Une stratégie de confrontation avec la Chine
- Tony Seed -
Les impérialistes américains et leurs alliés
tels que le Canada ciblent toujours plus la Chine
lors des Forum d'Halifax sur la sécurité
internationale (FHSI).
Dans un communiqué de presse du 13 novembre
concernant les priorités du forum cette année
(HFX2020), le FHSI déclare : « La position de
plus en plus antagoniste de la politique étrangère
de la Chine et ce que les démocraties peuvent
faire à ce sujet seront un sujet clé à HFX2020. La
participation à ces discussions inclura entre
autres : l'ancienne présidente du Parti
démocratique de Hong Kong, Emily Lau; Ai Weiwei,
militante des droits de la personne et artiste; et
Dolkun Isa, président du Congrès mondial ouïghour.
Le guide, Chine contre démocratie :
Le plus Grand Jeu, qui décrit l'approche
collective que les démocraties du monde peuvent
adopter pour contrer les ambitions mondiales de Xi
Jinping, sera également publié au HFX2020. »
Un développement connexe est l'augmentation des
ventes d'armes à Taïwan (officiellement la
République de Chine) pour provoquer la Chine,
visiblement en violation de la politique d'une
seule Chine. Que cela signale ou non la fin du
respect de la politique d'une seule Chine, cela
montre sans aucun doute que des tentatives sont
faite pour détruire les arrangements conclus au
lendemain de la Deuxième Guerre mondiale et lors
de la fondation de la République populaire de
Chine (RPC) sur la base de laquelle les relations
internationales ont été menées.
L'initiative anti-Chine a été initialement
annoncée le 22 novembre 2019, deux jours
après que le secrétaire d'État américain Mike
Pompeo ait réclamé la demande à la suite d'une
réunion des ministres des Affaires étrangères de
l'OTAN à Bruxelles que les pays de l'OTAN ne
peuvent ignorer les « différences et croyances
fondamentales » entre eux et le Parti
communiste chinois.
Dans un communiqué de presse publié lors du forum
de l'année dernière, le FHSI a annoncé « une
nouvelle initiative d'un an axée sur la
Chine » et le président du FHSI, Peter Van
Praagh, a déclaré : « Ce n'est plus un secret
pour personne que la Chine de Xi Jinping travaille
fort pour faire du monde un lieu sûr pour
l'autoritarisme. Il est temps d'adopter une
stratégie globale vis-à-vis la Chine par les
États-Unis, le Canada et leurs alliés – une
stratégie qui fait du monde un lieu sûr pour la
démocratie.
« Au cours des 12 prochains mois, Halifax
consultera des experts en la matière et des
leaders d'opinion pour obtenir leur avis sur ce
qui peut être fait pour faire face à cette menace
croissante à notre liberté. »
Le FHSI a « consulté plus de 250 experts du
monde entier, y compris des secrétaires de cabinet
des administrations Clinton, Bush et Obama ».
En fin de compte, ces « leaders d'opinion »
ont produit un « guide » incluant « un énoncé
de principe », dénué de principe, intitulé
Chine contre démocratie : Le plus
Grand Jeu – un guide pour les démocraties,
un document de 101 pages disponible sur le
site Web du FHSI[1].
Le sommaire exécutif du guide fait appel à des
accusations discréditées que la RPC doit être
blâmée pour la pandémie de la COVID-19 et qui sont
utilisées pour appuyer ses prétentions que la
Chine et ses dirigeants posent une menace
existentielle à la « démocratie » à l'échelle
mondiale. Le sommaire se termine par des menaces
de représailles contre la Chine pour ses
soi-disant méfaits.
« Il est grand temps de repenser sobrement les
réponses politiques du monde démocratique au défi
de la Chine. Les démocraties doivent chercher à
réaliser un 'pushback' soigneusement réfléchi,
mais robuste – un 'pushback' que la Chine de Xi
s'est attiré. Le PCC doit revoir ses ambitions
mondiales et s'abstenir de mener cette offensive
continue contre les démocraties du monde.
« Ni les États-Unis ni aucune autre démocratie
n'est susceptible de réussir à relever le défi en
provenance de la Chine de Xi en faisant cavalier
seul.
« Le déploiement effectif de la puissance, la
richesse et les prouesses technologiques des
États-Unis, conjointement avec leur vaste éventail
d'alliés mondiaux, feront en sorte que les
ambitions de la Chine puissent être maintenues
sous surveillance. Alors que les États-Unis
restent le leader naturel du monde libre, les
alliances et les partenariats entre démocraties
seront différents de ceux du XXe siècle. Le plus
urgent actuellement est de réinventer des
alliances démocratiques dignes du XXIe
siècle. »
Le manuel ne mentionne ni Mike Pompeo ni ses
ordres de marche. Il dit plutôt de sa
genèse : « Ce projet a débuté sous la forme
d'une série de réunions accueillies par la baronne
Neville-Jones à la Chambre des Lords à Londres
en 2019. Lors d'une de ces réunions, la
baronne Neville-Jones, qui a été une amie et un
soutien indéfectible depuis que HFX a vu le jour
en 2009, a déclaré que les démocraties du monde
n'avaient justement plus de stratégie commune à
l'égard de la Chine, et qu'elles devraient en
avoir une. Ce guide cherche effectivement à
contribuer à la construction de cette stratégie
commune. » Neville-Jones a été membre du
groupe de Bilderberg, présidente de QinetiQ
(société de recherche/services militaires
privatisée au Royaume-Uni), gouverneure de la BBC,
présidente du conseil consultatif sur l'assurance
de l'information, présidente du comité conjoint du
renseignement et directrice générale de NatWest
Markets.
L'auteur principal du guide est Robin Shepherd,
vice-président récemment nommé au FHSI et
journaliste britannique réactionnaire chevronné,
affilié à la Henry Jackson Society en
Grande-Bretagne, au McCain Institute aux
États-Unis et à Just Journalism, un groupe de
défense israélien. Son livre, Beyond the
Pale : Europe's Problem with Israel,
était si extrême dans sa promotion du terrorisme
d'État israélien qu'il aurait été congédié par
Chatham House, l'Institut royal des affaires
internationales, où il dirigeait le programme
Europe.
L'« équipe de collègues et de
collaborateurs » inclut Paz Magat, qui vient
d'un milieu contre-révolutionnaire – sa famille a
fui la révolution du pouvoir populaire
en 1986 contre la dictature de Marcos aux
Philippines. Auparavant, elle a travaillé avec le
département d'État américain et est responsable du
programme du FHSI OTAN « Peace With Women
Fellowship » organisé pour entraîner les
femmes dans l'agression et la guerre sous la
bannière de « l'inclusion ».
Le guide crédite entre autres :
- Michael R. Auslin, de l'institution Hoover et
conseiller principal du HFX pour l'Asie,
responsable de la « supervision générale ».
En 1959, l'ancien président américain Herbert
Hoover déclarait à propos de l'American Enterprise
Institute : « Le but de cette institution
doit être, par ses recherches et ses publications,
de démontrer les méfaits des doctrines de Karl
Marx. » Il est membre du London's Policy
Exchange, un groupe de réflexion conservateur qui
avait des liens étroits avec David Cameron, et il
est vice-président de la Wilton Park USA
Foundation, la branche américaine de Wilton Park,
une agence exécutive du ministère britannique des
Affaires étrangères et du Commonwealth.
Auslin était auparavant directeur des études
japonaises auprès de la conservatrice American
Enterprise Institute for Public Policy Research,
qui a joué un rôle majeur dans la création d'une
opinion favorable à l'invasion américaine de
l'Irak en 2003.
- l'amiral Mike Rogers (retraité), ancien
directeur de l'Agence américaine de sécurité
nationale (NSA) et ancien chef du Commandement
cybernétique américain (U.S. Cyber Command);
- John Mullen, ancien directeur adjoint de la CIA
pour l'Asie de l'Est et le Pacifique et ancien
directeur adjoint exécutif pour la sécurité
nationale, FBI, responsable du «
contre-terrorisme, contre-espionnage, ADM et
efforts de renseignement dans le monde
entier »;
- l'ambassadeur Kenichiro Sasae, président de
l'Institut japonais des affaires internationales;
- l'ambassadeur Hemant Singh, directeur général
du Delhi Policy Group (DPG), et le Brigadier Arun
Sahgal (retraité), DPG Senior Fellow pour la
sécurité stratégique et régionale;
- Peter Hefele, chef du département Asie et
Pacifique, et David Merkle, responsable pour la
Chine à la fondation allemande Konrad
Adenauer-Stiftung; et
- Roland Paris, ancien conseiller principal en
politique étrangère de Justin Trudeau.
Dans un tweet du 17 novembre, le FHSI
écrit : « Pékin s'est donné comme priorité
d'installer ses fidèles en tant que figures de
proue des organisations internationales, de @ITU à
@icao. HFX remercie @UNWatch & @HillelNeuer
pour leur contribution au Manuel pour les
démocraties et au maintien d'un contrôle sur les
régimes autoritaires comme la Chine. »
Neuer est un Sud-Africain de Toronto. UN Watch
est une minuscule agence basée à Genève qui
s'occupe des intérêts d'Israël; il est
officiellement affilié à l'American Jewish
Committee, une organisation de lobby politique
pro-israélienne basée à New York. UN Watch se
consacre à renverser les principes les plus
fondamentaux de la Charte des Nations unies au nom
des droits de l'homme et à assurer un «
équilibre » envers Israël, ce qui a été
condamné par plus de 20 résolutions sur les
droits de l'homme et plus de 70 résolutions
de l'Assemblée générale des Nations unies.
UN Watch n'a rien à apprendre aux Canadiens ou
aux peuples du monde sur la démocratie. Il a
organisé la soi-disant lettre libyenne des droits
de l'homme du 21 février 2011 simulant
le dossier contre la Libye qui appelait le Conseil
de sécurité de l'ONU (CSNU) à invoquer la «
responsabilité de protéger » et à envahir la
Libye. La lettre a été utilisée par le CSNU, Obama
et l'OTAN comme prétexte pour mettre en place les
« zones d'exclusion aérienne » pour couvrir
l'agression sauvage des forces américano-OTAN, les
bombardements par des avions de combat, les
attaques de drones qui ont tué des milliers
d'innocents. Un général des Forces canadiennes en
est le commandant.
Dans la même veine que le manuel, le FHSI a
également publié ses « Principes pour la
Chine », présentés comme une sorte de serment
d'allégeance devant être prêté par ceux qu'il
considère comme faisant partie du « monde
démocratique ». Il se lit comme suit :
« Le monde démocratique s'engage à se défendre
contre les pratiques suivantes qui sapent ses
valeurs et son mode de vie :
« - ignorer les tentatives de la Chine
d'interférer dans les sociétés démocratiques;
« - se soumettre, collaborer ou participer à une
quelconque censure ou autocensure des idées, des
écrits, des entreprises artistiques ou des
déclarations concernant la république populaire de
Chine;
« - participer à toute pratique ou tout échange
lié aux affaires ou à la technologie, qui assiste
et encourage l'oppression exercée par le Parti
communiste chinois (PCC) contre son propre
peuple;
« - omettre de s'opposer aux tentatives par la
république populaire de Chine d'établir une
gouvernance mondiale de l'Internet et des normes
technologiques en accord avec ses propres valeurs
et ambitions autoritaires;
« - soutenir et s'engager dans toute forme de
punition ou de sanction à l'encontre de quiconque
pour cause de critiques à l'égard de la Chine;
« - Omettre de soutenir les personnes et les
gouvernements du monde entier qui ont un esprit
démocratique et qui subissent des pressions ou des
intimidations de la part de la République
populaire de Chine;
« - acheter ou négocier, en connaissance de
cause, des produits ou des services chinois
fabriqués grâce au travail forcé ou qui sont le
résultat d'activités criminelles comme la
contrefaçon ou le vol de propriété
intellectuelle. »
Le 18 novembre, le Centre de la sécurité des
télécommunications et son Centre canadien pour la
cybersécurité, dont la présidente Shelly Bruce a
participé au FHSI, ont publié un rapport
hystérique déclarant que la Chine, la Russie,
l'Iran et la République populaire démocratique de
Corée constituent des « menaces stratégiques pour
le Canada » par les cyberattaques, les
fausses nouvelles, le vol de propriété
intellectuelle, etc. Pour justifier son approche,
en cause de désespoir, le Service canadien du
renseignement de sécurité, dans un rapport récent,
est allé jusqu'à dépeindre les Canadiens chinois
comme des troupes de choc dans les stratagèmes
présumés de la Chine. Selon les thèses xénophobes
et racistes s'apparentant à l'hystérie sur le «
péril jaune » au XIXe siècle, les Canadiens
d'origine chinoise seraient des marionnettes du
Parti communiste chinois qui infiltrent
secrètement la société canadienne. Cela fait suite
à des tentatives explicites des cercles dirigeants
du Canada de qualifier la COVID-19 de « virus de
Wuhan » pour blâmer la Chine et parler de
négligence du système de santé publique chinois.
Outre fomenter une agression contre la Chine, de
telles accusations sans fondement ont pour but de
détourner les peuples de l'examen du système
économique, du processus politique et des
conditions inhumaines qui leur sont imposées, pour
qu'ils ne s'engagent pas dans la recherche de
nouveaux arrangements.
Note
1. Chine contre
démocratie : « le plus Grand Jeu »
disponible ici
(en français)
Cet article est paru dans
Volume 50 Numéro 74 - 21 novembre 2020
Lien de l'article:
Une stratégie de confrontation avec la Chine - Tony Seed
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