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21 décembre 2017

Pour affirmer leurs droits, les travailleurs ont besoin du
pouvoir collectif de priver du ceux qui les privent de leurs droits de leur pouvoir de le faire

Les employeurs et leur État privent
les travailleurs de la construction
de leurs droits

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Pour affirmer leurs droits, les travailleurs ont besoin du pouvoir collectif de priver ceux qui les privent de leurs droits du pouvoir de le faire
Les employeurs et leur État privent les travailleurs de la construction
de leurs droits

Les travailleurs de la construction luttent pour des conditions saines et sécuritaires - Entrevue avec Simon Lévesque, responsable du dossier santé et sécurité de la FTQ-Construction

Les travailleurs maritimes se mobilisent contre la Loi sur le précontrôle antinationale du gouvernement Trudeau
« Nous allons maintenant lutter contre cette loi par le biais des règlements »
- Entrevue avec Rob Ashton, président du Syndicat international des débardeurs et magasiniers (SIDM) - Canada

Les soins de santé sont un droit!
Les paramédics de l'Ontario soulèvent des préoccupations face aux changements à la Loi sur les ambulances 
- Entrevue avec Jason Fraser, président du Comité des travailleurs ambulanciers de l'Ontario du Syndicat canadien de la fonction publique 

À nos lecteurs



Pour affirmer leurs droits, les travailleurs ont besoin du
pouvoir collectif de priver ceux qui les privent de leurs droits
du pouvoir de le faire

Les employeurs et leur État privent les travailleurs
de la construction de leurs droits

Les travailleurs de la construction sont très vulnérables face aux violations et à la négation de leurs droits. En plus du manque général de contrôle auquel tous les travailleurs font face à leurs endroits de travail, l'emploi dans la construction est instable car il se termine lorsqu'un projet particulier est complété. Selon les statistiques et les faits mêmes de la vie, le travail dans la construction est une occupation très dangereuse où les blessures et les décès par accidents et maladies professionnelles sont chose commune.

En fait, les travailleurs de la construction mènent une lutte constante pour humaniser leurs chantiers et cette lutte requiert que le facteur humain/conscience sociale soit constamment mis de l'avant et placé aux postes de commandes. Comment cela peut-il être réalisé alors que les travailleurs sont dans une position de subordination face à leurs employeurs dans les conditions qui prévalent présentement et qui reposent sur le pouvoir de l'argent et où l'État intervient régulièrement pour criminaliser la lutte des travailleurs à la défense de leurs droits ? La réponse se trouve dans le pouvoir collectif des travailleurs de priver ceux qui les privent de leurs droits du pouvoir qu'ils ont de le faire.

Selon les employeurs et l'État, ce qui est le plus important c'est que le projet soit complété avec succès et non que le facteur humain s'affirme. Selon eux, le facteur humain doit subordonner ses droits au succès du projet, ce qui veut dire qu'on doit limiter les droits des travailleurs de la construction et leur conscience sociale. Les employeurs et leur État affirment que le travail et la valeur que les travailleurs créent à la fois pour les employeurs et pour les travailleurs de la construction peuvent seulement être déployés si tout le pouvoir décisionnel est subordonné aux demandes et à la conscience antisociale de l'employeur de finir le projet le plus vite possible et avec le moins d'investissement possible dans le bien-être et la sécurité des travailleurs. La vision du monde antisociale des employeurs et de leur État est irrationnelle et désespérée et en contradiction avec les conditions sociales modernes où les droits doivent être affirmés et non niés et où le facteur humain/conscience sociale doit être aux commandes en toutes circonstances.

Afin de réaliser leur objectif de déshumaniser l'endroit de travail et d'exercer un contrôle absolu comme l'ont fait dans le passé les seigneurs féodaux, les employeurs et leur État ont recours à la force et à la criminalisation organisée par l'État de la conscience et de la parole des travailleurs de même que de leurs collectifs. Ils essaient de priver les travailleurs de leur droit de prendre et mettre en pratique collectivement des décisions qui sont basées sur les conditions concrètes du chantier de construction afin de garantir un environnement sécuritaire et de satisfaire les besoins et les réclamations des travailleurs à ce qui leur appartient de droit, en tant que producteurs véritables de la valeur que les employeurs convoitent.

Dans le monde moderne d'aujourd'hui, les gens ont des droits parce qu'ils sont des êtres humains. Les droits des travailleurs de la construction et de tous les travailleurs ne peuvent pas être niés ou restreints de quelque façon que ce soit. Lorsque les travailleurs affirment leurs droits, les transformations se produisent qui humanisent l'environnement naturel et social, y compris l'endroit de travail lui-même. Toute force sociale, comme les employeurs et leur État, qui prive les travailleurs de leurs droits par sa façon d'agir, n'est pas apte à gouverner, que ce soit à l'endroit de travail ou au gouvernement. La classe ouvrière doit développer et gagner le pouvoir collectif de priver ceux qui cherchent à priver les travailleurs de leurs droits de leur pouvoir de le faire, comme les peuples dans le passé ont développé et gagné le pouvoir de priver les seigneurs médiévaux de leur pouvoir de priver.

En renforçant leurs collectifs et en affirmant leurs droits par des actions avec analyse, les travailleurs de la construction et les travailleurs dans leur ensemble vont humaniser leurs endroits de travail et tout l'environnement politique, social et naturel. Par leur force collective, leurs actions et leur vision du monde moderne qui placent le facteur humain/conscience sociale aux postes de commandes, ils vont développer et gagner le pouvoir de priver les forces sociales qui cherchent à priver les gens de leurs droits du pouvoir de le faire.

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Les travailleurs de la construction luttent pour des conditions saines et sécuritaires


Manifestation des travailleurs de la construction en grève au Québec le 24 mai 2017

Les travailleurs de la construction du Québec intensifient leur lutte à la défense de leurs droits, dont le droit de travailler dans des conditions saines et sécuritaires. Les travailleurs de la construction forment 5 % de la main-d'oeuvre au Québec et subissent 25 % des décès qui sont officiellement reconnus comme étant liés au travail. Un mégachantier comme celui du barrage hydro-électrique La Romaine d'Hydro-Québec sur la Côte-Nord a connu quatre décès depuis le début des travaux en 2009. Les travailleurs blâment les méthodes de travail qui sont utilisées et surtout le fait que la voix et l'expertise des travailleurs ne sont pas écoutées lorsqu'ils soulèvent l'existence de dangers et font valoir l'importance de la prévention sur les chantiers.

Forum ouvrier s'est entretenu récemment avec Simon Lévesque, le responsable du dossier santé et sécurité de la FTQ-Construction, sur la situation que vivent les travailleurs de la construction et le travail que fait le syndicat pour défendre leurs droits.

***

Forum ouvrier : Quel est le travail principal que le syndicat fait à l'heure actuelle pour transformer la situation en ce qui concerne la santé et la sécurité sur les chantiers de construction ?

Simon Lévesque : La question de la prévention, en particulier du représentant en prévention nommé et formé par les travailleurs, est au centre de notre intervention.

Quand la Loi sur la santé et la sécurité du travail a été adoptée, en 1979, les législateurs se sont donnés jusqu'en 1985 pour l'appliquer à tous les secteurs. Nous, au niveau de la construction, nous sommes considérés au premier rang du premier groupe prioritaire. Nous sommes le seul milieu de travail qui a des dispositions particulières dans la loi parce que nous travaillons dans le secteur le plus dangereux. Pourtant, toutes ces dispositions qui sont dans la loi à notre sujet et qu'ils s'étaient donné jusqu'en 1985 pour appliquer, n'ont jamais été mises en pratique.

Il n'y a jamais eu un politicien qui a eu le courage de nous donner les dispositions auxquelles on avait le droit, et, principalement, le représentant en prévention. Les autres groupes prioritaires l'ont eu, mais pas nous. Cette loi-là n'a jamais été fonctionnelle parce qu'on ne nous a pas accordé ses dispositions dont le représentant en prévention. On ne les a jamais eues.

On a réussi, depuis 2010, dans certains chantiers de grande importance, à avoir des représentants en prévention. On a obtenu notre première décision en 2010, pour le prolongement de l'autoroute 30, où nous avons obtenu notre premier représentant en prévention. Ensuite on en a eus avec le CSUM [Centre universitaire de la santé McGill].On a obtenu 5 représentants en prévention, parce que nous sommes 5 associations syndicales dans la construction. On en avait demandé 5 parce qu'on ne voulait pas de conflit ou de jalousie entre syndicats, on a laissé tomber la question de la représentativité, du nombre de membres de chaque syndicat. Les 5 représentants en prévention étaient dans le même bureau, ils travaillaient ensemble. On a démontré que c'est possible.

Cela a porté fruit parce que sur les autres grands chantiers de construction, on les demande maintenant, et on demande à la CNESST [Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail] de se prononcer si les grands employeurs refusent de nous les accorder. Quand on nous les refuse sur les chantiers de grande importance, on demande à la Commission de se prononcer en vertu de l'article 221 de la Loi. Selon cet article, sur les chantiers de grande importaance, toutes les dispositions et tous les mécanismes de prévention sont déterminés par la CNESST. Partout oû nous avons obtenu des représentants en prévention, cela a donné des résultats. Pourtant, les grands employeurs mettent de la pression sur la Commission, ils mettent leur pouvoir politique en action pour nous empêcher d'en avoir. Au chantier de La Romaine, nous avons dû faire une énorme pression médiatique, en particulier suite au dernier décès, en décembre 2016, qui était le 4e décès sur ce chantier, pour obtenir des représentants en prévention sur une base volontaire. Hydro-Québec a finalement accepté et nous avons maintenant des représentants en prévention sur le chantier depuis près d'un an.

Pour que la prévention fonctionne, il faut une collaboration. Il faut que la collaboration soit bien intégrée, il faut que cela participe, qu'on travaille ensemble pour un objectif commun. Il faut dire que là où on a réussi à imposer des représentants en prévention, la coopération n'a pas toujours été bonne. En plus, on veut avoir des représentants en prévention partout, pas juste sur les chantiers de plus de 500 travailleurs. Ce n'est pas seulement sur les grands chantiers qu'il arrive des accidents mortels. Il en arrive sur tous les chantiers.

On veut développer des représentants en prévention pour que les employeurs n'aient pas le choix de prendre les mesures qui s'imposent pour assurer que le travail est sécuritaire. On ne veut pas s'attarder juste aux équipements de protection individuelle. On veut s'attaquer aux vraies choses, à ce qui blesse et tue nos travailleurs. On veut s'attaquer aux méthodes de travail, on doit s'assurer que ce sont les bonnes méthodes de travail qui sont utilisées, les bons outils, le bon équipement. On doit s'attaquer à la question de la santé également. Nos travailleurs travaillent avec un paquet de contaminants, des solvants, des choses qui finissent par les tuer à la longue. À l'heure actuelle, il y a juste deux maladies professionnelles qui sont reconnues dans la construction, l'amiantose et l'exposition à la silice.

Le problème qu'on rencontre, c'est qu'on ne nous écoute pas. Quand nos travailleurs veulent parler, souvent on se débarasse d'eux, de ceux qui ont parlé. Les travailleurs se font dire de se taire, qu'ils n'ont pas l'expertise de ces choses là, qu'il faut laisser cela aux experts. Au chantier de La Romaine, des travailleurs avaient soulevé que la façon dont on les faisait percer le roc ne concordait pas avec leur expérience et n'était pas sécuritaire. On leur répondait que cela regarde les géologues. Leur expérience n'était pas respectée.

Le représentant en prévention est important dans la construction parce que les travailleurs n'ont pas de sécurité d'emploi. S'ils se plaignent et poussent plus loin leur démarche, s'ils appellent leur association, ils servent de cible. Même s'ils font une plainte anonyme à la CNESST c'est possible de déduire de quel secteur vient l'appel.

Par contre, quand les travailleurs soulèvent les problèmes à travers les représentants en prévention, ils passent directement par lui. Il est au chantier à temps plein, ils passent par cette personne, elle est leur voix, elle défend leur point de vue. La voix des travailleurs doit être protégée, sinon, dans un contexte d'absence de sécurité d'emploi, les employeurs peuvent détecter les travailleurs qui se plaignent et les représailles pleuvent.

En plus de nos réclamations à la Commission, nous faisons de l'intervention directe sur les chantiers. Si on croit à la prise en charge par le milieu, on doit prêcher par l'exemple, on intervient directement sur les chantiers. Récemment encore, dans une bâtisse de 15 étages, il y avait six étages sans garde-corps. En 2017, on doit encore se battre pour dire que les garde-corps c'est nécessaire. Nous intervenons fermement auprès des employeurs pour que des mesures correctives soient appliquées immédiatement.

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Les travailleurs maritimes se mobilisent contre la Loi sur le précontrôle antinationale du gouvernement Trudeau

«Nous allons maintenant lutter contre cette loi par le biais des règlements»


Les travailleurs maritimes qui travaillent au port de Vancouver et dans les autres ports du pays s'opposent au projet de loi C-23, Loi relative au précontrôle de personnes et de biens au Canada et aux États-Unis. Cette loi étend le « précontrôle », un processus de dédouanement par le pays de destination avant que la cargaison ou la personne ne quitte le pays d'origine, de certains aéroports au Canada aux passages terrestres et maritimes. Il autorise le prédédouanement de cargaisons par des agents américains dans des installations canadiennes, permet aux agents américains de porter des armes et de détenir, fouiller et utiliser la force contre des Canadiens dans des installations de précontrôle au Canada.

Le Syndicat international des débardeurs et magasiniers (SIDM) s'est battu contre le projet de loi qui a maintenant été adopté par la Chambre des communes et le Sénat et, maintenant que la loi reçu la sanction royale, il continue de se battre et d'informer les Canadiens sur ce que cette loi signifie. En collaboration avec la Fédération des travailleurs de la Colombie-Britannique et l'Association pour les libertés civiles de la Colombie-Britannique, le SIDM a organisé un rassemblement le 16 décembre à la Place du Canada, à Vancouver, sur le quai où accostent les navires de croisière, le dernier jour de la saison de ce type de navires. Tous les travailleurs du SIDM à la Place du Canada seront directement touchés par la loi C-23 et les travailleurs maritimes de tout le pays devront maintenant subir un contrôle de sécurité par le gouvernement canadien et le département de la Sécurité intérieure des États-Unis.

Les syndicats et de nombreuses autres organisations se sont opposés à la loi C-23 comme une violation des droits des passagers et des travailleurs, et une violation de la souveraineté nationale, par la transmission d'informations sur les Canadiens à un gouvernement étranger. Cela va permettre à un gouvernement étranger de déterminer si un travailleur canadien est autorisé à travailler ou non et c'est une invitation aux pouvoirs policiers d'un gouvernement étranger à intervenir en sol canadien en toute impunité et immunité.

Forum ouvrier a interviewé Rob Ashton, le président du SIDM - Canada, après le rassemblement du 16 décembre

***

Forum ouvrier : Peux-tu expliquer le but du rassemblement à la Place du Canada le 16 décembre ?

Rob Ashton : Le rassemblement a été organisé par mon syndicat, le Syndicat international des débardeurs et magasiniers, et principalement par des jeunes travailleurs, pour faire connaître ce que le gouvernement du Canada fait avec la loi C-23. Irene Lanzinger, présidente de la Fédération des travailleurs de la Colombie-Britannique, et Josh Paterson, de l'Association pour les libertés civiles de la Colombie-Britannique, ont également pris la parole. Le rassemblement a été organisé très rapidement à un moment où les gens sont occupés à d'autres choses, alors nous croyons que l'action a été un succès.

La loi C-23 a été négociée secrètement entre le gouvernement Harper et le gouvernement Obama en 2015 et elle a été adoptée à la Chambre des communes et au Sénat plus rapidement qu'un train à grande vitesse. Nous n'avons pas réussi à la faire modifier avant qu'elle soit adoptée et elle a reçu la sanction royale le 12 décembre. Nous en sommes maintenant à l'étape de la réglementation et nous allons maintenant lutter contre cette loi par le biais des règlements.

Il est important de connaître l'historique du programme d'habilitation de sécurité. Après le 11 septembre 2001, le gouvernement canadien a adopté le Programme d'habilitation de sécurité en matière de transport maritime. Les syndicats maritimes, y compris le SIDM, ont résisté parce qu'il était trop intrusif et outrancier. Pour travailler à la Place du Canada où les navires de croisière accostent à Vancouver, un travailleur maritime doit posséder une habilitation de sécurité, soumettre ses empreintes digitales et subir une vérification détaillée de ses antécédents. Cela cause beaucoup de problèmes mais le programme comprend une procédure de griefs.

En vertu de la C-23, après que le gouvernement canadien aura accordé à un travailleur son habilitation de sécurité, celui-ci sera autorisé à travailler dans des endroits comme Place du Canada et son nom et sa date de naissance ainsi que d'autres renseignements seront envoyés par le gouvernement canadien au département de la Sécurité intérieure des États-Unis pour dépistage. Si le département de la Sécurité intérieure des États-Unis fait un « commentaire dérogatoire », alors le travailleur peut perdre son habilitation de sécurité. Nous ne savons pas ce que l'on entend par « commentaire dérogatoire ». Nous avons demandé aux représentants du gouvernement et personne ne peut nous le dire. Nous connaissons l'attitude et les actions de l'administration Trump à l'égard des musulmans, des minorités et des immigrants. Nous avons un grand nombre de travailleurs sud-asiatiques parmi nous et nous devons protéger tous les travailleurs contre les atteintes à leurs droits.

Nous sommes également préoccupés par les pouvoirs et l'immunité accordés aux gardes-frontières américains au Canada. Si un garde-frontière américain commet un crime au Canada, il est réputé à l'abri de toute accusation au Canada. Les gardes-frontières américains devront retourner aux États-Unis pour être éventuellement poursuivis par leur gouvernement. Avec ce projet de loi, les gardes-frontières américains auront également la possibilité d'avoir des interactions avec les travailleurs, de les détenir et peut-être même de les fouiller à nu.

Ce que nous avons toujours dit, à la Chambre des communes, aux députés, aux sénateurs, c'est que si le gouvernement canadien autorise un travailleur à travailler au Canada, aucune autre partie ne devrait avoir le pouvoir de lui enlever cela. Nous avons eu un peu d'appui. Au Comité de la sécurité publique de la Chambre des communes, Diane Watts, une députée conservatrice de la Colombie-Britannique a proposé notre amendement technique à cet effet et a été appuyée par Matthew Dubé, député néo-démocrate du Québec. Cet amendement a été rejeté. Au Sénat, nous avons aussi reçu l'appui de certains sénateurs. Au dernier jour du processus de trois jours au Sénat, il y a un examen ligne par ligne du projet de loi. Même s'il s'agissait d'un volumineux projet de loi et non d'un projet de loi normal qui prend une à deux heures, le projet de loi C-23 a été adopté en 6 minutes et 55 secondes.

FO : Outre les préoccupations concernant le profilage racial et le ciblage des travailleurs qui appartiennent à des minorités nationales, avez-vous d'autres préoccupations en ce qui a trait à cette loi ?

RA : Nous nous inquiétons pour tout le monde. En ce moment, si je veux me rendre aux États-Unis et entrer dans une zone de prédédouanement, puis je change d'avis et décide de ne pas voyager, je peux simplement partir. En vertu de cette loi, une fois que j'aurai entamé le précontrôle, je ne serai pas autorisé à partir tant que je n'aurai pas répondu à toutes les questions que les gardes-frontières américains voudront me poser, à leur satisfaction. Cela va même permettre à un garde-frontière américain de faire une fouille à nu d'un passager canadien sans la présence d'un représentant canadien.

Nous craignons qu'avec ces pouvoirs, la Sécurité intérieure pourra nier le droit de travailler à n'importe quel travailleur maritime canadien pour quelque raison que ce soit, et peut-être simplement parce qu'il s'oppose ouvertement à cette loi. Cela aura une incidence sur tous les travailleurs maritimes auxquels on réclame une habilitation de sécurité. Cela inclut tout le monde au terminal des navires de croisière à la Place du Canada et certains autres travailleurs dans le port, mais pas tous. Un travailleur ayant une habilitation de sécurité doit présenter une nouvelle demande tous les cinq ans. Pour les travailleurs qui ont déjà l'habilitation de sécurité c'est lorsque vous appliquez de nouveau que votre demande va à la Sécurité intérieure. Nous avons un système de répartition en vertu duquel nous plaçons entre 50 et 300 travailleurs par jour à la Place du Canada pendant la saison des navires de croisière. Nous estimons que jusqu'à 2000 travailleurs pourraient être touchés par cela.

FO : Tu as soulevé à la fois la question des droits des travailleurs et de la souveraineté nationale. Peux-tu nous en dire plus à ce sujet ?

RA : Trudeau parle de défendre la classe moyenne. Mes membres sont de la classe ouvrière, pas de la classe moyenne, et ce que fait le gouvernement Trudeau, c'est attaquer la classe ouvrière. Il semble que vous êtes de la classe moyenne si vous êtes un homme blanc qui gagne des millions de dollars par an. En ce qui me concerne, le gouvernement canadien vient de dire à la face du monde qu'il ne défendra pas la souveraineté canadienne. Notre position est la suivante : si un travailleur canadien est autorisé par le gouvernement canadien à travailler au Canada, aucun gouvernement étranger n'a le droit de lui retirer cette autorisation.

FO : Quelles autres actions envisagez-vous ?

RA : Transports Canada nous a dit qu'il va se passer entre 18 et 24 mois avant que la réglementation entre en vigueur alors les rassemblements vont devenir de plus en plus importants et nous n'allons pas nous arrêter tant que la classe ouvrière ne pourra pas vivre en paix parce que la classe ouvrière de ce pays se fait tromper depuis longtemps. On lui a dit pendant les élections que le gouvernement allait s'occuper de la classe ouvrière et tout ce qu'ils font, c'est attaquer la classe ouvrière.

(Photos: ILWU, BC Civil Liberties Assn.)

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Les soins de santé sont un droit!

Les paramédics de l'Ontario soulèvent des préoccupations face aux changements à la Loi sur les ambulances 

Le 12 décembre, des paramédics venus de plusieurs villes de l'Ontario ont convergé vers Queen's Park pour dénoncer les changements dangereux qui ont été faits à la Loi sur les ambulances par le gouvernement dans le cadre de la loi omnibus 160, Loi de 2017 renforçant la qualité et la responsabilité pour les patients. La loi a été adoptée en troisième lecture le 12 décembre et a reçu la Sanction royale le même jour. La loi 160 est une loi omnibus géante qui abroge ou crée sept lois et en modifie plus de 30. Le gouvernement libéral de Kathleen Wynne l'a déposée le 27 septembre et l'a adoptée à toute vitesse avec seulement 4 jours d'audience publique, tous à Toronto. Les syndicats du secteur de la santé dénoncent cette loi comme une loi de privatisation encore plus poussée du secteur de la santé et une menace encore plus grande aux hôpitaux locaux. L'action à Queen's Park était centrée sur l'annexe 1 de la loi qui modifie la Loi sur les ambulances. Voici une entrevue qu'a faite Forum ouvrier avec Jason Fraser qui est le président du Comité des travailleurs ambulanciers de l'Ontario (CACO) du Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP). Il y a environ 8 000 paramédics en Ontario et le CACO en représente environ 5 000.

***

Forum ouvrier : Quels sont les principaux changements qu'apporte la loi 160 à la Loi sur les ambulances ?

Jason Fraser : Le CACO et les paramédics de l'Ontario sont particulièrement préoccupés par l'annexe 1 de la loi 160 et cette annexe comprend deux amendements principaux. Elle prévoit d'abord que des patients qui auront appelé le 911 pour obtenir une ambulance pourront être dirigés vers d'autres institutions que les hôpitaux, qui sont la destination traditionnelle.La deuxième mesure, qui nous préoccupe beaucoup, permet au ministre de faire des modifications à la Loi sur les ambulances et cela comprend la détermination de deux sites-pilotes où l'on permettra à des travailleurs qui ont une formation de paramédics d'exercer leurs fonctions sur des camions de pompiers. Le gouvernement indique que c'est un test qu'il veut faire. Ils essaient de trouver deux municipalités-hôtes qui seront des sites-pilotes où les paramédics travailleront à partir de camions de pompier.

Nous ne savons pas exactement comment ce détournement des patients va fonctionner. Nous pensons que lorsque nous arriverons sur les lieux, plutôt que d'amener le patient à un département d'urgence d'hôpital traditionnel, nous allons l'amener vers un autre centre de santé comme un centre de santé mentale par exemple. Chaque fois que le gouvernement nous donne un exemple, c'est ce genre d'institution qu'il mentionne. Si la réglementation et les protocoles appropriés sont en place, et que le patient n'est pas amené à une institution privée qui fonctionne au profit, alors nous sommes prêts à accepter cette partie de la loi. Mail il faut faire en sorte que les règlements, les politiques et les protocoles soient bien en place afin que les patients et les paramédics soient protégés. Aussi, nous ne voulons pas amener des patients à des centres de santé privés. Nous ne savons pas exactement non plus qui va prendre la décision de diriger le patient vers un autre centre de santé qu'une salle d'urgence d'un hôpital. Ce n'est pas nous qui avons demandé ce changement. Cela fait des décennies que nous amenons les patients à des hôpitaux et le système fonctionne. Peut-être l'engorgement des hôpitaux explique-t-il le changement proposé dans la loi mais alors pourquoi ne pas financer les hôpitaux adéquatement ?

La deuxième mesure prévue par l'annexe 1 prévoit que des travailleurs ayant une formation de paramédics qui travaillent en ce moment au service des incendies pourront fournir des services de paramédics. Selon nous, c'est extrêmement problématique. C'est notre travail à nous. Il n'y a aucune preuve que des paramédics travaillant à bord de camions de pompier vont fournir un service meilleur que celui que nous fournissons présentement. Cela va aussi augmenter la responsabilité des municipalités parce que les municipalités n'ont pas de règlements, de protocoles et de garantie de qualité pour des services de paramédics qui seraient fournis par les services d'incendie. Il faut savoir qu'en Ontario, les municipalités sont les employeurs des paramédics. Le financement des services préhospitaliers est réparti sur une base 50-50 entre les municipalités et le gouvernement provincial. Les paramédics de l'Ontario qui fournissent des services de paramédics font l'objet d'une réglementation très développée. La surveillance est très étendue, et il en est de même des règlements et des mesures de conformité pour que la sécurité des patients soit garantie et ce système n'existe pas dans les services d'incendie en ce qui a trait aux soins aux patients.

Si le gouvernement provincial, le gouvernement libéral, pense qu'il faut accroître le nombre de paramédics en Ontario, des paramédics qui sont capables d'offrir des soins dans les communautés, alors il devrait réinvestir de l'argent dans les services préhospitaliers qui existent plutôt que de créer un second système.

En ce moment, la position de paramédic dans un service d'incendie n'existe pas en Ontario. Quelqu'un peut travailler comme pompier à temps plein en Ontario et travailler comme paramédic à temps partiel mais il doit exercer sa fonction de paramédic sur nos camions et être assujetti à notre réglementation et à nos mesures de surveillance.

Nous ne sommes pas d'accord que ce modèle soit introduit et personne ne semble en mesure de nous dire pourquoi il va l'être. Tous les syndicats du secteur préhospitalier sont opposés à ce changement. L'Association des municipalités de l'Ontario y est elle aussi opposée.

Cet été, avant que le projet de loi ne soit déposé et jusqu'au débat en troisième lecture, nous avons tenu de nombreuses réunions avec des fonctionnaires du ministère de la Santé qui travaillaient sur ce dossier, nous avons parlé à plusieurs députés et même avec le ministre de la Santé en octobre. On ne nous a pas écoutés. Le ministre a invité le SCFP à présenter des amendements qui nous satisferaient. Le SCFP l'a fait mais les amendements ont été rejetés.

Nous sommes très préoccupés de ce qui va arriver aux patients. Nous travaillons constamment auprès de nos patients pour leur fournir le meilleur service possible et nous voulons continuer de le faire. Le gouvernement devrait augmenter le financement des services préhospitaliers qui existent et non réinventer la roue et bâtir un deuxième système. La lutte aux incendies et la prévention des incendies et les services préhospitaliers fournis par les paramédics sont deux professions différentes. Si les services préhospitaliers et les hôpitaux sont financés adéquatement, cela va aider le système de santé dans son ensemble.

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À nos lecteurs

Ce numéro de Forum ouvrier est le dernier de l'année. Notre prochain numéro paraîtra le 18 janvier, peu avant le début de la nouvelle session du Parlement. Pendant cette pause, nous vous invitons à vous joindre au travail du Centre ouvrier pour tracer la voie à suivre afin de faire un succès de la nouvelle année, à la lumière de tous les défis auxquels le mouvement ouvrier fait face. Pour nous rejoindre, nous écrire à centreouvrier@cpcml.ca.

Au nom du Centre ouvrier du PCC(M-L) et de l'Équipe éditoriale et technique de Forum ouvrier, nos meilleurs voeux à tous nos lecteurs pour le temps des Fêtes et une nouvelle année heureuse et en sécurité.

Pierre Chénier
Secrétaire du Centre ouvrier du PCC(M-L)

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