Le peuple et personne d'autre ne décidera de ce qui se passe au Venezuela
- Margaret Villamizar -
À la suite de
l'élection de la nouvelle Assemblée nationale, le
président vénézuélien Nicolas Maduro s'est dit
satisfait que l'Assemblée nationale ait été
affranchie du contrôle des forces de l'opposition
qui s'en étaient servies comme base au cours des
cinq dernières années pour violer la constitution
du pays, empêcher le fonctionnement normal du
gouvernement et appuyer la guerre économique des
États-Unis contre le pays. Il a dit qu'il
s'agissait d'une grande victoire pour la
démocratie, pour la constitution. Nicolas Maduro a
déclaré que la première tâche de la nouvelle
législature sera de réparer les dommages causés à
l'économie du pays par les sanctions et d'adopter
les mesures nécessaires pour la fortifier et la
protéger des répercussions de la guerre économique
américaine. Il a dit qu'il faudra pour ce faire
adopter un projet de loi approuvé par l'Assemblée
constituante nationale en octobre, qui sera
dissoute le 31 décembre, la Loi antiblocus
pour le développement national et la garantie
des droits humains.
Lorsque la Loi a été approuvée à l'Assemblée
constituante, la vice-présidente Delcy Rodriguez a
dit que la Loi ouvrirait de nouvelles avenues pour
créer des partenariats avec des investisseurs
internationaux en offrant des protections
spéciales pour leurs investissements, permettant
ainsi au Venezuela de faire un pas en avant et de
lancer une offensive économique contre les
sanctions menées par les États-Unis qui asphyxient
l'économie. Elle a dit que le gouvernement
dévoilerait un « panier de projets » pour les
investisseurs étrangers dans des secteurs tels que
le pétrole, le gaz, les mines, l'agriculture, le
tourisme et « tous les secteurs où il est possible
pour le Venezuela de générer des investissements à
grande échelle ».
Si à Washington « on parle de droits humains », a
dit Rodriguez, « leurs politiques visent à limiter
le bien-être de toute une nation ».
La réponse impérialiste aux forces
bolivariennes Piquetage à Montréal le jour des élections au Venezuela, le 6
décembre 2020.
Comme on s'y attendait, les résultats
des élections n'ont pas été reconnus par les
gouvernements impliqués dans la guerre
multilatérale des États-Unis contre le Venezuela
qui continuent de tenter d'imposer au peuple un «
président » et un gouvernement parallèles contre
sa volonté telle qu'exprimée démocratiquement. Les
États-Unis ont confirmé que la prochaine étape de
leur plan de changement de régime consiste à
considérer l'Assemblée nationale contrôlée par
l'opposition et dont le mandat prend fin le 5
janvier 2021 – sur lequel Juan Guaido a brièvement
présidé, créant le fondement d'une présidence
fabriquée – comme étant la seule instance
législative « légitime » du pays. Peu après que le
secrétaire d'État des États-Unis, Mike Pompeo, ait
dénoncé les élections comme étant « truquées » et
une mascarade, le Canada et le Groupe de Lima (à
l'exception de l'Argentine et de l'Uruguay), la
Grande-Bretagne et les dirigeants de l'Union
européenne, de manière servile, ont offert leur
propre version de cette même position.
Le ministre des Affaires étrangères,
François-Philippe Champagne, par exemple, a dit
dans sa déclaration publiée le 6 décembre, avant
même que les résultats des élections ne soient
annoncés : « Le Canada ne reconnaît pas les
résultats du processus électoral du 6 décembre au
Venezuela parce que ce processus ne répond pas aux
conditions minimales d'un exercice libre et
équitable de la démocratie. » Il a ensuite appelé
à de nouvelles élections présidentielles et
parlementaires conformément aux normes que
présumément les États-Unis et l'Organisation des
États américains, le Canada et le Groupe de Lima
personnifient, leur permettant de faire la leçon
aux autres !
L'ancien premier ministre espagnol, José Luis
Rodriguez Zapatero, qui était au Venezuela pour
observer les élections et qui a facilité de
nombreuses tentatives de négociations entre le
gouvernement de Nicolas Maduro et les forces de
l'opposition, et que les États-Unis ont
invariablement sabotées, a affirmé que les
élections doivent mettre fin aux sanctions
incompréhensibles et injustes contre le Venezuela.
« La politique de sanctions et de
non-reconnaissance pourrait nous mener à la plus
grande absurdité dans l'histoire du droit
international », a-t-il prévenu.
Ces conseils ne se sont cependant pas rendus
jusqu'au gouvernement Trudeau au Canada ni à
d'autres, puisque l'Union européenne a annoncé
cette semaine de nouvelles sanctions contre
certains représentants vénézuéliens. Montréal, le 6 décembre 2020.
Le « multilatéralisme qui fonctionne » des
États-Unis
tel que mis en oeuvre contre le Venezuela
S'adressant à la 50e Assemblée générale de
l'Organisation des États américains (OÉA) en
octobre, Mike Pompeo a qualifié l'organisation
d'exemple de « multilatéralisme qui fonctionne
vraiment ». Ce qu'il entend par «
multiculturalisme » est devenu évident lorsqu'il a
donné aux gouvernements d'autres pays leurs
ordres, comme s'ils étaient tous des États vassaux
des États-Unis. La première des « attentes » de
son gouvernement, a-t-il dit, est que tous les
États membres ne reconnaissent pas les élections
passées ou futures du « régime illégitime de
Maduro ».
Le 9 décembre, une réunion spéciale du Conseil
permanent de l'OÉA a eu lieu à la demande du
Brésil, du Canada, de la Colombie, des États-Unis
et d'autres pays pour « examiner la situation
politique en République bolivarienne du Venezuela
dans le contexte d'élections parlementaires
organisées par le régime illégitime de Nicolas
Maduro ».
Lors de cette réunion, une résolution conforme à
ce qu'on doit s'attendre des États-Unis et de son
Groupe de Lima a été adoptée par 20 pays membres
alors que deux pays ont voté contre, cinq se sont
abstenus et que six pays des Caraïbes de même que
le Nicaragua n'étaient pas présents[1]. Selon la
résolution, les élections « frauduleuses » ont eu
lieu afin d'éliminer « la seule institution
légitime et démocratiquement élue restante au
Venezuela ». On y prétend que l'installation des
personnes élues sera encore plus destructrice pour
la démocratie et l'État de droit, et exacerbera
tous les autres problèmes qui affectent la vie
quotidienne des Vénézuéliens. En d'autres mots,
les États-Unis seraient forcés de poursuivre et
d'intensifier leur guerre d'usure cruelle contre
le Venezuela.
La résolution fait l'éloge de la « consultation
populaire » organisée la semaine dernière par la
faction Juan Guaido-Leopoldo Lopez, dans laquelle
on demandait aux Vénézuéliens, dans leur pays et à
l'étranger, de répondre à une série de questions
suggestives visant à montrer que le peuple ne
reconnaît pas les résultats des élections du 6
décembre et à demander à « la communauté
internationale » de faire de même et, en outre,
qu'elle « ordonne » que les mesures nécessaires
soient prises pour que « la communauté
internationale » intervienne pour « sauver notre
démocratie, traiter la crise humanitaire et
protéger le peuple des crimes contre l'humanité ».
En outre, la résolution a salué la « consultation
populaire » organisée cette semaine principalement
sur Internet et via des applications téléphoniques
par la faction Juan Guaido-Leopoldo Lopez, qui
demande aux gens de ne pas reconnaître les
résultats de l'élection et de plutôt réclamer une
intervention étrangère pour « sauver la démocratie
» au Venezuela. C'est ce qu'on appelle une «
initiative de la société civile avec le soutien de
l'Assemblée nationale ».
Après avoir affirmé que les élections du 6
décembre n'étaient prétendument ni libres ni
équitables « conformément aux conditions établies
par le droit international » et d'autres normes
démocratiques que les gouvernements des
États-Unis, du Canada et leur pathétique Groupe de
Lima prétendent respecter, la résolution
contrerévolutionnaire a appelé à « la tenue, dès
que possible, d'élections présidentielles et
parlementaires libres, équitables, transparentes
et légitimes ».
Mais tout n'est pas allé rondement pour les
États-Unis et le Canada. Un certain nombre de pays
qui ont voté en faveur de la résolution ont tenu à
déclarer que leur vote ne comprenait pas un accord
pour continuer à reconnaître l'Assemblée nationale
sortante lorsque son mandat se terminera en
janvier, comme les États-Unis le réclament.
L'ambassadeur d'Argentine auprès de l'OÉA, Carlos
Raimundi, qui s'est abstenu lors du vote, a pris
cette position. Il a déclaré que ce serait une
violation de la constitution du Venezuela de
continuer à reconnaître la législature qui arrive
au terme de son mandat. Il a également déclaré que
son gouvernement s'était engagé à faciliter la
recherche d'une solution politique au Venezuela
par le dialogue, et que la voie électorale était
la seule viable pour le renouvellement des
institutions du pays. Raimundi a dit qu'il était
erroné d'ignorer la volonté de ceux qui ont pris
part à l'élection et de dicter les conditions de
l'extérieur sans contribuer même de manière
minimale aux élections, ou pire, en promouvant
leur boycottage. Il a ensuite demandé que la
politique de sanctions et de non-reconnaissance
soit reconsidérée, affirmant qu'elle n'avait mené
nulle part.
L'ambassadrice du Mexique, Luz Elena Baños, a
pris une position honorable, en votant, comme le
représentant de la Bolivie, contre la résolution.
Ses paroles représentaient également plusieurs
sinon tous ceux qui étaient restés à l'écart de la
réunion. Elle a vivement dénoncé le comportement
antidémocratique et intolérant qui prévaut depuis
un certain temps au sein de l'OÉA, où un groupe
exclusif de pays propose une résolution sans
consulter tous les membres. Elle a condamné la
résolution comme étant interventionniste et a dit
que le rôle de l'OÉA n'est pas de reconnaître ou
de ne pas reconnaître les gouvernements.
L'approche de ces pays qui ne s'opposent même pas
aux sanctions, a-t-elle dit, est contre le
multilatéralisme, qui est censé essayer de
résoudre les problèmes sur la base du droit
international et non de bloquer la possibilité de
négocier.
Lorsque
l'ambassadeur du Canada Hugh Adsett a pris la
parole, il a faussement accusé le « régime »
vénézuélien d'avoir commis des crimes contre
l'humanité « contre tous ceux qui sont en
désaccord, afin de maintenir son emprise sur le
pouvoir ». De façon mensongère, il a affirmé que
le Canada veut travailler avec les Vénézuéliens et
d'autres membres de l'OÉA pour les aider à
résoudre leurs problèmes. Il a imposé comme
condition de collaboration la tenue de ce que le
Canada et l'OÉA reconnaîtraient comme des «
élections présidentielles et parlementaires libres
et équitables ».
L'hypocrisie des libéraux de Trudeau n'a pas de
limites. Ils n'agissent pas au nom des Canadiens
qu'ils n'ont jamais consultés au sujet de la sale
guerre dans laquelle ils sont engagés contre le
peuple vénézuélien et contre d'autres dans le
monde qui sont ciblés par les États-Unis et l'OTAN
pour un changement de régime et une
déstabilisation. Au lieu de s'immiscer dans les
affaires du peuple vénézuélien à la demande des
intérêts privés étroits qui sont favorisés par la
destitution d'un gouvernement bolivarien, le
gouvernement Trudeau devrait plutôt se préoccuper
du manque de conditions démocratiques dans sa
propre maison et des demandes du peuple canadien
pour être investi du pouvoir décisionnel au pays.
Note
1. Pour : Bahamas,
Brésil, Canada, Chili, Colombie, Costa Rica,
République dominicaine, Équateur, El Salvador,
Guatemala, Guyane, Haïti, Honduras, Jamaïque,
Panama, Paraguay, Pérou, Sainte-Lucie, Uruguay,
États-Unis. La délégation illégale «
vénézuélienne » a également voté pour.
Contre : Bolivie, Mexique
Abstention : Argentine, Barbade, Belize,
Saint-Kitts-et-Nevis, Suriname
Absents : Antigua-et-Barbuda, Dominique, Grenade,
Nicaragua, Saint-Vincent-et-les-Grenadines,
Trinité-et-Tobago.
(Photo : J. Escalona, LML, C.
Floria)
Cet article est paru dans
Volume 50 Numéro 83 - 12 décembre 2020
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