Dans l’actualité le 11 avril
En action à la défense des droits
Les acteurs canadiens accordent à leur comité de négociation un vote de grève massif
Les membres de l’Alliance des artistes canadiens du cinéma, de la télévision et de la radio (ACTRA) ont voté massivement pour accorder à leur comité de négociation un mandat de grève en réponse à la menace des producteurs de publicités de déclencher un lockout. La convention collective entre l’ACTRA et les producteurs de publicités télévisées a pris fin le 30 juin 2020 et une nouvelle entente n’a pas été conclue.
L’ACTRA est le syndicat national des interprètes professionnels qui travaillent dans les médias enregistrés de langue anglaise au Canada, comprenant la télévision, le cinéma, la radio et les médias numériques.
Les producteurs de publicités, l’Institut des Agences canadiennes (ICA) et l’Association canadienne des annonceurs (ACA), cherchent à insérer des taux non syndiqués à la convention d’ACTRA et à se donner le choix de travailler avec des artistes non syndiqués comme bon leur semble.
L’ICA et l’ACA avaient décidé de possiblement déclencher un lockout des interprètes de l’ACTRA à minuit le 2 avril (heure de l’Est). Cet échéancier a depuis été reporté à 12 h 01 (heure de l’Est) le 26 avril.
Face à cette menace de lockout, le Conseil national de l’ACTRA a décidé de tenir un vote de grève pour exprimer l’appui aux efforts du comité de négociation de négocier une entente équitable pour les membres de l’ACTRA. Le vote sur le mandat de grève a pris fin le 30 mars.
Les négociations se poursuivent et l’ACTRA dit : « Ce mandat fort ne veut pas nécessairement dire qu’il y aura un arrêt de travail. Nous continuons de négocier pour éviter un lockout tout en rejetant les modifications proposées à la convention collective qui porteront préjudice aux artistes. »
Aujourd’hui, dans la « nouvelle économie », la majorité des acteurs sont confrontés à des conditions de travail difficiles qui nécessitent une défense militante de leurs droits. C’était le cas à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle lorsque les syndicats de l’industrie du théâtre ont vu le jour. À cette époque, l’industrie a été révolutionnée par de puissants groupes de gestion qui l’ont monopolisée et l’ont centralisée. Cela a créé des conditions de travail difficiles pour les acteurs, que les puissants propriétaires et groupes de gestion ont encouragées.
Le 26 mai 1913, les acteurs aux États-Unis ont décidé de se syndiquer et ont formé le Actors’ Equity Association (AEA ou « Équité »). En 1919, Équité a organisé la première grève de l’histoire du théâtre américain et demandé d’être reconnue en tant que représentante et agent négociateur des artistes.
La grève a duré 30 jours, du 7 août au 6 septembre 1919, alors que les grévistes ont remporté une victoire en obtenant une convention collective type. La grève s’est répandue dans 8 villes, a fermé 37 spectacles et empêché l’ouverture de 16 autres.
Pendant la grève, la Chorus Equity Association a été formée, organisant les artistes qui chantaient et dansaient dans les choeurs des comédies musicales. Marie Dressler, la célèbre comédienne et actrice de théâtre et de film, a joué un rôle de premier plan dans la formation du syndicat des choristes et a été élue sa première présidente. Née à Cobourg, en Ontario, elle a déménagé en tant qu’enfant avec sa famille aux États-Unis. C’est là qu’elle commencé sa carrière dans un choeur à 8 dollars par semaine. Par la suite, elle a passé plusieurs années à apprendre sa profession en jouant pour des compagnies de théâtre ambulantes partout au Canada et aux États-Unis, pour éventuellement jouer dans des pièces et des comédies musicales à Broadway. Elle a été mise sur la liste noire des producteurs de Broadway pour sa prise de position et ses activités pro-syndicales. Ils l’ont empêchée d’exercer son métier d’actrice et l’ont laissée sans revenus.[1]
La grève qu’elle a aidée à organiser a été importante parce qu’elle a élargi la définition du travail et changé les perceptions en ce qui concerne les types de carrière qui pouvaient s’organiser. La grève a encouragé d’autres groupes dans l’industrie du théâtre à s’organiser.
Au Canada, les origines de l’ACTRA remontent aux années 1940, lorsque les artistes de la radio de Toronto ont organisé un syndicat – la Société des artistes de la radio de Toronto (RATS) – pour améliorer leur rémunération financière et leurs conditions de travail. Les années qui ont suivi ont permis de rassembler les artistes à l’échelle nationale et ont abouti à la création d’une nouvelle organisation nationale, l’ACTRA, en 1963. Aujourd’hui, l’ACTRA représente plus de 28 000 artistes professionnels à l’échelle du Canada.
Note
1. Marie Dressler a finalement pu rejouer dans des films lorsque le producteur de films Louis B Mayer, qui avait grandi à Saint-Jean au Nouveau-Brunswick, l’a engagée. Il a dit d’elle qu’elle était « la personne la plus adorée qui ait jamais mis les pieds dans le studio de Metro-Goldwyn-Mayer ». Parmi d’autres rôles célèbres, elle a joué aux côtés de Charlie Chaplin dans le film muet de 1914 « Tillie’s Punctured Romance »
À l’âge de 60 ans, Marie était non seulement la vedette de cinéma qui gagnait le plus d’argent mais celle également qui rapportait les plus grosses recettes au box-office. En 1931, Marie a reçu l’Oscar de meilleure actrice pour son rôle de Min dans le film comique à succès « Min and Bill ». Deux ans plus tard, elle devenait la première Canadienne à faire la une du magazine TIME.
Il y a un musée Marie Dressler à Cobourg.
Forum ouvrier, affiché le 11 avril 2022.
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