Le Marxiste-Léniniste

Numéro 43 - 1er décembre 2018

Il est temps de donner une nouvelle direction
à l'économie sous le contrôle des Canadiens!

La fermeture de GM et les pertes
d'emplois et de valeur manufacturière
doivent cesser

Il est temps de donner une nouvelle direction à l'économie sous le contrôle des Canadiens!
La fermeture de GM et les pertes d'emplois et de valeur manufacturière doivent cesser - K.C. Adams

Encore un effondrement des prix du pétrole en Alberta
Le besoin de la politique et de la vision moderne de la classe ouvrière - Dougal MacDonald
Le gouvernement albertain et le mantra néolibéral d'être «ouvert aux affaires»
Le problème du contrôle et de la vision dans le secteur énergétique

Tous ensemble, défendons la dignité et les droits des immigrants, des réfugiés et des travailleurs migrants
Exigeons un moratoire sur les déportations des personnes sans statut d'origine haïtienne! - Entrevue avec Frantz André, Comité d'action des personnes sans statut
Le statut de résident doit être accordé aux aides familiaux migrants et à leurs familles dès leur arrivée!

L'état des droits humains aux États-Unis aujourd'hui
Les attaques criminelles de Trump contre le droit d'asile
Retirez immédiatement toutes les troupes de la frontière : notre sécurité est dans notre lutte pour les droits de tous - Voice of Revolution

198e anniversaire de naissance de Friedrich Engels
Friedrich Engels : grand défenseur et éducateur de la classe ouvrière


Il est temps de donner une nouvelle direction à l'économie
sous le contrôle des Canadiens!

La fermeture de GM et les pertes d'emplois et de valeur manufacturière doivent cesser


Conférence de presse de la section locale 222 d'Unifor, le 26 novembre 2018, pour demander que la production se poursuive à l'usine de GM à Oshawa

Les dirigeants de GM à Détroit ont annoncé la fermeture d'une usine de montage d'automobiles qu'ils contrôlent à Oshawa, en Ontario. La fermeture mettra fin à l'emploi direct de 2 522 travailleurs de l'automobile, membres de la section locale 222 d'Unifor et d'un grand nombre d'employés à salaire fixe, et entraînera une perte de valeur considérable pour l'économie et les communautés canadiennes.

Le secret bien gardé des oligarques étrangers de GM a surpris la plupart des Canadiens et a suscité l'indignation et un débat sur la manière de réagir. Parmi toutes les réactions, deux sont remarquables. La première est celle de l'impuissance totale. Le premier ministre Trudeau et le premier ministre Ford de l'Ontario semblent avoir accepté la décision de GM comme définitive et ont centré leurs remarques sur la manière d'aider les travailleurs touchés à faire face à la crise du chômage et à la perte de revenus. Dans sa conférence de presse sur le sujet, le premier ministre Ford a répété sa devise néolibérale voulant que l'Ontario soit « ouverte aux affaires » pour les mêmes oligarques qui détruisent l'économie et attaquent les travailleurs canadiens.

L'autre réaction est l'indignation et le désir de faire quelque chose pour contrer la décision des oligarques américains. La section locale 222 d'Unifor et la plupart des travailleurs interviewés dans les médias ont condamné cette fermeture, considérée comme une attaque contre le Canada, l'économie et la classe ouvrière. Ils ont exprimé leur détermination à empêcher la fermeture et les pertes d'emplois et de la valeur manufacturière.

Lundi le 26 novembre, après avoir appris la nouvelle officielle, les travailleurs du quart du matin à l'usine d'automobiles étaient sous le choc, déplorant et dénonçant l'annonce. Les travailleurs sont sortis de l'usine et se sont rassemblés à l'extérieur et dans la salle du syndicat à Oshawa pour discuter de ce qu'il fallait faire face à la situation. Des travailleurs ont déclaré que le gouvernement devrait obliger GM à rembourser les milliards de dollars en subventions et autres stratagèmes pour payer les riches que l'entreprise a reçus au fil des ans, en particulier après la crise économique de 2008. D'autres ont amèrement rappelé que la fermeture de l'usine était la façon de remercier les travailleurs pour toutes les concessions dans leurs conventions collectives qu'ils ont accordées à GM au cours des vingt dernières années, ce qui a créé une main-d'oeuvre à trois niveaux de conditions de travail. Un ancien ouvrier a déclaré que son fils, récemment entré à l'usine d'Oshawa, ne recevait que 2,11 $ de plus par heure qu'il ne recevait en 1985. Pouvez-vous imaginer combien cela représente de moins avec l'inflation des prix et malgré cela l'entreprise n'est toujours pas satisfaite. Que cela serve d'avertissement aux autres travailleurs canadiens de ne pas faire de concessions, a-t-il dit.

Comment renverser la décision des oligarques mondiaux et tracer une autre direction pour l'économie sont des préoccupations sérieuses pour tous les Canadiens. La décision des oligarques de détruire l'économie avec une telle ampleur l'économie cause des dommages indicibles dans l'ensemble de l'économie locale et bien au-delà. Une grande partie du matériel et des pièces des véhicules à assembler proviennent d'autres usines, aciéries et mines en Ontario. Il va sans dire que les oligarques en contrôle ne vivent même pas au Canada, encore moins dans les communautés que leurs décisions affectent directement.

La base manufacturière a longtemps été le pilier de l'économie du sud de l'Ontario, mais elle est attaquée par les oligarques mondiaux depuis le début du siècle. Au cours des dix dernières années seulement, le pourcentage que l'industrie manufacturière contribue au produit intérieur brut (PIB) de l'Ontario a chuté de 16 % à seulement 11,7 %.

Des attaques soudaines, telles que l'annonce de GM à Oshawa, attirent immédiatement l'attention. D'une certaine manière, elles mettent à l'épreuve le courage de la classe ouvrière, sa situation actuelle et la capacité de ses institutions et de sa conscience sociale à se défendre et à protéger le Canada de l'oligarchie financière mondiale, à contrecarrer ces attaques contre l'économie et le pays, et à tracer une nouvelle direction prosociale.

La capacité de la classe ouvrière à réagir avec force et à se défendre dépend en grande partie du pouvoir de s'organiser indépendamment des oligarques au pouvoir, de leurs institutions et de leurs laquais au sein des organisations politiques et sociales du Canada. Pour la classe ouvrière, être la proie des partis politiques cartellisés de l'oligarchie financière et ne pas avoir sa propre politique et ses institutions indépendantes, la laisse vulnérable à ces attaques et incapable d'organiser une résistance sérieuse.

La destruction de l'industrie manufacturière en Ontario et l'offensive antisociale néolibérale dans son ensemble se sont produites sous l'oeil bienveillant des gouvernements des trois principaux partis cartelisés au parlement et à la législature. Ils ont soit participé volontairement à ces attaques, soit n'ont rien fait de concret pour les empêcher.

La renégociation de l'ALÉNA en ACEUM en est un exemple. Le mois dernier, la ministre des Affaires étrangères du gouvernement libéral Trudeau, Chrystia Freeland, s'est vantée du « résultat équilibré » des négociations commerciales entre le Canada et Washington. Freeland a déclaré que le gouvernement libéral Trudeau avait sauvé la production de véhicules en Ontario des attaques de Trump. « L'industrie automobile a maintenant une stabilité et une marge de croissance et de prospérité », a-t-elle écrit. Cela a été dit malgré le fait que pas un seul constructeur automobile ne soit une institution nationale, aucune des décisions de leurs principaux oligarques n'est prise pour renforcer l'édification nationale. Elles sont prises uniquement pour servir leurs intérêts privés étroits alors que l'ACEUM laisse en place les tarifs américains sur l'acier et l'aluminium provenant du Canada au nom de la sécurité nationale des États-Unis. La fermeture d'Oshawa ne démontre pas la stabilité, la croissance ou quelque fantasme libéral de ce que signifie être prospère.

Le mouvement de la classe ouvrière à une époque avait clairement compris que le libre-échange serait un désastre pour la souveraineté du Canada et pour les travailleurs, et il s'y opposait. Malgré une opposition généralisée, les conservateurs et les libéraux ont imposé le libre-échange via le Parlement, ce qui est devenu une victoire pour les oligarques américains et leur détermination à éliminer tout obstacle à leur contrôle. L'ALÉNA et la possibilité de rendre le Canada « ouvert aux affaires » pour les oligarques du monde ont détruit les derniers vestiges de souveraineté et ont rendu les Canadiens vulnérables à la destruction par l'oligarchie financière mondiale.

Quel contrôle les Canadiens exercent-ils maintenant sur leur propre économie et leur vie ? La décision par des étrangers de fermer l'usine GM d'Oshawa n'est qu'un désastre qui s'est produit dans notre dos et sans qu'on ait un mot à dire. Le démantèlement des activités commerciales de transport aérien de Bombardier est une attaque directe par Boeing et le Pentagone américain. Ce manque de contrôle doit changer pour que les travailleurs puissent se défendre et défendre leur bien-être, et renverser la situation. Une nouvelle direction pour l'économie ne peut être atteinte qu'avec le contrôle par les travailleurs de leurs propres organisations et de toutes les décisions qui affectent leur vie.

Les travailleurs d'Oshawa fabriquent des véhicules depuis cent ans. À un moment donné, les travailleurs de l'usine d'Oshawa ont construit à eux seuls un million de véhicules en une seule année. Pourquoi la valeur de cette production n'a-t-elle pas été réinvestie dans la fabrication en Ontario et dans la création d'un marché national stable pour les véhicules produits au Canada, sans parler de la création d'une économie plus diversifiée et dynamique, non vulnérable aux crises, qui puisse entreprendre des échanges commerciaux avec d'autres sur une base d'avantage et de développement réciproques ? La réponse est simple : les Canadiens ne contrôlent pas leur propre économie et sans ce contrôle, ils ne peuvent contrôler leur vie ni bâtir leur pays pour assurer leur bien-être. Ceux qui la contrôlent ne sont pas des bâtisseurs de pays ; ils édifient un empire pour satisfaire la demande insatiable des oligarques propriétaires d'exproprier de plus en plus de profits à même la valeur produite par les travailleurs.

Les experts et les politiciens de l'oligarchie financière disent que le Canada est trop petit pour avoir son propre marché et doit compter sur le marché impérialiste mondial pour survivre. Cette désinformation est destinée à décourager les enquêtes et discussions et à déclarer qu'on ne peut rien faire pour changer la réalité actuelle, à savoir que les Canadiens ne contrôlent pas leur économie et ne peuvent même pas commercer avec d'autres sur une base moderne d'avantages et de développement réciproques. Les experts considèrent comme inévitable que les oligarques du monde contrôlent tout pour servir leurs propres intérêts privés et ne se soucient pas des Canadiens.

Les Canadiens ont acheté environ deux millions de véhicules l'an dernier et en ont produit à peu près le même nombre. N'est-ce pas un marché intérieur solide, que les échanges commerciaux pourraient encore améliorer ? La valeur de ce marché national pourrait constituer le fondement de la production de véhicules dans une nouvelle ère de responsabilité sociale et d'humanisation de l'environnement naturel et social. Mais ce marché national et ce commerce international doivent être sous le contrôle des Canadiens et non des oligarques impérialistes mondiaux.

Le moment est venu pour les travailleurs de s'organiser de manière nouvelle pour faire face au défi et à l'assaut des oligarques mondiaux. Le moment est venu d'une nouvelle direction de l'économie. Le contrôle de l'économie et de la politique du pays doit être entre les mains des travailleurs pour qu'elles servent leur bien-être et l'édification nationale.

Les oligarques mondiaux attaquent la vie, le bien-être et le tissu social des Canadiens. On ne peut rester les bras croisés devant la fermeture de l'usine GM ! Unissons-nous à la défense des travailleurs de GM à Oshawa et pour une nouvelle direction !

Non à la destruction nationale !
Oui à la base manufacturière et à l'édification nationale !

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Encore un effondrement des prix du pétrole en Alberta

Le besoin de la politique et de la vision
moderne de la classe ouvrière

Le gouvernement de l'Alberta semble avoir décidé ou, pourrait-on dire, être pris dans la vision impérialiste que son avenir dépendra de la capacité du pétrole albertain d'atteindre les marchés mondiaux à un prix qu'il espère plus élevé. Toute autre considération a disparu. La première ministre Notley utilise sa parole et ne ménage aucun effort pour imposer cette vision non seulement aux Albertains mais à tous les Canadiens. Elle et son gouvernement considèrent que leur rôle est de servir la façon de faire des oligarques de l'énergie en position de contrôle et ils ne voient aucune alternative possible. Les partis cartellisés n'ont pas de vision moderne et manquent du courage nécessaire pour faire face aux oligopoles mondiaux qui contrôlent le secteur pétrolier et l'économie albertaine.

Adopter la vision de l'oligarchie financière et servir ses intérêts étroits signifie également s'aligner sur l'une ou l'autre de ces puissantes sections et être un instrument qui se plie à leurs quatre volontés. Que le gouvernement Notley survive ou qu'il soit défait aux prochaines élections l'an prochain peut très bien dépendre du prix du pétrole brut, en particulier de l'écart de prix qui affecte le Western Canada Select, et de la capacité du gouvernement Trudeau à imposer l'expansion de l'oléoduc Trans Mountain. Pour la classe ouvrière, succomber à une telle paralysie de la pensée et de l'action est suicidaire.

Les enjeux et l'ordre du jour présentés par les partis cartellisés en lice lors des prochaines élections albertaines et fédérales de 2019 servent en dernière analyse une section ou une autre de l'oligarchie financière. Ils sont conçus pour faire en sorte qu'aucune alternative n'est présentée ou discutée. Ces partis cartellisés ne veulent pas que la classe ouvrière développe sa propre politique indépendante, ce qui signifie qu'aucune alternative aux points de vue opposés de l'oligarchie financière ne doit être discutée. Cette absence de la politique indépendante de la classe ouvrière et son manque de contrôle sur les problèmes qui affectent la vie des Albertains et des Canadiens sont les problèmes les plus pressants auxquels ceux-ci sont confrontés.

C'est seulement en adoptant une vision moderne et des solutions alternatives indépendantes des réclamations des oligarques qui rivalisent pour le contrôle de l'économie et en acquérant le pouvoir et le contrôle politiques pour priver les oligarques de leur pouvoir, que les Albertains et les autres Canadiens peuvent surmonter les problèmes de la crise économique auxquels ils sont confrontés et s'engager avec confiance dans une nouvelle direction qui favorise le peuple.

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Le gouvernement albertain et le mantra néolibéral d'être «ouvert aux affaires»

Les monopoles de l'énergie et le gouvernement provincial de l'Alberta sont unanimes pour dire que le problème auquel est confrontée l'industrie est un manque de capacité de transport par oléoduc pour expédier le pétrole vers les marchés mondiaux. On sait que le gouvernement albertain revendique depuis un bon moment l'expansion de l'oléoduc Trans Mountain - qui est maintenant la propriété du gouvernement fédéral - de l'Alberta jusqu'à la vallée du Bas Fraser en Colombie-Britannique. Le gouvernement de l'Alberta a aussi demandé au gouvernement fédéral d'aider à accroître sa capacité de transporter le pétrole brut par train comme solution à court terme.

Le 30 août, la Cour d'appel fédérale du Canada a arrêté l'expansion de Trans Mountain en raison de ce que la Cour a évalué comme un manque de consultations raisonnables avec les peuples autochtones. Les enjeux d'énergie et de revenus du gouvernement albertain se sont encore compliqués quand l'Agence de réglementation de l'énergie de l'Alberta a annoncé récemment qu'il en coûtera au trésor public de l'Alberta plus de 58 milliards de dollars pour nettoyer le désastre environnemental de plusieurs décennies laissé par les monopoles énergétiques, appartenant surtout à des intérêts étrangers, qui ont pris leur argent et ont déguerpi. Dans certains milieux, on estime que le montant nécessaire pour la restauration environnementale de puits abandonnés et d'autres formes de contamination se situerait plutôt autour de 260 milliards de dollars.

L'opinion publique est plus que favorable à ce que les monopoles énergétiques nettoient leurs propres désastres. Cependant, les forcer à le faire serait contraire au mantra néolibéral des provinces et du Canada d'être « ouverts aux affaires » en ayant recourt aux finances publiques pour payer les riches et en laissant les monopoles libres de faire ce qu'ils veulent. Aucun gouvernement de partis cartellisés au Canada n'a eu le courage de contester ce mantra impérialiste. La conciliation envers les enjeux relatifs à la pollution n'est pas très différente de la capitulation sur la question des prix du pétrole et elle montre la nécessité impérieuse à long terme de réinvestir la valeur de la production énergétique dans l'économie albertaine afin de la diversifier et de défendre le peuple contre les crises économiques.

Falsification de la théorie économique

Les contradictions entre les monopoles de l'énergie sont un autre problème dont la source est leur contrôle de l'économie. Le niveau relativement faible de revenu brut et de paiements de redevances au gouvernement en raison des bas prix de marché du pétrole est utilisé pour préconiser la réduction des investissements dans les programmes sociaux et dans les services publics, y compris l'infrastructure. Cette assertion n'a rien à voir avec la science et est fondée sur la falsification impérialiste que les programmes sociaux et les investissements en éducation et en santé et en infrastructures ne produisent pas de nouvelle valeur. Les monopoles de l'énergie et d'autres secteurs font cette désinformation chaque fois qu'on leur demande de payer la valeur qu'eux et leurs entreprises consomment dans leurs opérations qui provient des programmes sociaux et de l'infrastructure, alors que cette valeur est transférée dans la valeur que les travailleurs produisent.

Les oligarques qui possèdent et contrôlent des sections de l'économie socialisée nient son caractère interrelié et la nécessité d'une planification consciente afin que tous les secteurs puissent fonctionner ensemble pour le bien et la stabilité de tous. Une économie moderne a besoin d'une base solide dans tous les secteurs fondamentaux d'exploitation des ressources, de l'industrie manufacturière, des programmes sociaux et des services publics, y compris l'infrastructure, et elle a besoin que la valeur que les travailleurs produisent dans chaque secteur soit réalisée dans tous les autres. Ce n'est pas ce qui se produit actuellement dans l'économie impérialiste alors que les oligarques perçoivent leur section ou secteur particulier comme étant en concurrence avec les autres sections et secteurs dans une quête anticonsciente pour le profit maximum aux dépens des autres et du tout.

Par exemple, les barons des monopoles de l'énergie refusent de réaliser (acheter) la valeur produite socialement dans les secteurs de l'éducation et de la santé par un échange acceptable et correct avec les entreprises publiques qui produisent la valeur. De façon générale, les monopoles consomment gratuitement la nouvelle valeur que les travailleurs produisent à partir d'investissements dans les programmes sociaux et dans l'infrastructure ou du moins consomment la valeur sans sérieusement comptabiliser le montant qu'ils consomment et sans payer pour l'échange avec les institutions qui produisent la valeur. En plus de refuser cela, ils exigent sans arrêt ou exercent un chantage pour ne pas payer d'impôts et, au contraire, se faire payer à même les fonds publics sans quoi ils cesseront leurs activités parce qu'une autre endroit leur aura offert une meilleure entente pour payer les riches. Le récent « concours » d'Amazon pour trouver l'endroit qui offrirait au monopole la meilleure entente pour payer les riches pour qu'il ouvre un deuxième siège social en est un exemple plutôt déplorable.

Puisque l'économie est sous le contrôle des riches oligarques, une plus grande production, de meilleurs profits ou un PIB élevé provenant de l'exploitation et de la production de matières premières ne se traduit pas automatiquement en de plus grands investissements dans les programmes sociaux ou même dans l'industrie manufacturière, et ceci est depuis longtemps un problème et une pomme de discorde en Alberta. Après toutes ces années pendant lesquelles les travailleurs ont produit une énorme richesse sociale dans le secteur énergétique, l'économie albertaine est loin d'être diversifiée et stable. Les oligarques de l'énergie qui sont aux commandes ont siphonné la richesse sociale de la province et ont laissé ses autres secteurs faibles et vulnérables.

Une comparaison des chiffres sur le PIB en Alberta et à Terre-Neuve et au Labrador (les deux provinces avec le pourcentage de PIB le plus élevé en extraction de ressources) et des chiffres représentant le PIB en Ontario et au Québec montre qu'il n'y a pas de lien automatique entre un pourcentage élevé de PIB provenant de l'extraction de ressources et de plus grands investissements dans les programmes sociaux. En fait, il semblerait que c'est le contraire. Un problème sérieux se produit lorsque le revenu brut des ventes de ressources naturelles sort de la province, que le secteur ne réalise pas pleinement le produit social qu'il consomme des autres secteurs et ne réinvestit pas la richesse sociale dans l'économie provinciale pour bâtir une économie durable à secteurs multiples, avec l'industrie manufacturière, les programmes sociaux, les services publics et l'extraction de ressources comme base diversifiée et de plus en plus autonome. Cela laisse l'Alberta et les autres économies dépendantes de l'extraction de ressources vulnérables à de sérieuses difficultés lorsque le secteur des ressources chancelle.

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Le problème du contrôle et de la vision dans le secteur énergétique

Le ralentissement prolongé du secteur de l'énergie de l'Alberta, en plus de frapper les travailleurs, aggrave les contradictions entre les monopoles énergétiques qui dominent la province. L'un des facteurs importants du conflit est l'écart de prix du pétrole entre le West Texas Intermediate (WTI) et le Western Canadian Select (WCS) de l'Alberta. Le WTI se vend actuellement à environ 52 $ le baril et est utilisé comme référence du prix du pétrole brut sur le New York Mercantile Exchange. Le WCS est un pétrole brut lourd vendu environ 20 $ le baril. Ces prix fluctuent, mais l'écart reste important. L'écart de prix se traduit par un revenu moins élevé pour certains monopoles énergétiques et le gouvernement de l'Alberta.[1] Le gouvernement et certains monopoles énergétiques veulent réduire l'écart de prix et ont proposé un décret gouvernemental visant à réduire la production de pétrole de la province afin d'augmenter le prix du WCS.

La proposition de réduction de la production a été accueillie avec le soutien et l'opposition des principaux monopoles énergétiques, principalement en raison de la manière dont ils exproprient leurs profits. Cenovus et CNRL, dont les profits proviennent de la vente du pétrole brut WCS, sont favorables à un décret du gouvernement de l'Alberta pour réduire la production afin d'augmenter le prix du pétrole. Suncor, Imperial et Husky au contraire ne veulent pas d'intervention du gouvernement, car ils profitent du faible prix du WCS, qui est devenu l'alimentation de leurs activités de raffinage en aval aux États-Unis.

Le 2 novembre, Tim McKay, président de CNRL, a déclaré que « des membres anonymes de l'industrie énergétique » s'opposaient délibérément aux tentatives visant à rendre les pipelines plus efficaces, car ils tiraient des « revenus exceptionnels » des bas prix actuels du pétrole de l'Ouest canadien. Apparemment, les pipelines inefficaces créent une surabondance de WCS invendu en Alberta. McKay n'a pas expliqué pourquoi une surabondance de pétrole invendu en Alberta, qui ne peut pas atteindre les clients, entraînerait une surproduction et un prix bas subséquent au terminal des pipelines « inefficaces ».

En revanche, le PDG de la Compagnie Pétrolière Impériale, Rich Kruger, a déclaré le même jour : « Dans le contexte difficile actuel en amont, nous sommes particulièrement bien placés pour tirer parti de l'écart grandissant des prix du brut. » Dans son cas, l'Impériale se réjouit d'acheter du WCS à bas prix, parfois même à elle-même, pour le raffinage aux États-Unis où le pétrole raffiné est vendu à des prix mondiaux beaucoup plus élevés, une situation intéressée en effet.

Ces positions opposées mettent en évidence la vision des oligarques, qui voient les problèmes de l'économie socialisée sous un angle déformé qui sert leurs intérêts privés particuliers. Aucun problème économique ne peut être résolu avec cette mentalité dépassée. Les problèmes de l'économie moderne interdépendante de la grande production industrielle nécessitent une vision moderne prosociale qui les considère tels qu'ils se présentent objectivement pour le plus grand bien de l'ensemble sans les manipuler pour les adapter aux notions préconçues fondées sur des intérêts privés étroits et le dogme impérialiste.

Le problème des prix du marché du pétrole brut provient du contrôle et de la manipulation du secteur par l'oligarchie financière. Les prix ne sont pas déterminés scientifiquement selon une formule moderne qui sert l'économie et sa reproduction élargie et mène au commerce basé sur l'avantage réciproque et au développement, et non aux crises constantes actuelles et à la rivalité souvent violente des grandes puissances pour la domination mondiale.

Le prix du marché global du pétrole brut, et pas seulement du WCS, a encore une fois plongé. La chute spectaculaire récente des prix du marché en dessous de leurs prix de production est source de difficultés, en particulier pour les travailleurs du secteur et de toute l'Alberta qui sont toujours durement touchés par les crises récurrentes. Elle pose également des difficultés pour des pays, comme le Venezuela, qui dépendent fortement de la production et de la vente du pétrole et sont la cible de l'ingérence, de menaces d'invasion et de changement de régime de l'impérialisme américain.

Pour ce qui est de l'écart de prix entre le WTI et le WCS, les oligarques de l'énergie qui contrôlent la situation et leurs représentants au gouvernement ne présentent pas le problème de façon scientifique. Ils ne révèlent pas clairement quel est le prix de production du WTI ou du WCS à partir duquel un prix de marché stable adéquat pourrait être établi et exigé. Cela s'explique en partie par le dogme du « laisser les forces du marché décider des prix » et le fait que l'oligarchie financière utilise son monopole pour manipuler les prix pour servir ses propres intérêts et pour attaquer ses concurrents et ses ennemis.

L'admission du PDG de l'Impériale, Rich Kruger, que son monopole est « particulièrement bien placé pour tirer parti de l'écart grandissant des prix du brut » montre la vraie nature de ces oligarques. Kruger ne veut pas avoir un compte rendu scientifique des prix et encore moins l'intervention du gouvernement pour stabiliser les prix parce qu'en ce moment son monopole profite actuellement en aval du faible prix du WCS.

Le président de CNRL, Tim McKay, et d'autres oligarques souhaitent que des mesures soient prises pour réduire l'offre du WCS dans l'espoir que le prix du marché augmentera. Une telle mesure favorisera leurs monopoles, s'ils parviennent à augmenter le prix du WCS. Là encore, le problème est considéré sous un angle étroit de l'intérêt particulier de certains monopoles énergétiques et ne résout pas le problème de la fluctuation des prix du pétrole en général, comme l'effondrement actuel généralisé.

En fait, McKay et le gouvernement se contredisent lorsqu'ils affirment que la réduction de l'offre est une solution et en même temps dénoncent « des membres anonymes de l'industrie énergétique » qu'ils accusent de s'opposer délibérément aux tentatives visant à rendre les pipelines plus efficaces. Des pipelines plus efficaces augmenteraient sans doute l'offre de WCS pour les acheteurs et, selon le dogme impérialiste, réduiraient encore davantage son prix. Ni McKay ni le gouvernement n'expliquent comment inonder le monde de pétrole albertain avec des pipelines nouvellement construits et plus efficaces fera augmenter les prix du pétrole lourd.

Les problèmes d'approvisionnement, de livraison et de prix du pétrole de l'Ouest canadien viennent du contrôle de l'industrie par les oligarques énergétiques mondiaux, de leur mentalité et de leur position dominante. Les oligopoles énergétiques mondiaux contrôlent tous les aspects du secteur pétrolier canadien et le manipulent pour servir leurs intérêts privés. Cela signifie que les problèmes du secteur ne sont pas considérés objectivement, comme ils se présentent, mais dans la perspective de servir les intérêts privés particuliers de ceux qui contrôlent le secteur.

Si les problèmes étaient résolus d'une manière qui sert les travailleurs albertains, les intérêts généraux de la société et la reproduction élargie d'une économie albertaine diversifiée, les crises économiques récurrentes pourraient être évitées. La question est de savoir qui décide : les oligarques en faveur de leurs intérêts privés étroits ou le peuple en faveur des intérêts généraux de tous, de l'ensemble de l'économie et de la société.

Lorsque des gouvernements ou des travailleurs s'alignent derrière les intérêts privés de tel ou tel groupe d'oligarques, cela indique qu'ils sont atteints par la même vision arriérée selon laquelle les impérialistes sont incapables de voir les problèmes tels qu'ils se présentent et de trouver des solutions en faveur du peuple.

Une vision sans objectivité de considération et incapable de faire l'analyse concrète de conditions concrètes empêche tout gouvernement et les travailleurs de trouver la source des problèmes, de trouver des solutions et de tracer une nouvelle voie pour surmonter les difficultés actuelles. Une nouvelle direction de l'économie exige une vision moderne prosociale et le contrôle des travailleurs sur toutes les questions économiques, politiques et sociales qui touchent leur vie.

Note

1. Les profits du troisième semestre 2018 (juillet à septembre) des monopoles de l'énergie de l'Alberta
Les monopoles suivants semblent avoir tiré profit du prix plus bas du Western Canadian Select (WCS) de 20 $, comparativement au prix d'environ 52 $ le baril du West Texas Intermediate (WTI). Le raffineur en aval Suncor a exproprié 1,6 milliard $ en profit d'entreprise au troisième trimestre de 2018 (une période de trois mois), comparativement à 867 millions $ pendant le même trimestre l'an dernier. Imperial a exproprié 749 millions $ pendant le même trimestre, comparativement à 371 millions $ l'an dernier, tandis que Husky a exproprié 545 millions $ pendant le même trimestre, une forte hausse par rapport à 136 millions $ pendant le même trimestre l'an dernier. Les oligarques qui contrôlent ces monopoles s'opposent à toute intervention du gouvernement pour réduire l'offre du WCS pour essayer d'en hausser le prix de marché.

D'autres monopoles veulent une réduction de l'offre parce que le bas prix du WCS leur a nui. Cenovus a rapporté une perte de 241 millions $ pour le même troisième trimestre de 2018. CNRL a dépassé les attentes avec un profit de 1,8 milliard $, mais CNRL est plus diversifié que Cenovus. Une portion importante des profits de troisième semestre de CNRL provient des ventes au prix mondial du pétrole de ses installations internationales, dont le forage en mer du Nord et au large de l'Afrique. Selon le site web de CNRL, ces ventes « ont fourni certains des plus hauts rendements sur les projets en capital du portefeuille de la compagnie. »

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Tous ensemble, défendons la dignité et les droits des immigrants, des réfugiés et des travailleurs migrants

Exigeons un moratoire sur les déportations des personnes sans statut d'origine haïtienne!

Manifestation contre l'expulsion des personnes
sans statut d'origine haïtienne
Dimanche 2 décembre - 14 h


Devant les bureaux de circonscription du
premier ministre Justin Trudeau, 1100, boul. Crémazie Est
Organisé par le Comité d’action des personnes sans statut

Chaque jour, des dizaines de personnes sont déportées en Haïti. Les personnes sans statut d'origine haïtienne en attente d'expulsion subissent un harcèlement insupportable de la part du gouvernement canadien. Un jour, le gouvernement les déporte, le lendemain, ce n'est pas le cas. Un jour, leur demande d'asile est refusée, leur date d'expulsion est fixée et le lendemain, elle est annulée et on leur dit qu'ils seront rappelés dans quelques semaines. C'est une situation inhumaine et intenable.

Le gouvernement a annoncé la suspension des expulsions prévues pour la semaine du 19 au 25 novembre, puis les a reprises le 26 novembre. Le 27 novembre, le gouvernement canadien a annoncé un nouveau sursis d'expulsion pour une durée indéterminée.

LML publie ci-dessous une entrevue avec Frantz André qui est membre du Comité d'action des personnes sans statut et accompagnateur des personnes prises dans cette terrible situation. L'entrevue a été publiée dans Chantier politique, le journal en ligne du Parti marxiste-léniniste du Québec.

* * *

Frantz André lors d'un rassemblement pour dénoncer les déportations d'Haïtiens en demande d'asile, le 21 juillet 2018

Chantier politique : Bonjour Frantz. Vous appelez à un moratoire sur les déportations. Peux-tu nous en dire plus ?

Frantz André : Ce qu'il faut comprendre, c'est qu'il y a une crise qui a été provoquée entourant PetroCaribe alors que 3,8 milliards de dollars ont disparu. PetroCaribe est une alliance pétrolière avec le Venezuela pour acheter du pétrole à des conditions de paiement préférentiel. Les fonds épargnés devaient servir à des actions de développement pour la population. Ces 3,8 milliards de dollars ont été un point de départ. Celui qui a commencé à questionner est un cinéaste d'origine haïtienne à Montréal, Gilbert Mirambeau. Il s'est questionné, écoeuré de ce qui se passe en Haïti ; il a mis sur un carton « Kote kob petrocaribe a ? » (Où est passé l'argent de PetroCaribe ?) et l'a fait circuler sur Facebook. Cela a fait boule de neige. Tous les jeunes en Haïti qui dénoncent le gouvernement se sont mis à faire le même mouvement.

Pour revenir en arrière sur ces argents de 3,8 milliards qui ont disparu, on a demandé une reddition de comptes. Il y a eu une commission sénatoriale, la Commission sénatoriale sur la gestion des fonds PetroCaribe, qui a été déclenchée et qui a soumis son rapport en novembre 2017. Quelques personnes ont été identifiées, mais pas nécessairement les responsables. Et il n'y a jamais vraiment eu de suite à cela. Le mouvement a demandé justice et reddition. Mais évidemment le rapport n'a pas été plus loin. On sait que même des sénateurs ont bénéficié et profité des argents alors ils n'ont aucun intérêt à ce que cela aille plus loin.

Maintenant, les manifestations de masse actuellement ont créé des émeutes. Après PetroCaribe, le gouvernement au début juillet a augmenté agressivement le prix du pétrole de 50 %. Et naturellement, la population a réagi. Il y a eu des émeutes les 6, 7 et 8 juillet. Il y a eu des morts et des dégâts matériels. Et à ce moment-là, le gouvernement a démissionné. Et il y a eu une autre tentative avec un nouveau gouvernement. Ce qu'il faut dire c'est que les 6,7, et 8 juillet, le gouvernement canadien avait fermé l'ambassade et avait demandé aux Canadiens de ne pas voyager en Haïti si ce n'est essentiel et à ceux qui sont en Haïti de revenir. Alors sur la question des demandeurs d'asile qui doivent être déportés, nous avons dit : si ce n'est pas bon pour les Canadiens, pourquoi ce serait bon pour des gens qui ont quitté à cause de l'insécurité ? C'est à partir de là que j'ai fait une demande de moratoire. C'est à partir de là que nous avons fait des manifestations devant le bureau d'Immigration Canada. Le 14, le 21 juillet, le 30 et ensuite PetroCaribe.


Maintenant, en quoi cela affecte-t-il les demandeurs d'asile qui sont ici, qui ont bénéficié la semaine dernière d'un sursis de 7 jours ? Avec les manifestations qui se tiennent à tous les jours en Haïti, il y a eu plus de 30 personnes massacrées à coup de machette, des gens tués dans les manifestations, une voiture a foncé sur les manifestants, 9 personnes sont mortes, donc c'est la population qui en paie le prix. Selon des sources crédibles, ce sont les gangs qui se battent entre eux et qui sont armés par le gouvernement et entre autres par l'opposition. On veut donc étouffer la question de reddition de comptes de PetroCaribe en criant à cette instabilité. C'est à mon avis une mini guerre civile. Et que le gouvernement ait arrêté du 18 au 25 novembre les déportations, est encore une fois, à l'intérieur de 4 mois, une admission qu'Haïti n'est pas un pays qui est sécuritaire. Alors, pourquoi arrêter, commencer, arrêter, commencer, au lieu de mettre quelque chose de plus permanent qui dirait aux gens qu'on va prendre un an et voir si le nouveau gouvernement est crédible et qui va prendre la question de PetroCaribe en main. Alors nous, en tant que Canadiens, avons un devoir moral de ne pas envoyer des gens comme cela et surtout aussi avec tout le fait d'arrêter et commencer, arrêter et commencer, arrêter. Cela amène des gens à avoir une anxiété, l'incertitude qu'à n'importe quel moment, ils vont être déportés.

Il y a une jeune dame qui est monoparentale dont le fils est né ici au Canada qui devait être déportée la semaine dernière. On l'appelle le 20 et on lui dit tu ne partiras pas le 21. Mais elle a cédé son appartement, elle a fait cadeau de ses meubles car elle n'avait pas eu le temps de les vendre, et maintenant elle a tout dans ses valises, elle est chez quelqu'un, en attente qu'on la convoque car on lui dit qu'on va vous rappeler dans 3-4 semaines pour choisir la date de déportation. C'est comme des gens qui ont été condamnés à mort et qui sont dans leur cellule à attendre qu'on les exécute. C'est l'équivalent du pouvoir de la mort aux États-Unis.

Un camp accueillant des réfugiés qui sont entrés au Canada en provenance des États-Unis à Lacolle, au Québec, le 17 août 2017. La plupart des réfugiés sont des Haïtiens qui ont fui, craignant que les États-Unis ne les obligent à retourner en Haïti.

CP : Quelle est la situation ici maintenant à Montréal ?

FA : Il faut voir que plusieurs des audiences n'ont pas été tenues. Avec l'arrivée massive des réfugiés l'année dernière, le système d'accueil était débordé, autant à la frontière qu'avec le manque de centres d'hébergement. Avec l'aide juridique, on faisait du rattrapage à perpétuité et jusqu'à présent c'est beaucoup d'improvisation. Les gens sont pris à ne pas avoir les services juridiques entre autres avec des avocats qui vont vérifier que les dossiers des demandeurs d'asile soient bien préparés. Les avocats aujourd'hui sont désarmés, ils baissent les bras. Il y a les critères arbitraires laissés à la discrétion de quelqu'un qui selon nous a reçu des quotas de refus et d'acceptation. Les quotas ont été plus ou moins annoncés l'année dernière quand Emmanuel Dubourg a été envoyé deux fois aux États-Unis pour dissuader la communauté haïtienne. Il avait accepté d'y aller. La première fois qu'il a été envoyé, autant lui que M. Trudeau que Marc Garneau, qui a été le premier à prendre la parole, ils disaient que les demandeurs d'asile haïtiens, c'était entre 40 et 50 % d'acceptation. Dubourg est retourné et la deuxième fois il apporte le message que c'est seulement 10 % d'acceptation, et ce, afin de dissuader les Haïtiens mais aussi les Salvadoriens et d'autres communautés. Le 10 % est basé sur une analyse de 297 dossiers dont 29 seulement ont été acceptés. Mais les 270 autres ont droit à des recours au fédéral, humanitaires, etc. Et 297 dossiers sur environ 6000, ce n'est pas représentatif. De 2012 à 2016, le taux d'acceptation a été de 40 à 50 %. L'année dernière on est tombé à 22 %. Il y a deux semaines le taux était de 17 %. Et maintenant je pense qu'on se rapproche du 10 %.

J'ai commencé à accompagner les gens au 1010 Saint-Antoine [Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada-Bureau du Québec - Note de Chantier politique] depuis juin pour me rendre compte de la manière dont les gens sont reçus, de manière extrêmement disgracieuse, irrespectueuse, agressivement pour voir si la personne risque de résister et alors on les détient immédiatement. On les envoie alors au centre de détention de Laval. Il s'y trouve environ 150 personnes. Et maintenant ils ont décidé de bâtir un autre centre de détention juste à côté de l'actuel centre, supposément parce que le centre actuel est désuet. Mais je pense que c'est pour augmenter la capacité de détention. Parce que le gouvernement canadien a annoncé que d'ici mars 2019, il va augmenter à 10 000 le nombre de déportations. En année préélectorale, il se doit de montrer qu'il a le contrôle. Donc il utilise une communauté particulièrement précaire, les Haïtiens. Il les déporte. Nous invoquons cette situation de guerre civile pour demander ce moratoire. On les déporte aussi aux frais du contribuable. Quand les gens n'ont pas d'argent pour acheter le billet, le gouvernement va fournir le billet mais on dit aux gens que s'ils veulent revenir, ils doivent rembourser ce billet. J'ai trouvé des billets à 280 $ la semaine derrière. Le gouvernement demande 1500 $. En plus il y a plus de 550 $ de frais pour demander de revenir. Alors cela coûte au moins 2050 $ pour avoir le droit de revenir, en plus d'autres frais.

CP : Qu'aimerais-tu dire pour terminer ?

FA : J'invite les gens à venir manifester ce dimanche 2 décembre à 14 h devant les bureaux de circonscription du premier ministre Justin Trudeau au 1100 boulevard Crémazie Est pour exiger un moratoire sur les déportations maintenant.

(Photos : Chantier politique, Haïti Progrès, Haïti Liberté )

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Le statut de résident doit être accordé aux aides familiaux migrants et à leurs familles dès leur arrivée!


Conférence de presse à Toronto le 18 novembre 2018

Les aides familiaux migrants ont tenu des réunions et des conférences de presse à Toronto, Edmonton, Vancouver, Ottawa et Montréal le 18 novembre pour lancer leur rapport dans lequel ils demandent au gouvernement de défendre leurs droits humains. Le rapport, intitulé Les voix des aides familiaux pour le statut de résident et la justice, a été préparé par 14 organisations qui représentent les aides familiaux migrants et sert de document de référence à leur campagne « Pour un statut de résident immédiat : les aides familiaux s'organisent ! » [1]

Aux réunions et dans le rapport, les femmes qui travaillent comme aides familiaux ont fait entendre leur voix. Elles ont exprimé la fierté qu'elles ressentent à accomplir un travail dont la société et l'économie ont besoin pour fonctionner. Elles ont parlé et écrit à propos de leur travail pour nourrir et s'occuper des enfants pour que leurs parents puissent aller travail, pour appuyer les aînés afin qu'ils puissent passer la dernière portion de leur vie à la maison et pour s'occuper des personnes ayant un handicap afin de soutenir leur indépendance.

En même temps, elles ont dénoncé les conditions de précarité dans lesquelles elles travaillent. Elles blâment le système d'immigration et les lois du travail du Canada pour cette situation. Par exemple, elles font l'objet d'un processus d'immigration « en deux temps » qui requiert qu'elles entrent au Canada avec un statut temporaire et un contrat de travail et sans leur famille. Elles doivent compléter leur contrat de travail avant de pouvoir demander la résidence permanente. Ce statut temporaire a eu et a encore des effets dommageables durables sur la santé physique et mentale de ces femmes et sur leur famille. En plus du fait que cela a un impact dévastateur, la détermination de ces travailleuses comme étant temporaires n'a pas de sens parce que l'aide familiale par des travailleuses étrangères, comprenant le travail domestique, l'éducation des enfants et le soin aux aînés, est un trait permanent de la société canadienne depuis des décennies. Forcer ces travailleuses à accepter un statut « temporaire » ne fait que faciliter et maintenir leur surexploitation et leur marginalisation.

Les rencontres ont été organisées alors que le gouvernement fédéral est en train d'examiner le programme d'Aides familiaux résidents qui doit se terminer en novembre 2019. Les travailleuses qui oeuvrent comme aides familiaux résidents ne veulent pas que ce programme soir prolongé ou remplacé par un projet-pilote qui est lui aussi arbitraire. Elles réclament un nouveau Programme fédéral pour les aides familiaux qui leur fournit le statut de résident permanent dès leur arrivée, pour elles et leur famille.

D'ici là, elles demandent des réformes immédiates qui vont améliorer leur situation, parmi lesquelles on trouve celles-ci :

Cliquer pour agrandir

- Les aides familiaux devraient pouvoir demander la résidence permanente (RP) après une année de travail (ou 1950 heures). À l'heure actuelle, elles doivent travailler deux ans avant de pouvoir faire une demande. Une période d'une année est la norme pour la plupart des autres programmes d'immigration permanente au Canada.

- Tous les aides familiaux doivent obtenir des permis de travail ouverts et avoir accès à la mobilité du travail. Les aides familiaux en ce moment ne peuvent travailler que pour l'employeur dont le nom est inscrit sur leur permis, ce qui rend très difficile de quitter un employeur abuseur ou, dans le cas des soins aux aînés, de changer d'employeur lorsque la personne dont ils s'occupent décède.

- Les nouvelles exigences en matière d'instruction doivent être abrogées. Les aides familiaux doivent présentement avoir terminé une année d'équivalence postsecondaire canadienne avant de faire une demande de RP, mais ils n'ont pas le droit de suivre des cours pendant qu'ils travaillent.

- Le test d'anglais requis avant la RP doit lui aussi être abrogé. De nouvelles exigences relatives à la connaissance de l'anglais ont été introduites par le programme-pilote, mais il n'existe pas de classes d'anglais gratuites.

- Le nouveau plafond qui limite à 2 750 demandes de RP par année pour chaque vague d'aides familiaux doit être abrogé. Plus de 5 500 aides familiaux viennent chaque année au Canada dans le domaine des soins aux enfants. Le plafond imposé aux demandes de résidence permanente fait en sorte qu'au moins la moitié des aides familiaux ne sont pas en mesure de présenter une demande même après avoir satisfait à toutes les exigences.

- Les retards dans la résidence permanente doivent être comblés. Des milliers de femmes oeuvrant comme aides familiaux attendent depuis une période allant jusqu'à 10 ans pour être réunies à leur famille parce que personne ne fait le suivi des demandes concernant les membres des familles.

- Les conjoints et les enfants des aides familiaux devraient pouvoir les rejoindre en ayant eux-mêmes accès à des permis de travail et d'études. L'unité de la famille est la norme dans plusieurs autres programmes d'immigration temporaire et cela permet d'améliorer la santé et de renforcer les familles comparativement aux années de séparation forcée.

Les aides familiaux et leurs supporters entendent organiser plus d'actions dans un proche avenir et demandent l'appui des Canadiens pour leurs justes revendications.

« Nous demandons à tout le monde de nous appuyer, de rencontrer leurs députés, de parler des aides familiaux et de signer la pétition, a dit à Forum ouvrier Kara Manso, coordonnatrice du Centre d'action des aides familiaux de Toronto. Les élections fédérales auront lieu bientôt. Cela offre l'occasion aux Canadiens de prendre la parole à la défense des aides familiaux. Nous ne demandons pas de traitement spécial. Nous revendiquons nos droits humains fondamentaux, les mêmes droits qu'ont les autres. »

Note

 1. On peut lire le rapport en cliquant ici.

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L'état des droits humains aux États-Unis aujourd'hui

Les attaques criminelles de Trump
contre le droit d'asile


La caravane de migrants centroaméricains à la frontière des États-Unis,
à Tijuana, Mexique, le 22 novembre 2018

Le 9 novembre, le président Trump a publié une proclamation attaquant le droit des réfugiés de demander l'asile aux États-Unis. Il a déclaré que seules les personnes entrant dans le pays par les points d'entrée seraient autorisées à demander l'asile. Il l'a fait à un moment où beaucoup sont déjà arbitrairement et illégalement refusés aux points d'entrée situés le long de la frontière sud avec le Mexique.

Les réfugiés ont le droit de demander l'asile et de le faire, quel que soit le lieu où ils entrent dans le pays. Ceci est codifié à la fois dans le droit américain et le droit international que le président est tenu de respecter. Trump agit au contraire ouvertement contre les droits et les lois, ce qui fait de la proclamation une attaque criminelle. Il appuie ses dires en déployant 5 200 soldats de l'armée dans la région frontalière méridionale. Il déclare : « C'est une invasion de notre pays et nos militaires vous attendent » ! Il utilise des mots comme « invasion » qui jettent les bases d'une déclaration éventuelle de la loi martiale tout en ayant les troupes pour la faire respecter.

Trump tente de justifier la proclamation et le déploiement militaire au nom de l'intérêt national. La proclamation stipule : « La migration de masse continue et menaçante d'étrangers qui entrent aux États-Unis sans aucun fondement par la frontière sud a précipité une crise et sapé l'intégrité de nos frontières. Je dois donc prendre des mesures immédiates pour protéger l'intérêt national... »

Les mesures prises consistent à refuser le droit de demander l'asile aux réfugiés qui n'entrent pas par les points d'entrée : « En vertu de cette suspension, les étrangers qui franchissent la frontière sud, même ceux qui ne possèdent pas de documents d'identité, peuvent se prévaloir de notre système d'asile, selon les termes de cette proclamation, à condition qu'ils se présentent comme il se doit à un point d'entrée, aux fins d'inspection... Mais les étrangers qui entrent illégalement aux États-Unis par la frontière sud en violation de la présente proclamation ne pourront se voir accorder l'asile. » Les ports d'entrée sont désormais militarisés avec des clôtures surmontées de barbelés et des camps de détention comprenant des tentes sous contrôle militaire. La suspension est censée durer 90 jours, mais peut être prolongée par Trump, de même que le déploiement des troupes.

Dans la proclamation, Trump a de nouveau souligné que « l'entrée illégale d'un grand nombre d'étrangers aux États-Unis entre les points d'entrée de la frontière sud est contraire à l'intérêt national et notre loi reconnaît depuis longtemps que les étrangers cherchant à entrer légalement aux États-Unis doivent le faire aux points d'entrée. »

Les faits montrent que la plupart des réfugiés ont un « motif d'admission », par exemple une « peur crédible » d'être persécutés, torturés ou tués s'ils retournent dans leur pays d'origine. C'est également vrai que le droit américain et le droit international obligent spécifiquement les États-Unis à accepter les réfugiés et à entendre leur cause en audience, quel que soit l'endroit par lequel ils entrent dans le pays. Trump lui-même admet que « la grande majorité de ces étrangers satisfont au seuil de crainte digne de foi », ce qui signifie que leurs réclamations sont légitimes. Malgré cela, plusieurs se voient refuser le droit d'asile à la fois parce que la plupart n'ont pas d'avocat (la plupart des personnes qui obtiennent l'aide d'un avocat obtiennent l'asile), beaucoup se font berner et sont obligées de signer des documents utilisés contre elles, et parce que les États-Unis ne cessent d'élever arbitrairement le seuil requis pour l'acceptation de l'asile. Cela inclut l'élimination de la violence domestique en tant que peur crédible. Les États-Unis continuent d'agir en toute impunité et continueront sans aucun doute de le faire, quelles que soient les décisions des tribunaux.

Des migrants dans une caravane traversant le Mexique en direction de la frontière américaine

Les actions du gouvernement ont aussi pour
cible le mouvement de résistance aux États-Unis

Les actions prises par la classe dirigeante aux États-Unis, y compris par ses médias, au sujet d'une soi-disant invasion, telles celles de stationner l'armée à la frontière sud et de se préparer à priver les gens de leur citoyenneté, représentent non seulement une négation criminelle des droits, mais visent aussi à faire obstacle au mouvement de résistance héroïque du peuple des États-Unis et à le briser. Par ces discours au sujet d'une invasion et de menaces à la sécurité et au mode de vie américains, on vise à priver le peuple d'une conception du monde qui lui permette d'avoir une vue d'ensemble de la situation pour identifier les problèmes auxquels il est confronté et pour leur trouver des solutions. Cet effort concerté vise à maintenir le peuple dans un état de désinformation au moment même où la vue d'ensemble dont il a besoin est basée sur la nécessité de changement, la nécessité d'investir le peuple du pouvoir pour qu'il donne une nouvelle direction à l'économie et qu'il engendre une démocratie qui réponde aux exigences de notre époque, non au désespoir des riches. Sinon, ce qui constitue l'« intérêt national » est précisément ce qui perpétue la situation de l'enrichissement des riches et de l'appauvrissement des pauvres qui menace la société et ses membres.

Les médias et les autorités à tous les niveaux font tout ce qu'ils peuvent pour inciter les gens à participer aux attaques contre les droits de leurs semblables. Le fait d'annoncer une invasion, de stationner des troupes et de se préparer à priver les gens de leur citoyenneté n'est pas un développement que le peuple américain appuie. Les milliers de migrants qui ont marché des milliers de kilomètres pour se rendre à la frontière dont le tiers sont des enfants et un grand nombre de femmes et dont aucun participant ne porte une arme ne constituent pas une force d'invasion. Dans une entrevue avec le New York Times, même l'amiral James G. Stavridis, l'ancien chef du commandement sud de l'armée américaine, a ouvertement dénoncé Trump et sa « fausse invasion de caravanes de migrants ». Pourquoi, alors, tous ces propos, ces proclamations et ce déploiement de troupes ? Pourquoi alors menacer de retirer la citoyenneté à des personnes nées aux États-Unis et du même souffle marteler la question de l'« intérêt national » ?

Par ces actions, on vise avant tout à justifier le recours à la force contre la résistance populaire aux atteintes aux droits qui sévissent des deux côtés de la frontière. C'est le peuple américain qui en est la cible et c'est la conscience grandissante que ce pays n'est pas celui que le peuple veut qui est attaquée. Cela s'est manifesté entre autres par les actions de masse contre les séparations familiales, actions qui ont rassemblé des gens de toutes les couches de la société et de diverses opinions politiques pour dire NON ! d'une seule voix.


Une caravane traversant le Honduras en octobre 2018 en direction nord

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Retirez immédiatement toutes les troupes
de la frontière : notre sécurité est dans
notre lutte pour les droits de tous

Le président Trump a ordonné à près de 5 200 troupes en service actif de se masser à la frontière sud entre les États-Unis et le Mexique. Il y a déjà 2 092 soldats de la Garde nationale à cet endroit. Selon le Pentagone, il y a 2 800 soldats en service actif au Texas, 1 500 en Arizona et 1 300 en Californie. Un nombre inférieur de soldats seront envoyés au Nouveau-Mexique. Le Pentagone affirme que le nombre de soldats pourrait atteindre 7 000. Des troupes seront actives tout le long de la frontière, mais la plupart d'entre elles sont stationnées dans des bases près de centres à forte population comme El Paso au Texas et San Diego en Californie. Déjà dans les régions de points d'entrée et les petites villes frontalières circulent des véhicules militaires, des clôtures coiffées de barbelés à lames ainsi que des soldats armés qui patrouillent.

Les troupes armées vont mener ce que l'armée appelle des « formations de masse à grande échelle sur l'usage de la force ». L'armée munit Douanes et Protection des frontières (DPF) de systèmes de reconnaissance et de renseignements et d'hélicoptères dotés de détecteurs à vision de nuit. Elle fournira aussi aux agents du DPF un nouvel équipement militaire tel des boucliers antiémeutes, des protège-tibias tactiques, des bâtons extensibles de trois pieds et une panoplie de munitions « non létales ». L'opération est menée sous le commandement du général Terrence O'Shaughnessy, le chef du Commandement Nord, qui est responsable des États-Unis, du Canada et du Mexique.

Ce qui est non négligeable est qu'il s'agit de troupes en service actif et non de nouveaux membres de la Garde nationale. Le recours à la Garde nationale doit généralement recevoir le consentement du gouverneur de l'État en question. L'armée en service actif n'est pas tenue de le faire et est entièrement sous le commandement du Pentagone, y compris pour décider du nombre d'intervenants, de la durée du déploiement et des règles gérant le recours à la force.

Un tel déploiement n'est nettement pas nécessaire puisqu'il ne s'agit que de quelques milliers de personnes dont le tiers est composé de femmes et d'enfants et que tous sont sans armes et ont voyagé des milliers de kilomètres surtout à pied pour chercher asile aux États-Unis. L'occupation militaire et les exercices militaires réels dans le pays même sont plutôt à l'intention des peuples des États-Unis et du Mexique, pour les habituer à la présence de l'armée et faire en sorte qu'il soit perçu comme normal pour l'armée d'être présente et active en si grand déploiement. Aussi, le DPF, l'État, le pays et les agents policiers locaux sont assujettis au commandement militaire. Ce qui explique un tel commandement unifié est le fait que les conflits entre ces autorités et le gouvernement fédéral et entre elles s'intensifient, en particulier dans les États sanctuaires comme la Californie. Il est aussi nécessaire en cas de ce que le président a qualifié d'« invasion », ce qui justifierait non seulement la présence de troupes, mais aussi du décret de la loi martiale.

En fait, il est interdit de déployer l'armée à des fins policières et pour détenir des personnes non militaires à l'intérieur des États-Unis. En vertu de la Loi Posse Comitatus (1878) adoptée dans la période de reconstruction après de la Guerre civile et de la Reconstruction, il est interdit aux forces militaires d'accomplir des tâches réservées aux autorités policières civiles telles les arrestations, les appréhensions, les interrogations et la détention à moins d'être dument autorisées par le Congrès.

Le Pentagone prétend que l'armée joue uniquement un rôle d'« appui » et non d'exécution. Les peuples du Mexique, de la Colombie, du Honduras, du Salvador et du Guatemala, pour ne nommer que ceux-là, connaissent très bien cet « appui » offert par l'armée américaine. C'est un prétexte pour que les forces militaires américaines assument le contrôle, aient recours régulièrement aux détentions, aux interrogations et aux confrontations armées sans égard aux lois ni à l'autorité d'un pays donné. En toute probabilité, ce déploiement fera de même, l'armée et le DPF agiront ensemble avec impunité contre les peuples des deux côtés de la frontière et sans égard aux autorités locales et gouvernementales.

Les troupes et les camps de concentration

Le 87e Corps mécanique de l'armée américaine déployé à la frontière mexicaine

En même temps que Trump déploie l'armée, il ordonne au Pentagone de construire des camps de détention capables d'enfermer 200 000 personnes comme point de départ — encore une fois un chiffre qui dépasse de loin le nombre de réfugiés sans armes qui arrivent à la frontière et qui demandent asile. On prévoit des camps de concentration aux bases des Forces aériennes de Fort Bliss, Goodfellow et Dyess au Texas et il est fort probable que tout équipement qui est présentement installé restera à de telles fins, à la fois pour l'armée et DPF. De tels camps sont aussi prévus en Californie et en Arizona, où les troupes sont déployées, sans oublier en Alabama et en Arkansas. Et même si Trump prétend que les camps, comme les troupes, sont là pour les immigrants et les réfugiés, le nombre d'installations indique plutôt que les futurs plans incluent tous ceux que l'exécutif juge une « menace à la sécurité nationale ». Si pour Trump des familles pauvres et sans armes qui arrivent à pied représentent une « invasion » et une menace à « l'intérêt national », les travailleurs en grève, les opposants à la guerre, les protecteurs de l'eau, les organisateurs environnementaux et tous ceux qui défendent les droits seront perçus de la même façon.

Élargissement des pouvoirs policiers

Le recours à l'armée au pays même, les camps de concentration, l'interdiction de demandeurs d'asile, la séparation des familles sont tous des exemples d'une expansion des pouvoirs policiers par l'exécutif. Les actions sont ouvertement illégales et sont prises en toute impunité. L'intention d'avoir recours au décret exécutif pour éliminer la citoyenneté de naissance serait un autre exemple de comment, malgré le fait que c'est illégal, l'exécutif peut avoir recours aux pouvoirs policiers pour mettre cette mesure en oeuvre, comme cela se produit pour les détentions illégales et la séparation des familles. Ces actions se poursuivent en dépit des décisions de justice.

Le Bureau du Président se sert des pouvoirs policiers au pays et à l'étranger pour usurper davantage le pouvoir et le concentrer entre les mains de l'exécutif pour priver le peuple de pouvoir et de droits. C'est ce gouvernement de pouvoirs policiers qui représente un danger. Le recours récent à l'armée, au DPF et à l'Immigration and Customs Enforcement (ICE) en témoigne - et toutes leurs actions n'ont fait qu'accroître l'insécurité des peuples, ici et ailleurs.

La solution est dans l'intensification de la lutte pour les droits de tous, au pays et à l'étranger. Le travail que font les vétérans militaires pour encourager les troupes actuelles à refuser de respecter les ordres et d'être au service des camps de concentration et d'attaquer les réfugiés, les nombreuses organisations de défense des droits des immigrants et des réfugiés des deux côtés de la frontière, l'organisation antiguerre qui ne fait qu'un avec les peuples qui luttent pour la paix et la justice contribuent toutes à un monde plus sécuritaire. Ensemble, intensifions la lutte pour nous investir du pouvoir et pour nos droits !

Retirez immédiatement toutes les troupes de la frontière !
Notre sécurité est dans notre lutte pour les droits de tous et toutes !

Voice of Revolution est une publication de l'Organisation marxiste-léniniste des États-Unis.

(13 novembre 2018. Traduction : LML)

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198e anniversaire de naissance de Friedrich Engels

Friedrich Engels : grand défenseur et
éducateur de la classe ouvrière

Friedrich Engels, le brillant éducateur et dirigeant du prolétariat international est né il y a 198 ans, le 28 novembre 1820. Lui et Karl Marx, son proche ami et camarade, ont fondé le socialisme scientifique, la théorie indispensable du mouvement émancipateur de la classe ouvrière. Son activité révolutionnaire s'étend sur plus d'un demi-siècle pendant lequel, avec Karl Marx, il a démontré que la lutte pour le socialisme n'est pas une utopie, un ensemble d'« idées excellentes » dont il s'agirait seulement de convaincre les maîtres et les classes gouvernantes de leur bien-fondé, mais la conséquence inévitable du développement des forces productives de la société moderne et de la toute aussi inévitable lutte de classe du prolétariat contre la bourgeoisie que ce développement provoque.

Friedrich Engels est né à Barmen, en Rhénanie prussienne. Déjà à l'école, il avait acquis une haine profonde pour l'autocratie et le despotisme politique. Disciple des enseignements révolutionnaires de Hegel, comme Marx, il en vint tôt à rejeter, comme Marx également, le point de vue idéaliste de Hegel, mais adopta son approche dialectique pour faire une analyse matérialiste du monde. Armé de cette conception et de cette approche, il fit une étude détaillée des conditions de la classe ouvrière anglaise après s'être établi à Manchester, dans le coeur de l'industrie britannique, en 1842, où il fut témoin de la pauvreté et de la misère des travailleurs. Le produit de ses études et observations est dans son ouvrage La situation de la classe laborieuse en Angleterre, qui a une grande valeur révolutionnaire et scientifique. Avec cet ouvrage, Engels fut le premier à souligner le côté révolutionnaire de la condition déplorable du prolétariat : que les conditions de la classe ouvrière la mènent irrévocablement à lutter pour son émancipation complète. Le mouvement politique de la classe ouvrière amènerait inévitablement les travailleurs à la conclusion que leurs intérêts exigent la destruction des fondements de la société capitaliste, du pouvoir de la toute petite minorité d'exploiteurs et de la propriété privée, et que l'avenir passait nécessairement par le socialisme. Engels démontra également par l'analyse matérialiste dialectique de la société humaine que le socialisme ne deviendrait une force que lorsqu'il deviendrait le but de la lutte politique de la classe ouvrière. C'est à cette époque en Angleterre qu'il devint un socialiste.

Engels rencontra Marx en 1844. Les deux avaient déjà commencé par correspondance leur collaboration qui allait durer toute leur vie et qui allait donner à la classe ouvrière la science révolutionnaire de son émancipation. Cette année-là, ils rédigèrent La Sainte Famille ou Critique de la critique critique, qui jette les bases du socialisme matérialiste révolutionnaire. Ils y présentent une critique incisive de la philosophie des frères Bauer et leur approche « critique » du monde, et écrivirent que la question n'est pas de contempler le monde, mais de lutter pour un meilleur ordre de société.

Couverture de la première édition du Manifeste du Parti communiste, en allemand

De 1845 à 1847, Engels poursuivit son oeuvre révolutionnaire parmi les travailleurs allemands à Paris et à Bruxelles où lui et Marx s'étaient mis en contact avec la Ligue communiste allemande clandestine, de laquelle ils reçurent le mandat d'énoncer les grands principes du socialisme tels qu'ils les avaient élaborés. En novembre 1847, Engels compléta la première ébauche du Manifeste du Parti communiste. Dans cet ouvrage immortel publié en 1848, Marx et Engels présentent avec brio la doctrine du socialisme scientifique, le programme pour l'émancipation de la classe ouvrière et l'édification d'une société nouvelle, la société communiste. Ils placèrent le prolétariat au centre du développement social en tant que dirigeant, inspirateur, organisateur et mobilisateur de la lutte de classe irréconciliable contre la bourgeoisie. Ils proclamèrent le prolétariat le fossoyeur de la bourgeoisie, déclarant que « sa chute et la victoire du prolétariat sont également inévitables », que la classe ouvrière doit devenir la classe dominante, qu'elle doit recourir à la violence pour contrer la violence de l'État bourgeois pour réaliser la transformation de la société et qu'il doit établir sa dictature pour s'émanciper et du même coup émanciper l'humanité tout entière. Marx et Engels lancèrent l'appel de clairon : « Prolétaires de tous les pays, unissez-vous ! » Il incarne les principes de l'internationalisme prolétarien et montre le caractère international de la lutte du prolétariat pour s'affranchir de l'exploitation capitaliste et de l'esclavage salarié, pour renverser l'ordre capitaliste et son pouvoir d'État à l'échelle du monde.

Les révolutions de 1848 en Europe ramenèrent Marx et Engels en Allemagne. À Cologne, en Rhénanie prussienne, ils publièrent le journal démocratique Neue Rheinische Zeitung et devinrent les personnages centraux de la lutte démocratique révolutionnaire contre les forces de la réaction dans ce pays. La réaction l'emporta et le journal fut interdit et si Engels continua de se battre après l'expulsion de Marx, en prenant une part active au soulèvement armé populaire, dans trois batailles en particulier, il fut lui aussi forcé de quitter le pays après la défaite des forces révolutionnaires.

Peu après, Engels s'établit en Angleterre où Marx s'était exilé et ils poursuivirent leur proche collaboration révolutionnaire jusqu'à la mort de Marx en 1883, produisant un trésor de matériaux révolutionnaires qui demeurent à ce jour un guide indispensable pour le prolétariat international, n'ayant rien perdu de leur valeur et validité. C'est en Angleterre que Marx allait rédiger le plus grand ouvrage jamais fait sur l'économie politique : Le Capital. Pendant que Marx poursuivait cette analyse d'envergure des phénomènes complexes de l'économie capitaliste, Engels entreprit de développer la science et la conception du monde révolutionnaires sur une grande variété de sujets, produisant plusieurs oeuvres simples et concises dans un style polémique. Parmi ses grandes contributions à la théorie du socialisme scientifique durant cette période, citons la célèbre polémique Anti-Duhring, dans laquelle il aborde plusieurs questions fondamentales de la philosophie, des sciences naturelles et des sciences sociales. Citons aussi La question du logement (1873), L'origine de la famille, de la propriété privée et de l'État (1884) et Ludwig Feuerbach et la fin de la philosophie classique allemande (1890). C'est également à Engels que revint la grande tâche de préparer et de publier les deuxième et troisième tomes du Capital, Marx les ayant laissés à l'état d'ébauche à sa mort.

L'oeuvre révolutionnaire de Friedrich Engels va toutefois au-delà de l'inestimable formulation de la théorie révolutionnaire du prolétariat. Comme Marx, il fut actif dans le mouvement ouvrier international, notamment au sein de l'Association internationale des travailleurs fondée par Marx en 1864. Puis après la dissolution de l'Internationale et la mort de Marx, Engels continua de s'intéresser de près au développement du mouvement international de la classe ouvrière. La correspondance qu'il entretint avec des communistes et des dirigeants ouvriers partout en Europe et en Amérique du Nord compte parmi les trésors qu'il a laissés au prolétariat international, riche en principes et d'une grande valeur pour la formulation de la stratégie et des tactiques révolutionnaires du prolétariat.

L'essence révolutionnaire de ce brillant combattant pour les intérêts de la classe ouvrière est toujours présente dans son oeuvre. Il ne perdit jamais de vue, ne serait-ce qu'un instant, les intérêts pour lesquels il combattait, ne s'abandonna jamais à la phrase, ne cessant de rappeler que le marxisme « n'est pas un dogme, mais un guide pour l'action ». Ces écrits constituent à ce jour une composante intégrale et essentielle de la théorie du socialisme scientifique, un guide inestimable et indispensable dans la lutte de la classe ouvrière pour son émancipation, pour le socialisme et le communisme.


Réunion de fondation de l'Association internationale des travailleurs à Londres
en septembre 1864

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