Numéro 67 - 31 octobre 2020

Une restructuration ordonnée par des intérêts privés étroits

Les gouvernements provinciaux se
servent de la pandémie pour masquer des interventions antisociales

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Les grandes pharmaceutiques mondiales prennent
d'assaut l'opinion publique

- K.C. Adams -

Des campagnes pour bloquer une nouvelle direction
pour le secteur pharmaceutique


Les élections en Colombie-Britannique

Les résultats

Le problème d'investir le peuple du pouvoir est toujours là

La Reine leur a tout donné

- Peter Ewart -


Tous les yeux sur la Mi'kmaqi!

De vigoureuses actions se poursuivent pour affirmer le droit issu des traités des pêcheurs mi'kmaq de pêcher le homard


Déclarations de solidarité avec les pêcheurs mi'kmaq
Le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes

Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants

L'Union nationale des fermiers


À titre d'information
Feuillet d'information sur la décision Marshall

- Le bureau de négociation Kwilmu'kw Maw-klusuaqn/ Initiative
pour les droits des Mi'kmaq -


Le peuple chilien vote en faveur d'une nouvelle constitution

La participation massive au plébiscite ouvre la voie à
de nouveaux arrangements constitutionnels

- Nick Lin -


25e anniversaire du référendum de 1995

La lutte du peuple du Québec pour s'investir de la souveraineté
demeure un problème posé et à résoudre

- Claude Brunelle et Christine Dandenault -



Une restructuration ordonnée par des intérêts privés étrois

Les gouvernements provinciaux se servent
de la pandémie pour masquer des interventions antisociales

Les décisions prises par les gouvernements fédéral et provinciaux prétendument en réponse à la pandémie de la COVID-19 ont un tout autre objectif que de protéger le bien-être du peuple et de la société. Les « mesures d'urgence » et les projets de loi adoptés depuis le mois de mars n'ont rien à voir avec bâtir une économie canadienne indépendante et suffisante pour répondre aux besoins des Canadiens. Depuis le mois de mars, en vertu de lois provinciales respectives, les gouvernements ont déclaré des états d'urgence par décrets, arrêtés ministériels et ordonnances des autorités de la santé publique, afin de prendre des mesures pour combattre la pandémie.

Dans plusieurs provinces, plus particulièrement au Québec, en Ontario et en Alberta, et par toutes sortes de moyens dans d'autres provinces, la pandémie sert d'excuse aux gouvernements pour adopter des lois et des méthodes de fonctionnement qui restructurent considérablement l'État, menant à l'élimination de toute autorité publique. C'est l'offensive antisociale des 30 dernières années qui se poursuit et qui s'intensifie dans le but d'ouvrir un espace pour les oligarques mondiaux les plus puissants afin qu'ils puissent gouverner directement les affaires de la société dans leurs propres intérêts étroits. Par exemple, au cours des dernières décennies et partout au pays, les gouvernements ont cédé de vastes portions du secteur de la santé, notamment les services alimentaires, l'entretien, les systèmes d'informatique et les services de laboratoire des hôpitaux et plus encore à certaines des plus grandes entreprises multinationales étrangères.

Il y a eu une vaste prise en main des résidences de soins de longue durée et de personnes autonomes et semi-autonomes par des propriétaires et gestionnaires d'entreprises privées, souvent étrangères. À cette fin, les travailleurs de la santé et leurs organisations ont subi des attaques sans précédent, leurs salaires et leurs conditions de travail étant perçus comme un coût et donc des obstacles à l'ordre du jour des intérêts privés étroits et des gouvernements qui les servent. Sous couvert de la pandémie, les gouvernements restructurent l'État, éliminant tout vestige d'une autorité publique pour faire place à un contrôle direct par les oligarques les plus puissants.

En Alberta

Les mesures du gouvernement Kenney en Alberta illustrent bien ce qui précède. Depuis l'ouverture de la deuxième session de l'Assemblée législative de l'Alberta le 25 février, 34 lois ont été adoptées, dont quatre sont liées directement à la pandémie. La plupart de ces lois visent à appliquer le programme du gouvernement du Parti conservateur uni de déréglementation de l'industrie et de privatisation de l'éducation et de la santé afin de répondre aux demandes des oligarques de l'énergie.

Les lois sont d'une telle envergure et sont adoptées avec une telle rapidité, un projet de loi antisocial et antiouvrier n'attendant pas l'autre, qu'il est difficile pour l'opposition populaire de ne pas s'y perdre, tandis que le gouvernement Kenney profite de sa majorité pour adopter les lois à toute vapeur à l'Assemblée législative.

Le premier acte législatif de cette session a été la Loi 1, Loi sur la défense des infrastructures critiques. La définition d'infrastructure publique dans la loi est tellement vaste qu'elle permet aux autorités de criminaliser les luttes grévistes des travailleurs, les actions des jeunes contre les changements climatiques et toute forme d'opposition. Le projet de loi avait été déposé à l'Assemblée législative le 25 février par le premier ministre Kenney lui-même qui a dit très clairement que la loi était une réponse directe aux actions menées à l'échelle du pays en appui à la lutte des défenseurs de la terre Wet'suwet'en contre l'oléoduc du monopole énergétique Coastal GasLink qui passera sur leur territoire ancestral sans leur autorisation.

Depuis, le gouvernement a menacé la Commission scolaire de Calgary de démantèlement en raison de sa prise de position contre les compressions en éducation, et a adopté des lois, dont la Loi 32, Loi de 2020 sur la restauration de l'équilibre dans les endroits de travail en Alberta, qui apporte des amendements au Code des normes d'emploi et au Code des relations de travail qui bafouent les droits des travailleurs. Peu après l'adoption de la Loi 32, le gouvernement a lancé un assaut majeur contre la classe ouvrière en révisant deux importantes lois de la législation ouvrière, la Loi sur la santé et la sécurité du travail (OHS Act) et la Loi sur l'indemnisation des travailleurs, afin de préparer le terrain pour apporter des changements en faveur des employeurs et à l'encontre des droits des travailleurs.

En juillet, la Loi sur l'amendement des statuts de la santé (Loi 30) a été adoptée, une loi omnibus qui modifie neuf lois et qui vise à couper des services et à ouvrir la porte à la privatisation, y compris en faisant de la sous-traitance dans les hôpitaux, en pavant la voie aux cliniques chirurgicales privées et en changeant la façon dont les médecins sont rémunérés.

Le 13 octobre, le ministre de la Santé a annoncé que le gouvernement allait de l'avant avec la mise à pied de 11 000 travailleurs de la santé et la privatisation d'un secteur après l'autre dans le système de santé, y compris la privatisation des services alimentaires et de buanderie ainsi que des services environnementaux, et qu'il continuera de couper des postes d'infirmières par attrition jusqu'à ce qu'il déclare lui-même la pandémie terminée, puis il procèdera à l'élimination de l'équivalent de 500 postes d'infirmières à temps plein, ce qui se traduira, selon les Infirmières et infirmiers unis de l'Alberta, par la mise à pied de 750 infirmières.

Cet assaut contre les travailleurs et le tort incroyable qu'il fera à la capacité du secteur de la santé de combattre la pandémie n'émeuvent aucunement le gouvernement Kenney qui est dirigé par les Ernst & Young de ce monde qui visent à apporter des changements qui favorisent les oligarques et cherchent à éliminer les obstacles, tels que les droits et les organisations des travailleurs qui se dressent sur leur chemin.

En Ontario


Des rassemblements et des lignes de piquetage devant les bureaux de membres du Parlement
ontarien sont organisés par les travailleurs de la santé en août et en septembre 2020 pour demander le retrait de la Loi 195.

Le 17 mars, le gouvernement de l'Ontario a déclaré l'état d'urgence à l'échelle de la province en réponse à la pandémie de la COVID-19. En vertu des pouvoirs d'urgence dont le gouvernement s'est muni, des décrets ont été pris touchant à tous les aspects du fonctionnement de l'économie, les rassemblements sociaux, la fermeture des écoles, la fermeture des hôpitaux et des résidences de soins de longue durée aux visiteurs, et beaucoup d'autres.

Plusieurs des décrets émis en vertu des pouvoirs d'urgence stipulent explicitement qu'en dépit des conventions collectives existantes, les employeurs peuvent unilatéralement décider du nombre des effectifs en personnel, redéployer le personnel comme bon leur semble, changer les horaires de travail ou la répartition des quarts de travail, annuler les vacances, embaucher des travailleurs à temps partiel, temporaires ou en sous-traitance, et avoir recours à des bénévoles pour faire le travail de syndiqués. Les procédures de grief ont été suspendues en ce qui concerne toute question contenue dans le décret. Malgré leur connaissance directe de leurs endroits de travail, les travailleurs de la santé ont été entièrement exclus de toute prise de décision sur le déploiement du personnel, sur les mesures à prendre pour protéger les travailleurs et les patients et, surtout en soins de longue durée, sur comment mobiliser d'autres forces dont les familles, les bénévoles, et les travailleurs de la santé provenant de secteurs autres que celui des résidences.

Le 7 juillet, la Loi de 2020 sur la réouverture de l'Ontario (mesures adaptables en réponse à la COVID-19), la Loi 195, a été adoptée à l'Assemblée législative ontarienne. La Loi étend les pouvoirs d'urgence du gouvernement tout en éliminant les mécanismes de surveillance de base au nom de la « flexibilité ». La Loi 195 met fin officiellement à l'état d'urgence (en date du 24 juillet), mais permet aux décrets d'urgence adoptés en vertu de la Loi sur la protection civile et la gestion des mesures d'urgence (EMCPA) d'être prolongés par ordre de la lieutenante-gouverneure en conseil (c'est-à-dire, le Cabinet provincial). Alors qu'en vertu de l'EMCPA les décrets d'urgence devaient être réapprouvés tous les 14 jours, la Loi 195 prescrit qu'ils peuvent être renouvelés par le Cabinet pour des périodes de 30 jours et même jusqu'à un an, et les pouvoirs conférés par la Loi peuvent être prolongés pour encore une autre année. Les décrets peuvent aussi être amendés pour qu'ils puissent être appliqués à d'autres personnes ou groupes.

Entretemps, ce qui aurait dû être fait pour veiller à ce que le système de santé puisse combattre adéquatement la deuxième vague, déjà en cours, n'a pas été fait.

Au Québec


Les travailleurs de la santé du Québec bloquent des ponts à Montréal et dans la ville
de Québec, le 19 octobre 2020, pour demander la satisfaction de leurs revendications aux conditions dont ils ont besoin pour assumer leur responsabilité envers la société.

L'état d'urgence dans la santé publique a été déclaré le 13 mars. Parmi les premières mesures adoptées, il y a eu les arrêtés ministériels du 15 et du 21 mars, en vertu desquels le gouvernement s'est donné le pouvoir d'annuler les conventions collectives des travailleurs de la santé et des services sociaux et d'imposer des conditions de travail à l'encontre des ententes négociées. Ces mesures ont été justifiées par des pouvoirs appartenant au ministre de la Santé en vertu de la Loi sur la santé publique. Cette loi ne comprend aucune référence à des annulations de conventions collectives ou à des changements de conditions de travail et le gouvernement du Québec n'a jamais offert d'explications sur comment ces mesures draconiennes protègent la santé du public.

Les arrêtés ministériels permettent au gouvernement d'annuler les congés des travailleurs, y compris leurs vacances, de changer les affectations et les horaires, d'imposer des journées de travail prolongées jusqu'à 12 heures et de « suspendre ou d'annuler les congés déjà autorisés, ainsi que de refuser l'octroi de nouveaux congés ». Ces arrêtés ministériels ont été renouvelés continuellement et sont toujours en vigueur.

Alors que le gouvernement a tout fait pour permettre aux employeurs d'agir unilatéralement et d'augmenter les risques pour les travailleurs, les patients et les résidents de centres de soins de longue durée, il a refusé d'écouter les travailleurs de première ligne qui sont les mieux placés pour décider comment organiser le travail et ce qui est requis pour assurer la sécurité de tout le monde. Il a aussi fermé la porte aux autres qui cherchent à faire partie de la solution, y compris les infirmières étudiantes qui se sont portées volontaires pour venir prêter mainforte et qui ont été ignorées.

Ensuite, le 3 juin, le gouvernement Legault a déposé le projet de loi 61, Loi visant la relance de l'économie du Québec et l'atténuation des conséquences de l'état d'urgence sanitaire déclaré le 13 mars 2020 en raison de la pandémie de la COVID-19. Le projet de loi constituait une restructuration majeure de l'État en ce qui concerne la prise de décision. On y citait l'urgence de la santé publique et la nécessité d'atténuer ses conséquences sur l'économie comme justification pour accorder à l'exécutif gouvernemental tout le pouvoir d'annuler et de passer outre les lois et les réglementations existantes sous prétexte d'accélérer la relance de l'économie. Le projet de loi 61 aurait autorisé l'exécutif gouvernemental à passer outre aux articles de la Loi sur la santé publique, la Loi sur la qualité de l'environnement, la Loi sur les expropriations, et la Loi sur les contrats des organismes publics. En plus, il accordait l'immunité face aux poursuites aux ministres du gouvernement et à d'autres agissant en vertu de la loi.

Une des principales caractéristiques du projet de loi 61 est que tout changement apporté aux lois existantes serait permanent. L'exécutif gouvernemental aurait le pouvoir d'apporter des changements législatifs sans discussion au sein de l'Assemblée nationale ou avec les personnes directement touchées par les nouvelles clauses, accordant le plein pouvoir à l'exécutif de faire toutes sortes d'arrangements avec des intérêts privés sans l'examen du public.

Le projet de loi 61 aurait aussi prolongé l'état d'urgence de la santé publique et les pouvoirs accordés à l'exécutif gouvernemental pour encore deux ans.

En raison de l'opposition massive du peuple, le gouvernement du Québec n'a pas pu adopter le projet de loi avant l'ajournement de l'Assemblée nationale le 12 juin, et le 23 septembre, le gouvernement Legault a déposé le projet de loi 66, Loi concernant l'accélération de certains projets d'infrastructure, en remplacement du projet de loi 61. Le nouveau projet de loi accorderait au gouvernement l'autorité de passer outre les lois sur la protection environnementale et sur les expropriations, mais non de passer outre la Loi sur les contrats des organismes publics ou d'accorder l'immunité aux ministres du gouvernement ou de prolonger l'état d'urgence de la santé publique.

Ce qu'ont en commun ces mesures des gouvernements de l'Alberta, de l'Ontario et du Québec, ainsi que d'autres, se résume à trois choses :

1) les mesures prises visent une plus grande restructuration de l'État pour servir les intérêts privés;

2) les droits des travailleurs de la santé sont bafoués, y compris leur droit d'agir collectivement à la défense de leurs droits;

3) le corps politique dans son ensemble, en particulier les travailleurs de la santé, les patients et les aînés qui reçoivent les soins, leurs familles et d'autres personnes en lien étroit avec les patients et les aînés, sont maintenus à l'écart.

4) ces mesures antisociales et ces stratagèmes pour payer les riches pour ne pas avoir le consentement du peuple et faire face à un examen de plus en plus minutieux et à des actes de résistance et d'opposition de la part de la classe ouvrière et du peuple.

Par leurs mesures coercitives, les gouvernements de l'Alberta, de l'Ontario et du Québec tentent de nier l'expérience du peuple et les leçons tirées dans la lutte contre la pandémie. Ces gouvernements ont recours à des pouvoirs exécutifs pour continuer d'imposer une direction de l'économie qui fait en sorte que toute l'organisation de la société repose la multiplication des stratagèmes pour payer les riches et la concentration du pouvoir et de la richesse entre les mains d'une poignée de personnes. Les travailleurs mettent de l'avant leurs revendications basées sur la reconnaissance collective que cette direction et la façon dont la société est organisée n'ont pas réussi à satisfaire les besoins de base du peuple.

(Photos : LML, HSAA, Radical Citizen's Media, Let Nurses Speak, OCHU, J-M Desrosiers)

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Les grandes pharmaceutiques mondiales prennent d'assaut l'opinion publique

L'accès à des produits pharmaceutiques abordables est un aspect important de l'affirmation du droit à la santé. Les gens n'acceptent pas que leur bien-être soit à la merci de la réalisation de profits par les cartels pharmaceutiques mondiaux. Le Canada a besoin d'une industrie pharmaceutique publique qui suffit à ses besoins et procure aux Canadiens les médicaments dont ils ont besoin à un coût minimal.

La nécessité d'un contrôle public d'une industrie pharmaceutique indépendante au Canada est davantage mise en évidence par la pandémie de COVID-19 et le besoin de tests et de vaccins pour prévenir la transmission, et de médicaments pour atténuer les symptômes et diminuer les effets à long terme et la mortalité.

Dans ces circonstances, le gouvernement libéral de Justin Trudeau semble « parier » sur certaines entreprises pharmaceutiques privées pour la mise au point d'un vaccin efficace. Le 23 octobre, la presse rapportait :

« Ottawa va fournir jusqu'à 173 millions de dollars à l'entreprise Medicago de Québec, pour son candidat-vaccin contre la COVID-19. Le premier ministre Justin Trudeau a indiqué vendredi [23 octobre] que ces fonds serviront à faire progresser le potentiel vaccin de Medicago et à mettre sur pied une installation de production à Québec.

« Le gouvernement fédéral a par ailleurs réservé 76 millions de doses du futur vaccin de Medicago au cas où les tests s'avéreraient concluants.

« M. Trudeau a également indiqué que plus de 41 millions seront investis pour d'autres candidats-vaccins au pays, dont 18,2 millions iront à l'entreprise Precision NanoSystems de Vancouver. »

Pendant ce temps, le Conseil national de recherches Canada dépense 23 millions de dollars pour soutenir d'autres initiatives canadiennes de vaccination, a déclaré Trudeau.

« Le premier ministre a déclaré que le Canada avait signé six accords avec un certain nombre d'entreprises participant à la course mondiale pour produire un vaccin sûr et efficace contre la COVID-19.

« Deux autres fabricants de vaccins américains, Moderna et Pfizer, ont demandé à Santé Canada de revoir leurs produits, qui font actuellement l'objet d'essais cliniques.

« Il est raisonnable de s'attendre à ce que les vaccins commencent à être déployés à un moment donné en 2021, a déclaré Trudeau, mais même dans ce cas, l'offre sera limitée et les populations à haut risque seront priorisées pour l'inoculation. [...]


« Le Canada a déjà des ententes de principe avec plusieurs fabricants pour l'élaboration d'un futur vaccin. Jusqu'à maintenant, trois d'entre eux  ceux d'AstraZeneca, de Moderna et de Pfizer  sont au stade de demande d'autorisation par Santé Canada.

« M. Trudeau assure que le Canada sera prêt lorsqu'un vaccin sera disponible. En attendant, le gouvernement fédéral a commencé à recevoir les premiers tests de dépistage rapides de l'entreprise pharmaceutique Abbott. Des centaines de milliers d'entre eux sont en cours de distribution à l'échelle du pays, a indiqué M. Trudeau, et d'autres livraisons suivront sous peu. »

Le rapport ne dit pas ce qu'il adviendra des fonds utilisés pour « obtenir les droits » s'ils s'avèrent que les vaccins en question ne sont pas viables. S'agit-il d'un nouveau stratagème pour payer les riches qu'on nous présente au nom du grand idéal de protéger les Canadiens contre la pandémie de COVID-19 ?

La nécessité d'une entreprise publique et indépendante
pour garantir le droit à la santé pour tous

C'est dans ce contexte que les grandes sociétés pharmaceutiques mondiales intensifient leur campagne contre une opinion publique qui exige une nouvelle direction prosociale pour ce secteur qui soit fondée sur l'autosuffisance et l'entreprise publique et qui ait pour mission de garantir le droit à la santé pour tous et toutes.

Les grandes sociétés pharmaceutiques ont recours à des agences et des groupes de réflexion néolibéraux grassement payés pour entraîner l'opinion publique dans des querelles sur les prix et la disponibilité des médicaments et l'éloigner d'une nouvelle direction axée sur l'autosuffisance et l'entreprise publique. Leur campagne vise à dénoncer les réglementations gouvernementales et le contrôle des prix comme n'étant pas nécessaires et  leur faisant du tort et à entraîner le peuple dans ce débat et à l'éloigner de toute discussion sur une nouvelle direction.

Les grandes sociétés pharmaceutiques se servent de gens ayant des maladies et des conditions rares pour exiger du gouvernement qu'il finance leurs traitements pharmacologiques à des prix extravagants. La campagne fait partie de leurs efforts pour obtenir un régime national d'assurance-médicaments par lequel les gouvernements puiseraient dans les fonds publics pour acheter encore plus de produits de ces cartels mondiaux de l'industrie pharmaceutique[1].

Le régime public/privé d'assurance-médicaments qui est proposé ressemble au régime de santé actuel dominé presqu'entièrement par des intérêts privés et par lequel les gouvernements distribuent des fonds publics pour la construction et l'administration d'hôpitaux, et pour payer des fournitures et des produits pharmaceutiques produits par le privé ainsi que pour la gestion de cliniques privées et de résidences privées de soins de longue durée.

Dans le contexte actuel, les grandes sociétés pharmaceutiques mondiales veulent nous entraîner dans un débat à savoir si les gouvernements devraient réguler le prix de marché des médicaments ou laisser les fournisseurs décider des prix et s'il y a nécessité d'un système national privé/public d'assurance-médicaments. Des patients atteints de maladies rares sont mobilisés pour dénoncer toute réglementation des prix et pour réclamer que tous les médicaments distribués par les sociétés pharmaceutiques mondiales soient disponibles aux prix fixés par ces compagnies. Les gens sont encouragés à prendre position pour ou contre le contrôle des prix et pour ou contre un régime public/privé d'assurance-médicaments plutôt que de regarder la situation dans la santé, de voir le problème de l'approvisionnement des produits pharmaceutiques tel qu'il se pose et de discuter d'une nouvelle direction qui garantit le droit à la santé de tous et toutes.

Les prix des médicaments sont-ils la question ?

Le prix des médicaments exigé par les grandes sociétés pharmaceutiques comprend le profit privé qui, selon elles, reflète le coût de la production, plus spécifiquement la valeur de la recherche et du développement de nouveaux médicaments. Cette affirmation soulève les questions de qui décide de la direction de la recherche, de ce qui doit être produit, de comment les médicaments doivent être distribués et de ce qui advient de la nouvelle valeur produite par les travailleurs de l'industrie pharmaceutique, ce qui comprend la valeur ajoutée ou le profit. Des questions aussi importantes devraient-elles être confiées à des grandes sociétés pharmaceutiques dont l'objectif est le profit maximum et non de garantir le droit de tous à des soins de santé selon le niveau optimal atteint par les forces productives et la science ?

Les grandes sociétés pharmaceutiques disent que les gouvernements, par la réglementation des prix, fixent souvent les prix de marché à un niveau égal ou inférieur au « coût de production », ce qui empêche les cartels pharmaceutiques de faire le profit maximum. Sans les prix qu'ils déclarent nécessaires, les cartels disent qu'ils ne peuvent poursuivre leur recherche, ce qui limite les nouveaux traitements et même la production de médicaments en quantité suffisante tels que les vaccins pour la grippe et d'autres médicaments pour répondre aux besoins.

Mais le prix des médicaments est-il le problème ? En réalité, ce problème des prix de marché n'existerait pas si le secteur pharmaceutique était organisé de façon autosuffisante en tant qu'entreprise et service publics, avec une autorité publique en qui le peuple pourrait avoir confiance et qu'il pourrait tenir responsable. Le secteur existerait pour servir le peuple et les besoins en santé de toute la population et garantir le droit à la santé pour tous et toutes. La valeur créée dans une industrie indépendante et contrôlée publiquement et appartenant au public, ainsi que le produit social lui-même, auraient comme but d'améliorer la santé du peuple et de garantir le droit de tous à des soins de santé de niveau optimal. La réalisation publique de la valeur des produits pharmaceutiques permettrait à cette valeur de revenir dans le secteur et dans l'économie afin d'améliorer le rendement des soins de santé et rehausser les capacités scientifiques et de travail de tout le monde engagé dans le processus de sorte que le peuple et la société dans son ensemble en tirent avantage. Dans les conditions actuelles, la valeur saisie par les grandes sociétés pharmaceutiques par la vente de médicaments est, la plupart du temps, retirée de l'économie et du pays.

Un tel secteur pharmaceutique public rendrait caducs un régime et un marché d'assurance-médicaments public/privé ainsi que le paiement de sommes faramineuses à même les fonds publics aux intérêts privés qui contrôlent les grandes sociétés pharmaceutiques. La recherche et le développement de médicaments existeraient et seraient développés au sein du système de santé public par ses travailleurs. La connaissance, la compétence et l'expertise grandissantes ainsi que les avances scientifiques pourraient être échangées avec d'autres partout dans le monde dans un esprit d'avantage réciproque et de coopération et non de concurrence à des fins de gain privé. La connaissance et les avances médicales humaines seraient universelles et à l'avantage de tout le monde dans l'esprit que nous ne formons qu'une seule humanité.

Lorsque réalisée, la valeur ajoutée que les travailleurs produisent dans un secteur pharmaceutique public retournerait dans ce secteur pour servir à la recherche, au développement et à la production de produits pharmaceutiques au Canada pour le bien du peuple et du système de santé, et non pour les intérêts privés étroits et concurrents des sociétés pharmaceutiques mondiales. Comment la valeur pharmaceutique est réalisée devient alors une question que le peuple décide en vertu du principe général que les soins de santé sont un droit égal pour tout le monde. La valeur que les travailleurs créent dans le cadre d'un système de santé entièrement public serait réalisée et resterait au Canada et il en résulterait une augmentation de la valeur de la capacité de travail de chacun et une amélioration générale de la santé du peuple et de sa conscience sociale ainsi que de sa capacité physique à combattre et à surmonter les crises telles que la pandémie de la COVID-19.

Qui contrôle ? Quel est l'objectif ?

L'enjeu, comme pour toute l'économie socialisée et tous ses secteurs, est qui contrôle et quel est l'objectif : la classe ouvrière elle-même avec le grand objectif de servir le peuple et la société ou les cartels mondiaux d'investissements qui poursuivent l'objectif étroit de faire le profit maximum afin de servir leurs intérêts privés ?

Les sociétés pharmaceutiques mondiales veulent détruire l'opinion publique en faveur d'une nouvelle direction vers l'autosuffisance et l'entreprise publique dans le secteur pharmaceutique et dans toute l'industrie de la santé. Elles veulent à tout prix préserver leur contrôle privé du secteur pharmaceutique. Elles veulent détourner l'opinion publique dans des débats sans issue sur les prix qu'elles font payer pour les médicaments et la disponibilité de ces médicaments plutôt que d'aller au fond du problème tel qu'il se présente : la nécessité de garantir le droit fondamental aux soins de santé pour tous et comment le faire dans ce monde socialisé moderne.

Les questions de bien commun et de la santé de la population et de la société requièrent des solutions publiques et l'objectif de servir le peuple et la société. De façon générale, l'industrie de la santé a besoin d'une nouvelle direction et d'un nouvel objectif qui soient de garantir le droit à la santé pour tous. La direction et l'objectif désuets des grandes compagnies pharmaceutiques, qui sont de réaliser le profit maximum et le contrôle privé de l'industrie pharmaceutique dans son ensemble, ne sont pas au diapason avec la direction et l'objectif modernes qui sont de servir le peuple et la société.

Le temps est venu d'établir une entreprise publique et autosuffisante pour toute l'industrie de la santé, y compris notamment le secteur pharmaceutique, pour garantir le droit de tous à des soins de santé tout au cours de leur vie.

Note

1. En juin 2019, le gouvernement libéral de Justin Trudeau a publié le rapport final du Conseil consultatif sur la mise en oeuvre d'un régime national d'assurance-médicaments de 204 pages intitulé Une ordonnance pour le Canada : l'assurance-médicaments pour tous.

Dans l'introduction du rapport qui présente le mandat du Conseil consultatif, on note l'absence de toute mention de l'industrie pharmaceutique. Les auteurs du rapport se contentent de dire :

« Les médicaments d'ordonnance constituent une partie essentielle des soins de santé. Toutefois, contrairement aux services prodigués par les médecins et les hôpitaux, les médicaments d'ordonnance ne sont pas couverts par le régime public d'assurance-maladie, sauf lorsqu'ils sont utilisés dans les hôpitaux. Ainsi, une partie essentielle de ce système de soins de santé, à d'autres égards si efficaces, est financée de façon incohérente et n'est pas également accessible à tous, ce qui fait qu'un trop grand nombre de patients risquent de ne pas obtenir les médicaments dont ils ont besoin. La situation n'a fait qu'empirer avec l'émergence d'un nombre croissant de médicaments spécialisés à coût élevé utilisés pour traiter des maladies chroniques complexes comme la polyarthrite rhumatoïde grave, la sclérose en plaques et le cancer. Ces nouveaux traitements, ainsi qu'un nombre croissant de médicaments ultraspécialisés et extrêmement coûteux pour des maladies rares, menacent de surcharger les programmes d'assurance publics et privés.

« Dans son budget de 2018, le gouvernement fédéral a annoncé la création du Conseil consultatif sur la mise en oeuvre d'un régime national d'assurance-médicaments (le Conseil). Le mandat du Conseil figure à l'annexe 2. Sa tâche consistait à conseiller le gouvernement sur la mise en place d'un programme national d'assurance pour les médicaments d'ordonnance – connu sous le nom de régime d'assurance-médicaments – qui serait abordable pour les Canadiens, leurs employeurs et les gouvernements. Le gouvernement a demandé au Conseil d'entamer un dialogue avec les Canadiens et a publié un document de réflexion exposant un éventail d'options possibles sur la façon de faire progresser un régime national d'assurance-médicaments et soulignant les questions clés que le Conseil devrait aborder dans ses travaux. »

Il est question de l'« industrie pharmaceutique » ici et là, mais seulement dans la mesure où le Conseil  recommande une meilleure réglementation de l'industrie et une limite sur le financement du système de santé par l'industrie pour éviter l'influence indue.

L'industrie pharmaceutique, son mode de fonctionnement, qui la contrôle et les intérêts qu'elle sert sont des questions totalement exclues de la discussion, des éléments à ne pas remettre en cause. Ce type d'arrangements ne peut que faciliter les stratagèmes pour payer les riches dans lesquels des fonds publics sont utilisés pour payer des intérêts privés au nom d'un « programme national d'assurance-médicaments ».

(Photos : LML)

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Des campagnes pour bloquer une nouvelle direction pour le secteur pharmaceutique

Les grandes sociétés pharmaceutiques attaquent l'opinion publique qui exige une nouvelle direction pour ce secteur afin de servir le peuple sur la base de l'autosuffisance et d'une entreprise publique contrôlée par une autorité publique à laquelle le peuple peut faire confiance et qu'il peut tenir responsable. Les grandes sociétés pharmaceutiques tentent de dévier la discussion vers les prix de marché payés pour les médicaments et l'introduction ou non d'un régime privé/public d'assurance-médicaments, ce qui garantirait une demande élargie et un paiement pour leurs produits.

L'enjeu dans ce secteur n'est pas le prix des médicaments demandé par les sociétés pharmaceutiques mondiales ni comment les Canadiens devraient le payer. Le problème relève du contrôle privé des sociétés pharmaceutiques mondiales du secteur pharmaceutique et leurs visées de profit maximum privé, et de la nécessité d'une nouvelle direction qui comprend une entreprise publique qui suffit à ses besoins, contrôlée par le peuple et son objectif de garantir le droit de tous aux soins de santé.

Un article a récemment été publié dans National Newswatch intitulé « Exempter les médicaments liés à la COVID des nouveaux contrôles de prix : l'hypocrisie d'Ottawa », par Nigel Rawson et John Adams[1]. On peut y lire : « En janvier, le gouvernement fédéral compte transformer de façon draconienne la réglementation de son tribunal qui fixe les prix maximums des nouveaux médicaments et des vaccins au Canada. [...] Des éléments clés du projet gouvernemental ont été vertement critiqués par les patients, les chercheurs et les analystes en produits pharmaceutiques depuis son annonce initiale en 2017. Ces inquiétudes se sont accentuées pendant la pandémie de la COVID-19. Plusieurs mois avant sa mise en oeuvre, le projet a déjà bloqué l'accès à de nouveaux médicaments importants pour les patients canadiens. »

Les auteurs se concentrent surtout sur le tribunal gouvernemental, sur la question des prix des médicaments et les répercussions possibles de ceux-ci sur la production, la disponibilité et l'approvisionnement de produits pharmaceutiques. Ils soulèvent les problèmes d'« accès à de nouveaux et importants médicaments » du point de vue du marché pour des médicaments produits par les grandes compagnies pharmaceutiques mondiales et non du point de vue d'ouvrir une nouvelle direction et un nouvel objectif pour le secteur, qui servent le peuple et son droit aux soins de santé.

Les auteurs soulignent : « Des études de cas ont montré que les nouveaux règlements peuvent exiger des fabricants qu'ils réduisent leurs prix à des niveaux non viables. En outre, les essais cliniques financés par les concepteurs de médicaments ainsi que le nombre de nouveaux médicaments au Canada ont diminué de façon dramatique. »

On sonne l'alarme et on encourage les gens à se lever à la défense des grandes compagnies pharmaceutiques, ou à préconiser que le tribunal et les contrôles de prix sont la voie vers l'avant.

L'article continue dans cette veine, affirmant que la proposition du gouvernement est « hypocrite » puisqu'elle permet aux grandes sociétés pharmaceutiques de dicter les prix des médicaments pandémiques, mais pas des autres médicaments : « Or, le 17 septembre, Ottawa a annoncé une politique spéciale qui réduit le pouvoir du tribunal d'examiner les vaccins et les médicaments pour la COVID-19, tels que le remdesivir, laquelle politique fait partie d'un 'effort gouvernemental visant à assouplir provisoirement le processus de réglementation des médicaments et des instruments médicaux nécessaires au diagnostic, au traitement, à l'atténuation ou à la prévention de la COVID-19'.

« Les fabricants pourront fournir ces produits selon leurs propres tarifs en vigueur, sauf si le tribunal des prix reçoit une plainte d'un ministre fédéral ou provincial de la santé. C'est bien qu'Ottawa ait commencé à comprendre que certains éléments de la révision des prix représentent un lourd fardeau réglementaire pour les concepteurs de médicaments et un obstacle à ce que les besoins des patients soient comblés. »

Les auteurs semblent enchantés de constater que les grandes sociétés pharmaceutiques pourront s'enrichir par la vente de vaccins et de médicaments pour la COVID-19. La pandémie met en lumière à quel point le Canada est dépendant de ces compagnies et la nécessité d'une nouvelle direction basée sur l'entreprise publique autosuffisante dans le secteur pharmaceutique.

Les auteurs défendent la demande des grandes entreprises pharmaceutiques de mettre fin au contrôle des prix pour tous les médicaments. Ils affirment : « Le Canada est présentement un marché commercialement viable pour de nouveaux médicaments et vaccins, malgré les obstacles créés par les gouvernements fédéral et provinciaux qui limitent, retardent ou refusent l'accès aux nouveaux médicaments, en particulier les plus dispendieux.

« Cependant, les nouveaux contrôles des prix du fédéral empêcheront plusieurs nouveaux médicaments d'entrer au Canada. Les Canadiens ayant des maladies rares seront les premiers à en subir les impacts. »

Les auteurs appellent les Canadiens à porter plainte contre « la bureaucratie et les contrôles des prix » auxquels les grandes sociétés pharmaceutiques sont confrontées, et qui empêcheront peut-être l'accès des patients à de nouveaux médicaments ou, au contraire, à se ranger peut-être du côté du gouvernement et de sa prétention que le tribunal et les contrôles des prix sont des mesures nécessaires. Ainsi, on cherche à empêcher les Canadiens de se pencher sur une nouvelle direction prosociale, d'en discuter, de planifier et de s'y engager, pour soutirer une fois pour toutes le secteur de l'emprise des grandes sociétés pharmaceutiques mondiales.

Les auteurs donnent l'exemple d'un cartel pharmaceutique mondial qui refuse de vendre une nouvelle drogue  le Trikafta  au Canada en raison des « incertitudes qui planent sur les nouveaux règlements de fixation des prix ». Ce recours à des cas spécifiques vise à imposer un chantage émotif aux Canadiens pour se plier aux termes des grandes sociétés pharmaceutiques et pour accepter leur domination, un peu comme lorsque les oeuvres caritatives des grandes entreprises intimident les gens en les prenant par les sentiments pour qu'ils donnent de l'argent plutôt que de regarder les problèmes en face et de les résoudre par une nouvelle direction.

Pour le Trikafta et d'autres nouveaux médicaments, selon les auteurs, les grandes entreprises pharmaceutiques mondiales semblent adopter une « approche attentiste. Depuis que la réglementation a été finalisée en août 2019, une liste grandissante de médicaments a été approuvée aux États-Unis, mais n'a pas été soumise à Santé Canada pour une évaluation ».

Les auteurs accusent le gouvernement Trudeau d'accroître « la bureaucratie, ce qui rend le Canada moins attrayant comme endroit où on peut faire de la recherche et lancer de nouveaux médicaments qui pourraient réduire les souffrances des Canadiens et prolonger des vies ».

Les Canadiens devraient dénoncer cet argumentaire et cette direction, et accuser les grandes sociétés pharmaceutiques de bloquer et de détruire le développement d'une recherche canadienne qui s'appuie sur elle-même, d'une production indépendante, d'une disponibilité de médicaments et d'un développement de l'expertise par le biais de l'entreprise publique.

À la fin de l'article, les auteurs affirment : « La pandémie a une fois de plus montré que notre système de santé est une ressource limitée et fragile. Les médicaments contribuent à la viabilité du système de santé et des vies des patients. Le gouvernement fédéral devrait reconnaître la valeur d'autres médicaments innovateurs qui révolutionnent l'existence et mettre en oeuvre des politiques rationnelles qui permettent aux Canadiens de bénéficier des progrès technologiques et qui encouragent la recherche et le développement au Canada. Agir autrement serait d'une grande hypocrisie. »

Si notre « système de santé est une ressource limitée et fragile », c'est précisément parce qu'il est contrôlé par les intérêts privés des grandes entreprises pharmaceutiques qui rivalisent pour dominer ce secteur tout en faisant le maximum de profit et bloquent un développement canadien indépendant. Pour rompre avec l'état « limité et fragile » du système de santé, il faut une nouvelle direction sous le contrôle du peuple dont l'objectif est de garantir la santé en tant que droit pour tous et non en tant que droit pour quelques-uns à des fins de profit maximum.

Note

1. Les auteurs Nigel Rawson et John Adams disent être membres de l'Institut canadien en politiques de santé (CHPI) et de la Coalition pour les meilleurs médicaments (BMC).

Sur son site Web, le CHPI affirme que son principal souci est « l'économie de la santé et les questions politiques liées à l'accès des patients aux biens et services médicaux innovateurs, ainsi qu'aux questions monétaires liées à la viabilité et le rapport qualité-prix pour les contribuables. »

La BMC affirme que son objectif est « Des programmes de médicaments qui permettent un accès équitable et uniforme aux médicaments pour tous les Canadiens ».

Ces objectifs et énoncés de mission répondent à ceux des grandes sociétés pharmaceutiques pour le profit maximum par la vente de médicaments et son contrôle continu du secteur pharmaceutique.

(Photos : LML)


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Les élections en Colombie-Britannique

Les résultats

Les résultats préliminaires basés sur les suffrages exprimés le jour de l'élection, le 24 octobre, sont les suivants : NPD : 55, Parti libéral : 29, Parti vert : trois et aucun indépendant élu. Elections BC prévoit que les résultats définitifs seront annoncés vers le 16 novembre en raison du grand nombre de bulletins de vote par correspondance (c'est-à-dire des électeurs qui ont voté en dehors de leur circonscription) et de bulletins de vote envoyés par voie postale. Ce classement peut changer lors du décompte final, mais pas suffisamment pour modifier la majorité du NPD.

Au moment de la dissolution, la représentation à l'Assemblée législative était la suivante : NPD : 41, Parti libéral : 41, Parti vert : deux, indépendants : deux et un siège vacant.

Elections BC a déclaré que le taux de participation était « d'au moins » 52,4 %. Le nombre définitif de votes exprimés, les députés élus à l'Assemblée législative et la position des partis à l'Assemblée législative ne seront connus qu'une fois le décompte final terminé. Le dépouillement a été prolongé en raison du grand nombre de bulletins de vote par correspondance et par la poste dus à la pandémie. Le nombre de bulletins de vote reçus continue de changer chaque jour.

Pour alléger la pression sur les bureaux de scrutin et maintenir les protocoles de la santé publique, les électeurs ont été encouragés à demander une trousse de vote par la poste et aux bureaux d'Élection BC dans les circonscriptions. Le nombre de bulletins de vote par la poste reçus par Elections BC et envoyés aux bureaux de circonscription avant le 29 octobre était d'environ 525 000, ce qui ne comprend pas les bulletins déposés directement aux bureaux de circonscription au lieu d'être envoyés par la poste. Sur les 1 827 201 bulletins de vote jusqu'à maintenant dépouillés, 1 217 201 ont été déposés par anticipation le 24 octobre, le reste sont des bulletins par correspondance et des bulletins de vote par la poste.

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Le problème d'investir le peuple
du pouvoir persiste

À l'instar de tous les partis cartellisés, le premier ministre élu, John Horgan, affirme qu'il a reçu un mandat du peuple de la Colombie-Britannique pour gouverner comme il l'entend, même si, au mieux, son gouvernement n'a reçu que 45,08 % des voix (au 29 octobre), avec un taux de participation dérisoire de 52,4 % des électeurs admissibles. Son soi-disant mandat repose donc sur les votes de 23,62 % des électeurs admissibles.

De plus, de nombreux électeurs parmi ce 23,62 %, étaient fortement en désaccord avec le déclenchement des élections en pleine pandémie et trouvaient que cette décision était opportuniste, antidémocratique et un simple coup de force. Tant le déclenchement des élections que la campagne électorale ont montré un mépris et une indifférence face à la situation difficile parmi le peuple, causée par les pertes d'emploi, les pressions exercées sur les professionnels et les travailleurs de la santé, les enseignants et les travailleurs en éducation, les étudiants et les parents, le problème des itinérants et la crise croissante des opioïdes ainsi que les craintes très réelles d'une résurgence de la COVID-19 et de la répétition des décès tragiques, de la souffrance et de l'isolement des résidents des établissements de soins de longue durée. Beaucoup ont voté avec réticence pour le NPD parce qu'ils craignaient qu'un gouvernement libéral ne soit encore plus brutal.

On ne peut certainement pas parler d'un consentement des gouvernés pour le programme NPD.

Depuis son arrivée au pouvoir en 2017, le gouvernement minoritaire du NPD a été un représentant docile et prédisposé à servir les intérêts financiers privés internationaux qui convoitent les ressources naturelles et humaines de la Colombie-Britannique, comme on peut le voir, entre autres, avec les projets de LNG Canada et du barrage du Site C. Le 22 octobre, le Globe and Mail a publié une entrevue avec John Horgan dans laquelle ce dernier expliquait que sa décision de déclencher les élections avait été influencée par les conseils qu'il avait demandés au président et chef de la direction de Jim Pattison Group, la deuxième plus grande société privée du Canada ayant des intérêts dans toutes les grandes industries de la Colombie-Britannique. Ni l'exécutif du NPD ni les membres ni les députés n'ont été mobilisés dans la décision de déclencher les élections.

La décision a été prise par le premier ministre et une poignée de conseillers non élus. Il est indéniable que le sentiment d'aliénation des électeurs envers le processus politique est plus répandu que jamais, en raison de l'élection elle-même et de la marginalisation du corps politique qui n'a pas son mot à dire sur les questions qui le concernent. C'est particulièrement ressenti par les travailleurs de la santé et les familles des résidents en soins de longue durée, les enseignants et les autres travailleurs de l'éducation et les travailleurs de l'industrie hôtelière qui manifestent avec force contre l'échec du gouvernement à assumer la responsabilité sociale des décisions annoncées. Les travailleurs ont été complètement écartés de la riposte à la pandémie et sont devenus la cible des ordres venant d'en haut.

Alors que certains espèrent que, maintenant que le NPD est majoritaire, il peut être persuadé d'agir dans l'intérêt du peuple et de l'environnement, les plans du gouvernement de John Horgan sont déjà inscrits dans le « Plan de relance » publié quelques jours avant le déclenchement des élections[1]. C'est une continuation de l'ordre du jour néolibéral antisocial selon lequel la sécurité et la prospérité de la Colombie-Britannique dépendent des stratagèmes pour payer les riches, de l'appui à l'entreprise privée, de la poursuite des projets qui remettent des milliards de dollars aux monopoles mondiaux, une voie qui s'est déjà avérée désastreuse pour l'environnement, pour une économie indépendante et qui viole les droits ancestraux des peuples autochtones.

La grande majorité des Britanno-Colombiens a été exclue de la décision de tenir des élections, de toute discussion sur les problèmes auxquels fait face le corps politique et les solutions qui favoriseraient le peuple. Cette expérience fait ressortir, une fois de plus, la nécessité de nouvelles dispositions, du renouveau politique pour mettre fin à la marginalisation du peuple et d'une nouvelle direction pour l'économie fondée sur la satisfaction des besoins du peuple.

Note

1. « La restructuration des arrangements étatiques pour renforcer l'économie provinciale qui paie les riches », K.C. Adams, LML, 3 octobre 2020

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La Reine leur a tout donné

Encore une fois, les élections d'octobre 2020 en Colombie-Britannique montrent à quel point le système uninominal majoritaire à un tour est déformé et comment il concentre le pouvoir d'une manière qui va à l'encontre de la volonté du peuple.

Lors des élections de 2020, le NPD n'a obtenu que 45,03 % des voix (chiffres basés sur un décompte non officiel des votes, les bulletins de vote par la poste n'ayant pas encore été dépouillés). Dans le cadre du système uninominal majoritaire à un tour, bien qu'il ait obtenu une minorité de voix au niveau provincial, il est désormais un gouvernement majoritaire qui détient 55 des 87 sièges de l'Assemblée législative (ce qui représente 63,2 % des sièges). Le NPD a gagné 14 siège de plus, alors que sa part du vote populaire n'a augmenté que de 5 % (par rapport à 40,29 % lors des élections de 2017).

Pour sa part, le Parti libéral de la Colombie-Britannique a obtenu 29 sièges avec 33,3 % du vote populaire tandis que le Parti vert a obtenu trois sièges avec 15,3 %, le Parti conservateur aucun avec 2,35 % et les autres partis aucun avec 1,9 %.

Dans un système électoral de représentation proportionnelle, les résultats de l'élection de 2020 auraient été sensiblement différents. L'objectif d'un système de représentation proportionnelle est que la répartition des sièges de l'Assemblée législative reflète le plus possible les résultats du vote populaire. Par exemple, pour l'élection de 2020, avec un système de représentation proportionnelle le résultat aurait été tout d'abord que le NPD ne disposerait pas d'un gouvernement majoritaire. Au lieu de cela, dans l'Assemblée législative de 87 sièges, le NPD détiendrait autour de 39 sièges (au lieu de 55), le Parti libéral autour de 31 sièges (au lieu de 29), le Parti vert autour de 13 sièges (au lieu de trois) et le Parti conservateur autour de deux sièges (au lieu de zéro).

Après cette élection, avec l'actuel système uninominal majoritaire à un tour, de nombreux électeurs de vastes régions de la province n'auront pas de députés qui représentent leur préférence politique. Par exemple, il semble que les libéraux seront évincés complètement des 14 sièges de l'île de Vancouver malgré qu'un nombre important de résidents aient voté pour ce parti. C'est la même chose pour une grande partie du nord-est et du centre de la province où les libéraux dominent et où le NPD, les verts et les conservateurs sont exclus malgré un soutien important.

Après la victoire de son parti aux élections provinciales de 1972, l'ancien premier ministre néodémocrate Dave Barrett a déclaré à la presse que « la Reine nous a tout donné »[1]. Il voulait dire par là que, dans le système électoral majoritaire à un tour, le bureau du premier ministre acquiert de grands pouvoirs et que « une fois que le pouvoir est conféré [...], c'est la prérogative du gouvernement de l'utiliser ». Une fois qu'un premier ministre est élu, il ou elle contrôle le Cabinet, les ministères gouvernementaux, l'Assemblée législative et le parti lui-même, et il y a peu ou pas de contrôle sur ce pouvoir.

Comme l'a souligné l'ancien député, maintenant décédé, du Crédit social, Rafe Mair, ces partis politiques, quelle que soit leur affiliation, « aiment le pouvoir absolu » et l'autoritarisme inhérent au système uninominal majoritaire à un tour, et « préfèrent attendre d'avoir100 % d'autorité que de partager le pouvoir avec l'autre camp détesté ». Oui, un jour tous les quatre ans, nous avons le droit de voter. Mais pour le reste de ces 1 460 jours environ, nous vivons sous une sorte de dictature élue où le peuple n'a aucun contrôle sur les décisions qui touchent sa vie.

Le fait est que les électeurs de la Colombie-Britannique sont privés de tout pouvoir à cause du système électoral et de la domination des partis cartellisés. Les groupes d'intérêt puissants aiment cet arrangement, notamment les grandes entreprises mondialisées, car il leur permet de n'avoir à frapper qu'à une seule porte pour obtenir ce qu'ils veulent. La représentation proportionnelle ne résout pas le problème fondamental de la privation de pouvoirs des électeurs, mais au moins elle permet de mieux refléter la volonté des électeurs. La Colombie-Britannique a tenu un certain nombre de référendums sur la réforme électorale, le plus récent étant sur la proposition référendaire de 2018 d'adopter la représentation proportionnelle (qui a été rejetée). Toutefois, que l'on soit pour ou contre la représentation proportionnelle, les problèmes posés par le système uninominal majoritaire à un tour et la question plus vaste d'investir les électeurs du pouvoir demeurent.

Note

1. Barrett, Dave et William Miller. « Barrett : A Passionate Political Life », Vancouver, Douglas & McIntyre, 1995.

(Photos : LML)

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Tous les yeux sur la Mi'kmaqi!

De vigoureuses actions se poursuivent pour
affirmer le droit issu des traités des pêcheurs
mi'kmaq de pêcher le homard

Vancouver, 24 octobre 2020

Tous avec les Mi'kmaq !
Montréal

Dimanche 1er novembre
Rassemblement à midi; marche à 13 h

Place Émilie-Gamelin, 1500, rue Berri
Organisé par Kaiatanoron Lahache et Waieñhawi ahache
Facebook

Des actions militantes ont lieu partout au Canada et au Québec pour affirmer les droits ancestraux et issus des traités des peuples autochtones d'un océan à l'autre, en particulier les pêcheurs mi'kmaq qui affirment leur droit de participer à la pêche au homard en Nouvelle-Écosse pour gagner une « subsistance convenable », tel qu'énoncé dans les traités signés entre la Couronne britannique et les Mi'kmaq, qui demeurent en vigueur aujourd'hui. Les Premières Nations, divers syndicats et l'Union nationale des fermiers ont publié des déclarations de solidarité avec les pêcheurs mi'kmaq. Partout au Canada, des gens de tous horizons rejettent également les tentatives de l'État canadien de diviser le peuple sur une base raciste et d'inciter à la violence raciste contre les Mi'kmaq et d'autres peuples autochtones. Les manifestations et les actions de solidarité attribuent la responsabilité de la situation à l'État canadien raciste qui refuse de résoudre les préoccupations de longue date des peuples autochtones et de redresser les injustices historiques commises à leur encontre en affirmant leurs droits et en rendant justice, comme il a le devoir de le faire en tant que partie signataire des traités[1].

Parmi les luttes menées par les peuples autochtones, il y a la nation algonquine anishinabeg du lac Barrière, qui lutte pour protéger la population d'orignaux en déclin rapide dans la réserve faunique de La Vérendrye; la nation haudenosaunee et le mouvement pour la restitution du territoire appelé « 1492 Land Back Lane » près de Caledonia en Ontario; les Wet'suwet'en et leur lutte contre Coastal GasLink dans le nord de la Colombie-Britannique ; la Société des femmes guerrières Secwepemc et la lutte des guerriers Tiny House contre le pipeline Trans Mountain; le combat des Kanienkehà:ka de Kanehsatà:ke pour affirmer leur revendication sur la pinède d'Oka; ainsi que le camp Pekiwewin à Edmonton, qui assure la sécurité de plus d'une centaine de personnes qui, autrement, seraient des itinérants.

LML lance l'appel à tous à continuer de s'organiser et de prendre part aux actions en appui aux peuples autochtones pour veiller à ce que le Canada entretienne avec eux des relations justes, afin que la juste revendication des pêcheurs mi'kmaq, parmi plusieurs autres, soit dûment satisfaite telle que l'exigent les traités dont le Canada est signataire et conformément aux obligations du Canada en vertu du droit international.

Ottawa, Ontario





Windsor, Ontario


Calgary, Alberta



Vancouver, Colombie-Britannique




Island Highway, Île de Vancouver

Note

1. Voir aussi le reportage sur les actions de solidarité Tous les yeux sur la Mi'kmaqi dans le numéro du 24 octobre 2020 du LML

(Photos : LML, A. Woo, K. Teixeira)

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Déclarations de solidarité avec les pêcheurs mi'kmaq

Le Syndicat des travailleurs et
travailleuses des postes

Le STTP est solidaire des pêcheurs de homard mi'kmaq qui revendiquent leur droit de pêche issu de traités pour en tirer une subsistance convenable. Le STTP condamne aussi les actes blessants et haineux commis par des pêcheurs non autochtones et leurs alliés. Les peuples autochtones, qui font valoir leurs droits légaux et traditionnels de pêche, ne devraient pas être confrontés à la violence et à la haine.

Pour parvenir à une société fondée sur l'équité, l'égalité et la justice, la réconciliation avec les peuples et les communautés autochtones est plus que jamais nécessaire. Et elle ne sera possible que si nous respectons les traités, comprenons le contexte de leurs luttes et dénonçons l'oppression et la violence.

Jusqu'à l'arrivée des colons, qu'ils ont accueillis, les peuples autochtones ont occupé les terres sur lesquelles nous vivons. Ces terres et leurs ressources leur ont été enlevées de force par ces mêmes colons, qui ont aussi envoyé leurs enfants dans des pensionnats et nié leurs droits fondamentaux.

Les membres de la Première Nation des Sipekne'katik se battent pour défendre leur droit de pêche, conformément aux traités que leurs ancêtres ont signés, il y a 260 ans, avec les Britanniques. Le STTP reconnaît que les communautés mi'kmaq ont le droit de pêcher pour s'assurer une subsistance convenable. Ce droit est protégé par les traités et confirmé par la Cour suprême dans l'arrêt Donald Marshall de 1999. Les droits issus de traités sont aussi enchâssés dans le droit canadien puisqu'ils sont inscrits dans la Constitution.

Appuyer les Premières Nations mi'kmaq dans leur lutte pour la justice et le droit de vivre dans la dignité fait partie du travail du STTP en vue de créer un monde où règne l'égalité. Notre appui fait partie de la réconciliation. Et celle-ci exige la création de nouveaux rapports entre les autochtones et les non-autochtones et la mise en oeuvre des 94 appels à l'action que la Commission de vérité et réconciliation a publiés en décembre 2015.

Nous devons reconnaître les injustices passées imposées par les colons aux peuples autochtones et reconnaître les répercussions qui aujourd'hui découlent de la colonisation. Nous devons dénoncer ces injustices et travailler à les réparer. Nous pourrons alors aller de l'avant vers un avenir meilleur. C'est dans cet esprit que le STTP exprime sa solidarité avec les pêcheurs de homard mi'kmaq.

Voici quelques gestes que vous pouvez poser

 1. Faites un don en argent
Frontlines Credit Union : virement électronique à 752frontline@gmail.com
Première Nation Sipekne'katik : virement électronique à monicah@sipeknekatik.ca (on peut aussi utiliser Paypal)

2. Envoyez une lettre ou un courriel à votre députée ou député fédéral ou lui passer un coup de fil  : Dites-lui que vous appuyez les Mi'kmaq et demandez que le gouvernement prenne des mesures pour protéger les pêcheurs et s'opposer à la violence à leur endroit et à leur criminalisation.

3. Participez à une action – Les sympathisants à la cause des pêcheurs mi'kmaq organisent des activités dans de nombreuses localités. Participez-y.

4. Informez-vous

Pour les membres non autochtones, une partie de la réconciliation consiste à se renseigner et à acquérir une perspective historique. Les conflits relatifs aux pêches existent dans la région de l'Atlantique depuis de nombreuses années. Apprenez-en davantage sur la crise de Burnt Church, par exemple, qui a secoué la région entre 1999 et 2002.

Renseignez-vous sur Clearwater, une entreprise qui, avec l'approbation du gouvernement, fait une pêche abusive des homards, et qui le fait en dehors des paramètres saisonniers de la pêche. Le PDG de Clearwater est l'homme le plus riche de la Nouvelle-Écosse.

Cette situation démontre clairement le fondement colonial de notre système juridique, le manque d'engagement du gouvernement envers la réconciliation et le peu d'égards envers les principes de conservation et de durabilité.

La Cour suprême du Canada n'a pas rendu une décision inébranlable dans l'affaire des droits de pêche issus des traités, contribuant ainsi à la formation d'alliances néolibérales entre le gouvernement et les sociétés.

Et qu'en est-il de la conservation et de la durabilité ? Clearwater pratique la pêche de manière irresponsable en utilisant 6 500 casiers, ce qui est considérablement plus qu'un bateau de subsistance mi'kmaq, qui en contient à peine 50. Et Pêches et Océans Canada passe la situation sous silence.

(22 octobre 2020. Photos : AMSMC, M. Barnes)

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Fédération canadienne des enseignantes
et des enseignants

La Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants (CTF/FCE) se range aux côtés des peuples autochtones du Canada tandis qu'ils poursuivent au quotidien leur lutte pour la justice. Elle réitère qu'elle condamne le racisme, la discrimination, les actes d'intimidation et de violence, et la haine sous toutes ses formes. En réponse aux récents événements survenus en Nouvelle-Écosse, la CTF/FCE soutient les Mi'kmaq dans leur volonté d'exercer leurs droits inhérents issus des traités et confirmés dans la Charte canadienne des droits et libertés pour pratiquer une pêche au homard de subsistance convenable. Ce droit leur a été reconnu en 1760-1761 dans les traités de paix et d'amitié et confirmé par la Cour suprême du Canada dans la décision Marshall en 1999.

Par solidarité, nous demandons à nos membres de la Nouvelle-Écosse et d'ailleurs d'agir avec les peuples autochtones d'une manière harmonieuse. Dans un souci de vérité et un esprit de réconciliation, nous demandons que les droits inhérents des Mi'kmaq soient défendus, que la loi soit maintenue et que le conflit qui cible injustement les Mi'kmaq soit résolu au plus vite.

Shelley L. Morse, présidente

Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants

(21 octobre 2020. Photo : P. Kirman)

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L'Union nationale des fermiers

L'Union nationale des fermiers (UNF) est solidaire avec les pêcheurs mi'kmaq qui affirment légalement leurs droits issus de traités de pratiquer une pêche pour une subsistance convenable et elle condamne les actes racistes et répréhensibles de violence et d'hostilité perpétrés contre eux. Que les Mi'kmaq puissent chasser, pêcher et cueillir fait partie des droits inhérents, issus de traités et affirmés par la constitution et nous appuyons leur lutte pour exercer ces droits et le droit à la souveraineté alimentaire. L'industrie de la pêche au homard dans les provinces maritimes est dominée par une corporation (Clearwater – l'une des plus grosses compagnies de mollusques au monde verticalement intégrée) et nous demandons que le droit légal des pêcheurs mi'kmaq d'accès à une subsistance de ces eaux soit respecté.

En 1999, la Cour suprême du Canada affirmait les traités de paix et d'amitié (signés entre 1725 et 1779) par l'entremise de la décision Marshall et déclarait le droit des Mi'kmaq de tirer une « subsistance convenable ». Le 17 septembre 2020, la Première Nation Sipekne'katik, en tant que nation souveraine, a décidé d'exercer pour la première fois ces droits selon une pêche autoréglementée. Cette décision a suscité de l'indignation et de la violence de la part de la communauté des pêcheurs commerciaux et fut accueillie par l'inaction de la part du gouvernement et de la GRC. La violence a continué à s'escalader et des pêcheurs non autochtones ont érigé des barrages, incendié des bâtiments, des bateaux, des véhicules et endommagé de l'équipement de pêche afin de restreindre la pêche – toutes des infractions aux droits légaux issus des traités. Le 21 octobre 2020, il fut confirmé qu'une injonction avait été mise en place contre ceux qui entravaient l'accès des membres de la bande Sipekne'katik à sa pêche.

En tant que fermiers, nous sommes privilégiés d'avoir une relation étroite avec la terre et nous avons la responsabilité d'en soutenir la santé pour les générations à venir. Nous, comme les pêcheurs mi'kmaq, nous efforçons de nourrir nos communautés et de gagner notre vie tout en protégeant la terre et les eaux; nous travaillons aussi pour atteindre la souveraineté alimentaire face aux systèmes alimentaires contrôlés par les multinationales. C'est par cet intérêt commun que nous sommes solidaires avec leur lutte. Nous demandons au premier ministre Trudeau, à la ministre Bernadette Jordan et à la ministre Carolyn Bennett de négocier de bonne foi afin de s'assurer que la décision Marshall soit respectée, basée sur les droits inhérents et les droits issus de traités avec les Mi'kmaq de chasser, de pêcher et cueillir, tels que protégés par l'article 35 de la Constitution canadienne. Ceci comprend l'acceptation de l'autogestion par les Mi'kmaq, au lieu du contrôle continu par le ministère des Pêches et des Océans. Nous demandons également que tous les actes de violence et les comportements criminels envers les pêcheurs mi'kmaq et les membres de leurs communautés soient passibles de fortes conséquences. Nous sommes heureux que les Mi'kmaq aient obtenu une injonction contre ceux qui perturbent leur pêche, mais nous demandons à Bill Blair, en tant que ministre de la Sécurité publique, et à David Lametti, en tant que ministre de la Justice, d'être imputables pour l'application égale du respect de la loi et de s'assurer que l'état du droit soit respecté.

L'UNF presse toutes les agences gouvernementales pertinentes, aux niveaux provincial et fédéral, à entamer des mesures audacieuses qui arrivent à point pour s'assurer que les droits inhérents des Mi'kmaq soient respectés et que la sécurité et la protection des communautés mi'kmaq soient priorisées. Nous sommes tous visés par les traités.

(26 octobre 2020)

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À titre d'information

Feuillet d'information sur la décision Marshall


La Première Nation Sipekne'katik se rassemble à Saulnierville, Nouvelle-Écosse, le 17 septembre 2020, pour célébrer l'ouverture de la première pêche de subsistance modérée Mi'kmaq, 20 ans après la décision R. c.. Marshall.

Que disent les décisions Marshall ? En septembre 1999, dans l'affaire Donald Marshall, la Cour suprême du Canada a statué qu'une série de traités signés entre 1760 et 1761 par les Mi'kmaq et la Couronne britannique étaient toujours valides.

Connus sous le nom de traités de paix et d'amitié, ils prévoient que les Mi'kmaq ont le droit de récolter et de vendre du poisson, des animaux sauvages, des fruits et baies sauvages pour assurer une subsistance convenable

Dans une deuxième décision, rendue en novembre 1999, la Cour a « clarifié » sa décision antérieure. Ensemble, ces deux décisions sont appelées Marshall 1 et Marshall 2.

Qu'est-ce qu'une « subsistance convenable » ?

La clause la plus importante des traités de 1760 et 1761 est la soi-disant « clause de maisons de troc » qui, selon la Cour suprême, signifie, dans le contexte actuel, un droit à un moyen de subsistance convenable. La « clause de maisons de troc » promettait aux Mi'kmaq (et aux Wolastoqiyik et Peskotomuhkati) que des maisons de troc ou postes de traite gérés par le gouvernement seraient établis pour permettre aux Mi'kmaq de vendre leurs produits comme la viande, les fourrures, les plumes et le poisson. En retour, les Mi'kmaq, les Wolastoqiyik et les Peskotomuhkati ont promis de ne faire du commerce que dans les maisons de troc.

Selon la Cour suprême, la promesse d'un poste de traite et la promesse de ne faire du commerce que dans une maison de troc équivaut à un droit « de commercer pour se procurer les biens nécessaires » (les marchandises européennes dont, en 1760-1761, les Mi'kmaq en sont venus à dépendre) et non un droit général de faire du commerce pour des gains économiques importants.

« La notion de 'subsistance convenable' s'entend des choses essentielles comme 'la nourriture, le vêtement et le logement, complétées par quelques commodités de la vie', mais non de l'accumulation de richesses ... » (Marshall 1, article 59)

Les traités signés en 1760-1761 par les Mi'kmaq et la Couronne britannique sont toujours valides.

Est-ce que toutes les ressources naturelles et
les aliments sont couverts par les traités ?

Non. Les Mi'kmaq ont le droit continu de récolter et de vendre tous les types de produits que les Mi'kmaq commerçaient dans les années 1760. Les articles qui peuvent être récoltés et vendus pour gagner une subsistance convenable ne s'étendent pas, par exemple, aux grumes. La Cour suprême du Canada dans R. c. Bernard; R. c. Marshall (« l'affaire de l'exploitation forestière ») a conclu que lorsque les traités ont été signés, il y avait tellement de bois disponible pour le bois d'oeuvre que les nouveaux colons n'avaient pas besoin d'acheter du bois aux Mi'kmaq pour construire des maisons, des granges, des hangars, etc.

Elle a conclu que, bien que les traités protègent les droits des Mi'kmaw de récolter et de disposer de certains articles, la coupe et la vente de grumes (exploitation commerciale du bois) n'étaient pas protégées en tant qu'« évolution logique » d'une activité commerciale traditionnelle.

Où le droit de traité à une subsistance convenable peut-il être exercé ?

Alors que la Cour suprême a qualifié les traités de 1760-1761 de « traités locaux » exercés par des Mi'kmaq ayant l'autorité communautaire, la territorialité des traités de 1760 et 1761 n'est pas claire et l'approche de l'Assemblée des chefs Mi'kmaq de la Nouvelle-Écosse est que tous les Mi'kmaq de la Nouvelle-Écosse ont les mêmes droits dans toute la province.

Est-ce qu'il y a des limites au droit à une subsistance
convenable issu de traité ?

Oui. La Cour suprême a indiqué que l'exercice des droits issus de traités, comme l'exercice des droits ancestraux, peut être limité.

La Couronne peut limiter ou enfreindre le droit à un moyen de subsistance modéré, mais il doit y avoir un objectif public primordial pour limiter l'exercice du droit  comme la conservation ou la sécurité publique. Toute atteinte doit être le minimum nécessaire pour atteindre l'objectif public et le groupe autochtone doit être consulté avant que la limitation du droit ne soit imposée. Une compensation doit être prévue en cas d'infraction. Ceci est connu sous le nom de « arguments justificatifs »; autrement dit, la Couronne doit démontrer que les limites qu'elle impose au droit issu de traité sont justifiées parce que c'est la seule façon d'atteindre l'objectif public primordial.

Les ressources qui sont récoltées pour obtenir un moyen de subsistance convenable doivent être équitablement partagées avec les non-Mi'kmaq.

À propos du bureau de négociation Kwilmu'kw Maw-klusuaqn

Le bureau de négociation Kwilmu'kw Maw-klusuaqn (KMKNO) travaille au nom de l'Assemblée des chefs Mi'kmaq de la Nouvelle-Écosse dans le cadre des négociations et des consultations entre les Mi'kmaq de la Nouvelle-Écosse, la province de la Nouvelle-Écosse et le gouvernement du Canada.

KMKNO a été développé par les Mi'kmaq pour les Mi'kmaq.

Le but de ces négociations et consultations est de mettre en oeuvre nos droits ancestraux et issus de traités signés par nos ancêtres dans les années 1700.

(www.mikmaqrights.com, Juin 2019. Photos : Mi'kmaq Rights Initiative, J. Gruben)

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Le peuple chilien vote en faveur d'une nouvelle constitution

La participation massive au plébiscite ouvre
la voie à de nouveaux arrangements constitutionnels

Dans son élan, le mouvement du peuple chilien pour le changement a remporté la victoire lors du plébiscite du 24 octobre pour décider si la constitution actuelle, imposée en 1980 par la dictature de Pinochet, doit être remplacée. LML félicite chaleureusement le peuple chilien pour ces résultats décisifs de plus de 78 % de la population en faveur d'une nouvelle constitution à la suite d'une participation sans précédent. Le mouvement populaire a ouvert la voie à de nouveaux arrangements qui favorisent le peuple, et non les intérêts privés et étrangers qui ont eu le feu vert pour dominer le pays depuis le coup d'État de Pinochet, ni les gouvernements qui ont poursuivi le saccage néolibéral depuis ce temps. Cette victoire est d'autant plus importante dans ces conditions de pandémie qui ont exacerbé les crises politiques et économiques auxquelles le peuple est confronté.

Dans ce plébiscite, le peuple devait répondre à deux questions. La première était d'approuver ou de rejeter la rédaction d'une nouvelle constitution. Le vote en faveur d'une nouvelle constitution a été de 78,27 %. La deuxième question était le choix entre une Convention constitutionnelle composée de citoyens élus expressément pour cette instance  ou une Convention constitutionnelle mixte  dont la moitié serait composée de députés siégeant déjà au parlement et l'autre moitié de citoyens élus à cette instance. Les Chiliens ont voté à 79 % en faveur d'une Convention constitutionnelle.

La composition de la Convention constitutionnelle sera répartie également entre hommes et femmes, constituant pas plus de 50 % plus un de l'instance (c'est-à-dire un maximum de 78). En outre, un certain nombre de sièges de la Convention seront réservés aux peuples autochtones qui forment 12 % de la population du Chili. Le sénat chilien n'a pas encore décidé si ces sièges feront partie des 155 sièges de la Convention ou s'ils y seront ajoutés. Ce sera la première fois dans l'histoire du Chili que les peuples autochtones seront représentés dans une instance constitutionnelle, rapporte teleSUR. Les peuples autochtones ont aussi demandé d'être représentés par un nombre égal d'hommes et de femmes et que leur participation soit basée sur leur identité en tant que nations et peuples sur un pied d'égalité, plutôt que d'être limités aux 10 peuples autochtones officiellement reconnus par la Société de développement autochtone national du Chili.
Les membres de la Convention constitutionnelle seront élus l'année prochaine, le 11 avril 2021, le même jour que l'élection des maires, des conseillers et des gouverneurs régionaux. La convention élaborera alors une nouvelle constitution pendant une période maximale de 12 mois. Dès qu'on aura approuvé la nouvelle constitution, un plébiscite de ratification sera fixé dans lequel le vote sera obligatoire.

Le Service électoral chilien (Servel) a rapporté une participation de 7 529 459 personnes aux urnes, la participation la plus élevée depuis les élections présidentielles de 1993. Pour ce qui est du pourcentage de participation de 51 %, il est le plus élevé depuis 2012. Le 26 octobre, le président de Servel, Patricio Santamaria, a noté l'augmentation de la participation citoyenne, en particulier parmi les jeunes, mais aussi parmi les adultes plus âgés même si « un nombre important de personnes n'ont pu participer sur ordre des autorités de la santé parce qu'ils étaient en confinement en raison de la COVID-19 ». Il a aussi souligné que d'autres n'avaient pu participer « tels que les personnes privées de leur liberté et de leurs droits politiques en raison d'une violation flagrante de leurs droits humains ». Il a aussi fait valoir que plus de 100 000 mineurs travaillaient le jour du vote et n'ont pu exercer leur droit de vote. Près de 60 000 Chiliens vivant à l'étranger dans 65 pays  principalement en Argentine, les États-Unis, l'Espagne, le Canada et l'Australie  étaient éligibles pour voter. Plus de 80 % des votants à l'étranger ont voté en faveur de la nouvelle constitution.

La nécessité pour le peuple chilien de demeurer vigilant

La nécessité pour le peuple chilien de demeurer vigilant a été mise en lumière le 25 octobre, lorsque le président Sebastian Pinera, lors d'un discours au palais de la Moneda, s'est donné des airs d'un gouvernement qui appuie le peuple et qui l'accompagnera maintenant dans les prochaines étapes du processus d'affirmation politique. « Ce plébiscite n'est pas la fin, mais bien le commencement d'une voie que nous devons tous suivre ensemble, a-t-il dit. Jusqu'à maintenant, la Constitution nous a divisés. Aujourd'hui, la citoyenneté et la démocratie l'ont remporté et la paix l'emportera sur la violence. C'est une victoire pour tous les Chiliens. » Que penser de ces belles paroles venant d'un président dont le régime s'oppose violemment au peuple et à ses justes revendications depuis plus d'un an ?

Le soir même du discours de Pinera, les gens célébrant la victoire à Santiago au carré de la Dignité ont été une fois de plus assaillis par la répression violente et non provoquée de la police nationale, les Cabineros, violence qui a commencé avant la fermeture des urnes à 20 heures. La police a encerclé le carré pour ensuite attaquer les citoyens avec des canons d'eau et des gaz lacrymogènes, interrompant les célébrations. Mais lorsque la police est partie, les gens ont à nouveau envahi le carré.

On peut se dire sans trop se tromper que c'est la trahison que le régime de Pinera réserve au peuple chilien, alors que le président doit terminer son mandat en mars 2022, au même moment où la nouvelle constitution doit être ratifiée.

Face à cette situation, le peuple chilien misera sans doute sur le courage et la ténacité qui lui ont permis de se rendre aussi loin. Avec l'appui des peuples épris de paix et de justice partout dans le monde, il l'emportera sur les néolibéraux d'aujourd'hui qui défendent les arrangements réactionnaires de l'ère de Pinochet.

(Sources : teleSUR, Prensa Latina, New York Times)

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25e anniversaire du référendum de 1995

La lutte du peuple du Québec pour s'investir de la souveraineté demeure un problème posé et à résoudre


Rassemblement pour le « Oui » à Montréal le 25 octobre 1995 à la veille du référendum

Le 30 octobre 2020 était le 25e anniversaire du référendum en 1995 sur la souveraineté du Québec dans lequel le peuple québécois s'est prononcé dans les conditions difficiles d'un déploiement tout azimut des forces de l'establishment canadien pour écraser son désir d'affirmer son droit en tant que nation souveraine. Mais vingt-ans plus tard, le problème demeure entier. L'Acte de l'Amérique du Nord britannique, qui est à la base de la constitution actuelle, date d'il y a plus de 150 ans. Il conserve les vieilles prérogatives royales et les vieilles conceptions de bâtisseur d'empire qui nient les droits de la nation du Québec, des Premières Nations et du peuple canadien.

Aujourd'hui, un profond mouvement existe parmi la jeunesse en faveur d'un Québec moderne et souverain qui défend les droits de tous et de toutes, qui prend soin de l'environnement naturel et social, qui entretient des relations d'égal à égal avec les peuples des Premières Nations, le peuple du Canada et les peuples du monde et qui est une zone de paix. Il représente le désir de tous ceux et celles qui vivent au Québec, qui constitue une seule et même nation, formée de tous ceux et celles qui y vivent, y travaillent, créent la richesse. Ce mouvement est porteur de beaucoup d'espoir. Ce mouvement objectif, indépendant, cherche et aspire à établir un projet d'édification nationale qui réponde aux aspirations de tous et toutes, soit une société moderne qui reconnaît que tous sont des êtres humains jouissant des mêmes droits et devoirs et contribuent ensemble comme force organisée à la promotion du bien-être de tous.

Beaucoup d'illusions sont créées et entretenues au sujet du système de démocratie dite représentative alors que tous peuvent voir que ce système ne les représente pas. En vertu des arrangements actuels, le peuple n'exerce aucun contrôle sur les prises de décision. Ces institutions, au Québec comme dans tout le Canada, ont été établies suivant l'expérience britannique d'édification nationale du XIXe siècle qui a conservé la « prérogative royale » et maintenu les privilèges entre les mains d'une infime minorité, ce qui était l'essence de l'absolutisme et de la notion archaïque du « droit divin des rois ». Que cette petite minorité soit dirigée par un monarque, un président ou un premier ministre, la plupart des organes du pouvoir ou bien ne sont pas élus, ou bien sont élus selon un processus qui empêche le peuple d'exercer une démocratie conséquente selon le principe « du peuple, par le peuple et pour le peuple ».

Ce sont autant de leçons pouvant être tirées du référendum de 1995.

Formulée par le parti majoritaire à l'Assemblée nationale, le Parti québécois, la question référendaire de 1995 était : « Acceptez-vous que le Québec devienne souverain, après avoir offert formellement au Canada un nouveau partenariat économique et politique, dans le cadre du projet de loi sur l'avenir du Québec et de l'entente signée le 12 juin 1995 ? »

Un peu plus de 5 millions d'électeurs, soit 93,25 % des personnes ayant droit de vote, se sont exprimés. C'était un taux de participation record au Québec. Le projet fut rejeté par 50,58 % des votants, contre 49,42 % en faveur. L'écart entre le « oui » et le « non » a été de 54 288 voix.

L'objectif déclaré du projet de loi numéro 1, l'Avant-projet de loi sur la souveraineté du Québec, était de donner à l'Assemblée nationale le pouvoir de déclarer la souveraineté du Québec et de réclamer « le pouvoir exclusif de faire toutes ses lois, de percevoir tous ses impôts et de conclure tous ses traités ». Il prévoyait l'ébauche d'une nouvelle constitution du Québec, le maintien des frontières actuelles, la création d'une citoyenneté québécoise, l'utilisation du dollar canadien et le maintien des lois et programmes sociaux en vigueur. Il prévoyait aussi que le gouvernement du Québec propose un traité de partenariat avec le reste du Canada basé sur l'entente tripartite signée le 12 juin 1995 par le chef du Parti québécois Jacques Parizeau, le chef du Bloc québécois Lucien Bouchard et le chef de l'Action démocratique Mario Dumont. Cette entente contenait certaines propositions convenues par les trois chefs qu'un Québec souverain ferait au Canada pour définir les relations entre les deux pays.

Le projet de loi numéro 1 est passé en première lecture à l'Assemblée nationale et le gouvernement en a envoyé une copie à tous les foyers du Québec accompagnée de l'accord tripartite Parizeau-Bouchard-Dumont, en préparation pour le référendum.

Le projet de loi a vite trouvé un grand appui dans la société québécoise parce que le moment était opportun et les conditions favorables à la déclaration de la souveraineté du Québec. Les forces progressistes du Québec et du Canada ont également reconnu qu'il y avait urgence à établir un nouveau partenariat économique et politique entre le Québec et le Canada. Le référendum de 1995 s'imposait comme façon de briser l'impasse créée par l'intransigeance libérale envers la souveraineté du Québec ainsi que plus généralement envers le renouveau démocratique et un nouveau partenariat économique et politique entre le Québec et le Canada. Le mécontentement face aux arrangements constitutionnels avait pris de l'ampleur partout au Canada, pas seulement au Québec. Le Forum des citoyens sur l'avenir du Canada de 1990, auquel les gens ont participé en très grand nombre, a montré que les Canadiens ne faisaient pas assez confiance aux politiciens pour les laisser rédiger la constitution et réclamaient des changements en profondeur dans le processus politique. Le besoin d'une constitution moderne et de nouveaux arrangements pour remplacer l'Acte de l'Amérique du Nord britannique de 1867 basé sur la négation de la nation du Québec et des Premières Nations et la nécessité d'investir le peuple du pouvoir de décider de toutes les questions qui le concernent étaient à l'ordre du jour et l'est toujours aujourd'hui.

Le référendum de 1995 était un geste audacieux après près de 25 ans de pourparlers sur la place du Québec dans la Confédération, de soi-disant efforts de réforme constitutionnelle et des initiatives du Québec pour affirmer sa souveraineté : on pense à l'échec du référendum québécois de 1980, à l'échec de l'accord du Lac Meech en 1990, au rejet de l'Accord de Charlottetown par les Canadiens dans le référendum de 1992. C'est sans parler de la période d'effervescence à la fin des années 1960 au Québec autour de la lutte pour la libération nationale et la souveraineté. Les tentatives du gouvernement de Pierre Elliott Trudeau d'écraser la lutte du peuple québécois pour la nation par l'imposition de la Loi sur les mesures de guerre sur le territoire du Québec le 16 octobre 1970 avaient échoué. Loin de se laisser écraser, la jeunesse étudiante et d'autres collectifs avaient résisté à l'occupation militaire et avaient obtenu des appuis de partout au Canada.

Durant la période menant au référendum, les libéraux dirigés par Jean Chrétien, chef du Parti libéral du Canada, et Daniel Johnson, le chef du Parti libéral du Québec, ont dressé tous les obstacles possibles à une discussion sereine sur les besoins de la nation québécoise et le besoin d'une constitution moderne pour le Canada. Ils ont recouru aux mensonges, à la déformation, à la menace et au chantage pour subvertir tout effort de discussion raisonnée. Le « camp du non » a commis des infractions répétées à la Loi référendaire du Québec, notamment en ce qui concerne les limites des dépenses.

Supplément du Marxiste-Léniniste sur la signification des résultats du référendum (cliquer pour agrandir)

L'État colonial anglo-canadien appuyé par tout l'establishment canadien, y compris les grandes entreprises publiques et privées comme Via Rail, Air Canada et Radio-Canada, a mené une vile campagne de peur et s'est livré à toutes sortes de tactiques illégales contrevenant à la Loi référendaire du Québec pour assurer la victoire du Non. Des sommes ont été versées à des individus et à des entreprises dans cet effort concerté pour priver la nation du Québec de la souveraineté. Il y a eu les « manifestations d'unité », dont la dernière le rassemblement de l'unité du 27 octobre 1995 , ou les appels interurbains gratuits enfreignant la Loi sur la consultation populaire du Québec. Il y a également eu la pratique permanente de corruption des leaders ethniques, l'accommodement de gens en position d'influence par des promesses d'emplois, de subventions et d'autres récompenses pour atteindre des fins politiques. Les libéraux sont passés maîtres dans ce genre de chose, pas seulement à Montréal, mais dans tout le pays.

Beaucoup d'efforts ont été faits après le référendum de 1995 pour élargir le mouvement d'indépendance nationale et « tendre la main » aux minorités nationales. Or, sans embrasser résolument et emphatiquement la définition moderne de la nation, on retombe dans ce qu'on appelle le modèle d'« intégration », le modèle européen ou français qui est l'autre versant du multiculturalisme canadien raciste à la moëlle. Le Parti québécois n'a pas été capable de s'élever bien au-dessus de la nation « française » ou « francophone ». Même après avoir pris le pouvoir après la défaite de Jean Charest à l'élection de 2012, entre autres à cause de sa loi matraque contre les étudiants du Québec au printemps 2012, le Parti québécois de Pauline Marois a maintenu cette vision désuète et divisive de la nation sur des bases linguistiques et imposé plus tard sa charte des valeurs sur des bases religieuses et vestimentaires, qui a mené à sa défaite.

L'incapacité du mouvement pour l'indépendance de sortir de ces carcans, qui comprend une opposition quasi haineuse entre partisans de politiques sociales « de gauche » et « de droite », le camp du « oui » et le camp du « non », etc., explique aussi l'échec à mobiliser la vaste majorité des Québécois autour d'un projet commun d'État souverain et moderne et d'un Québec qui défend les droits de tous.

Au lendemain de la défaite du référendum de 1995, il était évident qu'il fallait mettre tout en oeuvre pour ne plus cantonner le projet de souveraineté dans une définition dépassée et restreinte de la nation. Beaucoup ont reconnu cette réalité. Un État moderne ne se construit pas en fonction de la descendance. Un État moderne se construit autour de grands idéaux et un des grands idéaux de l'ère moderne est la création d'un système politique dans lequel tous ont des droits qui sont garantis du fait qu'ils sont des êtres humains.

Aujourd'hui, la lutte pour la souveraineté moderne, la souveraineté du peuple, se pose dans les batailles qu'il mène dans le moment présent. Elle repose dans les mains des travailleurs, les jeunes, les femmes, les différents collectifs qui forment le Québec et doit être au centre des solutions de tous les problèmes auxquels est confrontée la société sur la voie du progrès. C'est le problème auquel les travailleurs sont confrontés et qu'ils sont en train de résoudre en plein coeur de la pandémie en ce moment en défendant leur sécurité, celle de leurs pairs et de l'ensemble de la population. Les vieilles institutions dites démocratiques de même que le système de partis cartellisés sont en faillite et les empêchent de devenir les décideurs dans leurs endroits de travail, les hôpitaux, les écoles et les communautés. C'est le même blocage auquel ils sont confrontés dans l'affirmation de la souveraineté du peuple, de son droit de décider de tout ce qui le concerne. Il n'y a pas de muraille de Chine entre les deux.

Cette semaine, Dominique Anglade, cheffe du Parti libéral du Québec, a souligné le 25e anniversaire du référendum de 1995 en disant « qu'il reste encore quelque chose d'inachevé dans la place que le Québec doit occuper au sein du Canada ». La cheffe libérale estime que le gouvernement québécois doit revendiquer entre autres sa souveraineté culturelle. Elle a dit « que le Québec est maître de son avenir, dans un Canada où chacun doit pouvoir trouver la place qui lui revient. [...] Le Québec ne doit pas renoncer à ses demandes légitimes, ou laisser le pouvoir fédéral prendre une expansion sans limites. »

Ainsi, rien n'a changé. La position libérale actuelle montre que les libéraux n'ont pas abandonné leur conception arriérée de grand empire britannique qui refuse le droit à la souveraineté et le droit du peuple de décider. Elle ramène les vieux clichés de pouvoir et de rivalité entre les provinces et le Canada et nie la nécessité objective de régler les torts qui ont été rejetés un après l'autre. Ce qui est inachevé est l'application du droit du peuple de décider et celui de parler en son propre nom.

(Photos : LML, Fonds d'archive de compté de Verdun)

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