poussé à assumer un rôle politique. Cela ne fera qu’enliser davantage le processus électoral et le pousser à atteindre un point de non-retour.
Tout cela se fait au nom de la sécurité nationale et de la défense de la démocratie contre l’ingérence étrangère et maintenant, apparemment, au nom de la défense de l’intégrité du processus électoral contre des candidats frivoles et nuisibles.
Élections Canada doit publier son rapport complet sur les élections partielles de cet été l’année prochaine et les Canadiens verront par eux-mêmes quels arguments il parvient à donner pour justifier quoi que ce soit. Ce à quoi ils peuvent s’attendre, c’est qu’à l’instar de tout ce qui se passe dans l’ensemble du pays, quiconque ne peut fournir les arguments recherchés par l’État ne sera pas invité à donner son avis !
On peut se demander quelle démocratie ces médias, politiciens et hauts fonctionnaires défendent lorsqu’ils attaquent et méprisent des citoyens du Canada et du Québec qui revendiquent leur droit à se présenter aux élections. Toutes ces déclarations et accusations contre le Projet du plus long bulletin de vote et tous ceux qui refusent le statu quo visent à s’assurer que la question fondamentale de la crise de la démocratie libérale elle-même ne soit pas abordée. Cela ne fait que renforcer la conviction des Canadiens et des Québécois à l’esprit démocratique que leurs tentatives de s’exprimer sont justifiées.
La crise de crédibilité et de légitimité du système électoral ne sera pas atténuée en attaquant ceux qui cherchent à mettre fin à la défense des privilèges et du pouvoir. C’est en donnant la parole au peuple et en gardant l’initiative dans ses mains que le peuple se donne les moyens d’agir.
Propositions de modification à la Loi électorale pour rendre illégal le Projet du bulletin le plus long
Mettre en doute les intentions des candidats du Projet du bulletin le plus long, c’est refuser de reconnaître que les Canadiens et les Québécois demandent depuis très longtemps qu’on mette fin au mode de scrutin uninominal à un tour. Ceux qui le font ne cherchent même pas à comprendre pourquoi tant d’entre eux sortent recueillir des signatures pour soutenir les candidats du bulletin de vote le plus long et pourquoi il est important d’encourager le débat public sur la nécessité de démocratiser le système électoral.
L’expérience du PMLC est que les candidats qui défendent une cause qui est chère aux citoyens n’ont aucun problème à aller chercher les 100 signatures requises pour la mise en candidature. Les gens viennent les voir en grand nombre pour leur faire part de leurs propres opinions sur le besoin de se débarrasser d’un système électoral qui les tient à l’écart avec tant de mépris, tandis que les partis cartellisés se plaignent qu’il est très difficile de recueillir des signatures. C’est sans doute parce qu’on leur ferme la porte au nez ! Ils sont outrés que le Projet du bulletin de vote le plus long de l’élection partielle fédérale dans LaSalle-Émard-Verdun (LEV) a réussi à recueillir près de 13 000 signatures en deux jours. Ils proposent de modifier la Loi électorale pour réduire le nombre de signatures d’électeurs requis à 75, plutôt qu’à 100. Un des partis prétend même que ce serait une victoire pour la démocratie que de recueillir moins de signatures !
On peut maintenant s’attendre à ce que beaucoup d’argent soit dépensé pour embaucher des firmes qui conseilleront sur les arguments à donner pour rendre ce Projet du bulletin de vote le plus long illégal. Les institutions démocratiques moribondes donnent naissance à toutes sortes de spécialistes qui inventent de nouvelles lois et des changements qui criminalisent la parole et l’association et trouvent des raisons pour appuyer le fait que des pouvoirs de police doivent être responsables de surveiller ceux et celles qui, selon eux, mettent leur système non démocratique à risque, comme si leurs propres agissements ne suffisaient pas.
Les Canadiens peuvent s’attendre, entre autres, à d’autres amendements à la Loi électorale au nom d’améliorer la démocratie ! Les réunions et débats de candidats n’existent plus – mais qui veut être tenu en otage par les bouffonneries de Kamala Harris et de Donald Trump et de leurs semblables ici ? Les médias monopolisés n’ont certainement pas intérêt à fournir de l’information au sujet des candidats qui parlent en leur propre nom ou quelles sont leurs convictions. Clairement, aux yeux de l’élite dirigeante, aller vers le peuple est une atteinte à leur conviction que tout leur est dû et qu’ils ont tous les droits.
Il incombe aux Canadiens et aux Québécois de chercher à résoudre le problème d’un système de gouvernance de partis qui se pose en obstacle à leur droit d’avoir un mot à dire sur tout ce qui touche à leur vie. Aujourd’hui, préserver le pouvoir entre les mains de gouvernements de partis cartellisés contrôlés par des intérêts étroits privés supranationaux représente un danger réel.
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