Le Marxiste-Léniniste

Numéro 6 - 11 février 2015

Discussion

L'extrémisme du gouvernement Harper

Falsification de l'histoire pour éliminer la capacité du peuple
de s'unir dans l'action pour l'édification nationale aujourd'hui
L'extrémisme du gouvernement Harper

Tentative méprisable de faire du communisme
l'ennemi principal des Canadiens

Un projet de loi anticommuniste débattu à la Chambre des communes

Opposition aux projets du gouvernement
Dans le calendrier de qui le 30 avril est-il un jour funeste?
- Louis Lang -
Le monument de Harper aux victimes du communisme
suscite de nombreuses objections

- Le Conseil des Canadiens -

Pourquoi le Canada célèbre-t-il la Journée Raoul Wallenberg?
Pourquoi Raoul Wallenberg? Qui était-il? Qu'a-t-il fait?
- Pauline Easton et Dougal MacDonald -

Jour du souvenir de l'Holocauste
L'Allemagne loge des réfugiés dans d'anciens camps de concentration

L'anniversaire de la bataille de Stalingrad
Des anciens combattants adressent une lettre à la chancelière d'Allemagne

Critique de film
La Liste de Schindler
- Rich Gibson -


Dans l'actualité
Venezuela

Une autre tentative de coup d'État des États-Unis
La guerre économique menée contre le peuple vénézuélien
Un coup en temps réel
- Eva Golinger -

Grèce
La Banque centrale européenne réagit au rejet de l'austérité

Enquête sur la responsabilité d'Israël dans les crimes commis à Gaza
Nouvelle tentative de faire dérailler la Commission d'enquête
L'attaque israélienne contre Gaza était du «terrorisme
d'État sur une vaste échelle»

- Entrevue avec Richard Falk par Electronic Intifada -


Falsification de l'histoire pour éliminer la capacité du peuple de s'unir
dans l'action pour l'édification nationale aujourd'hui
L'extrémisme du gouvernement Harper

Tentative méprisable de faire du communisme
l'ennemi principal des Canadiens


Le gouvernement Harper est déterminé à créer le plus de monuments anticommunistes possible avant la fin du règne du premier ministre Harper. L'abominable mémorial qu'il fait construire aux prétendues 100 millions de victimes du communisme n'en est qu'un exemple.

Dans ce dernier projet, en plus d'accepter d'allouer des fonds publics à sa construction le gouvernement a pilé sur les pieds de plusieurs institutions canadiennes pour faire place à un monument qui impose un point de vue privé et extrémiste du monde et en fait une politique officielle. Il le fait d'une manière à froisser ou blesser plusieurs secteurs de la société qui ne partagent pas cette vision du monde ou cette interprétation de l'histoire. Ce n'est pas de la gouvernance, c'est de l'extrémisme. Aucune société ne peut survivre sur la base d'être dominée par des points de vue et des pratiques extrémistes. C'est quelque chose de très inquiétant.

Il ne serait pas surprenant que le déclenchement de la prochaine élection fédérale soit lié à l'achèvement de la construction de ce méprisable monument anticommuniste. Selon le plan actuel, tous les obstacles sont abattus pour que le monument soit prêt à l'automne 2015. Harper voudrait que son monument soit construit avant la tenue de l'élection à date fixe, soit le 19 octobre, au risque de ne pas être réélu et de voir son projet abandonné. Il ne serait pas surprenant non plus qu'il invente une raison pour reporter l'élection et se serve de sa majorité au parlement pour l'imposer.

Mais quelle que soit la date choisie pour le déclenchement de l'élection, pour achever cette monstruosité dans les délais annoncés le gouvernement Harper devra continuer de défier l'opposition à ce projet. Le financement public accordé est déjà un scandale. L'organisation anticommuniste privée qui est derrière ce projet n'a pas d'appui populaire et le gouvernement a dû intervenir lui-même pour combler le manque à gagner à même les fonds publics. Les coûts sont déjà passés de 1,5 million $ à 5,5 millions $ et certaines estimations les placent à plus de 12 millions $. Et cette somme est sans doute elle-même une sous-estimation quand on sait quelle technologie moderne et quels matériaux sont requis. Quoi qu'il en soit, les Canadiens peuvent s'attendre à ce que le gouvernement verse la somme qu'il faut pour assurer l'achèvement du projet.


Site assigné au monument anticommuniste

De plus, la dictature Harper place le monument sur un terrain déjà sélectionné pour un édifice fédéral dans les années 1920, qui s'inscrit dans « la vision et le plan à long terme » de la Commission de la Capitale nationale (CCN). Cet aspect montre encore les pratiques corrompues de ce gouvernement. Le mépris avec lequel Stephen Harper et ses ministres traitent la CCN et plusieurs autres institutions est d'autant plus condamnable quand on sait que certaines de ces institutions ont usurpé l'autorité en des matières dont elles ne sont pas expertes. Par exemple, les membres nommés du conseil d'administration de la CCN n'ont pas l'expertise requise pour juger de l'affirmation fallacieuse de l'organisation privée qui parraine ce projet, reprise par le premier ministre, que 100 millions de personnes sont mortes à cause du communisme. En vertu de quelle autorité ont-ils permis l'utilisation du terrain concerné, qui appartient à la CCN, pour ce monument, sans parler du fait qu'il s'agit d'un emplacement privilégié où se trouvent certaines des grandes institutions qui définissent le Canada ?

Même les sections les plus libérales de l'establishment canadien décrivent le monument comme étant anticanadien et une imposition brutale, et considèrent son emplacement parmi les institutions qui définissent le Canada comme tout à fait inacceptable.

Les tentatives des publicistes de Harper et de son gouvernement de les faire passer pour des représentants de l'opinion publique dominante ont clairement échoué. Les scandales vont continuer de s'accumuler s'ils ne reviennent pas à la raison.

À partir de ce moment, les Canadiens pourront s'attendre à voir une dictature encore plus brutale, l'utilisation encore plus abusive des fonds publics et des institutions d'État pour imposer la volonté extrémiste de ce gouvernement. Et cela pourrait se prolonger au-delà de la prochaine élection si les manoeuvres de micromanipulation de l'électorat réussissent et que les conservateurs gagnent à nouveau.

Ça ne doit pas passer ! Les Canadiens de tous les milieux ont des raisons tout à fait valables de s'élever contre ce que ce fait le gouvernement Harper sur ce front et sur tous les autres.

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Un projet de loi anticommuniste débattu
à la Chambre des communes




Monument à la victoire du peuple vietnamien en 1975, Da Nang, Vietnam

La Chambre des communes débat présentement d'un projet de loi adopté par le Sénat qui crée un précédent en qualifiant la chute de Saïgon le 30 avril 1975 de « jour noir » dans l'histoire qui devrait être commémoré comme tel au Canada.

Bien au contraire, le 30 avril 1975 marque la libération du Vietnam, un exploit glorieux accompli par le peuple vietnamien après vingt années d'agression et de guerre cruelles par les États-Unis et auparavant, du milieu du XIXe siècle à 1954, par la puissance coloniale française. La chute de Saïgon marque la libération complète du Vietnam, nord et sud, qui a permis sa réunification et, au prix d'énormes efforts, sa reconstruction et sa transformation en un pays prospère. C'est le jour où le peuple vietnamien a mis fin à la guerre d'agression sanglante durant laquelle l'impérialisme américain a commis des crimes incroyablement odieux contre l'humanité. La guerre d'intervention et d'agression des États-Unis au Vietnam et dans les autres pays de la péninsule indochinoise figure dans l'histoire des guerres d'agression comme l'une des plus barbares. Elle a fait plus de trois millions de morts parmi les Vietnamiens, des millions de blessés et de déplacés et laissé le pays et son économie en ruine. Près de 60 000 soldats américains ont été tués et 153 303 ont été blessés, beaucoup d'entre eux restés invalides, dont beaucoup se retrouvent à la rue encore aujourd'hui par négligence des autorités gouvernementales. Malgré la grande force militaire et la brutalité inouïe de la superpuissance américaine, l'héroïque peuple vietnamien lui a infligé une défaite. Voilà ce que les Vietnamiens et les peuples du monde célèbrent le 30 avril chaque année.

Il y a une photo de la chute de Saïgon qui est connue partout dans le monde. On y voit un hélicoptère avec à son bord des membres du personnel diplomatique et leurs familles qui n'arrive pas à décoller du toit de l'ambassade des États-Unis parce que des fantoches des États-Unis s'y accrochent. On voit les Américains à l'intérieur les repousser et les fantoches vietnamiens tomber ou s'accrocher désespérément. Cela illustre bien l'attitude de l'impérialisme américain envers ceux qui l'avaient pourtant bien servis, des renégats auxquels le gouvernement Harper fait maintenant appel pour l'aider à réaliser ses objectifs intéressés.


À gauche : évacuation de l'ambassade américaine à Saïgon. À droite : Un Sud-Vietnamien qui veut être évacué est chassé d'un coup de poing au visage.

Après la défaite des impérialistes américains au Vietnam, il y a eu le phénomène des « réfugiés de la mer fuyant le Vietnam » qui fut à l'origine d'un déluge de propagande déchirante à propos de nombreux Vietnamiens mourant en mer et leur sort dans les camps de réfugiés. Le Canada a ouvert ses portes à ces « réfugiés de la mer » et depuis les différents partis politiques au pouvoir ont essayé de les recruter à leurs propres fins intéressées. Qui étaient ces gens et pourquoi ont-ils quitté le Vietnam ? C'est une question qui mérite une réponse, mais le gouvernement Harper a décidé qu'il s'agissait de victimes du communisme. Le Canada est constitué de si nombreux immigrants et descendants d'immigrants, il est important que le compte-rendu de l'histoire reflète correctement pourquoi ils sont venus ici. Beaucoup sont des immigrants économiques. Il y a certainement de nombreux Vietnamiens qui ont cru ne pas pouvoir survivre dans une économie ruinée par la guerre et se sont fait prendre dans l'entreprise dangereuse de fuir dans des embarcations à peine en état de naviguer. Mais d'autres furent des collaborateurs des États-Unis qui ne voulaient pas faire face à la justice ou participer à la reconstruction de leur pays. Ce sont ces derniers que le gouvernement Harper louange en créant l'impression que les communistes furent responsables de la guerre du Vietnam parce qu'ils refusaient de remettre leur patrie aux impérialistes américains qui, dans leur quête pour la domination mondiale, s'étaient proclamés les véritables libérateurs de l'humanité.

Au Canada, dans les années soixante et soixante-dix, l'opposition à la guerre du Vietnam était très forte. Les Canadiens ont exigé en masse que les États-Unis se retirent du Vietnam et cessent de commettre des crimes contre l'humanité, et en masse ils ont célébré la victoire quand les États-Unis ont perdu la guerre et ont été forcés d'abandonner la péninsule indochinoise. Les États-Unis ont mené cette guerre au nom de la liberté, de la démocratie et des droits humains, contre ce qu'ils ont appelé l'empire du mal, le communisme, et aujourd'hui M. Harper usurpe le pouvoir d'État pour déclarer la victoire du capitalisme sur le communisme, qualifiant tous ceux qui partagent ses convictions de victimes du communisme. C'est un zèle de conquérant, pas un comportement d'homme d'État.

Le projet de loi débattu à la Chambre des communes est si controversé que son titre Loi du Jour noir d'avril a dû être changé pour Loi de la Journée du parcours vers la liberté. La concession semble avoir été faite pour le rendre acceptable aux libéraux, qui eux refusent de prendre position sur la question de fond. Selon le gouvernement Harper, le projet de loi ne serait pas une insulte au gouvernement et au peuple du Vietnam mais une célébration des immigrants d'origine vietnamienne au Canada.

Le nom du projet de loi est en soi une tentative d'imposer les falsifications de l'histoire de Harper comme la politique officielle du Canada. Cela ne fait que prouver encore une fois qu'aujourd'hui on a anéanti le système de démocratie représentative basé sur l'adoption ou la promotion de ce qu'on appelle communément les valeurs consensuelles canadiennes. Certains intérêts privés extrémistes se sont emparés du contrôle de l'État, font de leurs positions idéologiques la politique officielle de l'État et tentent de les imposer à l'ensemble des Canadiens et à la société.

Ce que prouvent les agissements du gouvernement Harper, c'est que ces attaques contre le communisme ne sont pas une affaire qui concerne seulement les communistes. Cela concerne tous les Canadiens et toutes les Canadiennes parce que c'est une attaque contre les institutions d'État et contre tout ce pourquoi le Canada est connu dans le monde. Il est inadmissible que l'on construise un monument dédié aux prétendues victimes du communisme. Il est inadmissible de nier, comme le fait ce projet de loi, la signification de la chute de Saïgon, de la changer de célébration de la victoire de la libération du Vietnam, de la victoire contre l'agression et l'oppression américaines en un « jour noir » pour servir la croisade anticommuniste de Stephen Harper.

Les députés au parlement et tous les Canadiens et toutes les Canadiennes ont le devoir de s'élever contre ces choses et de s'assurer qu'elles ne passent pas. Le fait même de s'exprimer contre ce projet de loi montrera ce que les Canadiens défendent réellement.

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Dans le calendrier de qui le 30 avril
est-il un jour funeste?


Manifestation de masse à Toronto contre la guerre du Vietnam

Le 5 février, la Chambre des communes a commencé à débattre d'un projet de loi émanant d'un sénateur qui marque le 30 avril comme le jour où le Sud-Vietnam est tombé sous le pouvoir d'un régime communiste autoritaire et oppresseur. Beaucoup de Canadiens et l'ambassade du Vietnam au Canada se sont opposés à ce projet de loi parce qu'il est une insulte flagrante faite au peuple vietnamien pour qui le 30 avril 1975 est une journée historique, la journée où le peuple vietnamien a remporté la victoire complète contre les forces armées des États-Unis qui ont été forcés de fuir Saïgon et d'admettre leur défaite.

Le projet de loi a été présenté au Sénat par le sénateur conservateur Thanh Hai Ngo sous le titre de Loi du Jour de l'avril noir, mais, confronté à l'opposition à son projet de loi scandaleux, le sénateur Ngo lui a donné un nouveau titre, la Loi sur la Journée du parcours vers la liberté. Le projet de loi a déjà reçu l'approbation du Sénat.

Lors de l'examen du projet de loi par le Sénat, la demande de l'ambassadeur du Vietnam au Canada, To Anh Dung, de venir témoigner a été refusée. Le premier ministre du Vietnam, Nguyen Tan Dung a écrit une lettre à Stephen Harper dans laquelle il a fait part de ses préoccupations concernant le projet de loi, l'avertissant que celui-ci présente une version déformée de l'histoire et pourrait endommager les relations bilatérales que les deux pays ont travaillé à construire. Les conservateurs ont utilisé leur majorité au Sénat pour faire adopter le projet de loi.

Le changement du nom du projet de loi n'en modifie pas l'intention

De toute évidence, changer le nom du projet de loi ne cache pas les véritables intentions du gouvernement Harper. Le projet de loi est le plus récent exemple de l'obsession et de la croisade anticommunistes des conservateurs. C'est une réécriture de l'histoire pour déformer la vérité et créer la mystification et la confusion politique pour empêcher les gens de tirer les conclusions qui s'imposent.

Pour le peuple vietnamien et le monde, le 30 avril 1975 représente la victoire complète du peuple vietnamien contre l'agression barbare impérialiste américaine. Cette victoire historique a valu au peuple vietnamien le plus grand respect et l'admiration du monde entier pour sa lutte courageuse et héroïque qui a une place d'honneur dans les annales des luttes de libération nationale.

Il est également important de se rappeler qu'au printemps de 1954, le peuple vietnamien a vaincu les colonialistes français à Dien Bien Phu. Les historiens militaires ont noté que Dien Bien Phu a été « la première fois qu'un mouvement anticolonial non européen pour l'indépendance passe toutes les étapes, depuis les groupes de guérillas jusqu'à une armée conventionnelle organisée et équipée capable de vaincre en bataille rangée un occupant occidental moderne ».

En 1955, les États-Unis ont commencé leur ingérence et leurs manoeuvres pour saboter l'unité du peuple du Vietnam et les élections démocratiques prévues. Ce qui avait commencé par l'envoi de conseillers militaires américains auprès du régime fantoche au Sud-Vietnam, a éclaté en une agression militaire de grande envergure des États-Unis pour dominer le Vietnam.

Au cours de son agression criminelle l'armée américaine s'est livrée à des bombardements intensifs pour tuer et mutiler le peuple dans un effort pour le soumettre. Un grand nombre de bombardiers B-52 et de chasseurs-bombardiers, de même que des hélicoptères d'assaut et de l'artillerie ont été lancés contre le peuple vietnamien. Parmi les armes de destruction massive utilisées, on compte non seulement des bombes conventionnelles utilisant des explosifs puissants mais aussi du napalm, du phosphore blanc et des bombes à fragmentation. On estime que 15 millions de tonnes de munitions ont été utilisées par l'armée américaine. En plus des morts et des blessures causées à des millions de personnes, l'agression américaine au Vietnam a eu des conséquences désastreuses pour l'environnement naturel. Des rizières, des vergers, des fermes et des jardins ont été détruits et pollués pour des générations à venir. L'armée américaine a délibérément pulvérisé plus de 70 millions de litres d'agents herbicides, principalement l'agent orange, sur tout le pays. Ces défoliants causent encore aujourd'hui des souffrances et des pertes humaines. Les enfants nés des décennies après la guerre souffrent encore des séquelles du poison laissé par l'armée américaine.

La liste des crimes commis au Vietnam est sans fin. Plusieurs de ces faits ont été documentés dans un livre soigneusement préparé, documentation à l'appui, par Nick Turse intitulé Kill Anything that Moves : The Real American War in Vietnam (Tuez tout ce qui bouge : la véritable guerre américaine au Vietnam), publié en 2013. Turse a fouillé pendant dix ans les archives secrètes du Pentagone et a eu de nombreux entretiens avec le personnel de l'armée américaine. Son livre expose clairement les rouages sinistres d'une machine militaire américaine qui a délibérément et systématiquement causé la mort et des blessures à des millions de civils vietnamiens.

Les crimes commis par l'impérialisme américain au Vietnam ne sont pas restés sans réponse. Le peuple vietnamien s'est battu et il a prévalu. Du début des années 1960 jusqu'à 1975, partout dans le monde les peuples ont manifesté et mené des actions en appui à sa juste guerre de résistance et de libération nationale. Aux États-Unis, le mouvement antiguerre a pris de l'ampleur année après année et aucune tentative de le réprimer par la violence n'a pu en venir à bout. Au Canada, des centaines de milliers de jeunes et d'étudiants ont organisé des manifestations en appui à la lutte du peuple vietnamien. Des milliers d'entre eux ont été jetés en prison et certains ont même été expulsés du Canada pour avoir combattu la police. Partout dans le monde, les gens ont fait tout ce qu'ils pouvaient pour fournir un appui au Front de libération nationale au Vietnam.

Pour toutes les personnes progressistes éprises de liberté au Canada, aux États-Unis et partout dans le monde, le 30 avril 1975 était ardemment souhaité. C'est le jour qu'ils avaient tous souhaité pour que le peuple vietnamien puisse être libre de toute agression étrangère et se créer une vie pour soi-même sans aucune ingérence. Avec la libération de Saïgon le 30 avril 1975, le Front national de libération (FNL) dans le sud du Vietnam et l'armée nord-vietnamienne dans le nord du pays ont réalisé la principale condition requise pour la réunification de leur pays. Ils ont montré au monde qu'un peuple déterminé à défendre sa liberté et sa souveraineté est plus puissant que n'importe quelle armée agressive, peu importe combien elle est puissante et arrogante.

La réunification du Vietnam a finalement été proclamée en 1976 et la République socialiste du Vietnam a été créée. Depuis, le gouvernement du Vietnam a réalisé d'importants progrès dans la reconstruction du pays et l'établissement d'une économie stable et prospère.

Compte tenu de l'histoire du Vietnam, quel problème le gouvernement conservateur de Stephen Harper essaie-t-il de résoudre avec ce projet de loi ? Jason Kenney, le ministre du Multiculturalisme, a déclaré qu'il appuie le projet de loi parce qu'il célèbre les 60 000 personnes qui « ont risqué leur vie à la recherche de la liberté et l'ont trouvée au Canada ». Si M. Kenney était vraiment préoccupé par les personnes « risquant leur vie à la recherche de la liberté », ne voudrait-il pas rendre hommage aux plus de 90 millions de Vietnamiens qui ont risqué leur vie tous les jours pendant plus de 15 ans d'occupation et de crimes américains et les millions de personnes qui ont été tuées impitoyablement par les forces américaines, à la fois vietnamiennes et américaines ? Kenney et le sénateur Ngo n'ont rien à dire sur les crimes commis contre le peuple vietnamien. Cette omission flagrante suggère que ces crimes et les victimes étaient un sacrifice nécessaire pour amener le peuple vietnamien à « la liberté et à la démocratie ».

M. Kenney ne semble pas préoccupé par ces crimes de guerre ni par la nécessité de porter des accusations contre les responsables. Sa préoccupation, c'est comment il peut amener 60 000 réfugiés à voter pour le gouvernement Harper et imposer son programme anticommuniste. En se faisant le porte-parole des demandes des éléments corrompus parmi ces 60 000 réfugiés qui recherchent des privilèges pour eux-mêmes au Canada, les harpériens pensent qu'ils peuvent maintenir leur dictature. Comme les membres de la mafia cubaine qui ont fui vers Miami après la révolution cubaine, toutes sortes de personnes ont fui le Vietnam après la victoire sur l'impérialisme américain. Pourquoi sont-ils partis ? Cela ne vaut-il pas une enquête ? Certes, certains d'entre eux sont partis parce qu'ils avaient aidé les occupants à commettre des crimes contre leur propre peuple et ne veulent pas répondre de leurs crimes. Le Canada est connu pour avoir servi de refuge à Montréal à un général qui a été un baron de la drogue.

La République socialiste du Vietnam est un pays souverain qui a le droit de déterminer son propre système et ses politiques sociales. C'est une honte pour le gouvernement Harper d'appuyer un projet de loi qui porte atteinte aux relations bilatérales entre le Canada et le Vietnam et aux relations amicales entre nos deux peuples. Au nom de la promotion de la liberté et de la démocratie, le gouvernement Harper mobilise les Canadiens, en particulier ceux d'origine vietnamienne, contre le Vietnam. C'est une insulte à l'histoire du peuple vietnamien et une perversion de l'histoire en général. Qu'est-ce que les enseignants dans les salles de classe devraient dire à leurs élèves, le 30 avril, sur la prétendue Journée du parcours vers la liberté ? Le projet de loi veut également criminaliser les communistes, fomenter la haine contre eux et les blâmer pour les crimes que les Américains et d'autres impérialistes et colonialistes ont commis contre l'humanité. Le gouvernement Harper utilise le soi-disant projet de loi émanant d'un sénateur pour adopter cette nouvelle loi de manière à le présenter comme un acte démocratique des Canadiens plutôt que le geste d'un gouvernement qui agit de manière lâche et méprisable. Cela ne trompe personne.

Les députés qui débattent du projet de loi devraient garder à l'esprit qu'ils sont invités à réécrire l'histoire d'une manière qui est inacceptable pour les Canadiens. Ils participent également à un acte qui détruit la diplomatie et les relations du Canada avec d'autres pays. Selon la Charte des Nations unies, tous les pays doivent respecter la souveraineté et la non-ingérence dans les affaires internes de tous les pays qui doivent être traités de manière égale, qu'ils soient grands ou petits. Le Vietnam est un pays qui s'est conduit avec honneur et continue de le faire. Il n'a jamais nui au Canada de quelque façon que ce soit.

Opposons-nous à ce projet de loi qui émane soi-disant d'un sénateur ! Opposons-nous à la falsification de l'histoire et aux intentions malveillantes du gouvernement Harper !

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Le monument de Harper aux victimes du communisme suscite de nombreuses objections

Le gouvernement Harper fait la promotion d'un monument de 5000 mètres carrés commémorant les victimes du communisme qui sera situé sur la rue Wellington à Ottawa, en diagonale à l'édifice de la Cour suprême. Le monument devrait être complété et en place l'automne prochain, soit juste avant l'élection fédérale prévue pour le 19 octobre. Le projet est déjà très controversé.

Le coût : Le coût du monument est déjà passé du 1,5 million $ initial à 5,5 millions $. Shirley Blomberg, une partenaire à l'une des firmes d'architecture les plus créatives du Canada, a dit que le coût final pourrait être de 8 millions $ ou même de 12 millions $. Les dons sont censés couvrir 2,5 millions $ du coût total. On a rapporté en août que le monument va recevoir environ 4 millions $ de trois ministères fédéraux : Citoyenneté et Immigration, Patrimoine canadien et Travaux publics.

L'endroit : La semaine dernière, le Ottawa Citizen écrivait : « Le ministère du Patrimoine canadien, qui supervise le projet de monument, a dit il y a quelque temps au Citizen que le site actuel 'convenait mieux à Hommage à la liberté' [l'organisme caritatif derrière le projet] parce qu'il est près de la Cour suprême du Canada, de la Tour de la Paix, de la Colline du parlement et de Bibliothèque et Archives Canada avec qui il a des 'liens thématiques'. »

Le chroniqueur du Globe and Mail, Jeffrey Simpson, discutant d'autres questions d'architecture urbaine, note cependant que « le nouvel emplacement du site du Monument commémorant les victimes du communisme, qui est piloté par une fondation privée ardemment appuyée par le gouvernement Harper, est tout aussi mauvais ». Il cite Blumberg selon qui : « Cela me cause un sérieux problème que le monument soit bâti sur ce site. Je pense que cela déforme complètement ce qu'est le Canada. » Blumberg fait remarquer que le monument va « dominer totalement » les édifices voisins, alors que, note Simpson, « de certains angles, l'immense monument va bloquer la vue de l'édifice de la Cour suprême ».


Le design de l'architecte qui a été retenu pour le monument anticommuniste

Le design : Dans une lettre de septembre 2014, la Juge en chef Beverley McLachlin écrit : « Malheureusement, certains aspects du concept architectural du monument pourraient véhiculer un mauvais message dans l'environnement d'édifices judiciaires, créant sans le vouloir un message de morosité et de brutalité qui ne convient pas à un espace consacré à l'administration de la justice. »

Le magazine Maclean's écrit : « Plusieurs architectes et planificateurs urbains bien connus ont exprimé leurs préoccupations face au monument, dont Larry Beasley de l'Université de Colombie-Britannique, le directeur maintenant à la retraite du Service d'urbanisme de Vancouver et l'une des figures les plus respectées du secteur de la planification urbaine au Canada. »

La politique : Le chroniqueur du Globe and Mail Roy MacGregor écrit : « Le Canada, bien sûr, est le leader mondial reconnu quand il est question de présenter des excuses. Il faudrait être idiot pour nier que des millions de personnes ont été les victimes tragiques du communisme mais ce nombre est bien inférieur au nombre des victimes du capitalisme. Si on s'entend à faire débuter le communisme à la Révolution russe de 1917, ce qui se discute évidemment, il faut faire remonter les crimes du capitalisme à l'époque d'avant les Croisades et aux guerres du commerce des épices. Malgré tout, et en dépit du fait qu'il existe déjà un impressionnant musée pour les droits de la personne à Winnipeg, on veut aller de l'avant avec ce nouveau monument. »

Le Conseil des Canadiens demande au gouvernement Harper de reconsidérer ses plans à la lumière des questions que soulève ce monument.

(3 février 2015. Traduit de l'anglais par LML.)

Notes du LML

Le design qui a « gagné » en dépit des objections du Comité consultatif de l'urbanisme, du design et de l'immobilier de la Commission de la capitale nationale, comprend six rangées de béton plié atteignant 14,5 mètres à leur point le plus élevé, recouvertes de 100 millions de « carrés commémoratifs » de la dimension d'un bout de doigt représentant chacun « une vie perdue aux mains des régimes communistes du monde ».

« Les visiteurs pourront marcher le long de ces rangées et toucher les carrés commémoratifs et 'ressentir de façon viscérale l'énormité des atrocités communistes', écrit l'équipe gagnante dans la présentation de son design.

« Le monument comprend aussi une place centrale, dans laquelle l'image d'une victime du communisme (les détails restent à peaufiner) va accueillir les visiteurs », écrit Don Butler dans le Ottawa Citizen.

« Tout à coup, les vies abstraites perdues deviendront une image documentaire des atrocités communistes », écrit un des architectes responsables du design. « Ces vies n'auront pas été perdues en vain ; elles vont témoigner de la vérité historique de leur souffrance. »

Dans un article au Globe and Mail, Roy MacGregor écrit : « Un membre du jury de sélection, Shirley Blumberg, a confié aux médias que la qualité des designs soumis avait été 'pauvre'. En plus de cela, a-t-elle ajouté, 'le design qui a été choisi par le jury était, je pense, particulièrement brutal et d'un caractère viscéral'. Selon l'architecte de Toronto, le monument d'Ottawa 'ne va pas amener les gens à penser qu'un monde meilleur est possible. Tout l'accent est mis sur le mal.' »

Lorsque madame Blumberg a parlé au Citizen, « elle a dit clairement que, selon elle, le monument qui va occuper un espace de première importance de notre propriété nationale occulte l'histoire de notre pays et, en dernière analyse, 'donne une fausse idée de ce qu'est ce pays' ».

Blumberg a dit au Citizen que le design qui a été retenu met l'accent « de manière troublante sur la brutalité et la cruauté ».

L'architecte d'Ottawa Barry Padolsky a écrit une lettre ouverte au premier ministre dans laquelle il dit que le site a besoin « d'une pièce d'architecture de haut calibre », ce qui n'est pas le cas de ce monument, écrit MacGregor.

L'ex-député d'Ottawa David Daubney écrit dans une lettre au Citizen que « selon moi il s'agit d'une grossière déformation de notre histoire et d'une nouvelle insulte à l'intelligence des résidents d'Ottawa et des Canadiens. Est-ce que le gouvernement veut faire revivre la 'Peur des rouges' des années 1950 pour l'ajouter à sa campagne sur le terrorisme ou si c'est juste une manière pratique bien que dispendieuse de faire un pied de nez à la Cour suprême qui va demeurer là à perpétuité ? »

Larry Beasley, professeur à l'Université de Colombie-Britannique, président du Comité consultatif de l'urbanisme, du design et de l'immobilier de la Commission de la capitale nationale et ancien responsable de la planification urbaine à la ville de Vancouver, a dit au magazine MacLean's que son comité était déçu. « Son comité, écrit MacGregor, croyait non seulement que le site 'n'était pas adéquat' mais que le design gagnant du Studio d'architecture ABSTRAKT de Toronto 'n'est pas celui que la majorité des gens de notre groupe favorisait' ».

Le journaliste du Ottawa Citizen Don Butler fait mention d'une lettre dont le Citizen a obtenu copie qui a été envoyée à la vice-ministre des Travaux publics Michelle d'Auray par la Juge en chef de la Cour suprême Beverley McLachlin. Butler rapporte qu'en décembre, lorsque le design du monument anticommuniste a été adopté, il y avait cinq designs en lice. Certains d'entre eux, écrit McLachlin, « pourraient véhiculer un mauvais message dans l'environnement d'édifices judiciaires, puisqu'ils donnent sans le vouloir un message de morosité et de brutalité qui ne convient pas à un espace consacré à l'administration de la justice. »

McLachlin ajoutait qu'elle n'avait pas de commentaire à faire sur la décision d'ériger le monument ou sur le site. « Cette décision appartient au gouvernement.

« Cependant, comme le site sur lequel le monument va être érigé fait partie d'un espace d'édifices judiciaires, je demanderais à votre ministère et au comité de sélection de s'assurer que le design final soit conforme au respect que le public manifeste pour la justice et la primauté du droit et y contribuera », écrivait-elle à Michelle d'Auray.

McLachlin faisait aussi remarquer à d'Auray que le site retenu « a été désigné depuis longtemps » comme faisant partie du complexe judiciaire . « Comme vous le savez, la Cour suprême du Canada est au sommet du système judiciaire » écrivait-elle, rapporte le Citizen.

Dans un article intitulé « L' acquiescement donné par le Conseil d'administration de la CCN à ses maîtres politiques pourrait signifier la ruine de la Colline », publié par le Ottawa Citizen le 21 janvier, Joanne Chianello écrit :

« C'est depuis les années 1920 que la propriété a été désignée dans les documents du gouvernement comme le site du nouvel édifice de la Cour fédérale du Canada. Du moins jusqu'à ce que le ministère des Travaux publics ait tout simplement alloué le site à Hommage à la liberté, l'organisme caritatif qui chapeaute le projet de monument.

« Le conseil d'administration de la CCN a approuvé à l'unanimité le changement en novembre 2013 sans prendre l'avis de son propre Comité consultatif de l'urbanisme, du design et de l'immobilier qui avait émis des réserves sur l'utilisation du site. Lorsque le comité s'est prononcé officiellement sur le projet au milieu de 2014, il a dit que l'endroit choisi pour le monument était tout à fait inapproprié et qu'il n'avait pas une bonne opinion du design du Studio d'architecture ABSTRAKT de Toronto qui avait été retenu.

« Le comité d'urbanisme de la CCN est présidé par l'urbaniste canadien renommé Larry Beasley, qui a dit au magazine MacLean's plus tôt en novembre que son comité avait dit au gouvernement que 'le site choisi n'était pas approprié et devrait servir à un projet gouvernemental de plus haute priorité dans les années à venir'.

« Qu'est-ce qu'on a fait alors de l'avis de cet expert en urbanisme ? On l'a ignoré, évidemment. Le conseil d'administration de la CCN, qui a pourtant le mandat officiel de voir à la planification de l'espace urbain, n'a ni demandé ni écouté l'avis de son propre comité d'urbanisme et de design. Il a plutôt choisi de voter du côté du gouvernement.

« On revient donc à notre question première : pourquoi avoir une CCN si les membres de son conseil choisis par nomination politique vont simplement appliquer les quatre volontés du gouvernement du jour ?

« Pire encore, la CCN avait déjà réservé un site beaucoup plus approprié pour le Monument commémorant les victimes du communisme sur la rue Wellington juste à l'ouest de Bay Street. Cet endroit de toute évidence n'était pas assez proéminent au goût de Hommage à la liberté.

« Le ministère de Patrimoine canadien, qui supervise le projet de monument, avait dit précédemment au Citizen que le site actuel 'était plus du goût de Hommage à la liberté' en raison de sa proximité et de ses 'liens thématiques' avec la Cour suprême du Canada, la Tour de la Paix, la colline du Parlement et Bibliothèque et Archives Canada.

« Alors, on va baser maintenant la planification urbaine de la capitale sur la volonté d'un organisme caritatif plutôt que de respecter l'opinion des urbanistes professionnels que nous avons recrutés partout au pays pour justement encourager la sensibilité à l'urbanisme dans la capitale nationale ? »

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Pourquoi le Canada célèbre-t-il la Journée Raoul Wallenberg?

Pourquoi Raoul Wallenberg?
Qui était-il? Qu'a-t-il fait?

Le gouvernement Harper a célébré la « Journée Raoul Wallenberg »[1] le 17 janvier avec une déclaration du ministre du Multiculturalisme, Jason Kenney. Avec beaucoup d'hyperboles et sans aucun fait, le ministre a fait la déclaration suivante :

« Chaque année, le 17 janvier, les Canadiens rendent hommage à Raoul Wallenberg, l'un des plus grands héros du XXe siècle.

« Raoul Wallenberg était un diplomate suédois qui a été envoyé à Budapest, en Hongrie, pendant la Seconde Guerre mondiale. Au péril de sa vie, il a contribué à sauver des dizaines de milliers de juifs hongrois de la mort certaine que leur auraient donnée les nazis et leurs alliés aux vues similaires.

« Dans l'hommage rendu aux efforts courageux et héroïques de M. Wallenberg, les Canadiens se souviennent également de l'une des plus sombres périodes de l'histoire de l'humanité. L'Holocauste occupe une place unique dans les annales de l'histoire en raison de sa dépravation et de son inhumanité. Heureusement, malgré cette obscurité, il y avait une lueur d'espoir chez des personnes comme Raoul Wallenberg.

« Le 17 janvier 1945, les forces soviétiques l'ont capturé au moment où l'Union soviétique a repoussé les nazis en dehors de la Hongrie. À ce jour, on ne sait pas exactement ce qui lui est arrivé. En reconnaissance de ses exploits héroïques, Raoul Wallenberg s'est vu conférer le tout premier titre de citoyen d'honneur du Canada, et le Parlement a proclamé le 17 janvier comme la Journée Raoul Wallenberg.


Timbre émis par Postes Canada,
17 janvier 2013

« En tant que ministre du Multiculturalisme, j'encourage tous les Canadiens à réfléchir au patrimoine laissé par Raoul Wallenberg. J'espère sincèrement que son altruisme et son héroïsme seront source d'inspiration pour tous les Canadiens, et que chacun d'entre nous agira avec fermeté lorsqu'il sera en présence d'intolérance et de préjugés. »

Le Parti libéral a également célébré cette journée avec une déclaration du député Irwin Cotler [2], qui a également écrit un article d'opinion à ce sujet dans le Montreal Gazette. La déclaration de Cotler est notable, car il comble les « faits » et les « arguments » qui manquaient à l'hyperbole de Kenney. La déclaration de Cotler se lit en partie :

« Wallenberg a personnifié ce que nous appelons aujourd'hui 'la responsabilité de protéger'. Il a notamment sauvé 20 000 juifs en leur délivrant des Schutzpasses leur conférant l'immunité diplomatique ; il en a sauvé des milliers de plus en établissant des maisons-refuges ; et il a mis sur pied des hôpitaux, des soupes populaires et des garderies, secourant des dizaines de milliers de personnes, donnant aux plus vulnérables un minimum de dignité. Lors de sa dernière action de sauvetage, qui est peut-être la plus mémorable, il a averti les généraux nazis qui préparaient la liquidation du ghetto de Budapest que les responsables seraient traduits en justice ; ils ont cédé, et 70 000 juifs de plus furent sauvés de la mort. »

Pour Cotler, c'est une lutte du bien contre le mal :

« Alors que le monde est aux prises avec des actes de terreur consternants en France, et avec les atrocités de masse au Nigéria, en Irak, en Syrie, au Soudan, et ailleurs, l'exemple inspirant de Wallenberg nous rappelle qu'une personne compatissante, qui a le courage d'agir peut faire face aux pires des maux, résister, triompher, et transformer l'histoire. »

Il reprend ce thème dans son article d'opinion dans le Montreal Gazette : « ...l'héritage de Wallenberg perdure, nous rappelant le pouvoir d'une personne qui agit pour confronter le mal et transformer l'histoire ».

La question se pose de savoir pourquoi les harpériens disent que Raoul Wallenberg est « un des plus grand héros du XXe siècle » et pourquoi il est un exemple pour Irwin Cotler. Et même si c'était le cas, pour quelles raisons fallait-il l'imposer aux Canadiens ? Pourquoi Raoul Wallenberg ? Tout ce que Jason Kenney nous dit est que Raoul Wallenberg est honoré parce qu'« il a contribué à sauver des dizaines de milliers de juifs hongrois de la mort certaine que leur auraient donnée les nazis et leurs alliés aux vues similaires ».

Dans son article dans le Montreal Gazette, Cotler cite les exploits que, dit-il, Wallenberg a accomplis, cependant ni Kenney ni Cotler ne fournissent de contexte ou d'arrière-plan, comme, par exemple, comment se fait-il que Wallenberg, même comme diplomate, jouissait de cette liberté de mouvement et a pu amener les nazis à laisser partir des juifs, ou sur la situation en Hongrie pendant la guerre. Ni Kenney ni Cotler ne se soucie d'indiquer que la plupart des choses que l'on sait de Wallenberg sont pour le moins sujettes à caution, et le reste est tout simplement contestable.

Pourquoi le Canada voudrait-il d'un tel citoyen d'honneur ? Des centaines et des milliers de héros ont combattu dans la résistance antifasciste, en fait des millions. Pourquoi le gouvernement Harper et Irwin Cotler mettent-ils tout l'accent sur Wallenberg ?

Le contexte est tout. N'oublions pas qu'après la guerre contre le fascisme, Winston Churchill, que les élites anglo-américaines considèrent comme un grand homme d'État, a déclenché la guerre civile en Grèce. Sous sa direction des milliers d'hommes et de femmes héroïques, beaucoup d'entre eux des communistes, ont été tués ou enfermés dans des camps de concentration, plusieurs pendant quarante ans, parce qu'ils avaient combattu dans la résistance grecque et refusaient de capituler. Donc, le choix des héros que le Canada doit honorer est certainement un sujet d'une grande importance.

Le fait est que l'histoire de Raoul Wallenberg et son action pendant la guerre ne sont pas aussi tranchées que les harpériens et Irwin Cotler les présentent. Il convient de s'interroger sur l'action de Wallenberg en Hongrie, qui lui vaut cet honneur. Ainsi :

- Quelle part de la notoriété de Wallenberg était due au fait qu'il faisait partie d'une famille capitaliste très puissante qui a collaboré avec les nazis et avait des intérêts économiques en Hongrie ? Il n'est arrivé en Hongrie que quelques mois avant la fin de la guerre et après que 80 % des juifs hongrois aient été déportés et assassinés. Si la mission principale de Wallenberg était de porter secours aux juifs hongrois, pourquoi n'a-t-il pas été envoyé beaucoup plus tôt ? Le retard de sa mission et les informations connues sur qui lui a confié cette mission semblent clairement indiquer qu'elle avait beaucoup à voir avec les arrangements d'après-guerre que les Britanniques et les Américains mettaient en place afin que l'Union soviétique n'apparaisse pas comme un vainqueur de la guerre.

- Pourquoi élève-t-on Wallenberg au rang de personne de renom alors que d'autres organisations et personnes ont arrêté beaucoup plus de déportations vers les camps de concentration bien avant que Wallenberg ait commencé sa mission, notamment le vice-consul suisse Carl Lutz, d'autres diplomates suédois, la Croix-Rouge, le consul de San Salvador et ceux qui fabriquaient de faux-papiers associés aux différents groupes sionistes. Carl Lutz est reconnu pour avoir empêché la déportation de bien plus de juifs que Wallenberg. Pourquoi n'y a-t-il pas de Journée de Carl Lutz ? Qu'en est-il de Valdemar Langlet, Angelo Rotta, Giorgio Perlasca, Gennaro Verolino, Friedrich Born et Ángel Sanz-Briz qui ont tous fait ce que l'on dit que Wallenberg a fait ou plus ? Et finalement, le régent de Hongrie, Miklós Horthy (un antisémite avoué) qui a défié Hitler et arrêté la ghettoïsation et la déportation de nombreux juifs pour des raisons pragmatiques, à savoir qu'ils jouaient un rôle clé dans l'économie hongroise. Même après l'invasion par les nazis, Horthy s'est opposé aux déportations, a ordonné à des trains de rebrousser chemin, même arrêté un convoi par la force militaire. On estime que ses mesures ont sauvé 250 000 juifs. Si Horthy n'avait pas fait ce qu'il a fait, il n'y aurait plus eu personne à sauver.

- Tous les autres pays ont envoyé un ou plusieurs de leurs diplomates de carrière en Hongrie, tandis que le Suédois Wallenberg a été envoyé par les États-Unis. Quelle part du travail de Wallenberg consistait à mettre en oeuvre l'ordre du jour des gouvernements étrangers et de leurs agences de renseignement comme le Bureau des études stratégiques (Office of Strategic Services-OSS), le prédécesseur de la CIA, auquel il était connu pour être relié ? En d'autres mots, pour qui travaillait-il vraiment et quels étaient ses objectifs réels ? Une grande partie de ses principales préoccupations étaient commerciales, financières et sociales plutôt que de nature humanitaire.

- Qui sont les véritables responsables de sa disparition et pourquoi ? Pourquoi sa famille, très riche et puissante, a-t-elle déployé peu d'efforts pour le retrouver immédiatement après la fin de la guerre ?

Par ailleurs, pour croire l'histoire de Raoul Wallenberg, il faut croire que la neutralité suédoise officielle n'était ni pro ni antinazie. En effet, la neutralité de la Suède a été utilisée par la très riche famille Wallenberg pour faire des affaires lucratives avec les nazis. Raoul Wallenberg ne risquait pas sa vie à chaque minute du temps qu'il a passé en Hongrie ou Budapest, comme c'était le cas pour les résistants qui luttaient pour sauver les juifs hongrois, les Roms, les communistes et combattants de la résistance de la machine à tuer nazie et vaincre les nazis. Il se livrait à des marchandages et à des tractations, à la corruption, comme se font les affaires entre les très riches, pour favoriser les intérêts de sa famille pendant et après la guerre.

Dans ce contexte, les marchandages et les tractations pour sauver des vies juives en Hongrie étaient manipulés par l'organisation sioniste dans ce pays, dirigée par un certain Rudolf Kastner, dont les manoeuvres très douteuses ont fini par être exposées en Israël alors qu'il travaillait pour le gouvernement israélien. Rudolf Kastner avait en réalité été arrêté par la police secrète hongroise et puis libéré par les nazis afin qu'il puisse poursuivre son travail. En 1953, un juif hongrois nommé Malchiel Greenwald publie un bulletin à Jérusalem qui dénonce comment certains juifs ont été sauvés par des accords qui permettaient d'en envoyer d'autres dans les camps d'extermination nazis. Ce projet a été dirigé par les Britanniques, comme l'a confirmé nul autre que David Ben Gourion, le premier premier ministre d'Israël, quand il a déclaré :

« Si je savais possible de sauver tous les enfants d'Allemagne en les amenant en Angleterre, et seulement la moitié des enfants en les amenant en Terre d'Israël, je choisirai la deuxième solution. Pour nous, il nous faut non seulement tenir compte des vies de ces enfants mais aussi de l'histoire du peuple d'Israël. »[3]


Rudolph Kastner, vers 1950 en Israël

Dans son bulletin, Greenwald accusait Rudolph Kastner de collaboration avec les nazis en Hongrie en 1944. Le procureur général d'Israël a inculpé Greenwald de « diffamation criminelle », mais au cours du procès des preuves incriminantes ont été produites qui montraient qu'en fait Kastner, dirigeant du Comité d'aide et de secours de Budapest, a accepté d'aider les nazis à déporter des milliers de juifs vers les camps d'extermination et en retour les nazis lui permettraient de choisir 600 notables juifs qui seraient autorisés à partir en Suisse.

Dans son verdict écrit Le procureur général c. Malchiel Greenwald, le juge Benjamin Halevy a écrit :

« Les organisateurs nazis de l'extermination et les auteurs de l'extermination ont permis à Rudolf Kastner et aux membres du Conseil juif de Budapest de se sauver eux-mêmes, leurs proches et leurs amis. Les nazis ont utilisé ce moyen pour rendre les dirigeants juifs locaux, qui avaient leur faveur, tributaires du régime nazi, tributaires de sa bonne volonté dans la période fatale de la déportation. En un mot, les nazis ont réussi à amener les dirigeants juifs à collaborer avec les nazis au moment de la catastrophe

« Eichmann ne voulait pas d'un deuxième Varsovie. Pour cette raison, les nazis se sont efforcés de tromper et de corrompre les dirigeants juifs. »[4]

Le juge Halevi a également souligné dans son verdict que lors des procès de Nuremberg, Kastner avait fourni un témoignage écrit « complètement mensonger » en faveur du meurtrier SS Kurt Becher pour garantir sa liberté. Becher était un responsable de la confiscation des biens juifs en Hongrie. Après la guerre, il a fait une brillante carrière d'homme d'affaires et a bâti sa fortune grâce aux objets de valeur et à l'argent qu'il avait extorqués à de nombreux juifs pendant la guerre, et aux entreprises qu'il a créées[5] notamment le Cologne-Handel Gesellschaft qui, paradoxalement, a eu d'importantes relations d'affaire avec le gouvernement israélien. Il est mort richissime en Allemagne de l'Ouest en 1995.

En octobre 1945, après le retour des survivants de l'Holocauste en Hongrie, les habitants de la ville natale de Kastner (Cluj) l'ont traduit devant un tribunal populaire qui l'a jugé et condamné par contumace comme criminel de guerre. En 1998, le gouvernement hongrois a tenté de réhabiliter Kastner en érigeant un monument à sa mémoire à Budapest, mais cela a été condamné par les juifs hongrois comme une tentative odieuse de réécrire l'histoire.

De la même façon, des statues et monuments ont été érigés à la mémoire de Raoul Wallenberg en Autriche, en Israël et aux États-Unis et le Canada a déclaré le 17 janvier Journée Raoul Wallenberg. Cela ne sert pas à unir les gens ou fournir un exemple éclatant d'héroïsme qui peut être pris comme modèle. Ce n'était pas tout le monde qui était lié à la machine de guerre nazie et avec raison. Ce n'était pas tout le monde qui avait beaucoup d'argent pour acheter des fonctionnaires nazis et même s'ils en avaient, ils parvenaient à trouver un autre usage à cet argent.

Il y a d'autres personnes qui, comme Wallenberg, sont des héros de l'oligarchie financière internationale et de ses représentants. L'un d'eux est idéalisé dans le film de Steven Spielberg La Liste de Schindler. D'après ce film, un industriel nazi, Oskar Schindler, paie pour sauver la vie de certains esclaves juifs en les gardant à son emploi. Le nazi Schindler est un héros pour Spielberg et ceux qui tombent pour la manipulation de l'histoire de la Deuxième Guerre mondiale et de l'Holocauste. Cette manipulation sert l'objectif de soutenir le projet sioniste en Israël aujourd'hui, ainsi que de pousser l'anticommunisme et la propagande pour isoler la Russie.

Spielberg a beaucoup d'argent et de nombreux investisseurs. Il pouvait réaliser n'importe quel projet. En fait, avant de faire La Liste de Schindler, il a fait interviewer tous les survivants de l'Holocauste qui acceptaient de lui parler. Il aurait pu faire n'importe quel film, alors pourquoi a-t-il choisi celui-ci ?

Lorsque l'on examine les informations concernant Raoul Wallenberg et les liens des Wallenberg avec la machine de guerre nazie, il est difficile de comprendre la psychopathologie qui considérerait les accords avec les nazis allemands comme louables sous prétexte qu'ils ont servi à sauver la vie de juifs, comme s'il n'y n'avait pas d'alternative. En Hongrie, certains de ces accords ont permis aux Allemands, dans le but de ne provoquer aucune résistance, de faire croire aux juifs qui étaient déportés vers les camps de concentration qu'ils allaient être libérés. C'est pourquoi l'extermination des juifs en Hongrie a été si rapide, ce que Irwin Cotler ne dit pas. Le fait que moins de soldats nazis étaient mobilisés pour la garde des camps signifiait aussi que plus de soldats nazis pouvaient aller au front.

La présentation de personnes comme Raoul Wallenberg comme héros résulte de la manipulation des perceptions basée sur la décontextualisation. Cela prive les gens du pouvoir de s'opposer à la propagande anticommuniste, raciste et antiouvrière du gouvernement Harper qui a pour objectif d'écraser la lutte contre l'offensive antisociale néolibérale. Le discours du bien contre le mal vise en effet à détruire la capacité humaine de distinguer le bien du mal, les faits de la fraude, un noble idéal des actions intéressées.

Pourquoi le Canada n'a-t-il pas une journée en l'honneur des héros antifascistes incontestés, dont certains étaient canadiens, comme par exemple les membres de la Brigade de MacKenzie-Papineau qui ont combattu en Espagne les armées fascistes de Franco ? Ou le médecin de renommée internationale Norman Bethune ?


À gauche : la brigade MacKenzie-Papineau. À droite : le Dr. Norman Bethune à côté d'un camion de transfusion sanguine pendant la guerre d'Espagne.

Une des raisons est que cela sert à diffamer et à décourager l'organisation de la résistance au pouvoir dictatorial, comme celui de Harper aujourd'hui. Une autre raison est, encore une fois, d'attaquer le communisme et tout ce qui est progressiste. On sait que les communistes étaient le fer de lance de la résistance antifasciste dans la plupart des pays d'Europe et ont fait une contribution cruciale à la victoire sur les nazis. Le rôle héroïque de l'Armée rouge soviétique dans la libération de l'Europe et l'énorme sacrifice des résistants sont des choses que les harpériens tentent vainement d'enterrer pour toujours dans leurs tentatives continues visant à réécrire l'histoire dans l'intérêt de ceux qui cherchent à usurper le pouvoir pour dominer le monde aujourd'hui.

Cela ne fait pas honneur au Canada d'avoir conféré le titre de citoyen d'honneur à un personnage controversé comme Raoul Wallenberg. En ce qui concerne les harpériens et les semblables d'Irwin Cotler, cela les expose simplement comme des sionistes convaincus et des agents de l'impérialisme anglo-américain. Le Canada compte de nombreux héros, tant ceux qui sont canadiens que ceux qui sont d'autres pays. La jeune génération du Canada saura se tourner vers eux et les tenir en haute estime.

Qui était Raoul Wallenberg ?

Raoul Wallenberg était un homme d'affaires et membre de la famille capitaliste la plus riche et la plus puissante de Suède, qui est d'abord allé en Hongrie, pays allié de l'Allemagne, en février 1942 pour diriger une entreprise import-export du secteur alimentaire pour le compte de la société suédoise Mellaneuropeiska, qui appartenait à l'industriel Sven Salen, un proche collaborateur de la famille Wallenberg.

Par coïncidence, la légation américaine était dans le même bâtiment de Budapest que la Mellaneuropeiska. Le gestionnaire de l'entreprise, Kalman Lauer, ne voulait pas voyager en Hongrie, à cause des lois antijuives, alors ce travail est revenu à Wallenberg. Wallenberg a également fait plusieurs voyages d'affaires en Allemagne et en France occupée pendant les premières années de la Deuxième Guerre mondiale. Il semble qu'au cours de ces voyages, il ait entrepris également d'autres affaires que celles de sa propre entreprise.


Wallenberg à Budapest durant la guerre

La Hongrie était une alliée déclarée de l'Allemagne nazie avec son propre gouvernement. Les nazis ont conservé au pouvoir le régent hongrois, Miklos Horthy, et son cercle d'aristocrates et d'industriels à cause de la contribution de la Hongrie à l'économie de guerre de l'Allemagne. Mais après qu'Hitler ait appris que Horthy et son premier ministre, Miklos Kallay, négociaient secrètement un armistice avec l'approche de forces soviétiques, il ordonna l'occupation de la Hongrie par les troupes allemandes le 12 mars 1944, après avoir convoqué Horthy hors du pays. L'occupant nazi, sur les ordres d'Adolf Eichmann, a commencé à déporter à nouveau les juifs de Hongrie par train au camp de concentration d'Auschwitz-Birkenau. Malgré cela, le gouvernement hongrois n'a jamais complètement perdu sa souveraineté sur son pays, et, quand il est devenu évident que l'Allemagne serait vaincue, la Hongrie a commencé à s'éloigner des nazis et a établi des relations avec les pays alliés.

Le 12 juin 1944, Raoul Wallenberg est officiellement nommé par l'Office pour les Réfugiés de Guerre américain (Wartime Refugee Board — WRB) à Budapest, pas par la Suède, afin d'aider les juifs hongrois. En fait, il serait plus précis de dire que Wallenberg était un homme d'affaires suédois qui travaillait pour le gouvernement américain et était financé par l'argent américain. Il avait étudié dans une université aux États-Unis de 1931 à 1935. Une des conditions de Wallenberg était qu'il puisse disposer d'une quantité énorme d'argent pour soudoyer des fonctionnaires hongrois et des nazis. Au cours de ses six mois à Budapest, le WRB lui a fait parvenir douze lettres d'instructions tandis que la Suède ne lui en a remise aucune. Cependant, le ministère suédois des Affaires étrangères l'a nommé attaché de la légation suédoise à Budapest pour qu'il ait une immunité diplomatique complète et lui a aussi payé un petit salaire.

Le choix de Raoul Wallenberg pour cette mission n'était pas un hasard. Wallenberg connaissait l'ancien ministre hongrois à Stockholm, le Dr Antal Ullein-Reviczky et son épouse et par leur intermédiaire Jozsef Balogh, rédacteur en chef de l'influente Magyar Szemle (La Revue hongroise). Balogh avait rassemblé autour de lui un cercle d'aristocrates, d'industriels et de politiciens, dont Horthy et le Baron Manfred Weiss, l'industriel le plus puissant de la Hongrie. Ce cercle avait des liens solides avec la Grande-Bretagne. L'empire de Weiss, qui appartenait aux familles Weiss, Chorin, Kornfeld et Mautner, comprenait des entreprises suédoises, tandis que la famille Wallenberg avait une présence très forte en Hongrie avec ses monopoles, Swedish Match et SKF Fabrique suédoise de roulements à billes. Henrik de Wahl, directeur général de Manfred Weiss A.G., a joué un rôle clé dans le choix de Wallenberg pour la mission humanitaire à Budapest. En même temps, la famille Wallenberg trouvait des façons d'aider discrètement les membres de l'élite hongroise à protéger leurs possessions, l'élite même, qui formait le noyau d'associés hongrois de Wallenberg.

Raoul Wallenberg est arrivé à Budapest le 9 juillet 1944, dix mois avant la capitulation de l'Allemagne. Sa mission pour le War Refugee Board (WRB) était de « prendre des mesures pour le sauvetage immédiat des juifs d'Europe et d'autres victimes des persécutions ennemies ». Le WRB était une organisation importante. Créé par le président Franklin D. Roosevelt le 22 janvier 1944, ses membres comprenaient Henry Morgenthau Jr., secrétaire au Trésor, Edward Stettinius Jr., secrétaire d'État des États-Unis (et un associé de J.P. Morgan) et Henry Stimson, secrétaire à la Guerre. De plus, Iver Olsen, le représentant de WRB en Suède qui a choisi Raoul Wallenberg et se tenait en contact avec lui, travaillait pour l'OSS. Certains responsables américains doutaient de la fiabilité de Wallenberg à cause des relations d'affaires lucratives de sa famille avec le gouvernement nazi (voir ci-dessous).

Un aspect moins connu de la mission de secours de Wallenberg était en fait la protection des actifs essentiels des entreprises hongroises et des employés hautement qualifiés de ces entreprises, ceux que son associé Kálman Lauer appelait « les hommes de l'avenir ». L'objectif était de préserver l'élite pour qu'elle puisse revenir au pouvoir dans une Hongrie d'après-guerre pro-britannique et pro-américaine. Il était clair que l'Allemagne nazie allait être vaincue et que l'Union soviétique aurait de l'influence en Hongrie d'après-guerre. En fait, le retard de la mission de Wallenberg pousse fortement à penser que les considérations d'après-guerre des États-Unis ont été un facteur puissant dans sa création.

Certaines ententes faites par Raoul Wallenberg avec les représentants hongrois et les nazis allemands pour arriver à placer les juifs hongrois sous la protection officielle de la Suède étaient pour le moins contestables. Lars Berg, le consul suédois à Budapest pendant la guerre, écrit dans une note interne d'après-guerre du ministère suédois des Affaires étrangères : « Wallenberg a reçu un soutien considérable de la riche famille des industries Weiss... Même le représentant spécial de Himmler et contrôleur des biens [confisqués] de la famille Weiss, Kurt Becher,... a aidé Raoul Wallenberg dans des situations critiques. »

À l'approche de la chute de l'Allemagne, plusieurs responsables nazis, dont Himmler, Eichmann et Becher, ont tenté de faire des marchés avec les représentants des alliés et fait des fausses promesses de sauver un certain nombre de juifs en échange d'argent ou même de matériel militaire, plus probablement dans l'espoir d'échapper à la justice après la guerre.

La méthode utilisée à grande échelle par Wallenberg pour porter secours aux juifs a été de délivrer des passeports provisoires et des « passeports de protection » (en allemand : Schutz Passes) suédois aux juifs menacés de déportation vers les camps d'extermination et de les mettre en sécurité dans des bâtiments de Budapest, achetés ou loués avec l'argent fourni par le War Refugee Board et identifiés comme « Territoire suédois » jusqu'à ce qu'ils puissent sortir de Hongrie. Il n'est pas clair si les lettres de protection étaient vendues ou données. Il y a des interrogations concernant le nombre de juifs sauvés par Wallenberg, qui ne serait certainement pas dans les 20 000 suggérés par Cotler mais plus de l'ordre de 4 500.[6]

L'émission de lettres de protection ne peut pas être attribuée à Wallenberg, cette idée vient du vice-consul suisse, Carl Lutz, en 1942 et elles étaient utilisées par Lutz, la légation suédoise et d'autres légations bien avant l'arrivée de Wallenberg. Même avant 1941, des diplomates de France, du Portugal et de Grande-Bretagne ont émis des « visas pour la vie » sous forme de visas de sortie ou de transit et de documents de citoyenneté. Parfois les fonctionnaires nazis et hongrois acceptaient les lettres de protection et d'autres fois non. Bien sûr, l'émigration était l'étape suivante qui nécessitait des fonds, que la personne devait se procurer. L'émigration cadrait bien avec le projet sioniste, dont l'objectif était de peupler la Palestine de juifs européens pour que leur nombre dépasse celui de la population arabe.


Le vice-consul suisse en Hongrie, Carl Lutz, a sauvé des dizaines de milliers de vies, la moitié de la population juive de Budapest. Un timbre a été émis par la Suisse en 1999 en son honneur.

Le 15 octobre 1944, Horthy a négocié un cessez-le-feu avec les Soviétiques. Les nazis ont forcé Horthy à abdiquer en faveur de Ferenc Szalasi et de son Parti des Croix fléchées fasciste même si les forces soviétiques étaient aux portes de Budapest. Le gouvernement des Croix fléchées a aidé Eichmann a reprendre les déportations de juifs vers Auschwitz et à assassiner massivement des centaines de juifs, noyés ou fusillés. Il est tombé à la fin de janvier 1945, quand l'armée soviétique a avancé à travers Pest et que les forces fascistes se sont retirées sur l'autre rive du Danube dans Buda. Après la fin de la guerre, Ferenc Szálasi et d'autres dirigeants des Croix fléchées ont été capturés et jugés en tant que criminels de guerre par les tribunaux hongrois et la plupart exécutés, notamment Szalasi.

Juste avant l'arrivée de l'armée soviétique pour libérer Budapest fin 1944, Wallenberg, avec l'aide de Pal Szalai, un membre haut placé du Parti des croix fléchées qu'il avait soudoyé, aurait réussi à convaincre personnellement les nazis d'empêcher un plan des Croix fléchées d'attaquer et de détruire le plus grand ghetto juif de Budapest. Cependant, le rôle de Wallenberg a été beaucoup plus limité que celui présenté à l'imaginaire populaire. Des historiens, comme Paul Levine, ont démontré que la décision de Pal Szalai de révéler le massacre projeté par les Croix fléchées au général de la Wehrmacht Schmidhuber a été décisive.[7] Schmidhuber a ordonné d'empêcher le massacre et a fait arrêter ceux qui devaient le diriger. Le général savait qu'il serait tenu responsable de ce massacre et jugé pour crime de guerre après la guerre.

Le 29 octobre 1944, les unités du deuxième front ukrainien, commandé par le maréchal Rodion Malinovsky, commencent l'offensive contre Budapest et le 26 décembre, la ville est encerclée par les forces soviétiques. Le commandant allemand refuse de négocier la capitulation de la ville, provoquant un siège long et sanglant, jusqu'à ce que les Allemands se rendent le 15 février 1945. La Hongrie est complètement libérée par l'Armée rouge le 4 avril 1945.

Pendant le siège de Budapest, le 17 janvier 1945, Wallenberg a été convoqué au quartier général du général Malinovsky pour répondre à des accusations qu'il se livrait à des activités d'espionnage. Cette allégation était fondée. En mai 1996, la CIA a publié des milliers de documents auparavant classifiés concernant Wallenberg, qui confirment qu'il était à la solde des services de renseignement américains en Hongrie. Wallenberg avait également des liens avec le MI6 britannique et avec le « Mouvement pour l'indépendance de la Hongrie » clandestin et qui était en contact avec le renseignement suédois, qui lui-même travaillait en étroite collaboration avec ses homologues britannique et américains. De plus le chef de la famille Wallenberg, Marcus Wallenberg (1899-1982) et ses associés avaient participé à des pourparlers clandestins entre la Grande-Bretagne et la Hongrie en 1942/43. De toute évidence, tout cet espionnage concernait les manoeuvres américaines et anglaises pour s'assurer des positions de pouvoir et d'influence en Hongrie et contenir l'influence soviétique après la guerre, une fois les nazis vaincus.

La collaboration de la famille Wallenberg avec les nazis

Il est significatif que Raoul Wallenberg était membre de la famille la plus riche et la plus puissante de Suède qui a longtemps contrôlé environ 30 à 40 % de l'ensemble de l'économie suédoise et qui a été comparée à la famille Rockefeller des États-Unis. Les Wallenberg possèdent les grandes entreprises suédoises, la Skandinaviska Enskilda Banken (SEB), (la banque de la famille), la Foundation Asset Management (FAM), le fabricant d'armes Bofors, l'entreprise du domaine de l'aéronautique, de la défense et de la sécurité civile Saab, le géant des télécommunications Ericcson, Skandinavian Airlines (SAS), le groupe pharmaceutique AstraZeneca, Husqvarna, Atlas Copco et les roulements mécaniques SKF. L'actuel patron de la famille est Marcus Wallenberg (1956-), qui siège au Comité de direction du groupe Bilderberg, un rassemblement annuel et informel privé des principaux banquiers, industriels et politiciens du monde capitaliste.

Pendant la Deuxième Guerre mondiale, la Suède, qui était sortie de la Première Guerre comme le pays le plus riche d'Europe, a été officiellement « neutre », mais c'était un mythe. Les entreprises suédoises, notamment celles qui appartenaient aux Wallenberg, ont collaboré avec les nazis en fournissant à l'Allemagne des matières premières, en leur accordant des crédits pour permettre la livraison de matériel de guerre de la Wehrmacht, en fournissant le transport ferroviaire pour faciliter l'invasion de la Norvège et en servant de conduit d'entrée et de sortie pour les marchandises et les devises étrangères de l'Allemagne. Le Roi Gustave V de Suède était un ami intime de Herman Goering (dont la première femme était suédoise) et d'autres hauts responsables nazis. Après la guerre, la Suède « neutre » a accepté de payer presque 70 millions de dollars en réparations, mais ne l'a pas fait et détient toujours plusieurs tonnes d'or nazi quelque part dans les coffres de ses banques.

La banque des Wallenberg, la Enskilda Banken (qui fusionnera avec Skandinaviska Banken en 1972 pour former Skandinaviska Enskilda Banken) a aidé les nazis à disposer de millions de dollars en avoirs confisqués aux personnes arrêtées en convertissant l'or nazi volé en monnaie suédoise. La Enskilda Bank a secrètement acheté toutes les succursales du groupe Robert Bosch, le fabricant allemand de bougies d'allumage qui utilisait de la main-d'oeuvre esclave, en échange de l'aide apportée par Bosch pour la vente d'Enskilda d'une valeur de 3,6 millions $ en titres allemands. La Banque Enskilda a également aidé des entreprises nazies comme I.G. Farben et Krupp à maquiller leurs filiales étrangères pour éviter la confiscation par les alliés. Le secrétaire au Trésor des États-Unis, Henry Morgenthau Jr., dans une lettre de février 1945 au secrétaire d'État américain a accusé Enskilda d'avoir fait des prêts importants sans garanties aux nazis et d'avoir investi secrètement pour les capitalistes allemands dans des industries américaines.

Notes

1. En 1985, Raoul Wallenberg s'est vu conférer le tout premier titre de citoyen d'honneur du Canada, par le gouvernement progressiste-conservateur de Brian Mulroney. Seize ans plus tard, le 5 juin 2001, la Journée Raoul Wallenberg a été votée par le gouvernement libéral de Chrétien. Elle a été célébrée pour la première fois en 2002.

2. Irwin Cotler est le député libéral de Mont-Royal, ancien ministre de la Justice et procureur général du Canada et professeur émérite de droit à l'Université McGill. En 2014, il a reçu la Médaille du centenaire Raoul Wallenberg.

3. Yvon Gelbner, « Zionist policy and the fate of European Jewry », dans Yad Vashem studies (Jerusalem, vol. XII, p. 199).

4. Tribunal de district de Jérusalem, 22 juin 1955.

5. Kurt Becher a rejoint le Parti nazi en 1934, a servi comme Major SS en Pologne et a été membre des SS-Totenkopfverbände responsables des camps de concentration et qui ont travaillé jour et nuit pour tuer des juifs. Il a été nommé par Heinrich Himmler responsable des camps de concentration en territoire occupé par les Allemands, il a également été chef du département économique du commandement SS en Hongrie. Adolf Eichmann a travaillé avec Becher dans le département d'économique. En 1945, Hitler a promu Kurt Becher au grade de lieutenant général de la Waffen SS en reconnaissance de son travail à Auschwitz, Dachau, Mathausen, Bergen-Belsen et d'autres camps.

La fortune de Becher a été évaluée par des journaux allemands à plus de 30 millions $ dans les années 1960.

(Hecht, Ben (1961). Perfidy. Jullian Messner Inc. : New York.)

6. Florence, Ronald (2010). Emissary of the Doomed : Bargaining for Lives in the Holocaust. New York : Viking.

7. Levine, Paul (2010). Raoul Wallenberg in Budapest : Myth, History and Holocaust. London & Portland : Vallentine Mitchell.

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Jour du souvenir de l'Holocauste

L'Allemagne loge des réfugiés dans d'anciens
camps de concentration

Les camps de concentration établis durant la Deuxième Guerre mondiale pour exploiter les peuples d'Europe comme main-d'oeuvre esclave de la machine de guerre nazie et procéder à l'extermination massive des juifs sont maintenant considérés comme des immeubles non occupés pouvant servir à loger des demandeurs du statut de réfugiés, rapportent les agences de presse. Selon les agences, certaines villes situées près des camps de concentration nazis ont commencé à y loger des réfugiés.

Moins de deux semaines avant le 70e anniversaire de la libération des camps de la mort d'Auschwitz, la ville de Schwerte a déménagé une vingtaine de demandeurs d'asile dans le camp de concentration de Buchenwald, rapporte-t-on.

Le 27 janvier, Jour du souvenir de l'Holocauste, la ville d'Augsbourg a décidé de convertir une section du camp de concentration de Dachau en un centre de réfugiés. Invoquant le besoin pressant de trouver des endroits où loger les réfugiés, le représentant municipal Stefan Kiefer a dit au Augsburger Allgemeine : « À ce site, on ne doit pas seulement commémorer, on doit aussi agir. » Antje Seubert, représentante du Parti vert, a qualifié cette décision de « victoire sur le fascisme ».

Le bureau régional du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés pour l'Europe rapporte que « le nombre de demandes d'asile reçues en 2014 dans les pays de l'Union européenne a augmenté de 25 % par rapport à l'année précédente. Le quart des demandeurs sont d'origine afghane, érythréenne ou syrienne et dans un pourcentage similaire les demandeurs ont moins de 18 ans. Il y a également eu de nombreuses autres demandes d'asile d'apatrides : on estime leur nombre à 435 000 pour l'ensemble de l'Union européenne. L'Allemagne demeure le receveur du plus grand nombre de demandes d'asile, suivie de la France, de la Suède, de l'Italie et du Royaume-Uni. »

Le nombre de personnes demandant le statut de réfugié a continué de grimper durant le premier trimestre de 2014 « en conséquence des guerres en Syrie et en Irak et des conflits et de l'instabilité en Afghanistan, en Érythrée et ailleurs », écrit le Haut Commissariat de l'ONU.


Carte des niveaux actuels de réfugiés en Europe (cliquer pour agrandir)

Par ailleurs, la propagande contre les immigrants se poursuit en Allemagne et dans d'autres pays d'Europe et les manifestations organisées contre les immigrants et les réfugiés se multiplient, prenant notamment à parti les gens de confession musulmane. « Ces derniers mois, le mouvement islamophobe PEGIDA a gagné de l'appui en Allemagne », rapporte l'agence TeleSUR. PEGIDA signifie « Européens patriotes contre l'islamisation de l'Occident ». « Un des principaux objectifs du mouvement est de faire adopter une nouvelle loi de l'immigration qui limitera le nombre de réfugiés venant en Allemagne et facilitera leur déportation », rapporte TeleSUR. Le groupe, basé en Allemagne, a tenté d'organiser une manifestation à Vienne, en Autriche, le 12 janvier, mais les Autrichiens se sont mobilisés massivement pour leur dire non. PEGIDA a mobilisé 250 personnes mais les opposants étaient au nombre de 5000.

(TeleSUR, Washington Post, Haut Commissariat de l'ONU sur les réfugiés)

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L'anniversaire de la bataille de Stalingrad

Des anciens combattants adressent
une lettre à la chancelière d'Allemagne

Le 22 janvier 2015, le Musée de la bataille de Stalingrad a accueilli une Table ronde avec la participation d'anciens combattants de la bataille historique de Stalingrad. Ces anciens combattants, toujours résidents de la région de Volgograd, Maxim Matveyevich Zagorulko, Alexander Kolotushkin, Maria V. Sokolov, Mikhail Tereshchenko, Eugene F. Rogov et Alexander Yakovlevich Sirotenko, âgés de plus de quatre-vingt et même quatre-vingt dix ans, ont discuté de la situation mondiale actuelle et de celle du passé. À l'issue de la réunion les anciens combattants ont adressé une lettre à la chancelière d'Allemagne, Angela Merkel, intitulée « Lettre des survivants ». Le texte intégral est sur plusieurs sites en langue russe. Voici leur lettre en français :


« L'Appel de la Mère-Patrie », statue érigée sur le Kourgane Mamaïev à Volgograd

* * *

Madame Merkel,

En cette 70e année de la victoire sur le nazisme, nous, anciens combattants de cette guerre terrible et participants à ce combat effroyable, sommes conscients qu'un spectre hante à nouveau l'Europe, le spectre de la peste brune. Cette fois, c'est l'Ukraine qui est devenue la pépinière des nervis nazis, qui s'abreuvant à la source d'une idéologie ultranationaliste, antisémite et inhumaine, se sont lancés dans le rejet des autres cultures, la violence physique, l'élimination des dissidents et les meurtres motivés par la haine ethnique.

Devant nous défilent des images familières : des marches aux flambeaux, des voyous en uniforme aux emblèmes nazis, les mains droites du salut nazi, les manifestations fascistes sous la protection de la police dans le centre de Kiev et l'imposition, à certaines personnes, d'un statut de second rang.

Nous avons déjà vu tout cela et nous savons où cela mène.


Des anciens combattants de la Grande Guerre patriotique accueillis par le président de la Russie, Vladinir Poutine, le 2 février 2012 à la cérémonie a Volgograd à l'occasion du 70e anniversaire de la bataille de Stalingrad.

En Ukraine, la peste brune couvait au cours de la dernière décennie et a éclaté dans une guerre civile. Des formations nazies comme celles du Secteur droit (Praviy Sektor), de la soi-disant garde nationale, des nombreuses bandes paramilitaires mais bien armées comme les Bataillons Azov, qui ont le soutien de l'armée régulière ukrainienne qui effectue des frappes aériennes et des bombardements d'artillerie lourde, massacrent systématiquement la population de l'Ukraine orientale.

Elles assassinent des innocents tout simplement parce que ceux-ci souhaitent parler leur propre langue, parce qu'ils ont une idée différente de l'avenir de leur pays, et parce qu'ils ne veulent pas vivre sous un gouvernement dirigé par les banderistes.

Les banderistes sont des fidèles de la prétendue Armée de libération ukrainienne, qui, nous vous rappelons, Mme Merkel, s'est battue pendant la Deuxième Guerre mondiale avec la Wermacht et avec la Division SS Galicie, connue pour le massacre des juif soviétiques. Ils exaltent leurs prédécesseurs spirituels, renomment les rues des villes d'Ukraine d'après les criminels de guerre nazis ! L'histoire du XXe siècle est réécrite sous nos yeux. Il n'est pas étonnant que les banderistes de notre temps, avec le fanatisme que nous connaissons, nous, anciens combattants du front de Stalingrad de la Deuxième Guerre mondiale, réclament que le Donbass soit rayé de la carte et brûlent au napalm leur propres compatriotes de l'Est. Il existe des preuves documentaires qu'ils ont assassiné des personnes simplement pour avoir porté le Ruban de Saint-Georges, notre symbole de la victoire sur le fascisme.

La vérité, Mme Merkel, est que l'Ukraine est plongée dans l'hystérie nazie ! Ce n'est pas juste quelques déclarations antisémites au parlement ou d'illuminés sur la supériorité d'une « race » sur une autre. Il s'agit de crimes sanglants massifs dont les victimes se chiffrent par centaines et par milliers.

Mais l'Occident occupe une position très étrange et nous ne la comprenons pas. Elle peut être interprétée comme une connivence avec le nazisme ukrainien. En Ukraine cela est interprété comme la position de l'Europe et cela commence à être interprété de la même façon en Russie. Nous aimerions savoir ce que le peuple allemand aurait à dire à ce sujet en partant de son expérience nationale historique.

Il est important pour nous de connaître votre opinion, le point de vue de la dirigeante du grand peuple qui dans le passé a subi la peste brune, mais, au prix de terribles sacrifices, s'en est relevé. Nous sommes conscients de sa lutte dans votre pays contre toute manifestation du nazisme et, croyez-nous, nous l'apprécions. C'est pourquoi, nous nous demandons d'autant plus pourquoi, alors que vous balayez tous les germes possibles du nazisme dans votre pays, vous ne semblez pas vous inquiéter du déclenchement à grande échelle de ceux-ci dans une autre partie de l'Europe ?

Pourquoi les dirigeants européens qui ont marché en solidarité avec les caricaturistes français assassinés par des terroristes islamistes, ne marchent-ils pas contre le fascisme en Ukraine ? Pourquoi le chef de l'État, qui a ordonné la destruction d'une partie de sa propre population, a-t-il participé à cette marche ? Pourquoi douze victimes françaises méritent l'attention, mais des milliers de victimes ukrainiennes et russes non ?

Savez-vous combien d'enfants ont été tués en Ukraine orientale par des voyous avec des emblèmes nazis sur leurs uniformes ? Vous voulez savoir ? Nous vous fournirons cette information, si vous ne l'avez pas déjà. Pourquoi les peuples d'Europe réagissent-ils calmement à la violence massive en Ukraine ? Est-ce tout simplement parce qu'il n'y a aucune mention de cela dans vos médias ? Alors, où est leur indépendance bien connue ? Indépendance des faits ? Indépendance de la vérité ? Quel est l'objectif authentique de vos sanctions économiques ? Affaiblir la Russie en tant que puissance ? Soutenir le nazisme en Ukraine ? Ou plus simplement supprimer nos retraites que nous recevons comme anciens combattants de la guerre mondiale ?

Mme Merkel, l'histoire sombre du XXe siècle nous a appris quelques leçons.

1. La réécriture de l'histoire est le premier pas sur la voie du nazisme.

Tous les régimes fascistes européens dans les années 1920 et 1930 ont commencé par là. Et c'est la voie que celui d'Ukraine a prise : de la ré-écriture des manuels d'histoire scolaires à la destruction généralisée des monuments commémoratifs soviétiques. L'apogée du mensonge a été atteinte par les déclarations proférées par le premier ministre ukrainien, Arseni Iatseniouk, dans les médias allemands sur « l'invasion de l'Allemagne et l'Ukraine par l'Union soviétique » ! Nous voudrions savoir votre opinion là-dessus, l'opinion d'une dirigeante d'un pays où la négation de l'Holocauste est un crime passible d'une peine d'emprisonnement.

2. La recherche de boucs émissaires est une manifestation du nazisme.

Les régimes fascistes rejettent la responsabilité de tout échec dans leur pays sur les différents groupes ethniques, sociaux et religieux. Dans le passé, c'était les juifs et les communistes. Dans l'Ukraine d'aujourd'hui, les boucs émissaires sont les Russes, la Russie et l'ensemble de l'Est du pays.

3. Si le nazisme apparaît dans un pays, la maladie peut se propager dans le monde entier.

Vous ne pouvez pas faire la promotion du nazisme dans un pays et supposer qu'il va rester dans les frontières de ce pays. La vague du nazisme se propage partout et franchit les frontières. C'est la raison pour laquelle le nazisme est appelé « la peste brune ». Le nazisme doit être arrêté et tenu éloigné pour qu'il ne pénètre pas chez vous.

4. Le nazisme ne peut être ignoré ; il doit être combattu.

Quiconque penserait que l'on puisse tout simplement ignorer le fascisme ukrainien et ne pas y porter attention se trompe lourdement. La nature du nazisme est telle qu'il considère le fait que l'on l'ignore comme un encouragement, même comme une reconnaissance de sa force. Le nazisme n'est jamais local ; il ne peut que s'enraciner et grandir. Par conséquent, le seul moyen de traiter le nazisme est de lutter activement contre lui.

5. L'arme la plus importante dans la lutte contre le nazisme à ses débuts est la vérité.

En un mot, la vérité est mortelle pour le nazisme. En exposant l'essence inhumaine du nazisme, l'essence inhumaine révélée par son idéologie, contenue dans les exhortations à ses adhérents, dans les crimes contre les humains qu'il commet, nous nous battons contre le nazisme tel qu'il est. La vérité historique est la meilleure protection contre le nazisme. Si leur propre gouvernement ne cachait pas l'histoire de leur pays et de leur peuple aux jeunes, il y aurait moins de disciples nazis en Ukraine. Les médias de masse jouent un grand rôle : ils peuvent faire partie du nazisme ou ils peuvent le combattre.

Mme Merkel, en Russie, l'héritière de l'URSS, nous avons une mission spéciale et historique. Il y a soixante-dix ans, au prix des plus grands sacrifices de la guerre nous avons mis fin au nazisme en Europe.

Nous, personnellement, Stalingradois, à Stalingrad nous avons infléchi le cours de l'histoire au prix d'efforts surhumains, pas seulement notre histoire, mais l'histoire de l'Europe, oui, l'histoire mondiale. Aussi ne pouvons-nous pas accepter la résurgence du nazisme. Certainement pas à notre porte. Nous l'avons combattu, nous le combattrons. Nous vous proposons de le combattre ensemble.

Un personnage, l'archétype d'un patron fasciste, dans un film bien connu et populaire ici, dit : « Dès que vous entendez quelque part que, au lieu de dire « Bonjour », les gens disent « Heil ! », vous saurez : c'est là qu'ils nous attendent, et c'est où nous allons commencer notre grande renaissance ».

Mme Merkel, le « Heil » retentit partout en Ukraine, ouvertement, avec l'appui officiel du gouvernement. Il est temps que le monde européen dans son ensemble arrête ce fléau. Nous espérons vivement que le peuple allemand et toute l'Europe, ainsi que le peuple russe, vont écraser ce reptile, le détruire des racines à la cime.


Peinture du panorama « La Destruction des troupes nazies à Stalingrad » du Musée de la bataille de Stalingrad à Volgograd

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Critique de cinéma

La Liste de Schindler

Cette critique du film La Liste de Schindler tourné en 1993 par Steven Spielberg a été écrite par Rich Gibson en 2001. Rich Gibson aujourd'hui est professeur émérite d'Études sociales au Collège de l'Éducation de l'Université de San Diego.

* * *

Le jour qui précède celui de la naissance de Hitler a été désigné à juste titre Journée internationale dédiée à la mémoire des victimes de l'Holocauste. Dans ces temps d'inégalités croissantes, de ségrégation accrue et d'irrationalisme omniprésent, il est de mise de jeter un regard rétrospectif sur ce qui a été nommé la Shoah, de réfléchir et d'affirmer « Jamais plus ! ».

Malheureusement, cette journée est banalisée encore une fois par la projection nationale de ce qui est devenu la version officielle de la Shoah, le film de Steven Spielberg, La Liste de Schindler. Le film est maintenant la source incontournable pour toute étude de l'Holocauste dans la plupart des salles de classe des États-Unis et le point de référence de millions de personnes. Cela en soi est une tragédie. Le film de Spielberg n'est qu'une pièce de fiction qui ne tient aucunement compte, et ce, de façon délibérée, du contexte historique de la Shoah. Pis encore, si les gens adhéraient au message du film, alors ils recréeraient les conditions qui ont rendu le fascisme possible. Une critique en règle de La Liste de Schindler est donc de mise.

La projection de La Liste de Schindler à l'échelle nationale, avec peu d'interruptions publicitaires, a commencé en 1997, alors que le commanditaire était la Ford Motor Company. Or, Henry Ford était un fasciste notoire et un contributeur important aux coffres des nazis et à leur idéologie. Ce paradoxe a atteint son paroxysme lorsque que, le 24 mars 1994, le roman La Liste de Schindler, a servi de preuve à l'émission de nouvelles la plus populaire aux États-Unis, « 60 Minutes », à l'effet que la Shoah avait bel et bien eu lieu (en opposition aux « historiens révisionnistes » qui prétendaient que la Shoah était un mensonge). Le film est inspiré de ce même roman de fiction historique inspiré de faits réels.

Dès les premières images, La Liste de Schindler omet tout contexte historique. Nous sommes ainsi projetés en plein coeur du développement de la guerre contre les juifs. Comment les nazis sont-ils arrivés au pouvoir ? Pourquoi étaient-ils si populaires ? Qui a résisté ? Comment le fascisme a-t-il été vaincu ? Le film n'offre de réponse à aucune de ces questions. Plutôt, nous faisons la connaissance de Schindler, un nazi, un héros en devenir.

Contrairement à la façon dont il est dépeint dans le film, Schindler n'était pas un ange de la miséricorde. Au contraire, il avait été un volontaire de la première heure pour participer au mouvement fasciste. Il était un nazi mercantile qui a agi de son propre bon vouloir. Contrairement aux prétentions du film à l'effet que la « liste est ton salut ultime », ce ne sont pas toutes les personnes sur la liste des « juifs de Schindler » qui ont survécu. Lors d'une seule rafle des SS, Schindler leur a remis 700 juifs qui furent envoyés dans les camps de la mort où ils ont été tués. Ainsi se sont créées des disponibilités sur la fameuse liste. Des victimes désespérées ont dû payer pour s'y retrouver et ils payaient au comptable Stern. La croyance motivant les survivants dans le film - celle d'être sur la liste et d'être sauvé, « la liste, c'est la vie » - est un mensonge. S'il est vrai que l'usine de munitions de Schindler était en grande partie oisive, celui-ci s'est tout simplement approvisionné en munitions sur le marché noir pour les revendre aux Allemands. Nous sommes loin des actes de sabotage tels que dépeints dans le film. Pour ce qui était de « ses » juifs, Schindler avait tout bonnement créé une compétition entre eux alors que la résistance collective était à l'ordre du jour. Il leur a aussi offert un faux sens de sécurité, les isolant de leurs alliés potentiels et minant par le fait même l'efficacité de la résistance de masse.

Schindler n'est devenu un habitué des listes et un allié présumé des juifs qu'après la bataille de Stalingrad, un tournant décisif de la Deuxième Guerre mondiale, alors que chaque Allemand capable de réfléchir savait que la défaite était imminente. Schindler n'a pas commencé à agir de façon définitive avant que les choses ne se détériorent encore davantage pour les nazis, en 1944, après que le maréchal nazi Rommel se soit suicidé. À la fin de la guerre, Schindler s'est déguisé en victime des camps de concentration et, accompagné d'un groupe d'amis, s'est enfui vers l'ouest - comme l'ont fait de nombreux criminels de guerre - craignant d'être arrêté par les Soviétiques. Il a poursuivi sa vie de coureur de jupons et d'alcoolique tout en faisant de nombreux voyages annuels en Israël pour y recevoir des accolades et demander de l'argent. Il est décédé en 1974. Il semblerait qu'au moins certains de « ses » juifs n'ont pas pleuré la mort de ce nazi.

La plupart des enseignants et des citoyens des États-Unis ignorent que le film a été interdit dans une grande partie du Moyen-Orient et constamment attaqué en Israël, ou que le réalisateur du film magistral Shoah a dénoncé Spielberg et son film. Claude Lanzmann, réalisateur de Shoah, croit que Spielberg dresse délibérément un portrait faux de la Shoah, et lui-même croit que ce n'est qu'une question de temps avant qu'une telle tragédie ne se répète. Les experts de la Shoah qui ont quitté l'entourage de Spielberg pendant le tournage du film affirment que Spielberg voulait absolument donner une fin relativement heureuse à son film, et que dès qu'ils se sont opposés à ce point de vue, ils ont été congédiés.

Le choix de la trame sonore par Spielberg n'a eu aucune résonance auprès des cinéphiles aux États-Unis, mais son message musical a été très clair pour d'autres. En effet, à la fin du film on entend Jerusalem of Gold, un hymne à la victoire du sionisme à la fin de la guerre de 1967. Les seuls cinéphiles qui n'ont pas entendu cette musique sont ceux d'Israël. Il semble que Spielberg craignait que le public israélien n'apprécie pas cette manoeuvre crasse de sa part. Il a retiré cette bande sonore.

La Liste de Schindler ne mentionne jamais la résistance antifasciste et le rôle clé des communistes à la tête de cette résistance. En l'absence de résistance, le film offre une vision antisémite des juifs. Les seuls juifs qui y sont dépeints sont des escrocs, des collaborateurs et des conspirateurs, tous des stéréotypes. Comme dans tout antisémitisme, la classe ouvrière juive est pratiquement inexistante. Dans le monde réel, c'est l'Armée rouge soviétique qui, ayant joué le rôle décisif dans la résistance à l'Holocauste et dans toute la Deuxième Guerre mondiale, a libéré les « juifs de Schindler ».

La Liste de Schindler véhicule les messages suivants :

- Le capitalisme est bon. « Si seulement j'avais fait plus d'argent, j'aurais pu acheter davantage de juifs. »

- Oublie ta conscience, laisse un nazi s'occuper de toi. « La liste est ton salut ultime ».

- Tiens-toi loin des communistes : un soldat de l'Armée rouge exhorte les survivants à aller vers l'ouest.

- Dieu s'occupera de vous : le service religieux à la fin du film.

Ce sont là les éléments mêmes qui ont alimenté la montée du fascisme en premier lieu. Enfin, ultime ironie, la tombe de Schindler se trouve dans un cimetière catholique en Israël. L'Église catholique a été un acteur de premier plan dans l'élaboration de l'idéologie nazie et de sa pratique sociale.

Selon Spielberg, le fascisme est une responsabilité collective mais c'est une responsabilité qui n'appartient à personne en particulier et est d'ailleurs terminée. En réalité, c'est la soif insatiable du capital pour une main-d'oeuvre à bon marché, pour des marchés et pour des matières premières qui a engendré le fascisme et permis aux nazis d'avoir les instruments et la science moderne pour le mettre en oeuvre. Beaucoup de ces recherches scientifiques, dont l'eugénisme et le déterminisme biologique, ont commencé aux États-Unis, tout comme les camps de concentration pour les autochtones. Cette responsabilité collective ne reconnaît pas que les peuples ont combattu le fascisme.

Le capitalisme a engendré le fascisme. Le fascisme et le génocide existent toujours dans le monde d'aujourd'hui. En somme, le fascisme, c'est le pouvoir direct des élites, c'est le racisme organisé, le nationalisme, le mysticisme, l'anticommunisme, la violence, la culture de la mort, la terreur et la guerre. La réponse à cela est la démocratie et l'égalité, la résistance qui vient à bout des demandes cupides et morbides du capital. Ce sont ces idées qui ont mobilisé la violence collective qui a vaincu le fascisme, des idées que La Liste de Schindler n'aide pas à saisir.

(Université d'État de San Diego, le 19 avril 2001. Traduction : LML)

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Dans l'actualité
Venezuela

Une autre tentative de coup d'État des États-Unis


Manifestations au Canada en 2014 à la défense de la souveraineté du Venezuela

Lors d'un discours télévisé le 4 février, le président vénézuélien Nicolás Maduro a accusé les agents de l'ambassade des États-Unis à Caracas de conspirer pour soudoyer des gens près du gouvernement vénézuélien, incluant d'actuels et anciens ministres ainsi que des fonctionnaires militaires.

Le Venezuela a appelé l'Union des nations sud-américaines (UNASUR) à travailler avec la Communauté d'États latino-américains et caraïbes (CELAC) pour servir de médiateurs dans le conflit entre lui et les États-Unis.

Le secrétaire général de l'UNASUR Ernesto Samper a visité le Venezuela le 5 février pour vérifier les allégations qu'une conspiration de coup d'État est en cours au Venezuela. Ayant reçu des preuves des activités du personnel diplomatique américain au Venezuela, Samper a condamné en termes non équivoques les efforts pour déstabiliser le pays.

« Je veux publiquement réitérer la position de l'UNASUR, qui est dans la Lettre de la Constitution endossée dans la Clause démocratique du Traité, qui est absolument claire et concluante à l'effet que tout effort de déstabilisation qui a lieu dans une démocratie ou toute tentative de déstabiliser un gouvernement se méritera le rejet unanime des pays de l'UNASUR », a déclaré Samper.

Dans le même ordre d'idées, la présidente vénézuélienne du Tribunal suprême de justice (TSJ), Gladys Gutirrez, a annoncé le 5 février lors d'une réunion avec le président Maduro, que la plus haute instance judiciaire du pays émettra un communiqué rejetant la dernière série de sanctions imposées par le gouvernement des États-Unis contre le Venezuela.

Les sanctions additionnelles imposées par les États-Unis contre le Venezuela le 2 février, augmentent le nombre d'agents du gouvernement vénézuélien qui ne peuvent entrer aux États-Unis.

« Ces restrictions vont aussi affecter les membres immédiats de la famille d'un certain nombre des individus sujets à des restrictions de visa à cause de leur participation présumée à des violations des droits humains ou à des actes de corruption publique », a déclaré la porte-parole du Département d'État des États-Unis Jen Psaki. Elle poursuit : « Nous n'identifierons pas publiquement ces individus en raison des lois sur la confidentialité du visa mais nous envoyons un message clair que les abuseurs des droits humains, ceux qui profitent de la corruption publique et leurs familles ne sont pas les bienvenus aux États-Unis. »

Répondant à cette annonce, le président Maduro a souligné que les États-Unis n'ont aucune autorité morale en matière de droits humains pour faire la leçon à d'autres pays.

« Ils tuent avec impunité des jeunes noirs dans les rues, ils persécutent et ont des jeunes de l'Amérique centrale dans des camps de concentration. [À Guantanamo], ils ont enlevé des dizaines de citoyens du monde en ne s'appuyant sur aucun système légal, et les ont soumis à la torture et à l'isolement », a-t-il dit lors d'un discours. « De quels droits humains parlent-ils ? »

Un communiqué officiel du gouvernement vénézuélien rejette catégoriquement les sanctions américaines. Il y est souligné que le récent sommet de la CELAC a exprimé son « profond rejet de l'application de mesures coercitives unilatérales contraires au droit international » et que le MERCOSUR et l'UNASUR ont aussi exhorté le gouvernement des États-Unis de s'abstenir d'appliquer des sanctions unilatérales « qui ne contribuent pas à la stabilité, la paix sociale et la démocratie. »

Le gouvernement vénézuélien a aussi déploré les attaques américaines continuelles « qui menacent le dialogue respectueux gouvernant la performance internationale du gouvernement vénézuélien et violent les principes de la souveraineté nationale, l'égalité des droits et la non-ingérence dans les affaires internes, intrinsèques à la Loi internationale. »

Le vice-président des États-Unis accusé de planifier la déstabilisation

Le 1er février, le président Maduro a dit que le vice-président des États-Unis Joe Biden a rencontré à Washington certains dirigeants de gouvernements de l'Amérique latine pour les amener à isoler le Venezuela tandis que les États-Unis intensifient leurs efforts de déstabilisation. Le président a été directement informé de la réunion avec Biden par d'autres dirigeants lors du récent sommet de la CELAC au Costa Rica.

Maduro a appelé les Vénézuéliens « à être alertes, très alertes, préparés, organisés : les blocs de lutte populaire, les unités de combat Bolivar-Chavez, les conseils de la communauté, les forces armées, les travailleurs ruraux, les travailleurs, les femmes, les jeunes, les mouvements de la diversité sexuelle, les écologistes, tout le monde. »

Implication canadienne

Le 4 février, le Centre pour les droits humains et le pluralisme juridique de McGill a tenu un événement appelé « Venezuela en crise : le déclin de la démocratie et la répression des droits humains ». Le but était de répandre la désinformation au sujet du Venezuela. Le « déclin de la démocratie » est l'expression que les réactionnaires utilisent pour décrire leur perte de privilèges d'élite quand le peuple s'investit du pouvoir. Ils s'objectent aux arrestations de ceux qui sont soupçonnés d'incitation à la violence et aux meurtres en 2014, lorsque des groupes anti-gouvernement ont pris la rue avec des armes à feu, des cocktails Molotov et des bazookas faits maison pour exiger le retrait de Maduro. Quarante-trois personnes ont été tuées. Environ la moitié des victimes étaient des supporters du gouvernement, du personnel de la sécurité d'État et des membres ordinaires du public vraisemblablement tués par les groupes anti-gouvernement, ont rapporté les médias.

Ceux qui ont été arrêtés pour incitation à cette violence comprennent le dirigeant de l'opposition Leopoldo López. L'événement de Montréal comprenait quelqu'un de sa famille et un supporter. Le député libéral Irwin Cotler a aussi pris la parole, présenté sans vergogne comme « l'ancien avocat de Nelson Mandela » pour tenter d'associer le combattant de la résistance Mandela et la lutte contre l'Apartheid avec l'activité terroriste appuyée par les États-Unis au Venezuela.

(TeleSUR, Prensa Latina, Venezuelanalysis)

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La guerre économique menée
contre le peuple vénézuélien


Parlementaires en action pour s'opposer à la guerre économique contre le peuple, État d'Anzoátegui, 20 janvier 2015

Dans le cadre des efforts des États-Unis et des réactionnaires traîtres au Venezuela pour créer l'instabilité, il y a la tentative d'entraver le fonctionnement normal de l'économie pour créer des pénuries et des troubles sociaux, qui sont ensuite mis sur le dos du gouvernement.

Le 21 janvier, lors de son discours annuel à la nation, le président Maduro a présenté un enregistrement audio exprimant un complot de l'opposition pour semer le chaos dans les supermarchés. Dans l'enregistrement, Ivan Carratu Molina, un agent de la sécurité sous l'ancien président vénézuélien Carlos Andres Perez et Jose de Jesus Gamez Bustamente, un général vénézuélien à la retraite, discutent de plans pour générer la violence et le désordre au Venezuela et ultimement renverser le gouvernement. Gamez a été formé à « l'école des assassins » à Fort Benning en Géorgie et prétend être un expert des opérations psychologiques.

Dans l'enregistrement, Gamez dit que l'opposition va fracasser des vitrines de supermarchés pour provoquer du pillage puis la répression par la Garde nationale vénézuélienne des travailleurs, la base politique de la Révolution bolivarienne. Gamez suggère que les manifestations violentes de rue comme celles organisées par l'opposition l'année dernière ne fonctionneront pas. Il ajoute que l'opposition devrait se faire connaître dans le monde comme un mouvement pacifique, tout en masquant un ordre du jour violent.

Le 22 janvier, TeleSUR a publié un article intitulé « La vérité derrière les pénuries au Venezuela », qui souligne que les pénuries sont causées délibérément, principalement par les secteurs de l'opposition et les entreprises privées afin de causer la déstabilisation.

« Les médias partout dans le monde ont travaillé à présenter le Venezuela comme un pays aux prises avec une crise économique. Ces médias font état des pénuries de produits de base dans les magasins et les lignes d'attente qui se produisent parfois pour certains produits comme étant une preuve de cette prétendue crise.

« Ces pénuries semblent faire partie d'une action concertée par les membres de l'opposition afin d'évincer le gouvernement démocratiquement élu du pouvoir. »

Faisant référence au complot de membres de l'opposition dénoncé par le président Maduro le 21 janvier, TeleSUR indique : « Les événements qui se produisent aujourd'hui au Venezuela sont étrangement similaires à ceux du Chili avant le coup d'État de 1973. »

L'article de TeleSUR explique la nature de ces pénuries :

Qu'en est-il réellement des pénuries ?

Depuis environ deux ans, soit depuis que l'ancien président Hugo Chavez a été hospitalisé, il y a eu des pénuries régulières de produits de base comme le lait, le sucre, la farine de maïs et les articles d'hygiène personnelle. Ces produits sont disponibles sur les tablettes pour un temps puis ils disparaissaient. Avant les élections, il y avait aussi des pénuries mais elles durent plus longtemps maintenant. Cependant, aujourd'hui comme avant, si le lait est rare, les produits dérivés du lait tels le yogourt ou le fromage sont largement disponibles.

Les produits deviennent rares à d'autres moments stratégiques. De juillet à octobre 2014, il y a eu plus de 9 000 cas enregistrés du chikungunya au Venezuela, un virus répandu par les moustiques. Bien qu'il n'y ait pas de remède, ses symptômes sont souvent traités avec de l'acétaminophène, qui aide à soulager la fièvre et l'inconfort. Pendant cette période, l'acétaminophène n'était pas disponible en magasins. Les insectifuges et insecticides ont aussi disparu des tablettes.

Quels produits sont en manque ?

Au Venezuela, le prix des produits de base est réglementé par le gouvernement, une pratique routinière dans les pays en développement afin que la population puisse acheter les produits essentiels. Le gouvernement vénézuélien a élargi le contrôle des prix en 2013 après qu'il ait été révélé que des vendeurs écoulaient de nombreux autres produits à plus de 200 % au-dessus du coût réel.

Quand Chavez est décédé, et qu'une nouvelle élection présidentielle a été déclenchée, la rareté a augmenté. Le riz, un produit réglementé, est devenu difficile à trouver, tandis que le riz parfumé était facile à trouver. Les pâtes réglementées, un produit qui n'était pas rare auparavant, ainsi que l'huile de cuisson et le lait, sont devenus difficiles à trouver, tandis que les pâtes de luxes, importées, étaient toujours disponibles. C'était le cas avec beaucoup de produits réglementés, tels le thon et le café.

Pour les vendeurs, il est devenu plus profitable de vendre le produit dérivé que le produit de base et si les produits de bases ne peuvent être trouvés, alors les consommateurs sont obligés d'acheter l'option plus dispendieuse.

Qui contrôle la plus grande partie de la production de biens au Venezuela ?

Les entreprises privées contrôlent environ 70 % de la production au Venezuela. Comme groupe, ceux qui dirigent ces entreprises privées ont été historiquement opposés au modèle socialiste vénézuélien. Ces entreprises sont représentées par Fedecamaras et Consecomercio, qui ont appuyé activement le coup d'État raté contre l'ancien président vénézuélien Chavez. En fait, c'est le chef de Fedecamaras, Pedro Carmona Estanga, qui a brièvement occupé la présidence après le coup d'État.

Les médias monopolisés diffusent des images de Vénézuéliens faisant la queue pour acheter des biens afin de calomnier le gouvernement vénézuélien, prétendant que les politiques du gouvernement et la réglementation sont la cause des pénuries. Ces reportages n'analysent pas les causes des pénuries et ne reconnaissent pas que depuis le début de la Révolution bolivarienne, le nombre de Vénézuéliens à faibles revenus et de travailleurs qui peuvent acheter des biens est plus élevé que jamais.

Le chômage au Venezuela est à 5,9 %, le taux le plus bas depuis 30 ans et, durant les 15 dernières années, il y a eu plus de 25 augmentations de salaires et de prestations de pensions.

Pénuries ou accaparement des biens ?

Les médias internationaux suggèrent aussi que les pénuries que vivent les Vénézuéliens sont dues à un manque de production de produits de base. Peu d'attention est accordée cependant aux cas où les fonctionnaires démasquent des opérations massives d'accaparement de biens.

En 2014, plus de 28 000 tonnes de produits devant être vendus en contrebande ont été saisis. En janvier 2015, la société Herrera a été prise en flagrant délit de thésaurisation d'une tonne de nourriture et de produits de base dans un entrepôt. Dans un autre lieu, on a découvert que la même société avait accumulé des produits essentiels pendant 45 jours.

L'économiste espagnol et directeur du Strategic Latin American Geopolitical Center, Alfredo Serrano, a expliqué que sous la Révolution bolivarienne, initiée par le président Chavez et poursuivie par son successeur Nicolas Maduro, la consommation s'est démocratisée. Les Vénézuéliens peuvent se permettre d'acheter plus que les seuls biens de base. Ils peuvent maintenant acheter des produits industriels et électroniques parmi d'autres choses.

Cependant, tel que mentionné précédemment, la majorité de la production alimentaire est contrôlée par les entreprises privées, ce qui leur donne le contrôle sur ce qui est et n'est pas disponible dans les magasins. Les produits fabriqués par l'État, en raison des pénuries générales, sont achetés aussitôt qu'ils apparaissent et deviennent rares rapidement. Cette situation place les entreprises privées dans une position où elles se présentent comme étant indispensables et elles utilisent cela pour mener une guerre économique contre le gouvernement. Les Vénézuéliens sont poussés à penser que le gouvernement est à blâmer pour les pénuries.

Les entreprises privées étroitement alignées avec l'opposition au Venezuela utilisent le pouvoir dont elles disposent pour mettre de la pression sur le gouvernement et créer une tension sociale afin de faire mûrir les conditions propices aux complots et au renversement du gouvernement démocratiquement élu.

(TeleSUR, 22 janvier 2015)

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Un coup en temps réel


Les Vénézuéliens célèbrent la Journée de la Dignité nationale, à Caracas, le 4 février 2015, pour commémorer les efforts des soldats patriotiques et des civils dirigés par Hugo Chavez pour mettre fin en 1992 aux politiques néolibérales du président Carlos Andres Perez qui avait l'appui des États-Unis.

Un coup se fomente au Venezuela. Les pièces du casse-tête tombent toutes en place comme dans un mauvais film dont la vedette est la CIA. À chaque tournant apparaît un nouveau traître et de nouvelles trahisons se trament, menaçant à tout moment de révéler des preuves dites irréfutables pour justifier l'injustifiable. Les infiltrations sont monnaie courante, les rumeurs se propagent à la vitesse de la lumière, et une mentalité de panique est omniprésente, défiant toute logique. La une des journaux proclame un danger, une crise, une chute imminente, tandis que les suspects habituels déclarent une guerre secrète contre un peuple dont l'unique crime est d'avoir le plus grand bassin d'or noir au monde.

Cette semaine, tandis que le New York Times publiait un article dégradant qui ridiculisait Maduro, disant du président vénézuélien qu'il est « instable et despotique » (« M. Maduro pris dans son labyrinthe », NYT, le 26 janvier 2015), un quotidien d'outre-atlantique publiait à son tour un article à sensation accusant le président de l'Assemblée nationale du Venezuela, Diosdado Cabello, qui est aussi la personnalité politique la plus puissante de ce pays après Maduro, d'être à la tête d'un réseau de narcotrafiquants (« Le chef de la sécurité réfugié aux États-Unis accuse le deuxième Chavista en importance au Venezuela d'être un trafiquant de drogue », ABC [Espagne], le 27 janvier 2015). Ces accusations proviennent d'un ancien officier de la garde présidentielle vénézuélienne, Leasmy Salazar, qui a servi sous le président Chavez et qui a été recruté par la US Drug Enforcement Agency (DEA), devenant par le fait même la nouvelle carte de Washington dans sa guerre contre le Venezuela.

Deux jours plus tard le New York Times présentait à la une un article dénigrant l'économie et l'industrie pétrolière vénézuéliennes, et prédisant leur déclin (« Les pétro-dollars en chute libre, les tablettes vénézuéliennes vides », NYT, le 29 janvier 2015). On néglige d'y mentionner les centaines de tonnes d'aliments et les autres produits de consommation ayant été stockés ou vendus en contrebande par des producteurs et des hommes d'affaires privés dans le but est de provoquer des pénuries, la panique et le mécontentement envers le gouvernement et de justifier des hausses de prix exorbitantes. On y a aussi omis de mentionner les nombreuses mesures prises par le gouvernement afin de surmonter les difficultés économiques.

Simultanément, un grand titre sensationnaliste et trompeur est paru dans plusieurs quotidiens étasuniens, sur papier et en ligne, liant le Venezuela à des armes nucléaires et à un plan visant à commettre un attentat contre la ville de New York (« Scientifique des États-Unis arrêté pour avoir aidé le Venezuela à fabriquer des bombes », NPR, le 30 janvier 2015). Le titre laisse entendre que le Venezuela a été directement impliqué dans un plan terroriste contre les États-Unis, alors que l'article lui-même n'indique aucunement que des Vénézuéliens aient été impliqués dans un quelconque complot. En réalité, il s'agit d'une provocation tramée de A à Z par le FBI, dont les agents ont posé en tant que fonctionnaires vénézuéliens afin d'arnaquer un physicien nucléaire désenchanté qui avait déjà travaillé pour Los Alamos sans avoir aucun lien avec le Venezuela.

Le même jour, la porte-parole du département d'État, Jen Psaki, a condamné la soi-disant « criminalisation de la dissension politique » au Venezuela. Elle répondait à un journaliste dont la question portait sur l'arrivée à New York d'un général vénézuélien transfuge, Antonio Rivero, et sur ses intentions de demander l'appui du Comité de travail des Nations-unies sur la détention arbitraire. Rivero avait esquivé un mandat d'arrestation émis contre lui au Venezuela suite à sa participation en février 2014 aux manifestations antigouvernementales violentes menant au décès de 40 personnes, presque tous des supporters ou des agents de sécurité du gouvernement. Son arrivée aux États-Unis concorde avec celle de Salazar, témoignant de l'effort coordonné visant à affaiblir les forces armées vénézuéliennes en paradant publiquement deux officiers militaires de haut rang - deux officiers qui avaient été loyaux à Chavez - qui se sont retournés contre leur propre gouvernement et qui réclament activement une intervention étrangère contre leur propre pays.

Ces exemples ne représentent qu'un aperçu des nombreux reportages systématiquement négatifs et mensongers envers le Venezuela dans les médias étasuniens, qui dressent un portrait exagérément pessimiste de la situation actuelle dans ce pays et qui dépeignent le gouvernement comme étant incompétent, dictatorial et criminel. Bien que ce genre de campagne médiatique coordonnée contre le Venezuela ne soit pas nouveau - les médias ont sans arrêt dépeint l'ancien président du Venezuela, Hugo Chavez, qui avait été élu président quatre fois avec des majorités sans équivoque, comme étant un dictateur tyrannique qui ne voulait que la destruction de son pays - il est clair que cette campagne s'intensifie à une vitesse accrue et inquiétante.

Le New York Times ne donne pas sa place lorsqu'il s'agit du Venezuela. Son comité de rédaction avait applaudi sans retenue le violent coup d'État d'avril 2002 qui avait évincé le président Chavez et mené à la mort de plus de 100 civils. Lorsque Chavez fut retourné au pouvoir deux jours plus tard grâce à ses millions de supporters et à la loyauté de ses Forces armées, le Times n'a pas réparé son erreur, mais a plutôt en toute arrogance imploré Chavez de « gouverner de façon responsable », l'accusant lui-même d'avoir provoqué le coup. Mais maintenant que le Times mène une campagne directe et persistante contre le gouvernement vénézuélien par le biais d'articles biaisés, mensongers et nettement agressifs - éditoriaux, blogues, opinions et nouvelles - il est clair que le Venezuela est plus que jamais dans la mire de Washington qui cherche à précipiter un changement de régime.

Le fait que Leamsy Salazar soit arrivé à Washington en tant que présumé collaborateur de la DEA bénéficiant d'une grande visibilité publique ne relève pas du pur hasard. Février cette année est le premier anniversaire des violentes manifestations antigouvernementales dont l'objectif était de forcer la démission du président Maduro. Certains groupes d'opposition saisissent l'occasion pour tenter à nouveau de provoquer l'instabilité sociale. Les dirigeants de ce mouvement d'opposition, Leopoldo Lopez et Maria Corina Machado, ont tous les deux été encensés par le New York Times et par d'autres réseaux médiatiques « respectés » comme des « combattants de la liberté », de « vrais démocrates », le Times disant de Machado qu'il est « un adversaire inspirant ». Même le président Obama a demandé que Lopez soit libéré de prison (il est détenu et subit son procès pour son rôle dans les soulèvements violents) pendant un discours donné en septembre dernier lors d'un événement des Nations unies. Ces voix influentes omettent de mentionner l'implication de Lopez et de Machado et leur rôle de leadership dans des actes violents, antidémocratiques, voire même criminels. Les deux ont été impliqués dans le coup d'État de 2002 contre Chavez. Les deux ont reçu du financement étranger illégal pour leurs activités politiques destinées à renverser leur gouvernement, et les deux étaient à la tête des manifestations violentes contre Maduro l'an dernier, exigeant publiquement, par des recours illégaux, que celui-ci se retire.

Le fait de se servir d'une personnalité comme Salazar qui est connu par tous comme étant un proche de Chavez, un de ses gardes loyaux, est une vieille tactique des agences de renseignement qui n'a rien perdu de son efficacité. Un tel individu devient un facteur puissant permettant de discréditer et d'attaquer le gouvernement en place. Infiltrer, recruter et neutraliser l'adversaire de l'intérieur ou par le biais d'un proche est une tactique de trahison qui déstabilise et qui ne peut que provoquer la méfiance et la peur dans les rangs de ceux qui la subissent . Bien qu'aucune preuve n'ait été mise de l'avant pour endosser les accusations à l'emporte-pièce de Salazar contre Diosdado Cabello, les grands titres ont tout ce qu'il faut de sensationnalisme pour porter de nouveaux coups contre le Venezuela dans l'opinion publique. Ils ont aussi créé tout un remous au sein de l'armée vénézuélienne et pourraient encourager de nouvelles trahisons parmi des officiers qui appuieraient un coup contre le gouvernement. Les allégations non fondées de Salazar visent aussi à neutraliser l'une des personnalités politiques les plus puissantes du Venezuela, et à créer des divisions internes, ainsi que de l'intrigue et de la méfiance.

Les tactiques les plus efficaces utilisées par le FBI contre le parti des Black Panthers et d'autres mouvements radicaux prônant le changement aux États-Unis ont été l'infiltration, la coercition et la guérilla psychologique. En implantant ou en y recrutant à l'interne des agents à même ces organisations, agents ayant réussi à s'infiltrer et à gagner la confiance des instances supérieures, le FBI a été en mesure de détruire ces mouvements de l'intérieur, les brisant psychologiquement et les neutralisant politiquement. Ces tactiques et stratégies clandestines sont présentées en long et en large dans des documents du gouvernement étasunien et du FBI obtenus par le biais de la Loi sur l'accès à l'information et publiés dans l'excellent livre de Ward Churchill et Jim Wander, « Les agents de la répression : la guerre secrète du FBI contre le parti des Black Panthers et le mouvement amérindien », (South End Press, 1990).


Les missions sociales de renom mondial du Venezuela assurent le bien-être du peuple, y compris sa participation à la vie sociale et politique du pays.

En ce moment, le Venezuela souffre grandement des chutes soudaines et dramatiques des prix du pétrole. L'économie du pays, qui repose précisément sur le pétrole, en est affectée et le gouvernement prend des mesures pour réorganiser le budget et garantir l'accès aux services et aux produits de base. Ces mesures ne réussissent pas à complètement atténuer les difficultés vécues par le peuple. Mais contrairement au portrait pessimiste dressé par le New York Times, les Vénézuéliens ne meurent pas de faim, ils ne sont pas sans toit ni souffrent-ils de chômage massif comme c'est le cas en Grèce ou en Espagne à cause des politiques d'austérité. En dépit de certaines pénuries - dont certaines sont dues aux contrôles des devises et d'autres au stockage intentionnel, au sabotage et à la contrebande - 95 % des Vénézuéliens consomment trois repas par jour, ce qui représente le double de ce qui existait dans les années 90. Le taux de chômage est inférieur à 6 % et les logements sont subventionnés par l'État.

Néanmoins, le fait d'attaquer ainsi l'économie vénézuélienne est devenue une stratégie qui s'intensifie rapidement, exécutée par des intérêts étrangers et leurs homologues vénézuéliens, et cette stratégie est des plus efficace. À mesure que ces pénuries se multiplient et l'accès aux dollars devient de plus en plus difficile, le chaos et la panique deviennent plus palpables. Les agences des États-Unis et les forces antigouvernementales au Venezuela qui prônent un changement de régime se font du capital politique sur la base de ce mécontentement. Une stratégie presque identique avait été utilisée au Chili dans le but de renverser le président socialiste Salvador Allende. D'abord, on avait détruit l'économie, ce qui avait engendré un mécontentement massif. Puis l'armée est intervenue pour débarquer Allende, appuyée par Washington à chaque étape de l'opération, menant à la dictature brutale du général Augusto Pinochet qui a torturé, assassiné, fait disparaître et forcé à l'exil des dizaines de milliers de gens. Ce n'est surtout pas un modèle à reproduire.

Cette année, le président Obama a approuvé un financement spécial de 5 millions $ provenant du département d'État pour appuyer des groupes antigouvernementaux au Venezuela. Aussi, le National Endowment for Democracy, lui-même financé par le Congrès, subventionne des groupes d'opposition. Il leur donne 1,2 million $ et assiste leurs efforts visant à miner le gouvernement de Maduro. Il n'y a aucun doute que plusieurs autres millions sont versés par divers canaux moins connus pour mener à un changement de régime au Venezuela.

Le président Maduro a dénoncé ces attaques continues contre son gouvernement et en a appelé directement au président Obama de cesser d'attaquer le Venezuela. Récemment, les 33 pays latino-américains et antillais, membres de la Communauté d'États latino-américains et caraïbes (CELAC), ont exprimé leur appui à Maduro et condamné l'ingérence incessante des États-Unis dans les affaires du Venezuela. L'Amérique latine rejette fermement toute tentative de miner la démocratie dans la région et ne tolérera pas un autre coup fomenté par les États-Unis. Il est grand temps que Washington soit attentif aux préoccupations de l'hémisphère et arrête d'avoir recours aux vieilles tactiques usées contre ses voisins.

Eva Golinger est l'auteur du « Code Chavez ». On peut la contacter sur son blogue.[http ://www.chavezcode.com]

(Counterpunch, le 2 février 2015. Traduction : LML)

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Grèce

La Banque centrale européenne réagit
au rejet de l'austérité

La Grèce a averti qu'elle n'acceptera pas le chantage qui vise à l'obliger à renoncer à sa révision des accords sur la dette avec les créanciers de la troïka : la Banque centrale européenne (BCE), le Fonds monétaire international et l'Union européenne, rapporte l'agence TeleSUR.

« La BCE a décoché ses premières flèches [le 4 février] contre le nouveau gouvernement du Syriza lorsqu'elle a annoncé qu'elle n'acceptera plus d'obligations de la Grèce comme garanties de prêts aux banques commerciales.

« Cette décision forcera la banque centrale grecque à renflouer les banques commerciales à l'aide de ses réserves d'urgence avant le 1er février [date d'entrée en vigueur de la décision de la BCE], écrit TeleSUR. Jusqu'à présent, des dizaines de milliards en obligations du gouvernement et en obligations de banques garanties par le gouvernement ont servi de garanties de prêt de la BCE.

Selon Gary Jenkins de LNG Capital, une firme de gestion d'actifs de Londres, la décision de la BCE est un avertissement à prendre au sérieux. « Il est difficile de voir cette décision comme autre chose qu'un geste agressif de la part de la BCE, a-t-il dit au quotidien britannique The Guardian. Il n'était pas nécessaire de le faire maintenant et de maintenant prétendre suivre les règles alors qu'elle les a souvent amendées en temps de crise, comme l'a fait l'ensemble de l'Eurozone. »

Le représentant du gouvernement grec Gavriil Sakellaridis a répondu à l'annonce de la BCE en disant qu'Athènes « ne se soumettra pas au chantage » et poursuivra la révision globale des mesures d'austérité très impopulaires.

Sakellaridis a assuré le public que le système bancaire grec demeure stable malgré la chute de 9 % de l'indice du marché boursier grec.

Le ministre des Finances Yanis Varoufakis s'est engagé à revoir les accords sur la dette avec la troïka.

La Grèce ne se sortira jamais du trou de la dette sans pouvoir accroître sa productivité, a-t-il dit. Elle a besoin d'un « sevrage » et « nous avons été élus pour mettre fin à l'accoutumance ».

(TeleSUR, The Guardian)

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Enquête sur la responsabilité d'Israël dans les crimes commis à Gaza

Nouvelle tentative de faire dérailler
la Commission d'enquête


Le 3 février, William Schabas a démissionné de son poste de chef de la Commission d'enquête indépendante des Nations unies sur le conflit de Gaza de 2014. En août 2014, Schabas, un universitaire canadien, avait été nommé par le président du Conseil des droits de l'homme de l'ONU pour diriger un groupe de trois membres devant examiner les allégations de crimes de guerre commis par Israël lors de son offensive à Gaza. L'enquête a été lancée en grande partie à la lumière des tueries de masse de civils menées par la puissance d'occupation, tueries pour lesquelles les peuples du monde exigent qu'Israël rende des comptes.

Dans une lettre adressée au Conseil, Schabas a dit qu'il allait se retirer immédiatement de la Commission d'enquête afin d'empêcher que les accusations d'Israël contre lui ne nuisent au travail de la commission. Dans sa lettre de démission, Schabas reconnaît qu'en 2012 il avait reçu 1 300 $ pour une opinion juridique qu'il avait émise pour l'Organisation de libération de la Palestine, ajoutant qu'il s'agissait d'une pièce de nature « juridique et technique » provenant d'un travail universitaire publié précédemment. Il a défendu son bilan et nié les accusations de partisanerie portées contre lui, disant qu'en tant qu'universitaire travaillant dans le domaine des droits humains internationaux, il avait eu à « condamner fréquemment ceux qui transgressent ces droits ».

« Ce travail à la défense des droits humains semble avoir fait de moi la cible préférée d'attaques malicieuses », a dit Schabas, ajoutant que s'il démissionnait, c'était afin d'éviter que la chose ne devienne source de distraction alors que la commission a franchi « l'étape décisive » de son travail en préparant son rapport et ses constatations. Ceux-ci doivent être présentés à la prochaine session du Conseil des droits de l'homme le 23 mars.

Le 3 février, le Conseil a publié un communiqué de presse accusant réception de la lettre de démission de Schabas. On y lit :

« Cette lettre fait suite à celle qu'a fait parvenir la Mission permanente d'Israël au président du Conseil, Joachim Ruecker, le vendredi 30 janvier, demandant la démission du professeur Schabas de la Commission d'enquête suite à ce qu'elle interprète comme étant un conflit d'intérêt.

« Le président a accepté la démission du professeur Schabas et lui fait part de sa reconnaissance pour son travail au cours des six dernières semaines en tant que président de la Commission. Le président respecte la décision du professeur Schabas et apprécie le fait qu'ainsi l'apparence de conflit d'intérêt sera écartée, préservant ainsi l'intégrité du processus.

« La Commission est maintenant dans la dernière phase de sa cueillette de preuves recueillies auprès du plus grand nombre possible de victimes et de témoins provenant des deux côtés.[...]

« Le président est présentement en discussion avec les deux membres restants de la Commission d'enquête afin de décider de la nomination d'un nouveau président.

« L'ambassadeur Ruecker souligne la nécessité de continuer de se concentrer sur le travail substantiel de la Commission dans le meilleur intérêt des victimes et de leurs familles des deux côtés. »

La démission de Schabas a immédiatement servi de munition aux sionistes pour tenter de saboter l'enquête, le premier ministre Benjamin Netanyahu exigeant de l'ONU qu'elle y mette fin. Netanyahu prétend que le conseil est « une instance anti-Israël qui n'a rien à voir avec les droits humains ». Selon lui, le conseil devrait être « relégué aux oubliettes ».

Il a réitéré la position d'Israël à l'effet que sa brutale tuerie de masse de près de 2 200 Gazaouis, dont des centaines d'enfants, ne constitue pas un crime de guerre mais un acte d'autodéfense provoqué par des tirs de roquettes atteignant le sud d'Israël et tuant six civils israéliens. Netanyahu prétend que les tueries de masse par Israël de civils ont été menées « conformément aux lois internationales ».

Cette déclaration de Netanyahu ne tient pas compte du fait que les actions d'Israël ont été vues par les peuples du monde, y compris les Israéliens eux-mêmes. Le 28 janvier, le Centre d'information d'Israël pour les droits humains dans les territoires occupés (B'Tselem), a publié un rapport de 49 pages intitulé « Drapeau noir » dans lequel il accuse le gouvernement israélien d'avoir eu recours à une politique délibérée de frappes aériennes contre des édifices résidentiels pendant la guerre à Gaza, violant les règles de la guerre. Dans la conclusion du rapport, B'Tselem affirme : « Ce qui est clair, c'est que la politique décrite dans ce rapport - le fait d'attaquer des maisons par frappes aériennes et terrestres, menant à leur effondrement alors que les résidents se trouvaient toujours à l'intérieur - n'est pas une riposte légitime aux défis posés par la lutte contre Hamas. Même si les dirigeants politiques et militaires pensaient que cette politique allait mettre fin aux attaques contre les communautés israéliennes, ils n'auraient pas dû aller de l'avant ne serait-ce que pour les horribles conséquences à prévoir mais aussi parce que ces attaques ont été menées sous le drapeau noir de l'illégalité. »

(Sources : Guardian, Xinhua, B'Tselem)

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L'attaque israélienne contre Gaza était
du «terrorisme d'État sur une vaste échelle»

Richard Falk, l'ancien Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967, s'est entretenu avec Electronic Intifada à Berkely en Californie sur les attaques d'Israël contre Gaza l'été dernier, qu'il qualifie de « forme de terrorisme sur une vaste échelle contre toute la population de Gaza ». Il a dit que leur impact a été tout à fait « catastrophique ». Il a aussi donné son analyse de la lutte de libération des Palestiniens.

Falk est l'auteur du livre publié récemment « Palestine : The Legitimacy of Hope » (Palestine : la légitimité de l'espoir). Voici le texte de son entrevue.

Nora Barrows-Friedman : Commençons par Gaza. La reconstruction doit toujours débuter, des dizaines de milliers de gens s'abritent du mieux qu'ils peuvent lors de ces rudes mois d'hiver et l'infrastructure a toujours besoin de reconstruction à la base. Lors de l'opération Plomb durci en 2008-09, vous avez appelé la fermeture des points de sortie autour de Gaza « une nouvelle sorte de crimes de guerre », alors que les gens étaient incapables de fuir la violence utilisée par Israël, ce qui s'est répété durant l'été.

Donnez-nous votre évaluation, en votre qualité de spécialiste et analyste de longue date sur la Palestine, de ce que nous avons vu en été et ce que nous voyons maintenant.

Richard Falk : Bien, je pense que ce que nous voyons maintenant est une crise humanitaire de la plus grande envergure, ce qui est pire que les crises humanitaires normales parce qu'elle survient après cette attaque catastrophique en été, que je vois comme une forme de terrorisme sur une vaste échelle dirigé contre toute la population de Gaza.

On ne devrait pas mesurer les pertes humaines seulement en nombre de personnes tuées et blessées ; toute la population était ciblée par cette guerre terroriste. Et de ce que j'ai entendu, il y a 425 000 enfants à Gaza qui ont besoin de traitement pour stress sévère. Donc, il faut saisir l'ampleur de cet événement qui doit vraiment être vu, à mon avis, comme une atrocité de très haut niveau.

NBF : Notre contributeur, Patrick O. Strickland, rapportait que « Durant et après l'offensive militaire, Israël et l'Égypte ont refusé l'accès à Gaza à des groupes des droits humains, incluant Amnistie internationale et Human Rights Watch, ainsi qu'aux enquêteurs de l'ONU », incluant aussi votre successeur à l'ONU, pour y mener une recherche sur des crimes de guerre probables. Qu'est-ce qui peut être fait pour demander des comptes à Israël s'il refuse d'agir de manière transparente ?

RF : Bien sûr c'est compréhensible du point de vue d'Israël qu'il veuille supprimer cette histoire autant qu'il le peut. Le Conseil des droits de l'homme a nommé une commission d'enquête dirigée par William Schabas, un professeur respecté de droit criminel international. Il n'est pas clair encore s'ils vont suivre la même voie que le rapport Goldstone a suivie en 2009 mais c'est une commission de haute qualité, et la preuve semble écrasante que nous faisons face à la perpétration de crimes de guerre massifs.

Alors on peut espérer qu'il produira un rapport qui va faire autorité et être accepté, bien qu'il sera probablement bloqué par les États-Unis qui vont utiliser ce que j'appelle leur veto géopolitique, lequel d'une certaine façon est plus sinistre que le veto constitutionnel parce qu'utilisé derrière des portes fermées, sans reconnaissance, sans débat, empêchant ainsi l'ONU de donner suite à sa prise de position symbolique à l'effet que l'action d'Israël n'est pas légitime.

NBF : Pendant ce temps, la société civile internationale va de l'avant, surtout depuis les attaques de cet été, avec ses campagnes de boycott, de désinvestissement et de sanctions sur les campus des collèges ou dans des communautés locales. Pouvez-vous parler du rôle que la société civile joue, alors que les organisations internationales incluant l'ONU continuent d'être incapables de rendre Israël redevable de ses actions ?

RF : Je crois que la croissance du rôle de la société civile est une combinaison de l'indignation face aux expériences qui ont été associées aux attaques contre Gaza et du discrédit de l'approche diplomatique d'Oslo, de l'effondrement des pourparlers de Kerry, du sentiment qu'Israël a gagné alors que la Palestine a perdu à cause de ce report perpétuel de tout type de développements significatifs. Les colonisations ont augmenté, le mur de séparation a été construit, les routes réservées aux colons ont été construites. C'est une sorte d'accaparement de la terre facilitée par un processus diplomatique qui a exclu des négociations la pertinence du droit international.

Alors, dans le cadre du discrédit de la diplomatie, le recours à la non-violence par les Palestiniens et la croissance du mouvement mondial de la société civile sont une nouvelle réalité, je pense, dans la lutte palestinienne. Et son expansion est impressionnante, en particulier en Europe mais également en Amérique. Et je pense que l'espoir que les Palestiniens ont en ce moment est très lié au changement de direction à Ramallah vers ceux qui représentent les Palestiniens dans la société civile.

NBF : Richard, parlez-nous de votre livre, « Palestine : The Legitimacy of Hope » (Palestine : la légitimité de l'espoir), de quoi il traite et de ce qui vous a poussé à l'écrire en ce moment.

RF : Eh bien, il représente ma pensée au sujet du conflit depuis ces six dernières années, partiellement l'expérience que j'ai eue à l'ONU et partiellement en tant que quelqu'un qui tentait de commenter sur les développements avec un blogue que j'ai maintenu avec une certaine consistance. Le véritable sujet du livre c'est le tournant, non reconnu, vers la non-violence de la part des Palestiniens, incluant le Hamas, et une sorte d'enquête sur pourquoi les médias n'ont pas réussi à prendre note de ce changement et sur certaines des initiatives courageuses qu'ont prises les Palestiniens, des grèves de la faim notamment et d'autres formes de résistance non violente.

C'est, je pense, une très importante progression dans la lutte palestinienne, qui a commencé dans sa phase préliminaire par la dépendance aux voisins arabes pour libérer la Palestine, puis s'est tournée pendant une période vers la lutte armée. Entre ces deux phases, il y a eu la dépendance envers l'ONU et la communauté internationale, parce qu'elles ont adopté ces résolutions qui confirmaient la légitimité des doléances palestiniennes mais qui n'ont rien donné. Puis est venue la diplomatie et maintenant cette nouvelle phase qui, dans mes rêves les plus fous, deviendra éventuellement ce que j'appelle une Intifada mondiale.

NBF : Dites-nous en un peu plus, à quoi cela va-t-il ressembler ?

RF : Cela ressemblerait vraiment à une intensification dramatique de ce qui se passe déjà , mais le climat qui serait créé c'est que la mobilisation populaire a créé une réalité nouvelle qui a forcé la direction israélienne à réévaluer ses propres intérêts, ce qui je pense s'est passé en Afrique du sud. Ce n'était pas une transformation morale soudaine au sein de cette direction raciste, mais le sentiment que ce serait mieux pour eux d'en arriver à un accord avec l'opposition et de permettre qu'émerge une démocratie constitutionnelle multiraciale que de maintenir la structure d'apartheid.

Israël, en un sens, a un chemin plus aisé devant lui, parce que l'élite blanche en Afrique du sud faisait face à un contre cinq à la majorité africaine. Israël serait probablement près de la parité en terme de population, et parce qu'il a un tel contrôle sur l'économie et l'infrastructure diplomatique de la politique mondiale, le danger, pour les Palestiniens, serait que cette transformation reproduise sous une autre forme la domination israélienne actuelle.

J'utilise le mot « espoir » et le discours de l'espoir parce que la situation est incertaine en ce qui concerne la possibilité dans l'avenir de créer les fondements moraux et politiques de l'engagement dans la lutte. C'est cela qu'on pourrait accomplir en ce moment, et être optimiste quant aux perspectives de la lutte palestinienne c'est prétendre avoir une connaissance que nous ne pouvons pas avoir.

Ce que nous pouvons dire c'est que dans la plupart des cas, les luttes qui ont été menées depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale ont été gagnées, en dernière analyse, par la partie qui contrôle l'argument moral et légal et non celle qui a la meilleure capacité militaire. Toutes les guerres anticoloniales ont été gagnées par la partie la plus faible du point de vue militaire. Et les États-Unis auraient dû apprendre cette leçon du Vietnam, où ils dominaient complètement les dimensions militaires du conflit et ont quand même perdu la guerre. Les Afghans disent « Vous avez les montres, nous avons le temps », ce qui est une façon d'exprimer la persévérance d'un peuple qui se bat et a tout à perdre en abandonnant, tandis que la partie opposée, la partie dominante ou oppressive, a beaucoup à gagner en faisant un compromis.

Si vous analysez les choses de cette façon, il y a je pense une solide raison d'avoir suffisamment d'espoir pour rester impliqué dans la lutte.

(Electronic Intifada. Traduction : LML)

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