Notre sécurité est dans la lutte pour les droits de tous

Une coalition de groupes d'aides familiales migrantes et d'alliés poursuit sa campagne pour la résidence permanente immédiate

Une coalition de groupes d'aides familiales migrantes et d'alliés et la campagne « La résidence permanente maintenant » ont émis un communiqué de presse conjoint le 25 février en réponse aux nouveaux projets pilotes que le gouvernement fédéral a annoncés deux jours plus tôt.[1] Le communiqué mentionne que les projets annoncés par le gouvernement sont une réponse directe à la vigoureuse campagne qui demande la résidence permanente immédiate pour toutes les aides familiales migrantes (www.LandedStatusNow.ca).

On lit dans le communiqué que le gouvernement a répondu à la campagne et fait certaines concessions mais a laissé de côté des questions importantes. Le communiqué mentionne que l'annonce du gouvernement s'applique aux travailleuses du Québec qui font face à l'exploitation et au déni de leurs droits.

Par leur campagne « La résidence permanente maintenant », les aides familiales ont parlé avec fierté du travail essentiel qu'elles accomplissent, dont la société a besoin pour pouvoir fonctionner. Elles parlent avec amour social des enfants, des aînés fragiles et des personnes ayant des besoins spéciaux dont elles prennent soin. Elles parlent aussi de la douleur qu'elles éprouvent à quitter leurs familles et de leurs conditions de travail précaires à cause du caractère antisocial du système d'immigration et des lois du travail.

Le communiqué mentionne que le gouvernement a fait quelques concessions en réponse à la campagne pour les droits des aides familiales. Celles-ci vont maintenant avoir le droit d'amener leur famille avec elles au Canada ; les permis de travail à occupation spécifique ne seront plus liés à un employeur unique et une fenêtre de trois mois est ouverte pour les aides qui sont venues au Canada en vertu du projet pilote de 2014 qui leur permettra de demander la résidence permanente sous des conditions modifiées.

Cependant, le gouvernement n'a pas satisfait la revendication la plus importante des aides familiales et des autres travailleurs migrants, soit la résidence permanente immédiate. Le statut temporaire et sans droits garantis des aides familiales les rend vulnérables aux abus et à la surexploitation. Il faut que cela cesse !

Projets pilotes sur le soin des enfants et des personnes ayant des besoins médicaux élevés

La séparation forcée des familles des aides familiales est une honte pour le Canada, une forme barbare de servitude. La majorité des aides familiales sont des femmes ; elles viennent au Canada pour s'occuper des enfants et des aînés fragiles et elles doivent laisser leurs familles derrière elles. Cela doit cesser.

Cette photo parue dans les médias sociaux le Jour de la Famille concerne la séparation forcée des aides de leur famille.

Le gouvernement a promis que le nouveau programme mettra fin à la séparation des familles et permettra aux aides familiales d'amener leur famille avec elles. Leurs conjoints vont recevoir des permis de travail ouverts et leurs enfants des permis d'étudier. Ces changements restent cependant des énoncés de politique et des ordonnances ministérielles non spécifiques et ne sont pas des mesures concrètes qui garantissent les droits des aides familiales.

La Coalition des aides familiales migrantes fait remarquer que le gouvernement doit faire ces changements en pratique pour tous. Si les enfants vont recevoir des « permis d'étudier », est-ce que cela veut dire qu'ils deviendront des « étudiants internationaux » devant payer des frais de scolarité exorbitants ? Les aides familiales s'occupent des personnes ayant des handicaps et des besoins médicaux élevés mais elles ne peuvent pas amener leur famille entière si un de ses membres souffre d'un handicap. Cela est inacceptable et doit cesser.

En plus, de nombreuses aides familiales devront tout de même laisser leurs enfants derrière elles à cause du statut temporaire de leur travail, de l'inégalité salariale entre les hommes et les femmes et des bas salaires reliés aux emplois traditionnellement féminins qui ne leur permettent pas de faire face au coût de la vie au Canada.

Pour mettre fin à l'impact de la séparation des familles, il faut aussi que les gouvernements provinciaux appliquent leurs propres lois. En dépit des lois qui disent que les heures commencent à être payées en temps supplémentaires après 40 heures, de nombreuses aides familiales doivent vivre près de la résidence de leur employeur à cause de leur bas salaire et doivent travailler de longues heures, sans congés et sans paie de temps supplémentaire.

Les aides familiales posséderont maintenant un permis de travail à occupation spécifique plutôt qu'un permis lié à un employeur unique. C'est une réalisation positive de la lutte que les aides familiales mènent depuis des années. Les permis de travail liés à un employeur unique rendent les travailleurs migrants très vulnérables aux mauvais traitements et ont été utilisés par nombre d'employeurs pour retenir le salaire et les avantages sociaux auxquels ils avaient droit en vertu des contrats et des normes du travail et les forcer à travailler de longues heures sans salaire.

En vertu des nouveaux projets pilotes, la demande des travailleuses pour la résidence permanente va être examinée avant qu'elles commencent à travailler au Canada. Une fois qu'elles obtiennent leur permis de travail et ont travaillé deux ans, elles peuvent faire une demande de résidence permanente. Par contre, l'exigence d'une éducation équivalente à une année d'étude postsecondaire au Canada et d'une meilleure connaissance de l'anglais introduite en 2014 n'a pas été abandonnée.

Voie d'accès provisoire pour les aides familiales

Le ministre fédéral Ahmed Hussein a annoncé qu'une Voie d'accès provisoire pour les aides familiales sera ouverte du 4 mars au 4 juin 2019. Plusieurs aides familiales qui sont venues au Canada après 2014 ont réalisé qu'après avoir complété 24 mois de travail, elles ne pouvaient toujours pas demander la résidence permanente parce qu'elles ne possédaient pas les équivalences en maîtrise de l'anglais et en éducation. Plusieurs d'entre elles ont accumulé de lourdes dettes pour payer les trafiquants d'êtres humains déguisés en « consultants en immigration » et en « recruteurs ». Ces trafiquants d'êtres humains extorquent de grandes sommes d'argent au nom de trouver des emplois au Canada puis laissent de nombreuses travailleuses sans espoir de devenir résidentes permanentes et citoyennes canadiennes.

Le gouvernement Trudeau dit comprendre la situation des aides familiales et qu'il examinera la situation vécue par les aides qui sont venues au Canada après 2014 sous les anciens critères. Pendant cette fenêtre de trois mois qui s'ouvre cette année, les travailleuses peuvent demander la résidence permanente après 12 mois de travail au lieu de 24 et une éducation postsecondaire ne sera pas requise. Le gouvernement s'est aussi engagé à accélérer le traitement à l'intérieur de cette petite fenêtre de trois mois. Les organisations des travailleurs migrants font remarquer que de nombreuses aides familiales pourraient bien ne pas savoir que cette fenêtre existe avant qu'elle soit fermée. En plus, les travailleuses qui sont devenues sans papier ne peuvent l'utiliser. Ces choses doivent être corrigées immédiatement et le droit à la résidence permanente accordé à tous les travailleurs migrants vivant et travaillant au Canada en ce moment.

Le gouvernement n'a rien fait pour faire cesser l'extorsion des travailleurs par les trafiquants d'êtres humains, que ce soit au Canada ou à l'étranger. Aucune autorité publique n'a été établie afin de remplacer ces trafiquants pour que les droits des migrants soient respectés pendant le processus de recrutement et après qu'ils soient acceptés, ou pour fournir une compensation aux pays qui ont formé leurs résidents pour qu'ils deviennent des travailleurs productifs.

En plus, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada n'acceptera qu'un maximum de 2 750 demanderesses principales (le chiffre ne comprend pas les membres des familles) par année en vertu des projets pilotes pour les gardiennes d'enfants et les aides de maintien à domicile. Cette réduction des demandes a été introduite en dépit de la demande croissante de travailleurs dans le programme pour les personnes à besoins médicaux élevés et pour un programme national de garderies pour les enfants et pour un programme de soins public, moderne et humain pour les aînés.

Le statut de résidence permanente tout de suite !

Le ministre Hussein parle des nouveaux projets pilotes comme s'il s'agissait de « projets d'immigration » alors que ce n'est pas le cas. La bataille de plusieurs décennies pour obtenir le statut de résidence permanente à l'arrivée pour tous les travailleurs migrants ne peut être éclipsée en parlant de « projet d'immigration ». La voie vers la garantie des droits pour tous est toujours semée d'obstacles et de dangers. Les travailleurs sociaux et d'autres personnes ne sont pas des travailleurs temporaires et leur statut ne devrait pas non plus être temporaire.

Le gouvernement prétend comprendre l'importance de la résidence permanente. En annonçant sa politique publique de voie provisoire aux aides familiales, le gouvernement a déclaré : « Le ministère a également appris que les aides familiaux migrants font face à des obstacles spécifiques que leur statut temporaire ne fait qu'exacerber. Par exemple, la nature sexospécifique et isolée de la profession d'aide familial, les nombreux cas d'ententes de travail de « résidence chez l'employeur » malgré le retrait de l'exigence officielle à cet égard en 2014, et la dépendance des aides familiaux envers leur employeur pour obtenir et fournir la preuve d'expérience de travail au Canada dont ils ont besoin pour être admissibles à la résidence permanente.... [En 2014] les critères du programme ont été modifiés de manière à ce qu'ils concordent davantage avec l'approche du gouvernement consistant à sélectionner les immigrants économiques en fonction de leur capacité de réussir leur établissement économique au Canada. »

Ces programmes et énoncés politiques ont été mis en place par arrêté ministériel et sont même appelés projets pilotes temporaires. Ce ministre ou un autre ministre peut les changer d'un trait de plume ou les laisser arriver à échéance. C'est ce que l'on appelle la « primauté du droit » et ce que l'élite dirigeante considère comme « légal » et même « constitutionnel ». De cette manière, le gouvernement facilite la traite des êtres humains et le déni de droits à grande échelle.

Nos félicitations vont aux travailleurs sociaux, à leurs organisations et à tous ceux qui ont fermement défendu les droits de tous et toutes. Par leur courage de parler et de s'organiser malgré leur situation précaire, ils ont obligé le gouvernement à faire certaines concessions. Cette situation requiert que les travailleurs et leurs alliés apportent leur soutien entier à la poursuite de la lutte pour l'obtention du statut de résident permanent maintenant !

Note

1. Le 23 février, le ministre d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC), Ahmed Hussein, a annoncé la création de deux nouveaux projets pilotes quinquennaux visant à remplacer le Programme des soins aux personnes ayant des besoins médicaux élevés. Les projets initiaux ont été introduits en 2014 et se terminent en novembre 2019. Le ministre Hussein a annoncé les nouveaux projets en tant que « programmes pilotes d'immigration » qui « permettront aux aides familiaux de venir au Canada avec leur famille et leur offriront une voie d'accès vers la résidence permanente ».


Cet article est paru dans

Numéro 8 - 7 mars, 2019

Lien de l'article:
Notre sécurité est dans la lutte pour les droits de tous: Une coalition de groupes d'aides familiales migrantes et d'alliés poursuit sa campagne pour la résidence permanente immédiate - Peggy Morton


    

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