« La crise économique est causée par l'impérialisme américain. Par des investissements massifs de capitaux, de sinistres manipulations du marché et la collaboration avec les gouvernements fédéral et provinciaux, les monopoles américains détruisent les petits agriculteurs, les petits producteurs de lait, petits propriétaires et entreprises. Les investissements américains accrus et le pillage des ressources naturelles du Québec par les monopoles ont créé des milliers de chômeurs partout au pays. Les monopoles américains liés au 'Kentucky Fried Chicken' ont détruit les petites fermes avicoles de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean et ont construit d'énormes fermes [...] pour le marché de Montréal. À Sherbrooke, la compagnie de lait Carnation a liquidé les petits producteurs laitiers régionaux, contribuant grandement à la lutte contre le sentiment anti-impérialiste dans toute la région. Récemment, les investissements américains dans l'industrie des pâtes et papiers ont liquidé plus de 100 petites usines par an et la production a été reprise par de grands monopoles mécanisés qui n'embauchent qu'un petit pourcentage des travailleurs mis à pied. La même situation existe dans les mines de minerai de fer et l'extraction de l'amiante. « Aujourd'hui, face à la crise économique chez nous, les impérialistes américains n'ont pas renouvelé les contrats avec des entreprises [...] situées au Québec, préférant les donner à leurs propres usines en difficulté aux États-Unis. Ainsi, plus de 9000 travailleurs sont mis à pied à Montréal seulement, chez Canadair, United Aircraft, Marconi et Northern Electric. « Le pillage économique et le contrôle du Québec par les États-Unis et l'impérialisme ont entraîné des difficultés et une misère indicibles. Plus de 15 % de la population active est sans emploi. Dans certaines régions comme Trois-Rivières, Saint-Jean et Saint-Jérôme, le chômage a atteint de 40 à 50 % de la population active. Dans les quartiers populaires de Montréal, comme Saint-Henri et Saint-Jacques, le taux de chômage atteint presque 50 %[1]. »
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Les jeunes remplissent l'aréna Paul Sauvé à Montréal en appui à la libération nationale du Québec en 1970, à la veille de la proclamation de la Loi sur les mesures de guerre. |
À la veille du 16 octobre, quand l'armée est déployée dans les rues, des milliers de jeunes et d'étudiants se lèvent à l'aréna Paul Sauvé à Montréal et à l'Université de Montréal pour saluer l'esprit de combat des patriotes québécois et en réponse à la répression sans précédent.
« À bas le fascisme ! », « Nous sommes tous du FLQ - venez nous chercher ! », résonnent parmi les slogans et mots d'ordre. D'autres rassemblements ont lieu à Québec, Sherbrooke, Trois-Rivières et ailleurs. Partout au Canada, des manifestations d'appui à la lutte du peuple du Québec pour la souveraineté ont lieu – à Vancouver, Toronto, Calgary, Winnipeg et ailleurs. Il y a une vigoureuse opposition aux activités terroristes de répression et aux arrestations visant les militants, les personnes progressistes et le PCC(M-L), qui avait été fondé à Montréal en mars 1970.
Toutes ces conditions de travail et de vie soulèvent la colère et l'opposition du peuple qui aspire à bâtir son projet d'édification nationale, pour un Québec moderne indépendant qui n'est pas sous la gouverne d'un État anglo-canadien et de l'impérialisme américain et ses ambitions guerrières. Les Québécois voient la nécessité de conquérir le pouvoir politique et économique et de bâtir la nation du Québec sur tous les plans, pour que les Québécois ne soient plus, comme le dit le poète national Félix Leclerc, « porteurs d'eau, scieurs de bois, locataires et chômeurs dans notre propre pays ».
Dans l'ensemble, on peut dire que cela montre qu'il y avait des conditions révolutionnaires au Québec et au Canada à l'époque, dans lesquelles les idées communistes gagnaient rapidement du terrain dans la conscience des travailleurs et de la jeunesse. Les journaux de l'époque témoignent du fait que le Parti communiste du Canada (marxiste-léniniste), ses organisations précurseures et ses ailes jeunesse étaient au coeur des actions, intervenant de façon active et organisée pour avancer la lutte du peuple du Québec pour son droit de décider de ses propres affaires.
C'est pour écraser la lutte du peuple qui était en effervescence à tous les niveaux et poursuivre son ordre du jour de soumission du peuple québécois au plan d'expansion de l'impérialisme américain que le gouvernement Trudeau a fait adopter la Loi sur les mesures de guerre le 16 octobre 1970. C'était aussi la preuve de la soumission de l'État canadien aux agences de renseignement de l'impérialisme américain et de l'OTAN qui poursuivaient l'opération Chaos dont l'objectif était d'infiltrer et même monter des groupes et elles-mêmes participer à des activités terroristes pour ensuite blâmer le peuple et justifier la répression.
Les activités du FLQ ont été utilisées pour justifier la proclamation des mesures de guerre les plus draconiennes jamais appliquées en temps de paix. C'est à cela que Trudeau a voulu s'attaquer : briser le mouvement organisé des travailleurs et du peuple qui réclamaient justice et des conditions de travail et de vie décentes. Et il n'a pas agi seul, il a agi de connivence avec la CIA et son « Opération Chaos » menée à l'échelle mondiale qui comprenait, entre autres, des attaques terroristes organisées par l'État, des coups d'État, des assassinats, des disparitions et une propagande anticommuniste enragée de pair avec d'autres opérations. Le gouvernement canadien a agi sous les pressions et les ordres des impérialistes américains.
1. « Rien ne sauvera les réactionnaires de la catastrophe économique et politique », Le Quotidien du Canada populaire, 20 novembre 1970
2. « L'initiative révolutionnaire du people vaincra à coup sûr les fanfaronnades des réactionnaires anglo-canadiens ! », Déclaration de l'exécutif national du Parti communiste du Canada (marxiste-léniniste) sur la Loi sur les mesures de guerre et la Loi sur l'ordre public, la situation au Canada et au Québec et les tâches du Parti, Ligne de masse, 10 décembre 1970
La désinformation médiatique en ce qui a trait à la Loi sur les mesures de guerre de 1970 a tendance à se concentrer sur certains événements qui ont eu lieu en octobre 1970 et à la discussion à savoir si Pierre Elliot Trudeau a réagi de manière excessive ou qu'il y avait véritablement un état d'insurrection appréhendée à cette époque. Ce qui a été révélé en 2010 à propos d'un plan ultrasecret développé par la GRC en 1950, afin de détenir et d'interner pour une période indéterminée des milliers de Canadiens, dont le nom de code PROFUNC (« PROminent FUNCtionaries of the Communist Party » – membres importants du Parti communiste), a été utilisé entre autres choses pour déclarer que le phénomène de la police au-dessus des pouvoirs civils est une chose du passé.
Le résumé de « Ennemis de l'État » diffusé par Radio-Canada et la CBC (l'émission Enquête en français et The Fifth Estate en anglais) le 15 octobre 2010, qui met à jour le plan « PROFUNC », débute par :
« Le plan d'urgence secret appelé PROFUNC permettait à la police d'arrêter et de détenir pour une période indéterminée des citoyens canadiens soupçonnés d'être des sympathisants communistes. »
« Il est difficile d'imaginer aujourd'hui qu'un gouvernement canadien approuve un plan visant à rassembler des milliers de Canadiens respectueux des lois et à les enfermer tout simplement parce qu'ils sont perçus comme une menace à la démocratie canadienne. »
Ce qui suit est un extrait de la déclaration émise par le PCC(M-L), le 16 octobre 2014, qui fait les commentaires suivants à ce sujet :
« Cette tentative de présenter les événements d'octobre 1970 et le programme PROFUNC comme quelque chose d'inimaginable aujourd'hui et les descentes et arrestations massives comme l'ont fait de policiers un peu trop zélés 'dans le temps' échoue lamentablement devant la réalité des arrestations et descentes massives et des agissements illégitimes de la police avec la pleine sanction des tribunaux avant, durant et après les manifestations contre le G8/G20 à Toronto cet été. C'est une affirmation étonnante quand tout le monde sait maintenant que le Canada a livré des citoyens et résidents canadiens à la torture et maintient des listes d'interdiction de vol sur lesquelles apparaît le nom de milliers d'individus soupçonnés d'allégeance terroriste du simple fait qu'ils sont musulmans, pakistanais ou arabes ou professent des opinions contraires à celles du gouvernement Harper sur le droit de résister ou sur le sionisme et les crimes de l'État d'Israël.
« La proclamation de la Loi des mesures de guerre en 1970 et les choses révélées au sujet de PROFUNC qu'on présente comme 'le programme de sécurité nationale le plus draconien de l'histoire du Canada en temps de paix' sont présentées comme des anomalies, des écarts par rapport à la démocratie canadienne, mais ce n'est malheureusement pas le cas.
« En fait, ce qu'il faut examiner à la lumière de ces événements ce n'est pas le passé, mais le présent, et le faux 'débat' qu'on nous propose à propos du passé caché que les pouvoirs policiers continuent d'être au-dessus du pouvoir civil. La seule différence est que dans le passé les libertés civiles étaient suspendues occasionnellement alors que maintenant un état d'urgence permanent a été déclaré au nom de la guerre à la terreur et que cela sert à justifier une redéfinition de la démocratie avec l'état d'exception comme nouvelle norme.
« Certains éditorialistes sont allés jusqu'à dire que la majorité des Canadiens préfèrent 'la paix, l'ordre et le bon gouvernement' même s'il faut pour cela renoncer aux libertés civiles. S'il faut sacrifier les droits civils à la paix, l'ordre et le bon gouvernement, que valent la paix, l'ordre et le bon gouvernement ? Ou bien ils ne valent rien, ou bien ils sont un régime dans lequel les pouvoirs policiers sont au-dessus du pouvoir civil et ce sont les pouvoirs policiers qui décident quand les droits peuvent être suspendus.
« Il y a un 'débat' sur le besoin d'un équilibre entre les droits et la sécurité. Qu'est-ce qu'un droit s'il peut être suspendu ? Qui décide des conditions justifiant la suspension de ce droit ? Selon la Charte canadienne des droits et libertés, tous les 'droits' sont soumis à des 'limites raisonnables'. Autrement dit, vous avez des droits sauf quand vous en avez besoin. C'est contraire à la définition même d'un droit appartenant à son détenteur du fait de son existence en tant qu'être humain, un droit qui ne peut être ni échangé, ni abandonné, ni enlevé, mais seulement affirmé et appliqué.
« Même sans pouvoirs spéciaux, au Canada, le droit de conscience est attaqué de façon routinière. Loin d'être un écart par rapport à la norme, la persécution, l'arrestation et l'emprisonnement de militants du mouvement communiste et ouvrier font partie de ce qu'on appelle la démocratie canadienne.
« Durant la période qui a suivi la Deuxième Guerre mondiale, bien que l'existence du Parti communiste et l'appartenance au Parti communiste n'étaient pas considérées comme des infractions au Code criminel, la démocratie anglo-américaine a déclaré le communisme ennemi de la démocratie. C'est sur cette base que la GRC a dressé des listes de milliers de communistes et de sympathisants communistes qu'elle voulait détenir indéfiniment. En plus des arrestations effectuées durant la Loi sur les mesures de guerre, il y a eu plus de 2 500 arrestations de membres et sympathisants du Parti communiste du Canada (marxiste-léniniste) dans les années 1970, l'État canadien cherchant par tous les moyens à écraser le nouveau parti qui venait d'être créé. Ces arrestations n'ont pas été effectuées en invoquant des pouvoirs spéciaux. La GRC a tout simplement recouru à ses méthodes habituelles pour faire passer les membres du PCC(M-L) pour des criminels de droit commun et détruire l'organisation. Le fondateur et dirigeant du PCC(M-L), Hardial Bains, a fait l'objet de plusieurs coups montés et de tentatives de déportation de la GRC et il a été privé de citoyenneté pendant 30 ans. La persécution des autres camarades du Parti se poursuit à ce jour.
« Tout cela montre que les prétendues sauvegardes qu'on appelle libertés civiles, qui sont censées nous protéger contre les abus et l'impunité des pouvoirs policiers, sont toujours sujettes à des 'limites raisonnables'. Mise à part la persécution des forces progressistes, les droits des travailleurs sont brimés par des lois de retour au travail. De plus, dans certaines conditions, des 'circonstances exceptionnelles' sont invoquées pour justifier l'utilisation d'instruments comme la Loi sur les mesures de guerre, comme pour la persécution du mouvement communiste et ouvrier durant la Première et la Deuxième Guerres mondiales, l'expropriation des flottes de pêche et des maisons des Japonais sous prétexte d'internement ainsi qu'en octobre 1970.
« Tout cela révèle le caractère de classe des institutions démocratiques que ces faux débats cherchent à cacher et que tant que la souveraineté réside dans la prérogative de la Couronne représentant les monopoles et défendant leurs intérêts, plutôt que dans le peuple comme le veut la démocratie moderne, la situation ne fera qu'empirer. Le fait que des ministres de la Justice n'étaient même pas au courant de l'existence du programme PROFUNC (comme l'ont admis Warren Allmand et Robert Kaplan, tous deux ministres de la Justice des gouvernements Trudeau) montre le mépris de cette prérogative pour le 'pouvoir civil'.
« La proclamation de la Loi sur les mesures de guerre de 1970 et le programme PROFUNC montrent non pas que la police était au-dessus du pouvoir civil dans le passé, mais que ce qu'on appelle pouvoir civil est en fait une forme de pouvoir policier au service du pouvoir des monopoles et de leurs intérêts au pays et à l'étranger. L'élite dirigeante présente ces intérêts d'une manière qui prétend que le rôle de l'État est de défendre le bien public et que l'État est neutre dans la confrontation des intérêts de classe.
« Les méfaits de la GRC ayant été exposés dans les années 1970, en 1983 le gouvernement canadien a déposé un projet de loi créant le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) pour retirer les opérations de sécurité et de renseignement des mains de la GRC. Le SCRS a été créé en 1984. Mais cela n'a pas changé le fait que la police agit au-dessus du pouvoir civil, qui a à voir avec l'essence de la démocratie canadienne, bien au contraire. Le SCRS et les autres agences policières n'ont jamais cessé d'agir au-dessus du pouvoir civil, comme on l'a vu dans l'affaire Maher Arar et dans d'autres cas où le Canada a été impliqué dans la torture, la déportation vers la torture et autres crimes contre l'humanité. Dans le cas des détenus afghans remis aux autorités américaines et soumis à la torture un peu après l'engagement du Canada dans l'invasion de l'Afghanistan par les États-Unis, même le premier ministre n'a appris la nouvelle qu'une semaine après le fait. Selon une note de service qui a depuis été rendue publique, le premier ministre ne devait pas être mis au courant de certains accords secrets entre les forces spéciales du Canada et des États-Unis.
« À cet égard, notons que la CBC et Radio-Canada ont 'révélé' toutes sortes de choses au sujet du programme PROFUNC, mais ils n'ont pas parlé de l'intégration actuelle des services policiers et de renseignement et des forces armées du Canada et des États-Unis, sans compter l'information qui est transmise aux services d'espionnage américains pour placer des Canadiens sur les listes d'interdiction de vol, de gens soupçonnés d'être des terroristes, qui peuvent être soumis à la torture, etc. Tout cela montre que le programme PROFUNC concerne le présent, pas le passé. C'est un phénomène qui appartient à la catégorie du terrorisme d'État, non de la démocratie [...]. »
(Déclaration du Parti communiste du Canada (marxiste-léniniste), 16 octobre 2014)
Les émissions The Fifth Estate de CBC et Enquête de Radio-Canada ont révélé en 2010 l'existence d'un plan pour détenir indéfiniment lors de situations « d'urgence nationale » des milliers de Canadiens soupçonnés d'être des communistes ou des sympathisants communistes.
Le PROFUNC (« PROminent FUNCtionaries of the Communist Party » — principaux membres du Parti communiste) est un plan ultrasecret développé en 1950 par le commissaire de la GRC, Stuart Taylor Wood. Il contenait une liste de 16 000 personnes soupçonnées d'être des communistes et de 50 000 sympathisants qui devaient être espionnés et possiblement internés pour une période indéfinie.
Même le solliciteur général responsable de la GRC ignorait le plan. Robert Kaplan, qui a été solliciteur général de 1980 à 1984, a été interviewé dans les deux émissions. C'est lui qui aurait mis fin au programme par inadvertance en 1983 quand il a ordonné à la GRC d'arrêter toute activité limitant l'entrée de Canadiens âgés aux États-Unis. Kaplan a dit que c'est l'émission Fifth Estate qui l'a mis au courant de l'existence du programme. Il a confié à la CBC qu'il n'en revenait pas d'apprendre que le gouvernement canadien a été impliqué dans le programme. « Je ne peux pas croire, a-t-il dit, que le programme a reçu une autorisation gouvernementale. »
L'information amassée par le PROFUNC a été utilisée lorsque la Loi sur les mesures de guerre a été décrétée en 1970. Trudeau a alors déclaré un état « d'insurrection appréhendée » bien que, selon le lieutenant à la retraite Julien Giguère, le chef de l'escouade antiterroriste de la police de Montréal à l'époque, la police n'avait que 60 noms sur la liste des personnes soupçonnées d'être des sympathisants du FLQ. Cette liste est apparue insuffisante pour justifier un état « d'insurrection appréhendée ». Selon le lieutenant retraité, la Sûreté du Québec et la GRC ont alors fourni plus de noms, ce qui a mené à près de 4 000 perquisitions et 500 arrestations.
La proclamation de la Loi sur les mesures de guerre en 1970 et les choses révélées par Radio-Canada au sujet de PROFUNC qu'on présente comme « le programme de sécurité nationale le plus draconien de l'histoire du Canada en temps de paix » sont présentées comme des anomalies, des écarts par rapport à la démocratie canadienne, mais ce n'est malheureusement pas le cas.
Les listes comprenaient des personnalités canadiennes bien connues et des gens ordinaires, hommes, femmes et enfants, dont l'identité était gardée secrète dans des enveloppes scellées gardées dans des bureaux de la GRC. Un formulaire d'arrestation appelé C-215 était créé pour chaque détenu potentiel. Selon la CBC, les filières mentionnaient des détails personnels comme l'âge, une description physique, des photos, de l'information sur la voiture de la personne et sur son logis, et même les issues pouvant être utilisées en cas de tentative de fuite. La liste des personnes visées comprenait même le nom des enfants des hommes et des femmes à arrêter. L'information aurait été maintenue à jour de 1950 jusqu'en 1983, lorsque le programme a été démantelé.
Le PROFUNC prescrivait à la GRC d'entreprendre des descentes massives lors du Jour M ou Journée de mobilisation. On préparait secrètement des chefs de police en vue de cette journée. Le plan comprenait des équipes spéciales qui devaient être déployées dans les quartiers résidentiels, y prendre leurs positions et arrêter leurs « cibles » qui seraient alors transportées vers des « centres d'accueil » et de là vers des prisons permanentes ou centres d'internement[1]. Les enfants devaient demeurer avec des membres de la famille ou avec leurs parents en internement.
La CBC rapporte que les détenus devaient être punis sévèrement s'ils enfreignaient les règles du camp, comme celle-ci par exemple : « Aucun détenu n'a le droit de parler à quiconque n'est pas un officier de garde ou un membre du personnel à moins que les règles ne le permettent ou qu'un officier lui ait donné une permission spéciale. »
1. Bien que le plan ait évolué au fil des ans, un document de 1951 énumère les centres d'accueil et les camps d'internement suivants à mettre en place dans tout le pays.
Centres d'accueil
Halifax : quartier général du centre
canadien de détention des immigrants
Montréal : auberge du ministère du Travail
Toronto : Casa Loma
Winnipeg : une école
Port Arthur, Ontario : le Country Club de
Port Arthur
Regina : les tribunes du parc d'exposition
Edmonton : les installations de l'immigration
canadienne
Calgary : l'édifice Northern Electric
Vancouver : l'édifice de l'immigration
canadienne
Camps d'internement
Kelowna, Colombie-Britannique : logements
pour 400 femmes internées de la
Colombie-Britannique et des Prairies
Chilliwack, Colombie-Britannique : campement
pour 400 hommes de la Colombie-Britannique
Lethbridge, Alberta : des installations pouvant
recevoir 400 hommes internés originaires des
trois provinces des Prairies
Neys, Ontario : un camp pour 400 hommes de
l'Ontario
North Bay, Ontario : des installations pour
400 hommes de l'Ontario
Péninsule du Niagara (région de Saint-Thomas ou de
London), Ontario : des installations pour 400
femmes de l'Ontario, du Québec et des Maritimes
Parry Sound, Ontario : un camp mixte,
capacité non connue
Saint-Gabriel-de-Brandon, Québec : 400
hommes provenant du Québec et des Maritimes
(« PROFUNC : Le plan secret du Canada pour des détentions pour des périodes indéterminées », LML numéro 163, 21 octobre 2010)
Il y a plusieurs comptes rendus officiels et reportages des médias sur les crimes commis par la Gendarmerie royale du Canada (GRC) contre les Canadiens, les Québécois et les peuples autochtones. Certains de ces crimes n'ont jamais été documentés; d'autres sont rapportés comme des aberrations inacceptables ou nécessaires malgré les violations des droits. Dans l'ensemble, on dit que ces crimes appartiennent au passé ou même qu'ils ont contribué à renforcer notre démocratie. Le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) qui a été créé en 1984 avait pour mandat de recueillir des renseignements mais sans pouvoir d'intervention, et ainsi nous devrions croire que le temps des activités illégales de la GRC est terminé. Il n'est évidemment pas vrai qu'après 1984 les services de sécurité ont cessé de violer les droits du peuple. Cela inclut la dissimulation de leur implication dans la catastrophe d'Air India de 1985. Depuis le 11 septembre, toutes les excuses ont été données pour violer les droits en toute impunité. Le projet de loi C-51, la Loi antiterroriste de 2015, étend les pouvoirs du SCRS pour lui permettre de mener des activités qui ressemblent à celles de la GRC avant 1984.
Cet article revoit de manière succincte le récit officiel de ce qui s'est passé et ce que le Parti communiste du Canada (marxiste-léniniste) a dit à ce sujet à l'époque. Cet examen vise à résumer cette expérience afin que les gens puissent se donner un guide à l'action qui serve le présent et ouvre la voie à un avenir brillant et en sécurité.
Selon le récit officiel, la GRC a mené des activités illégales dans le cadre de son travail de protection de la « sécurité nationale » du Canada jusqu'en 1977, puis tout cela a été assaini au cours de la période 1978-1984, dont l'aboutissement a été la séparation des services de renseignement des services de police de la GRC, comme l'avait recommandé la Commission d'enquête concernant certaines activités de la GRC (la Commission McDonald). La période de 1977 à 1981 a été la période d'enquête sur les méfaits de la GRC, tandis que celle de 1981 à 1984 a été la période de réorganisation des forces de sécurité. Le nouveau régime a été mis en place en novembre 1984 avec la création du Comité de surveillance des activités de renseignements de sécurité.
Le 26 juillet 1974, Robert Samson, gendarme de la GRC, membre de l'escouade antiterroriste conjointe du Québec et du Service de sécurité de la GRC, est blessé par l'explosion d'une bombe devant la résidence du président de la compagnie Steinberg, M. Melvyn Dobrin, à Ville de Mont-Royal. En interrogatoire, l'agent Samson dit qu'il s'était rendu à cet endroit pour y rencontrer un informateur et qu'il avait été blessé par l'explosion d'un colis suspect qu'il avait ramassé. La GRC dément officiellement tout lien avec l'activité de Samson et le rapporte à la police de Montréal. Le Commissaire des incendies du Québec qui interroge Samson ne croit pas sa version des faits et Robert Samson est accusé d'avoir placé une bombe. Au cours de son procès, qui a lieu en 1976, Samson fait des révélations sur ce qu'il appelle l'opération Bricole. En échange de l'immunité, il explique que l'opération Bricole est le nom du cambriolage des locaux de Montréal de l'Agence de presse libre du Québec (APLQ) dont le but est « de prendre des documents qui étaient les dossiers des membres plus militants, ainsi que des documents pertinents ». Il explique que l'APLQ « avait toujours eu une assez grande liste de militants de gauche du Québec ». Encore aujourd'hui, ce que Samson était en train de faire à Ville de Mont-Royal le 26 juillet 1974 reste un mystère.
Peu de temps après la fin du procès de Samson, le solliciteur général du Canada de l'époque, Warren Allmand, déclare à la Chambre des communes que la perquisition de l'APLQ était un cas isolé et l'oeuvre de la police provinciale du Québec ou de la police de Montréal avec le soutien de la GRC.
À la même période, en juin 1977, le gouvernement du Québec, un gouvernement du Parti Québécois, décide d'ouvrir sa propre enquête sur les activités de la police et crée la Commission d'enquête sur des opérations policières en territoire québécois (aussi connue sous le nom de la Commission Keable). À chaque étape de son travail, la Commission se heurte à la résistance et à l'obstruction de la GRC et du gouvernement fédéral qui conteste sa compétence à faire enquête sur un organisme fédéral et soutient que c'est une atteinte aux prérogatives du gouvernement fédéral. Finalement, le gouvernement Trudeau obtient un jugement de la Cour suprême qui déclare l'enquête inconstitutionnelle, même si un grand nombre des sales opérations dont il est question étaient dirigées contre le peuple du Québec. On accuse la Commission Keable d'enfreindre la Loi sur les secrets officiels. Le solliciteur général Francis Fox, qui a succédé à Allmand, refuse de remettre les documents exigés en invoquant le « privilège absolu » accordé au solliciteur général en vertu de la Loi sur les Cours fédérales du Canada, un privilège à l'abri de toute procédure d'appel.
Toutefois, la Commission Keable réunit assez de preuves pour établir que la GRC s'est livrée à un certain nombre d'activités illégales dans le cadre de ses opérations de surveillance après la crise d'octobre de 1970, notamment :
- le cambriolage à l'APLQ
- l'incendie criminel, en 1971, d'une grange, La Ferme du Québec Libre, dans les Cantons-de-l'Est, où devait se tenir une rencontre entre des membres du Front de Libération du Québec (FLQ) et des Black Panthers américains.
- l'émission de 13 faux communiqués du FLQ en 1971, rédigés dans le cadre de la mise sur pied d'une fausse cellule du FLQ, la cellule André Ouimet. La fausse cellule revendiquera un attentat à la bombe incendiaire à la compagnie Brinks de Montréal en janvier de la même année. Le but de ces communiqués était de donner l'impression que le FLQ était encore actif après la crise d'octobre de 1970. Ces communiqués contenaient des menaces de mort contre le ministre de la Justice, Jérôme Choquette, et revendiquaient la responsabilité d'attentats à la bombe incendiaire qui n'ont jamais eu lieu. Sur la base de ces communiqués, les médias, en particulier le Journal de Montréal, ont publié des articles avec des titres comme « Le FLQ n'est pas mort » et « A-t-on sous-estimé la force du FLQ ? ». Le FLQ qui, en réalité, avait été démantelé au cours de la crise d'octobre, était maintenant présenté comme une organisation puissante avec de nombreuses cellules dont les actions fréquentes « représentent une menace active pour la sécurité de la personne et les libertés civiles au Québec ». La Commission Keable a consacré un chapitre entier au rôle des médias.
- Le vol de dynamite, dans la nuit du 26 au 27 avril 1972, à la poudrière de la Richelieu Explosives de Rougemont, par le gendarme Rick Daigle ainsi que par les caporaux Bernard Dubuc et Normand Chamberland.
- L'enlèvement le 7 juin 1972 d'André Chamard, stagiaire dans une étude de droit qui assure la défense d'accusés du FLQ. Les agents de la GRC essaient de le recruter comme indicateur en le faisant chanter pour une affaire de drogue, en le maltraitant et en proférant des menaces de mort.
- le vol de listes de membres du Parti Québécois en janvier 1973, au cours de l'opération Ham lors du cambriolage de l'entreprise Messageries Dynamiques Inc. Soixante-six agents de la GRC ont participé à cette opération.
L'agent de la GRC Donald Cobb, l'inspecteur Jean Coutellier de la Sûreté du Québec et l'inspecteur Roger Cormier de la police de Montréal sont poursuivis pour avoir autorisé une perquisition sans mandat, la perquisition illégale des locaux de l'APLQ. Lorsqu'ils comparaissent en mai 1977, ils plaident tous les trois coupables aux accusations portées contre eux, ainsi il n'y a pas de divulgation de la preuve au cours d'audiences publiques. Leur avocat plaide qu'ils sont des citoyens remarquables qui ont fait une erreur de jugement momentanée en ne demandant pas de mandat, mais que cela a été fait dans les meilleures intentions, pour défendre la sécurité nationale. En juin 1977, le juge les libère inconditionnellement et ils sont retournés au service actif.
Le 6 juillet 1977, à la Chambre des communes, le solliciteur général, Francis Fox, reconnaît que « l'affaire de I'APLQ n'est pas un acte isolé ou exceptionnel » et annonce une commission d'enquête.
Les audiences de la Commission McDonald commencent le 18 octobre 1977. En tout, il y a 169 audiences, dont 144 à huis clos. Le témoignage de 149 personnes est entendu au sujet des activités de la GRC et de la connaissance qu'avaient les ministres et les hauts fonctionnaires des activités illégales de la GRC.
Les principales questions traitées par la commission sont :
- l'opération Bricole – l'affaire de l'APLQ;
- l'opération Ham – l'enlèvement de bandes d'ordinateurs contenant des données sur les membres du Parti québécois, la reproduction de ces bandes;
- les entrées subreptices;
- les tentatives de recrutement de sources humaines;
- la vérification du courrier;
- l'incendie d'une grange;
- la subtilisation de dynamite;
- l'accès à l'information en la possession du ministère du Revenu national, la Commission d'assurance-chômage et d'autres ministères du gouvernement;
- l'opération Checkmate – les contre-mesures et les tactiques perturbatrices;
- divers sujets ayant trait à la responsabilité de la GRC au gouvernement;
- la relation entre le Service de sécurité et ses sources humaines.
La Commission promet sous réserve « des restrictions qui nous sont imposées par notre mandat quant aux questions liées à la sécurité nationale, l'intérêt du public et l'intérêt de la vie privée des personnes » de rendre publics les témoignages entendus « autant que possible ».
Cinquante-deux volumes des transcriptions des témoignages entendus lors des audiences à huis clos sont publiés sous forme de 45 volumes de documents expurgés. Certains de ces volumes sont maintenant aux Archives nationales et ne peuvent être consultés qu'avec une autorisation du SCRS. Une fois autorisés, les documents peuvent être consultés. Beaucoup, sinon la plupart, des preuves se rapportant à cette période jusqu'à 1988 ont été détruites. Le volume relatif aux actes illégaux commis contre le PCC(M-L) n'a jamais été publié.
Lors des audiences de la Commission McDonald en novembre 1979 et février 1980, il est révélé que le Service de sécurité de la GRC a détruit des dossiers, en particulier ceux de l'opération Checkmate. Ce service a détruit les dossiers contenant des informations sur des opérations réelles et d'autres opérations qui n'étaient que « de simples projets ».
Selon les informations fournies à la Commission, le Service de sécurité a détruit ces dossiers après les avoir soumis à deux revues internes, la première, la Phase un, en 1974 et 1975, et la deuxième en 1977. Les dossiers Checkmate comprenaient environ 25 volumes en tout.
La Commission est informée que le directeur général adjoint (Opérations) du Service de sécurité de la GRC Howard Draper, le sergent d'état-major Ron Yaworski et le surintendant principal Gustav Begalki, responsable des opérations « D » – le Service d'antisubversion qui a supervisé l'opération Checkmate – ont recommandé la destruction des dossiers. On lit dans le rapport de la Commission que « dès novembre 1974, il [Yaworski] croyait qu'un grand nombre des opérations Checkmate avaient été menées 'à tort'. Il en était venu à cette conclusion en grande partie parce qu'il avait de plus en plus conscience des critiques croissantes que suscitaient aux États-Unis les programmes comparables exécutés par le FBI. »
La Commission explique : « Puisqu'il y avait eu peu de temps auparavant des fuites de documents gouvernementaux, M. Yaworski craignait beaucoup que ne soient divulgués ce qu'il considérait comme des renseignements 'très délicats et très explosifs" et qu'ainsi l'ensemble du Service de sécurité ne soit mis dans l'embarras ». Il voulait « faire baisser le risque de divulgation de l'opération Checkmate ».
La Commission note que les policiers impliqués dans la destruction des dossiers avaient examiné « la nature potentiellement 'très explosive' du peu de matériel qui était encore dans les dossiers ». Elle déclare qu'aucune explication n'a été donnée sur ce que voulait dire « très explosive » ou s'il s'agissait de « problèmes liés à des activités illégales ». Aucune liste du matériel détruit n'a été conservée.
Begalki a dit que les dossiers avaient été détruits à cause de la « réduction progressive » de l'opération. Selon la Commission, M. Begalki « a ajouté que les ennuis que la divulgation du contenu de ces dossiers aurait pu causer au Service de sécurité n'ont pas joué 'séparément' sur sa décision d'en ordonner la destruction. Il a expliqué plus tard que là n'était pas la raison, qu'il ne savait pas ce que contenaient les dossiers ou si des actes illégaux y étaient décrits. Il a maintenu que leur valeur nulle du point de vue du renseignement est le critère dont il a tenu compte pour autoriser leur destruction et qu'il s'attendait de voir le sergent d'état-major Pethick l'appliquer en dépouillant les dossiers. »
Les personnes qui ont participé à la destruction des dossiers, comme le sergent d'état-major Pethick, ont dit à la Commission qu'ils n'avaient que de vagues souvenirs des dossiers. M. Pethic « dit se souvenir vaguement tout au plus d'avoir révisé un dossier sur un particulier et de n'avoir retenu que trois documents : (1) un tableau des finances soit du Parti communiste du Canada, soit d'une organisation crypto-communiste, (2) une description de l'abandon par un particulier d'une organisation soupçonnée d'être crypto-communiste et (3) un document provenant d'un organisme autre que le Service de sécurité ».
La Commission conclut : « À notre avis, si on analyse bien l'explication donnée par M. Yaworski concernant la recommandation de 1974 de détruire les dossiers Checkmate, elle n'équivaut à rien de moins que l'intention de réduire la possibilité que le gouvernement du Canada apprenne l'existence d'actes qu'il en était lui-même venu à juger répréhensibles. MM. Yaworski et Draper ont passé outre délibérément aux critères habituels de destruction des dossiers.
« Nous ne pouvons pas faire abstraction du fait que plus de trois ans auparavant, soit le 30 juin 1971, une note de service rédigée par M. Yaworski (mais signée par le sergent Pethic) précisait que 'les mesures de restriction tentées ou envisagées' pourraient bien être 'd'une nature tellement délicate qu'il ne faille pas les consigner par écrit'. Selon M. Yaworski, lorsqu'il a écrit 'délicate' il ne voulait pas dire 'illégale', mais plutôt que le Service de sécurité utilisait des informations qui risquaient de mettre en danger la source qui les avait fournies, et que le Service de sécurité prenait lui-même des mesures, plutôt que de faire part des renseignements qu'il possédait à un autre secteur gouvernemental.
« Cette explication ne nous a pas convaincus et nous croyons que, dans la note de service pour la signature du sergent Pethic, M. Yaworski, voulait dire qu'on était prêt à recourir à des moyens de dissuasion, illégaux au besoin, pour parvenir, comme il le dit dans la note de service, à une 'façon plus agressive et positive' d'exécuter des opérations destinées à entraver, contrecarrer ou saper les groupes cibles. »
Aucune accusation n'a été portée pour cette destruction délibérée des preuves des crimes commis contre le peuple du Canada et du Québec. Pendant un certain temps, Ron Yaworski a été un « consultant en sécurité » qui, plus tard, en 2002, a témoigné devant une commission du Sénat comme témoin expert à une audience à huis clos qui examinait les questions budgétaires reliées à la sécurité. (Le poste de directeur adjoint des opérations du SCRS est occupé par un Jeff Yaworski. LML n'a pas pu établir s'il y a un lien de parenté.)
À part la destruction des dossiers liés à la période allant de 1974 à 1977, dans la période transitoire où le Service de sécurité de la GRC est devenu le SCRS, une des questions qui se posaient était comment disposer des dossiers accumulés depuis plus de 50 années d'activités subversives. Un universitaire ayant enquêté sur le sort réservé aux dossiers écrit : « Le service de sécurité, avec l'autorisation du gouvernement fédéral, a détruit 208 481 de ces dossiers entre juillet 1983 et mai 1984. Lorsque la nouvelle agence d'espionnage a vu le jour, la décision a été prise de transférer certains des dossiers aux Archives nationales du Canada. En 1987, le SCRS a mis sur pied la Sous-section des exigences des Archives nationales afin d'examiner les dossiers en consultation avec des archivistes. Sur près de 500 000 dossiers, 440 000 ont été détruits. 29 000 dossiers sont allés aux archives tandis que 28 000 ont été retenus par le SCRS parce qu'ils étaient toujours pertinents. Le facteur embarras a joué dans au moins un dossier au moment de leur examen. Après avoir examiné une compilation de dossiers liés à l'Université McGill, un employé du SCRS est arrivé à la conclusion qu'il fallait à tout prix détruire ce dossier puisque le nouveau service d'espionnage du Canada devait « se défaire d'un dossier qui avait été spécifiquement ouvert pour espionner une université (effacé). Le fait de conserver un tel dossier ne peut que nous attirer des problèmes ».
Le 19 février 1975, le Parti communiste du Canada (marxiste-léniniste) a tenu un point de presse à Toronto pour répudier une nouvelle sensationnaliste publiée par le Toronto Star dans laquelle on prétend qu'un agent du FBI du nom de Joseph Burton avait infiltré le Parti et qu'il avait recueilli des renseignements internes. La présumée taupe avait supposément appris que « Hardial Bains était sorti de l'ambassade de la Corée du Nord à Paris avec 30 000 $ » alors qu'une telle ambassade n'existait tout simplement pas.
Dans sa déclaration à l'époque, le Parti avait dit : « Cette manoeuvre de la part de la presse capitaliste était si malhabile qu'elle a révélé l'objectif sinistre qui est de discréditer le Parti en soulevant des doutes sur ses activités et en remettant en doute son intégrité aux yeux du peuple. »
Le fondateur et dirigeant du PCC(M-L) Hardial Bains réfute les mensonges et les calomnies dirigées contre le Parti, lors d'une conférence de presse à Toronto le 19 février 1975. |
Il s'agissait de l'une des nombreuses activités menées contre le PCC(M-L). Ce ne fut pas la première opération sale menée contre le Parti par le Service de sécurité de la GRC et c'était loin d'être la dernière. Le temps viendra sans doute où les peuples du Canada reconstruiront la vérité sur les activités traîtres et sordides menées contre eux au cours de cette période qui a supposément été examinée et élucidée. La plus grande fraude de toutes, cependant, est qu'avec le SCRS était né une « nouvelle » agence civile pour s'occuper du renseignement de sécurité nationale. En réalité, le SCRS a recruté les agents du Service de sécurité de la GRC qui désiraient passer au SCRS. On dit que plusieurs d'entre eux ont même conservé leur bureau et que la nouvelle agence d'espionnage était composée avant tout d'anciens du Service de sécurité de la GRC.
Dans la période de transition vers le SCRS, le 12 août 1984, le bureau du PCC(M-L) en Colombie-Britannique ainsi que les entreprises avoisinantes ont été complètement ravagés par un incendie, causant des dommages de l'ordre de 3 millions de dollarsr. C'est comme si le SCRS voulait envoyer un message que rien n'allait changer. Un citoyen américain âgé de 22 ans du nom de Rolland Degroot a été arrêté en lien avec l'incendie, mais la police et les médias ont refusé d'enquêter adéquatement et personne n'a été accusé et aucune compensation n'a été versée. Dans les jours et les semaines qui ont précédé la destruction du bureau du Parti en Colombie-Britannique, plusieurs autres attaques ont été perpétrées, non seulement en Colombie-Britannique, mais aussi à Montréal.
Rolland Degroot, un néonazi autoproclamé, n'a jamais été accusé par la police ni traduit en justice. Cette attaque faisait partie de l'offensive raciste de l'État contre le peuple en Colombie-Britannique et à l'échelle du pays pour terroriser les immigrants et les forcer à cesser de se battre pour leurs droits. L'État a mis sur pied des organisations nazies et suprémacistes blanches et les a utilisées pour commettre des attaques racistes. Il a essayé de blâmer le peuple pour ce racisme, comme il le fait aujourd'hui en accusant les Québécois d'être islamophobes ou en disant que les Canadiens exigent que les musulmans soient « modérés » et jurent loyauté à ce qu'on appelle les valeurs canadiennes. Toute cette propagande a servi à justifier l'intervention de l'État contre le peuple au Canada et en Inde et elle est utilisée dans le même but aujourd'hui au pays et à l'étranger.
Dans la période où ces attaques étaient perpétrées, le PCC(M-L) et son dirigeant Hardial Bains ont avancé le slogan « Blâmons l'État et non le peuple pour les attaques racistes et la violence fasciste », et ont appelé le peuple à s'organiser pour se défendre lui-même puisque de toute évidence la police n'allait pas le défendre. Le Comité de défense indien a été fondé en 1975 et le Front du peuple contre la violence raciste et fasciste en novembre 1980. Les deux organisations ont développé leur travail sous la direction du Parti et de Hardial Bains. Cela a donné une forme organisée au travail qui était fait depuis le début de l'année 1973 pour unir dans l'action les gens de tous milieux et aux expériences diverses contre la violence raciste et fasciste et s'assurer qu'elle ne s'enracine pas au Canada.
Des centaines de milliers de Canadiens ont bâti ensemble une opposition de masse à la violence raciste et fasciste, et notamment au Livre vert raciste sur l'immigration présenté par le gouvernement libéral en 1975, une lutte qui elle aussi a été dirigée par le Parti. Le Livre vert divisait les Canadiens entre « blancs » et « personnes de couleurs aux traits nouveaux et distinctifs » et enchâssait la catégorie « Autochtone » pour faire en sorte que toutes les nations autochtones soient mises dans un même paquet sur une base raciste. À la suite du Livre vert, alors que dans la conscience canadienne s'incrustait l'idée que le racisme était organisé par l'État, l'Ontario a présenté le Rapport Pitman (du nom de son auteur Walter Pitman) qui affirmait qu'il n'y a aucune preuve de l'existence d'un racisme organisé par l'État et que les Canadiens sont « tous un petit peu racistes ». Toute cette période a exposé que l'État était à l'origine de la violence raciste et fasciste. Elle a confirmé la véracité de ce que le PCC(M-L) disait. Face à cela, l'État a tout mis en oeuvre pour isoler le PCC(M-L) et a notamment organisé les attaques d'agents de police contre lui au sein du mouvement populaire et a accusé le Parti de fomenter la violence alors qu'il ne faisait que se défendre contre ces attaques. Le PCC(M-L) a eu gain de cause en cour où la preuve a été faite que le Parti était celui qui était victime des assauts et qu'il n'avait agressé personne même en se défendant contre les assauts.
Plus tard, l'État canadien a intensifié son utilisation du terrorisme d'État contre le peuple. Entre autres, il a concocté la théorie de l'« intégrisme » et de l'« extrémisme » sikhs pour justifier les attaques de l'État contre ceux qui luttaient contre l'injustice au Canada et en Inde, s'opposaient au régime d'Indira Gandhi, et surtout contre la nation du Pendjab qui revendiquait son indépendance de l'Inde. Des attaques criminelles ont aussi été lancées contre le peuple du Cachemire et les autres nations et peuples tribaux en Inde qui luttaient pour leur émancipation de l'exploitation et de l'oppression brutales des industriels et des propriétaires fonciers et de leur État.
C'est dans ces conditions que se produisit l'attentat à la bombe d'Air India. Malgré les tentatives faites pour blâmer les « extrémistes sikhs », rien n'a pu cacher le rôle des agences d'espionnage dans la création de ces « extrémistes » et la fabrication de ce complot.
Dans ces conditions, des milliers de Pendjabis ont été massacrés au Pendjab, alors que les « lois antiterroristes » et les opérations occultes étaient utilisées pour réprimer l'opposition. Finalement, c'est dans ce contexte d'anarchie et de violence en Inde que se produisit en 1984 l'Opération Blue Star au cours de laquelle le Temple d'Or d'Amritsar, au Pendjab, le temple le plus sacré des sikhs, a été attaqué par l'armée indienne et un grand nombre de personnes ont été tuées. Cela ouvrit toutes grandes les portes de l'intervention de l'État dans les affaires religieuses où celui-ci dicte au peuple sa conscience, ce qu'il peut et ne peut pas faire et son mode de vie. Les actes individuels de terrorisme et les assassinats ciblés devinrent la méthode privilégiée pour exclure le peuple des affaires politiques. Indira Gandhi et son fils Rajiv Gandhi tombèrent eux aussi victimes de cette politique.
C'est ainsi que l'État canadien a créé le spectre de l'« intégrisme sikh ». Après les attentats du 11 Septembre contre les tours jumelles de New York et le Pentagone à Washington, ce spectre a rendu un grand service au système impérialiste d'États. L'« intégrisme sikh » a servi de modèle à la CIA pour créer le spectre de l'« intégrisme islamique » en tant qu'extrémisme qui représente la plus grande menace pour la société. Sur cette base, une fois de plus, c'est le peuple qui est blâmé pour les attaques terroristes tandis que le terrorisme d'État au nom de la lutte au terrorisme devient la solution. Tout ceci révèle le modus operandi de ces services de renseignement et leur « stratégie de tension » qui, en même temps, vise à faire en sorte que les problèmes économiques, sociaux et autres ne reçoivent pas de solutions politiques.
Pendant toute cette période, le PCC(M-L) a démontré son caractère et son courage révolutionnaires en unissant le peuple dans l'action contre les attaques racistes et fascistes de l'État.
À la suite de l'incendie criminel du Bureau provincial du PCC(M-L) en Colombie-Britannique, le Parti a convoqué un Plénum élargi du Comité central du Parti communiste du Canada (marxiste-léniniste) les 20 et 21 août 1983 où a été présenté le rapport intitulé « L'incendie criminel du Bureau provincial du PCC(M-L) en Colombie-Britannique – un geste insensé de violence individuelle ou un crime inspiré par l'État contre le Parti et le peuple ? » Le Parti a placé l'incendie criminel dans le contexte de la longue série d'attaques sous diverses formes perpétrées contre le Parti, ses membres, ses sympathisants et ses locaux depuis 1970 jusqu'à cet incendie criminel.
Le rapport présenté au Comité central du Parti a tiré la conclusion que l'incendie criminel et la réponse de la police et des médias avaient comme objectif de :
1) convaincre l'opinion publique que l'incendie criminel n'avait pas grande importance et donc que ces attaques contre le Parti étaient une chose normale et acceptable;
2) créer de la confusion dans l'esprit du peuple afin de sous-estimer et nier le danger de fascisme;
3) créer l'opinion publique que c'est la victime des attaques qui les provoque;
4) promouvoir la théorie anticommuniste en banqueroute « des deux extrêmes » selon laquelle les marxistes-léninistes et les fascistes se combattent l'un l'autre tandis que le gouvernement et les agences de l'État sont la voie modérée, qui sont neutres et opposées aux deux extrêmes.
Dans ce contexte, le Plénum a analysé que les mesures étaient en train d'être mises en place pour renforcer l'appareil répressif de l'État comme une composante de la fascisation de la vie, de la répression des marxistes-léninistes et des autres forces progressistes et pour « inciter à des crimes de violence insensée » comme cet incendie criminel en Colombie-Britannique.
Le rapport du Comité central a traité de la question du Rapport de la Commission McDonald, et montré la similitude entre l'incendie criminel au Québec en 1974 et l'incendie de la librairie. Il a déclaré : « Loin de condamner de tels crimes, la Commission McDonald sur les méfaits de la GRC a cherché à les justifier et à élaborer un cadre légal pour les activités criminelles de la GRC contre les luttes du peuple et les intérêts de la nation, ainsi que pour les opérations au Canada des services d'espionnage de l'impérialisme américain, le FBI et la CIA et l'intervention directe dans les affaires du Canada des plus hautes instances du gouvernement américain.[...] » Le rapport a souligné que le Service canadien du renseignement de Sécurité « pourra légalement mener toutes les activités de voyous que la GRC, la CIA et le FBI ont menées illégalement par le passé, et cela au nom de la défense de la démocratie et des intérêts de la nation contre la subversion ».
Le Comité central a posé la question : « Qui sont les terroristes et qui provoque des actes de violence politique au Canada ? » La réponse à cette question se trouve dans le rapport de la Commission McDonald.
« La Commission royale a carrément admis que c'est la bourgeoisie, sa GRC et ses autres forces policières et d'espionnage, ainsi que les bandes fascistes, qui ont été la source d'actes de terrorisme, d'incendie de granges, d'enlèvements, de tortures et de chantage pour recruter des espions et des indicateurs, de messages téléphoniques enregistrés véhiculant la haine raciste et fasciste, d'attaques violentes contre les minorités nationales, contre les luttes ouvrières, contre les forces démocratiques et progressistes et les marxistes-léninistes, de tentatives d'assassinats, etc. Le rapport de cette commission révèle également que la police et les autorités gouvernementales ont apporté leur pleine collaboration aux services d'espionnage et aux forces policières des États-Unis pour faire venir au Canada des espions afin de saboter le PCC(M-L) et la lutte des autochtones et d'autres groupes au Canada. Cependant, il est significatif que certaines sections du Rapport de la Commission McDonald, notamment celle sur l'« opération Checkmate », qui traitent spécifiquement des attaques terroristes menées contre le Parti communiste du Canada (marxiste-léniniste) et son dirigeant, le camarade Hardial Bains, n'ont pas été publiées. Ce mutisme aussi sert la tactique de la bourgeoisie qui consiste à calomnier les marxistes-léninistes en disant qu'ils sont la source du crime et de la violence et en les comparant aux fascistes et terroristes, tout en gardant le silence quant à leurs vraies activités et positions progressistes. »
« Le rapport de la Commission McDonald a
également servi à justifier la fascisation de
l'État et le renforcement de l'appareil de
répression, notamment la création d'un service
d'espionnage civil, le SCRS, prétextant que la
sécurité nationale exige la légalisation des
activités illégales, que les intérêts du Canada
sont inséparables de ceux de l'impérialisme
américain, que ceux qui luttent pour les droits
démocratiques du peuple et les intérêts de la
nation [...] sont les ennemis des intérêts du
peuple et de la nation et la source du danger qui
plane sur la paix, la sécurité et la démocratie au
Canada.
« Ainsi, dans son rapport, la Commission McDonald
déclare que les principales menaces à la sécurité
du Canada 'proviennent des activités clandestines
d'agents de puissances étrangères au Canada,
d'organisations terroristes et de groupes qui
travaillent activement à renverser le fondement de
la démocratie parlementaire'. »
Le rapport du Comité central soulignait : « Dans la catégorie de 'groupes qui travaillent activement au renversement du fondement de la démocratie parlementaire', la commission réunit les marxistes-léninistes et les fascistes de sorte à créer le maximum de confusion, puis déclare que les fascistes sont inactifs et ne représentent aucun danger ». Le rapport indiquait également que ce n'est pas un hasard si la Commission ne précise pas davantage la catégorie des « organisations terroristes », puisqu'on ne manque pas de preuves pour établir le fait que la GRC et d'autres forces policières étaient derrière toutes les activités terroristes dont on a accusé le FLQ et derrière les actes terroristes de la Western Guard et les autres groupes néonazis suprémacistes blancs. « La Commission McDonald elle-même traite de certaines de ces attaques, ainsi que du travail d'agents de police américains au Canada, et elle cautionne ces activités infâmes. »
Le rapport du Comité central soulignait que la Commission McDonald reconnaissait le caractère policier de l'État canadien et que « les activités du PCC(M-L) ont fait l'objet d'une enquête détaillée dans les années 1970. Son dirigeant a fait l'objet à la fois de surveillance étroite et de certaines des tactiques de sabotage menées dans le cadre de l'opération Checkmate. La Commission avoue aussi qu'il y a eu contre les membres et sympathisants du Parti « un vaste harcèlement en toute occasion », notamment des congédiements et des expulsions du pays ainsi que des attentats à la vie. Plusieurs de ces activités ont échoué grâce à la vigilance du Parti, qui les a condamnées et combattues au moment même où elles étaient perpétrées ».
Le rapport avertissait que « la Commission McDonald prétend qu'elle s'oppose à ces activités, mais c'est seulement pour tromper les naïfs, pour justifier ses propres agissements et la fascisation de l'État et pour préparer d'autres attaques. En réalité, elle avait la mission d'attaquer directement les marxistes-léninistes sous prétexte de défendre « la primauté du droit ». Pendant que la Commission McDonald écrivait ses justifications de « la loi et l'ordre », les attaques contre les marxistes-léninistes et les autres forces progressistes se poursuivaient dans tout le pays, et elles se poursuivent encore aujourd'hui. Elles n'ont jamais cessé, ne fût-ce qu'un instant. »
Le rapport concluait que la création du SCRS « est un pas de plus vers la fascisation de l'État dans le cadre de ce qu'on appelle le processus parlementaire et par les 'moyens constitutionnels' et constitue une réelle menace pour la vie et les libertés du peuple ». Le rapport soulignait notamment que le projet de loi accorderait l'immunité aux agents des services de sécurité et ferait la divulgation de leur identité un acte criminel.
Le rapport identifiait également la prétendue lutte au terrorisme comme « une arme de propagande importante de tromperie idéologique et politique » du peuple dans le but de détourner et de liquider ses luttes.
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