À titre
d'information
La motion contre la Chine
La motion contre la Chine a été présentée à la
Chambre des communes le 17 novembre 2020
par le député conservateur Michael Chong. La
motion et le débat montrent le refus de résoudre
pacifiquement les problèmes dans les relations
internationales et en font une question de lutte
entre factions, de promotion d'intérêts
commerciaux et de positions anti-chinoises
hystériques. Voici le texte de la
résolution :
« Que, étant donné (i) que la République
populaire de Chine, qui est dirigée par le Parti
communiste chinois, menace les intérêts
nationaux du Canada et les valeurs de la
population canadienne, y compris les Canadiens
d'origine chinoise en territoire canadien, (ii)
qu'il est essentiel que le Canada se dote d'une
politique étrangère rigoureuse et fondée sur des
principes appuyée par des actions de concert
avec ses alliés, la Chambre demande au
gouvernement : a) de prendre une décision
au sujet de l'implication de Huawei dans le
réseau 5G du Canada dans les 30 jours
suivant l'adoption de la présente motion ;
b) d'élaborer un plan robuste, comme l'a fait
l'Australie, pour lutter contre l'ingérence de
plus en plus forte de la Chine au Canada et
l'intimidation sans cesse croissante des
Canadiens vivant au Canada, et de le présenter
dans les 30 jours suivant l'adoption de la
présente motion. »
En présentant la résolution, Michael Chong a dit
que bien que le gouvernement libéral ait « réalisé
certains accomplissements en matière d'affaires
étrangères », comme la renégociation de
l'accord de libre-échange avec les États-Unis,
dans son ensemble, « la politique étrangère
globale du gouvernement nous déçoit ». Il a
déclaré :
« C'est à propos de la Chine que le
gouvernement libéral nous a le plus déçus. La
Chine n'assume pas les responsabilités qui sont
les siennes dans l'ordre mondial international
fondé sur des règles où nous évoluons. Elle fait
fi des conditions de son entrée à l'Organisation
mondiale du commerce. Elle manipule sa monnaie
en utilisant des entreprises d'État pour nuire à
l'économie d'autres pays. Elle enfreint le droit
international de la propriété et fait subir aux
Canadiens Michael Kovrig, Michael Spavor, Gary
Schellenberg et Hussein Jalil un traitement qui
est également contraire au droit international.
Elle ne respecte pas non plus le droit
international lorsqu'il s'agit des Hongkongais
et des minorités religieuses et ethniques, comme
les Tibétains et les Ouïghours. En somme, la
Chine menace nos intérêts et nos valeurs.
Dans ce contexte, il est très important que le
gouvernement du Canada tienne toujours le même
discours clair et cohérent. Ce n'est pas ce qui
se passe, malheureusement.
En janvier de l'année dernière, le premier
ministre a déclaré qu'il ne s'ingérerait pas
dans la procédure judiciaire concernant Meng
Wanzhou, à Vancouver. La même semaine, l'ancien
ambassadeur du Canada en Chine, John McCallum,
déclarait que le gouvernement devrait intervenir
et échanger Meng Wanzhou contre les Canadiens
Michael Kovrig et Michael Spavor.
Les incohérences ont continué cette année. En
juillet, le ministre des Affaires étrangères a
déclaré à la Chambre qu'il envisageait d'imposer
des sanctions aux dirigeants chinois
responsables de ce qui se passe à Hong Kong. Le
lendemain, le gouvernement a affirmé à Reuters
que cette mesure avait été écartée.
En septembre, le ministre des Affaires
étrangères déclarait au Globe and Mail que
les efforts visant un accord de libre-échange
avec la Chine étaient abandonnés, alors que le
même jour, l'ambassadeur du Canada en Chine
affirmait devant un auditoire à Edmonton, dont
l'ambassadeur de Chine au Canada faisait partie,
que le Canada devrait en faire plus en Chine et
accroître ses échanges commerciaux.
Ce n'est qu'un exemple parmi tant d'autres.
Le gouvernement reconnaît implicitement
lui-même que sa politique envers la Chine ne
marche pas. Il l'a reconnu par le changement de
son discours sur la Chine cet automne, et il l'a
reconnu en annonçant qu'il envisageait de
présenter un nouveau cadre pour la Chine d'ici
le 24 décembre. Voilà pourquoi j'ai
présenté cette motion aujourd'hui.
Tout nouveau cadre pour la Chine doit inclure
deux éléments.
D'abord, il doit inclure une décision sur
Huawei. En mai de l'année dernière, le
gouvernement a affirmé qu'il prendrait une
décision à propos de l'implication de Huawei
dans le réseau 5G du Canada avant les
élections de 2019. En juillet de la même
année, le gouvernement a changé d'idée en disant
qu'il prendrait une décision après les élections
de 2019.
Les dernières élections remontent maintenant à
plus d'un an, et la décision se fait toujours
attendre. Le gouvernement réfléchit à cette
question depuis des années. Son attentisme et
ses tergiversations menacent la sécurité
nationale du Canada. À cause des retards du
gouvernement dans ce dossier, Telus, une grande
entreprise de télécommunications canadienne, a
acheté de l'équipement de Huawei pour son
réseau. Elle l'a installé dans la région de la
capitale nationale, où se trouvent la plupart
des bureaux des institutions fédérales du
Canada, comme la GRC, le SCRS, le ministère de
la Défense nationale et d'autres installations
militaires. Pourtant, elle avait conclu une
entente avec le gouvernement fédéral, qui
excluait l'utilisation d'équipement de Huawei
dans la région. On apprend maintenant que le
gouvernement fait des pieds et des mains pour
que Telus retire son équipement, qui a été
installé sur quelque 80 tours et sites dans
la région de la capitale nationale. Selon
l'article 7 de la loi chinoise sur le
renseignement national, Huawei doit offrir son
soutien, son aide et sa coopération à la Chine
dans ses activités de renseignement.
L'inaction du gouvernement relativement à
Huawei révèle autre chose : l'écart abyssal
entre ses belles paroles et la réalité. Il dit
croire au multilatéralisme, mais il ne saisit
pas les occasions qui se présentent. Huawei en
est un parfait exemple. Quatre des partenaires
en matière de renseignement du Groupe des cinq,
l'Australie, la Nouvelle-Zélande, les États-Unis
et le Royaume-Uni, ont exclu Huawei de leur
réseau ou ont limité sa participation. Le Canada
est le seul à rester les bras croisés.
Il est grand temps que le gouvernement prenne
une décision concernant Huawei. Aucun cadre
relatif à la Chine ne peut être complet sans une
telle décision. Tout nouveau cadre relatif à la
Chine doit aussi comprendre un plan rigoureux
pour contrer les activités subversives que la
Chine mène au Canada. Par l'entremise de ses
représentants et des activités qu'elle mène sur
notre territoire, la Chine menace les intérêts
et les valeurs du Canada. Elle intimide des
Canadiens, particulièrement des Canadiens
d'origine chinoise. Elle espionne les citoyens
et les entreprises du Canada, ainsi que le
gouvernement fédéral, et elle lance des
cyberattaques contre eux. Elle fait de la
désinformation. Elle pratique l'accaparement des
ressources par les élites en offrant des
avantages financiers et des sinécures à des
fonctionnaires et à des politiciens à la
retraite. Elle soutient financièrement des
instituts de recherche qui appuient les
positions de Pékin, comme l'Institut Confucius.
Elle s'adjoint des médias et des organismes
locaux de langue chinoise sur le terrain pour
promouvoir les intérêts de Pékin. Elle surveille
et mobilise des étudiants chinois qui
fréquentent des universités canadiennes pour
étouffer les débats sur les campus et menacer
d'autres étudiants, comme elle l'a fait à
l'Université de Toronto et à l'Université
McMaster. Elle s'ingère dans la communauté
chinoise en sollicitant un appui politique
contre ceux qui ne soutiennent pas Pékin.
Le Service canadien du renseignement de
sécurité, la GRC, Amnistie internationale et le
Comité spécial sur les relations
sino-canadiennes de la Chambre ont documenté
d'innombrables exemples d'activités d'influence
menées par la Chine au Canada. Tout nouveau
cadre relatif à la Chine doit comprendre un plan
qui en fait davantage pour protéger les
Canadiens contre les activités d'influence de la
Chine au Canada, comme l'ont déjà fait nos
alliés, notamment l'Australie.
Le gouvernement est arrivé au pouvoir en
parlant de conviction responsable. Ce principe a
été abandonné pour celui voulant que le Canada
soit un pays essentiel. Nous parlons maintenant
d'un nouveau cadre pour la Chine. Tout nouveau
cadre doit comprendre une décision au sujet de
Huawei ainsi qu'un plan robuste pour protéger
les citoyens et les intérêts canadiens des
activités d'ingérence subversives de la Chine en
sol canadien.
Mon dernier point porte sur le délai prévu dans
la motion. Cette dernière demande au
gouvernement de prendre ces deux décisions dans
les 30 jours. Le gouvernement dit depuis
des mois qu'il va présenter un nouveau cadre
relativement à la Chine d'ici la fin de
l'automne, donc d'ici le 21 décembre. Par
conséquent, le délai prévu dans cette motion est
très raisonnable. C'est pourquoi j'ai présenté
cette motion. J'espère que les députés vont
l'appuyer. »
Au nom du Bloc Québécois, Luc Desilets
(Rivière-des-Mille-Îles, BQ) a déclaré que son
parti était d'accord et qu'il n'avait que quelques
inquiétudes quant au délai. Il a déclaré :
« Pourquoi n'attendrait-on pas les conclusions
du Comité spécial sur les relations
sino-canadiennes, que les conservateurs
eux-mêmes ont demandé ? »
Au nom du NPD, Gord Hohn (Courtenay-Alberni, NPD)
a remercié Michael Chong pour la motion et a posé
une question :
« J'aimerais savoir si, à son avis, le Canada
devrait adopter une mesure législative visant à
combattre l'ingérence de la Chine et d'autres
États au Canada. »
Michael Chong a dit :
« Oui, nous sommes d'avis que le Canada a
besoin d'un nouveau cadre législatif pour
traiter différents enjeux. À titre d'exemple,
selon nous, les anciens politiciens et anciens
fonctionnaires de haut niveau devraient inscrire
leurs contrats dans un registre lorsqu'ils
travaillent pour un État étranger ou une entité
contrôlée par un État étranger. Par ailleurs,
nous sommes d'avis que les forces de l'ordre
devraient être mieux outillées pour contrer les
activités subversives par lesquelles la Chine
cherche à exercer son influence en sol canadien.
Ce ne sont là que deux des changements qui
nécessiteraient un nouveau cadre législatif et
qui nous permettraient d'être mieux outillés
pour contrer ces activités. »
Au nom du gouvernement libéral, le ministre des
Affaires étrangères, François-Philippe Champagne,
a déclaré :
« Monsieur le Président, j'ai été heureux
d'assister au discours du député ce matin. Il a
oublié de mentionner une chose, et c'est
là-dessus que porte ma question : le
leadership du Canada quand il s'agit de passer à
l'action.
Pourquoi le député omet-il de dire aux
Canadiens qui suivent le débat que le Canada a
été le premier pays à suspendre le traité
d'extradition entre le Canada et Hong
Kong ? Pourquoi ne dit-il pas aux Canadiens
que le Canada a suspendu l'exportation
d'équipement sensible ? Pourquoi le député
ne mentionne-t-il pas que nous avons pris des
mesures en matière d'immigration ?
J'ai présidé la réunion du Groupe des cinq et
j'ai consulté nos homologues britanniques tout
au long du processus. Pourquoi le député omet-il
de dire que nous continuons à collaborer avec
nos partenaires de partout dans le monde pour
exercer notre leadership, passer à l'action et
défendre les valeurs et les intérêts
canadiens ? »
Cet article est paru dans
Volume 50 Numéro 87 - 21 décembre 2020
Lien de l'article:
: La motion contre la Chine
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