Campagne pour mettre fin à la sous-traitance des travaux civils au ministère de la Défense nationale


La vaste campagne publique de l'Alliance de la fonction publique du Canada en septembre 2018 a réussi à mettre fin à la sous-traitance des services de nettoyage sur la base militaire de Greenwood dans une région rurale de la Nouvelle-Écosse. La sous-traitance planifiée des services de nettoyage à Kingston a aussi été retirée.

L'Alliance de la fonction publique du Canada (AFPC) et une de ses plus importantes composantes, l'Union des employés de la Défense nationale (l'UEDN), demandent aux Canadiens de se joindre à sa campagne pour éliminer la privatisation au ministère de la Défense nationale (MDN). Le 30 octobre, les syndicats ont publié un rapport « détaillant l'échec de la privatisation au sein du ministère de la Défense nationale. La plupart des bases du ministère de la Défense nationale (MDN) sous-traitent la gestion des installations, le nettoyage, la préparation des aliments, la tonte des pelouses et le travail spécialisé. Les services essentiels aux opérations du MDN, comme l'entretien des hélicoptères et la gestion des aéroports, sont également sous-traités. »

L'AFPC-UEDN déclare : « Lorsque les gouvernements sous-traitent des travaux du secteur public à des entreprises privées, les profits ont priorité sur les services, et tout le monde, sauf les actionnaires des entreprises, finit par en payer le prix. »

L'AFPC-UEDN détaille les abus des fonds publics et des travailleurs par les entreprises sous-traitantes. Cet abus comprend une demande constante de modifier les contrats pour plus d'argent et de prolongations, la dissimulation de la façon dont l'argent est utilisé, de terribles relations avec les employés et un faible niveau de service.

« Une fois le contrat conclu, les Canadiens n'ont aucun moyen de savoir comment l'argent public est dépensé en raison des clauses de protection des avantages concurrentiels et des intérêts des entreprises contenues dans la Loi sur l'accès à l'information », déclare Marianne Hladun, vice-présidente régionale et exécutive de l'AFPC-Prairies. « Sans les détails de ces contrats, le public n'a aucune information sur les rapports d'inspection, les salaires des employés, les dépenses d'équipement ou les bénéfices réalisés par les entreprises. Lorsque les employés rapportent qu'on leur dit de diluer les produits de nettoyage et de rationner les fournitures, ces détails deviennent très importants. »

L'AFPC-UEDN affirme que les budgets des bases des Forces canadiennes sont faussés pour faire paraître sous un jour favorable le travail effectué par les entrepreneurs privés par rapport à celui effectué par les employés du secteur public. Dans le cadre du processus budgétaire, très peu d'argent est alloué pour l'organisation interne de l'entretien et des services. En revanche, le budget prévoit que des « fonds généreux » seront versés pour les services donnés en sous-traitance pour l'exploitation et la maintenance. Néanmoins, les commandants de base sont tenus par leurs budgets déterminés par le MDN de ne pas utiliser le service public, mais de sous-traiter plutôt le travail à des intérêts privés, « même si la sous-traitance coûte plus cher ».

L'AFPC-UEDN déclare : « Au lieu de prévoir le budget nécessaire pour embaucher un nombre suffisant d'employés, le ministère de la Défense nationale (MDN) lésine sur les budgets des ressources humaines, obligeant les commandants de base à sous-traiter tout en sachant qu'il en coûtera plus cher pour fournir moins de services. Des centaines de millions de dollars sont dépensés dans ce tour de passe-passe, et des profits substantiels sont engrangés par des sociétés privées au Canada et dans le monde entier.

« Pour les localités qui comptent sur les emplois dans les bases des Forces canadiennes, c'est une perte nette. Au lieu d'avoir accès à de bons emplois avec un salaire décent, les résidents se retrouvent avec des emplois précaires au salaire minimum et ne peuvent pas contribuer à l'économie locale.

Le MDN donne annuellement environ 4 milliards de dollars de fonds publics à des entreprises privées plutôt que d'investir cet argent dans la construction d'un secteur public viable et de donner aux travailleurs une chance d'avoir des emplois stables au Canada avec une sécurité d'emploi. Un secteur public stable et dynamique garantit que, par le biais du MDN, l'argent dépensé pour les services et la maintenance circule en grande partie dans l'ensemble de l'économie locale.

Le montant que les entreprises sous-traitantes siphonnent en tant que profit exproprié n'est pas insignifiant. Nombre de ces entreprises sont des cartels mondiaux qui rapatrient leurs profits vers on ne sait où. Des cartels comme Aramark, Sodexo et ATCO sont des profiteurs mondiaux notoires de la privatisation, engagés dans la sous-traitance de travaux dans les soins de santé et toutes sortes de programmes sociaux et de services publics.

L'expérience de l'Alberta

« L'Alberta est truffée d'exemples de sous-traitance inutile allant de la gestion des installations et du nettoyage au personnel de cuisine et au personnel d'intervention médicale d'urgence. Des personnes de métier du secteur public sont même remplacées par des 'hommes à tout faire' sous contrat. Nos bases méritent un travail de la plus haute qualité, sans faire des économies dans l'intérêt du profit », déclare Peter Devlin, président de la section locale 30910 de l'UEDN. S'il y a des fonds publics engagés, il devrait y avoir une responsabilité publique, point final. »

L'AFPC-UEDN écrit : « Les employés du service de nettoyage de la fonction publique étaient autrefois plus nombreux, mais leur nombre s'érode lentement. En 2019, un préavis de marchés a été émis pour une somme totale de 6 millions de dollars à Wainright Garrison [Alberta] pour des services de trois ans pour compléter le travail de la fonction publique. »

Peter Devlin insiste sur le fait que leur campagne pour s'opposer à la privatisation « n'est pas une question de simplement changer d'entrepreneur privé, il s'agit de sortir une fois pour toutes du jeu de la privatisation  – nous l'avons essayé et c'est un échec. En investissant des fonds publics dans la fonction publique, nous savons que nous investissons dans un travail de qualité avec transparence et reddition de comptes ainsi que pour de bons emplois stables pour les gens de nos communautés ».

L'expérience de l'Alberta confirme que la privatisation porte atteinte à la sécurité des travailleurs et à leurs conditions de travail et siphonne l'argent non seulement de l'économie locale, mais aussi du Canada.

L'expérience de la Saskatchewan

La 15e Escadre de l'Aviation royale du Canada à la base de Moose Jaw, à l'instar des autres bases du MDN, a privatisé et sous-traité la gestion des installations, le nettoyage, la préparation des aliments, la tonte du gazon, les travaux spécialisés, l'entretien des hélicoptères, la gestion aéroportuaire et les pompiers. Les rapports abondent d'employés sous contrat soumis à des pressions de la part de leurs employeurs « pour diluer les produits de nettoyage et rationner les fournitures ». Ces détails ne sont jamais révélés officiellement, car les contrats et les détails de la pratique des entreprises sont tenus secrets et aucune reddition de comptes n'est autorisée.

« Au début de la pandémie à la base de la 15e Escadre de l'Aviation royale du Canada à Moose Jaw, il est devenu encore plus clair que la sous-traitance créait deux catégories de personnes : celles protégées par leur employeur et celles qui se sentent jetables, déclare la vice-présidente de l'UEDN Mona Simcoe. Bien qu'ils continuent d'être payés, les sous-traitants de CAE, ATCO et Sodexo, ont ignoré les directives visant à limiter le travail aux 'seules activités de base essentielles' et ont demandé à leurs employés de continuer à travailler, quelle que soit l'urgence de la tâche. »

L'AFPC-UEDN écrit : « Le MDN a déclaré à l'AFPC-UEDN qu'il 'ne pouvait pas dire aux entrepreneurs comment gérer' leurs employés. Seulement grâce à l'intervention de hauts représentants syndicaux élus – June Winger et Mona Simcoe, respectivement présidente nationale et vice-présidente de l'UEDN – et ce n'est que lorsque le sous-ministre a été mis en situation que les entrepreneurs ont répondu aux préoccupations du syndicat. Mais ce n'est toujours pas suffisant. Le syndicat continue de se battre pour les droits de ces travailleurs alors que les cas de coronavirus augmentent à nouveau. »

L'AFPC-UEDN souligne : « La sous-traitance crée un cycle sans fin de travail précaire. Le contrat actuel d'Aramark prenant fin en janvier 2021, les employés d'Aramark à la 15e Escadre sont actuellement menacés de perdre leur emploi. Un nouvel entrepreneur entraînerait des pertes d'emplois pour chaque employé d'Aramark à la 15e Escadre. »

Pour Mona Simcoe, une solution n'est pas difficile. Elle a ajouté qu'« avec le contrat actuel d'Aramark prévu pour être soumis en appel d'offres, le moment est venu de ramener ces travailleurs dans la fonction publique. En investissant des fonds publics dans la fonction publique, nous savons que nous investissons dans du travail de qualité avec transparence, reddition de comptes et de bons emplois stables pour les gens de nos communautés. »

L'expérience du Manitoba

L'expérience du Manitoba révèle les échecs de la privatisation au ministère de la Défense nationale et qu'il existe une solution en rétrocédant le travail au secteur de la fonction publique. « Il y a plus d'une décennie, nous avons connu l'échec de la privatisation à la 17e Escadre de l'Aviation royale du Canada à Winnipeg. Les nettoyeurs civils ont vu leurs heures réduites de 8 à 6 heures. Tout travail requis en dehors de ces 6 heures était sous-traité. Il n'a pas fallu longtemps pour qu'il y ait des plaintes concernant la qualité du travail fourni par l'entreprise privée. La sous-traitance a créé le problème et en rétrocédant le travail à la fonction publique, on l'a résolu », a déclaré la vice-présidente de l'UEDN Mona Simcoe pour le Manitoba et la Saskatchewan.

Marianne Hladun écrit : « L'AFPC-UEDN a analysé les données et entendu directement les travailleurs touchés et les conclusions sont claires : les Canadiens paient plus pour obtenir moins grâce à la privatisation, tout en minant les pratiques de travail équitables et sécuritaires, les relations de travail et la sécurité de nos bases. Il est maintenant temps de mettre un terme à ces contrats privés et de rétrocéder le travail civil sur les bases du MDN. »

L'AFPC-UEDN conclut de manière décisive : « Les intérêts privés n'ont pas leur place sur les bases militaires du Canada ».

(Sources : l'AFPC-UEDN et exposezlescouts.ca. Photos : AFPC)


Cet article est paru dans

Volume 50 Numéro 72 - 14 novembre 2020

Lien de l'article:
Campagne pour mettre fin à la sous-traitance des travaux civils au ministère de la Défense nationale


    

Site Web:  www.pccml.ca   Courriel:  redaction@cpcml.ca