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Actualité et point de vue sur la crise ukrainienne
La stratégie du bord de l’abîme et la menace nucléaire
Le 27 février, des reportages indiquaient que Vladimir Poutine avait dit à ses hauts responsables de la défense et de l’armée de mettre les forces nucléaires « en régime spécial d’alerte au combat ». Les manchettes au Canada et aux États-Unis ont dit : « Poutine met les forces nucléaires en état d’alerte maximale et intensifie les tensions » On a parlé d’« escalade spectaculaire ».Dans sa réponse du 28 février, la Maison-Blanche a cependant choisi de minimiser la question peut-être parce qu’elle ne veut pas attirer l’attention sur le fait qu’elle s’engage dans des activités tous azimuts qui posent un grave danger de guerre en Europe. La Maison-Blanche a déclaré : « Nous pensons que la rhétorique provocatrice inutile et dangereuse sur les armes nucléaires accroît les risques d’incident, devrait être évitée, et nous n’allons pas nous y livrer. »
D’autres disent que Poutine le fait pour faire monter les enchères et pour menacer l’OTAN afin qu’elle se retire, ou pour faire pression sur l’Ukraine afin qu’elle négocie un règlement acceptable pour la Russie. Pendant ce temps, des reportages alarmistes sont également diffusés, selon lesquels une prétendue « occupation » russe des installations nucléaires abandonnées de Tchernobyl représente une sorte de grave danger nucléaire.
Le fait est que, depuis 1994, l’Ukraine elle-même n’a plus d’armes nucléaires sous son contrôle. Les États-Unis disposeraient de 400 missiles balistiques intercontinentaux (ICBM) qui sont toujours armés et en état d’alerte. La Russie, comme les États-Unis, maintient ses ICBM terrestres toujours armés et dans un en état de disponibilité opérationnelle avancée.
Les États-Unis et la Russie possèdent chacun environ 2 000 armes nucléaires toujours en état d’alerte, sur des arsenaux de plus de 5 000 armes chacun. L’arsenal américain comprend au moins 100 armes nucléaires en Europe, dans cinq pays de l’OTAN : l’Allemagne, l’Italie, la Turquie, la Belgique et les Pays-Bas, avec des bombardiers prêts à les déployer. Cela met gravement en danger les populations de ces pays et de toute l’Europe.
De plus, le 24 janvier, Joe Biden a placé 10 000 soldats américains supplémentaires en état d’alerte renforcée pour les déployer en Europe, en plus des 30 000 déjà stationnés en Allemagne et des 30 000 déjà stationnés en Pologne, entre autres. Cela inclut ceux de la Force aérienne des États-Unis, qui sont en grande partie responsables du largage des armes nucléaires, ainsi que 3 000 soldats de la 82e division aéroportée de l’armée américaine qui ont déjà été déployés en Pologne, à la frontière avec l’Ukraine.
Compte tenu de tout cela, il est peu probable que la déclaration de Vladimir Poutine signifie un changement de statut pour les forces nucléaires russes ou que la Russie représente à elle seule le danger nucléaire.
Le jeu dangereux de la stratégie du bord de l’abîme auquel se livrent les États-Unis et les forces de l’OTAN pour tester les réponses de la Russie, calculer son état de préparation au combat et savoir jusqu’où elle est prête à aller pour défendre sa sécurité nationale est un grave sujet de préoccupation. L’expansion de l’OTAN, les déploiements de plus en plus importants de troupes, d’armements et de jeux de guerre menacent les intérêts russes et mettent systématiquement la Russie au pied du mur. Cela implique non seulement les diverses menaces des forces américaines et de l’OTAN, mais aussi les centaines de millions de dollars d’armes et d’armements donnés à l’Ukraine et l’augmentation considérable des déploiements militaires dans la région.
Les armes nucléaires américaines sont déployées dans le monde entier et leur emplacement exact est gardé secret. Elles comprennent ce qu’on appelle des armes nucléaires tactiques, dont l’utilisation est envisagée. Les présidents américains ont déclaré les uns après les autres que les États-Unis prendraient des mesures nucléaires préventives, y compris contre des États non dotés d’armes nucléaires. L’existence d’armes nucléaires américaines en Europe, notamment en Allemagne où les États-Unis ont également d’autres armements stationnés en permanence ainsi que 30 000 soldats, n’a pas pour seul but de tenir la Russie en échec. Elles font partie intégrante des efforts déployés par les États-Unis pour maintenir l’Allemagne et tous les membres de l’OTAN sous leur domination.
La promotion actuelle d’une menace nucléaire de la part de la Russie fait partie des efforts de Joe Biden pour s’assurer que sa « coalition des volontaires », comme les États-Unis l’appellent communément, se soumette au commandement américain et soit en état d’alerte élevé pour une action militaire. L’argument selon lequel il s’agit d’une « escalade spectaculaire » vise à détourner l’attention des actions des États-Unis et de l’OTAN tout en ralliant les gouvernements et les peuples de la région et du monde entier pour qu’ils soutiennent la militarisation accrue des États-Unis et acceptent les affirmations des États-Unis selon lesquelles la Russie est un « agresseur ».
La notion d’une « erreur de calcul » est également une tentative de semer la confusion. L’ensemble du dispositif américain d’armes nucléaires est conçu pour que de telles « erreurs de calcul » se produisent. Un seul général dans la chaîne de commandement actuelle des armes nucléaires peut les déclencher. Le dispositif est conçu de cette manière, en partie pour maintenir l’unité des différentes forces armées et répartir l’autorité entre elles, ce qui permet de les contrôler. Il fournit également une justification potentielle pour leur utilisation « par erreur ». Aujourd’hui, du fait que tout semblant d’obéissance au commandant en chef a disparu, avec des généraux parlant à tort et à travers, contredisant le président et certains refusant les ordres, tout est possible, comme l’atteste l’assaut du 6 janvier sur le Capitole. Étant donné les scénarios de guerre civile qui se dessinent en raison de l’incapacité des pouvoirs exécutifs fédéraux à résoudre les conflits entre les intérêts privés rivaux au sein de la classe dirigeante et à maintenir le peuple dans le droit chemin, les actions en rapport avec l’Ukraine, y compris maintenant la menace nucléaire, sont également un effort pour unir les forces armées et leur bureaucratie – ce que les guerres contre l’Irak et l’Afghanistan n’ont pas réussi à faire. C’est essentiel pour que les États-Unis puissent entrer en guerre et endiguer la guerre civile au pays, y compris la grande résistance des peuples contre la guerre.
L’un des objectifs du maintien du monopole des armes nucléaires entre les mains des grandes puissances et de leurs amis est d’utiliser la menace nucléaire pour garder tout le monde soumis. Mais le jeu qui consiste à amener les pays au bord l’abîme pour tester leur détermination dans l’espoir qu’ils cèdent est dangereux. L’anarchie et la violence qui ont été créées, principalement par les États-Unis et leurs « alliés » dans le monde entier, signifient qu’il n’est plus possible de faire des prédictions sur les résultats. Les énormes forces productives humaines qui existent échappent à leur contrôle et le dysfonctionnement de leurs institutions sape également leur capacité de prédire. Les dirigeants agissent également pour détruire ce qu’ils ne peuvent contrôler. Cela crée une situation très dangereuse. Cela rend très urgente la revendication des peuples du monde contre les tensions croissantes et l’armement des pays pour la guerre.
Les efforts des États-Unis et de leurs médias bellicistes pour attirer l’attention sur les armes nucléaires est également un moyen utilisé pour marginaliser les peuples et leur résistance, pour détourner l’attention des crimes des États-Unis et de l’OTAN commis dans le monde entier, en Yougoslavie, en Irak, en Afghanistan, en Libye, en Syrie et de leur rôle provocateur en faisant de l’Ukraine leur base avancée contre la Russie, à commencer par le changement de régime de 2014 qui a amené un gouvernement soumis aux intérêts des États-Unis et de l’OTAN.
On voudrait que les peuples oublient les relations qui existent dans le monde et la réalité qu’aujourd’hui il appartient aux peuples du monde d’apporter des solutions qui leur sont favorables aux problèmes réels qui existent. Pas une seule des mesures prises par les États-Unis et leurs « coalitions des volontaires », notamment les pays membres de l’OTAN, n’a permis de résoudre les problèmes auxquels les peuples sont confrontés. Au contraire, les riches s’enrichissent, les pauvres s’appauvrissent, les crises de réfugiés s’amplifient et se multiplient, et l’incapacité à sauvegarder l’environnement naturel a des conséquences de plus en plus désastreuses. Et pourtant, nous sommes tous censés sauter dans le char de guerre des États-Unis et de l’OTAN au nom de leur rôle de libérateurs.
Ce sont les peuples du monde qui luttent pour leurs droits et pour un monde digne de l’humanité qui peuvent résoudre ces problèmes. Dans la situation actuelle, il est de notre devoir de nous opposer au bellicisme, aux mensonges et à la désinformation, d’exiger que les États-Unis et l’OTAN s’abstiennent de lancer une guerre contre la Russie et de cesser d’utiliser l’Ukraine comme base avancée pour provoquer et isoler la Russie.
(LML Quotidien, affiché le 3 mars 2022)
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