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Les travailleurs migrants passent à l’action
À titre d’information
Rapport de la Vérificatrice générale
Le rapport de la Vérificatrice générale du Canada au Parlement, intitulé « La santé et la sécurité des travailleurs agricoles étrangers temporaires pendant la COVID 19 », a été publié en décembre 2021. Le rapport couvre la période de janvier 2020 à juin 2021.
Le rapport s’est penché en particulier sur la performance d’Emploi et Développement social Canada (EDSC) en ce qui concerne la protection des travailleurs agricoles dans les conditions de la pandémie de la COVID-19 en 2020 et 2021. Il a aussi examiné à quel point Agriculture et Agroalimentaire Canada avait veillé au respect des normes par les employeurs qui ont reçu des fonds en vertu de ses deux programmes d’aide à la COVID-19. Ces fonds devaient protéger la santé et la sécurité des travailleurs sur les fermes, dont leur capacité de se confiner de façon sécuritaire.
L’EDSC, l’instance gouvernementale responsable de la gestion du Programme des travailleurs étrangers temporaires, évalue les demandes des employeurs et mène des inspections pour assurer le respect par les employeurs des exigences du programme et des dispositions applicables des Règlements sur l’immigration et la protection des réfugiés.
Selon le rapport de 62 pages de la Vérificatrice générale, des « problèmes importants » sont à signaler dans les politiques d’inspection et les façons de procéder de l’EDSC, y compris leurs évaluations selon lesquelles la presque totalité des employeurs auraient respecté les exigences liées à la COVID-19, bien qu’ils aient recueilli peu ou pas de preuves à cet effet. Sur la base de ces données pour 2020, le Bureau de la Vérificatrice générale a avisé l’EDSC des problèmes et prolongé son audit jusqu’en 2021.
En 2021, le rapport soulignait : « L’audit a révélé une détérioration sur le plan de la qualité et la rigueur des inspections et, en surcroît, un immense arriéré s’est développé – si bien que le ministère n’a pas complété la vaste majorité des inspections dans un délai convenable. Plusieurs inspections visant à déterminer si les employeurs avaient respecté leurs exigences réglementaires pour des conditions de confinement sécuritaires étaient toujours incomplètes et inactives longtemps après que les confinements des travailleurs avaient pris fin. »
L’audit a trouvé des problèmes dans environ 73 % des inspections de quarantaine évaluées en 2020 et a avisé l’EDSC. Ce pourcentage a atteint 88 % au printemps et à l’été de 2021 après que le ministère eut été avisé de ces problèmes. Il y avait des problèmes similaires pour les inspections des cas d’éclosions.
L’audit a aussi souligné que l’EDSC avait peu fait pour respecter ses engagements envers l’amélioration des conditions de vie des travailleurs agricoles migrants temporaires, y compris la mise en place de logements et la bonification de ses processus d’inspection. Alors que l’EDSC a réitéré ses engagements pendant la pandémie, l’audit n’a pas trouvé de « preuves à l’effet qu’il avait entrepris quoi que ce soit à cet effet ».
Le rapport révèle notamment que, lors des inspections visant à vérifier le respect des exigences obligatoires en matière de conditions de vie de base – telles que l’eau courante, le taux d’occupation et l’absence de risques pour la santé et la sécurité dans les logements des travailleurs, l’EDSC « n’avait recueilli aucune information dans la plupart des cas mais avait néanmoins conclu que les employeurs avaient respecté les exigences ». Les inspections ont été menées en mode virtuel et devaient comprendre des photos et des entrevues avec les employeurs et les travailleurs. Dans les cas où des preuves indiquaient que les employeurs n’agissaient peut-être pas conformément aux règlements (15 % des inspections), il n’y a pas eu de contestation ou de suivi auprès des employeurs par l’EDSC.
Concernant les inspections d’éclosions en 2021, 60 % « ne comprenaient pas assez d’information pour déterminer si des travailleurs malades ou asymptomatiques avaient eu des logements séparés afin de s’isoler tel que requis » et « environ 80 % des inspections en cas d’éclosion que nous avons examinées sont aussi restées inactives pendant au moins un mois ou deux, soit longtemps après la période d’isolement des travailleuses et travailleurs ».
Selon le rapport : « Nous avons trouvé que 60 % de ces dossiers d’inspection ne comprenaient pas suffisamment d’informations (telles que des photos des espaces d »isolement et la confirmation de l’isolement suite à des entrevues ) pour déterminer si les travailleuses et travailleurs malades ou symptomatiques avaient été hébergés dans des logements séparés leur permettant de respecter les règles en matière d’isolement. »
Le rapport confirme que les inspecteurs n’avaient pas interviewé les travailleurs en isolement pour confirmer leurs conditions, prendre des photos des logements d’isolement pour vérifier si les travailleurs avaient des salles de bains privés et des chambres à coucher, ou démontrer qu’il y avait eu un suivi lorsque les employeurs avaient remis des photos faisant preuve de non-respect. Dans au moins deux cas, des travailleurs qui avaient eu un test positif à la COVID-19 avaient partagé des logements avec des travailleurs non-positifs.
Lors d’inspections post-quarantaine, ils ont trouvé que dans 93 % des cas il y avait peu ou pas d’information sur les logements des travailleurs et dans 84 % des cas aucune photo n’avait été recueillie tel que requis par les procédures d’inspection virtuelle. En outre, dans 81 % des entrevues avec les employeurs et 68 % des entrevues avec les travailleurs, aucune question n’a été posée au sujet des logements des travailleurs. Malgré que l’EDSC n’avait pas les preuves nécessaires en mains, il a tout de même conclu que chaque employeur individuel était respectueux des règlements.
Les données des enquêteurs ont mené à la conclusion du rapport selon laquelle les inspections de l’EDSC ont été mal exécutées et ne procuraient que peu d’assurance que les travailleurs étrangers temporaires dans le secteur agricole canadien étaient protégés. En outre, la situation s’est détériorée en 2021, et il n’y a eu aucun progrès dans les engagements ultérieurs visant à prendre en compte les préoccupations de longue date liées aux conditions de vie des travailleurs.
Le rapport de la Vérificatrice générale fait un certain nombre de recommandations avec lesquelles l’EDSC se dit d’accord, comme pour les recommandations de décembre 2020. Une fois de plus, l’EDSC et le ministre se sont dits d’accord et ont dit qu’ils allaient « faire mieux ».
Mais le problème reste toujours que les Canadiens n’ont aucun moyen de tenir les représentants gouvernementaux responsables de crimes commis contre le peuple. Ce problème doit être résolu.
(Forum ouvrier, affiché le 27 janvier 2022)