Projet de loi C-15

Tentative du gouvernement de subvertir le droit des autochtones à la souveraineté

Le 3 décembre, le gouvernement libéral a déposé au Parlement le projet de loi C-15, Loi sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (DNUDPA). En présentant le projet de loi, le ministre fédéral de la Justice David Lametti a déclaré : « En travaillant avec les Premières Nations, les Inuits et les Métis pour mettre en oeuvre la déclaration et créer un cadre pour atteindre ses objectifs, le gouvernement du Canada montre qu'il valorise, respecte et promeut les droits de la personne de tous, et pas seulement de certains [...] Le projet de loi est un pas en avant important sur la voie commune de la réconciliation pour les peuples autochtones et non autochtones. »

À la lumière des preuves, personne ne peut être dupe de l'affirmation éhontée du gouvernement Trudeau selon laquelle le projet de loi C-15 fera progresser les droits des peuples autochtones et favorisera la réconciliation.

Le projet de loi C-15 rappelle la loi 41 du gouvernement de la Colombie-Britannique, la Loi sur la Déclaration des droits des peuples autochtones, adoptée en novembre 2019. Elle n'a rien fait pour faire respecter les droits des peuples autochtones de la Colombie-Britannique même si le gouvernement Horgan a revendiqué la même chose – que la loi 41 « fera avancer la province grâce à un plan d'action clair pour la réconciliation, qui appuie la prévisibilité et les opportunités économiques, tout en respectant les droits humains des autochtones ». Loin de là, lorsque les gouvernements au Canada parlent de défendre les droits humains des peuples autochtones, ils ne veulent pas dire fournir des garanties en matière de logement, d'eau, de soins de santé et d'éducation. Même le droit humain fondamental et issu des traités à l'eau potable a été refusé à de nombreuses communautés autochtones qui vivent dans des régions éloignées, notamment la Première Nation de Naskandaga, qui vit avec une ordonnance de faire bouillir l'eau depuis près de trois décennies. Ce que les libéraux de Justin Trudeau veulent dire c'est que les terres des autochtones continueront de leur être volées, comme le fait le gouvernement de la Colombie-Britannique en allant de l'avant avec le projet de barrage du site C sur le territoire du Traité 8, ou par les attaques de l'État contre le peuple Wet'suwet'en qui défend ses droits ancestraux face aux intérêts d'un monopole privé et de mégaprojets économiques ou sur le territoire mohawk à des fins de développement.

Depuis leur arrivée au pouvoir en 2015, les libéraux de Justin Trudeau ont démontré par leurs actes que le droit de monopole supplante les droits des autochtones lorsqu'il s'agit de relations Couronne-Autochtones. L'un des principaux points soulevés par les conférenciers lors du webinaire de l'Institut Yellowhead tenu le 9 décembre sur le projet de loi C-15 est que l'État canadien à tous les niveaux criminalise et cible les peuples autochtones en les présentant comme des menaces au développement économique et à la prospérité du Canada, en utilisant les tribunaux pour imposer des injonctions et en faisant appel à des forces paramilitaires lorsque les peuples autochtones défendent leur souveraineté et leur droit d'être.

En ce qui concerne les droits des peuples autochtones, les libéraux de Justin Trudeau ont continué de terroriser et de criminaliser les défenseurs des terres autochtones d'un océan à l'autre lorsqu'ils défendent leurs droits, et ont continué de surveiller les activités politiques des autochtones dans le cadre du tristement célèbre projet Sitka de la GRC[1].

À l'instar de leurs prédécesseurs, les conservateurs de Stephen Harper, les libéraux continuent de sous-financer les programmes sociaux destinés aux familles et aux enfants autochtones, ce qui a appauvri et déstabilisé les communautés et conduit davantage d'enfants autochtones à être placés dans des institutions de l'État.

En juin 2019, Trudeau a reconnu que les crimes commis contre les femmes et filles autochtones disparues et assassinées constituaient un « génocide », mais son gouvernement n'a pas fait grand-chose pour remédier à cette crise nationale. Sous l'administration « féministe » de Trudeau à Ottawa, les femmes autochtones demeurent la population carcérale dont la croissance est la plus rapide au Canada. Comment ces faits peuvent-ils être conciliés avec les affirmations des libéraux selon lesquelles le projet de loi C-15 fait progresser les droits des peuples autochtones et constitue un pas vers la réconciliation ?

Les libéraux parlent généralement des droits comme des abstractions, dépourvues de sens ou de tout lien avec la vérité sur le terrain. Ces abstractions sont une provocation contre les peuples autochtones et les Canadiens et Québécois qui, de l'avis des libéraux, ne voient pas ce que ceux-ci manigancent et, s'ils le voient, ne peuvent pas les forcer à rendre des comptes.

Tout finit par se payer et toutes les tentatives pour dissimuler les crimes que l'État canadien a commis et continue de commettre contre les peuples autochtones aujourd'hui ne resteront pas impunies. Le projet de loi C-15 est soumis au Parlement à un moment où les relations entre la Couronne et les autochtones sont au plus bas parce que le Canada n'a pas respecté ses obligations envers les peuples autochtones, surtout lorsqu'il s'agit de respecter leur souveraineté. Le gouvernement poursuit la politique raciste de l'État selon laquelle il décide de ce qui est bon et de ce qui est mauvais pour les peuples autochtones. Il contrôle leur argent, qui leur est dû pour le vol des terres et des ressources dont ils dépendent pour vivre.

Derrière les belles paroles de réconciliation, il y a le sinistre objectif de miner davantage la souveraineté des peuples autochtones et de subvertir l'unité politique et la solidarité sans cesse croissantes des peuples du Canada et du Québec avec les peuples autochtones. Le Canada peut espérer donner l'impression de se conformer aux exigences des Nations unies de respecter les droits des autochtones et ainsi effacer sa triste réputation de puissance coloniale, mais les faits sont têtus. Il a recouru à cette façade à plusieurs reprises dans le passé et le gaspillage d'argent dans plus de campagnes de relations publiques est répugnant. Les actions du gouvernement, y compris la présentation du projet de loi C-15, ne peuvent pas masquer la conception coloniale qui bloque les aspirations des peuples qui forment le Canada à une relation nouvelle et moderne avec les peuples autochtones fondée sur la reconnaissance de leur souveraineté et de leurs droits ancestraux.

L'Institut Yellowhead et d'autres organisations ont été les hôtes d'un webinaire en ligne le 9 décembre sur le sujet « L'économie de la rançon  Ce que Fermons le Canada révèle au sujet des droits territoriaux ». Ont pris la parole des défenseurs de la terre des nations Secwepemc, Wet'suwet'en, Mohawk et Mi'kmaw. La porte-parole des Wet'suwet'en Molly Wickham a souligné que la nouvelle loi du gouvernement Trudeau sur la DNUDPA est « une assurance pour les investisseurs [...] un écran de fumée pour dire que nous jouons gentiment [...] nous leur [peuples autochtones] donnons la parole [...] les gouvernements se demandent comment ils vont mettre en oeuvre le DNUDPA ? Eh bien, ce n'est pas à eux. C'est à nous en tant que peuples autochtones [...] de décider comment la DNUDPA sera mise en oeuvre. La DNUDPA sera mise en oeuvre conformément à nos lois ».

Skyler Williams, qui a parlé en tant que défenseur de la terre Mohawk, a dit que les positions prises par les défenseurs de la terre pour défendre leur souveraineté sur l'île de la Tortue ont été confrontées à la violence de l'État, mais que tout cela a renforcé la détermination des peuples autochtones à affirmer leur souveraineté avec le soutien de leurs alliés sur l'île de la Tortue. C'est la réponse que mérite le projet de loi C-15.

Le projet de loi C-15 est une tentative désespérée des libéraux de Justin Trudeau de se redonner une crédibilité et une légitimité en ce qui concerne les relations entre la Couronne et les autochtones.

Non au projet de loi C-15 !
Défendons les droits ancestraux et issus des traités des peuples autochtones !
Respectez la souveraineté des Premières Nations !

Note

1. Des courriels internes, des mémos, des rapports et des documents de la GRC acquis par CBC News ont révélé l'existence du « Projet SITKA » de la GRC. La GRC voulait indentifier des activistes qui avaient été arrêtés, accusés et condamnés, et créer des profils et des liens à des organisations à l'échelle du pays. Après avoir fait enquête sur 300 activistes, la GRC a produit une liste en comprenant 89 - autochtones et non autochtones - à la fin du projet de renseignement, a indiqué CBC. Selon la GRC, ces personnes étaient « désireuses et capables d'utiliser des tactiques illégales » lors des protestations pour les droits des autochtones de décembre 2012 à la fin de 2013. On dit que le projet s'est terminé en mars 2015. Cependant, quelques jours avant que Justin Trudeau ait annoncé l'approbation initiale du pipeline Trans Mountain, la GRC a réactivé la liste soi-disant dormante d'activistes des droits des autochtones qu'elle considérait représenter des « menaces criminelles » potentielles ». (APTN)

(Sources : Gouvernement du Canada, Gouvernement de la Colombie-Britannique, Globe and Mail, Yellowhead Institute, Policy Options, APTN. Photos: LML, J. Stayshyn)


Cet article est paru dans

Volume 50 Numéro 83 - 12 décembre 2020

Lien de l'article:
: Tentative du gouvernement de subvertir le droit des autochtones à la souveraineté - Philip Fernandez


    

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