L'allocution éhontée de Justin Trudeau à l'Assemblée générale des Nations unies

L'adresse du premier ministre Justin Trudeau au débat général de la 75e session de l'Assemblée générale des Nations unies le 25 septembre a été une démonstration d'arrogance et d'aveuglement volontaire.

Dans son message enregistré, Justin Trudeau a utilisé cette tribune pour faire la promotion de la conception impérialiste d'un nouvel ordre mondial pour laquelle milite une partie de l'oligarchie financière internationale dans sa lutte pour le contrôle des peuples et des ressources du monde dans les conditions actuelles. Ce n'est rien d'autre qu'une tentative désespérée de présenter les loups sous un déguisement de brebis pour qu'ils puissent poursuivre sans opposition leur destruction et pillage.

Ces mêmes forces qui ont amené le monde au bord de l'épuisement en imposant le néolibéralisme veulent maintenant restructurer les institutions internationales créées dans la période qui a suivi la Deuxième Guerre mondiale pour faire basculer le système impérialiste d'États du côté des intérêts de l'impérialisme anglo-américain.

Justin Trudeau a dressé un tableau très sombre de la situation mondiale. Sans préciser qui est le « nous » qu'il invoque, il dit :

« Le monde est en crise. Et pas seulement à cause de ces derniers mois. Pas seulement à cause de la COVID-19, mais à cause des dernières décennies et à cause de nous. C'est notre avertissement et nous ne pouvons pas l'ignorer. À maintes reprises, l'histoire nous a montré que le prix à payer pour s'être dérobé, pour avoir refusé d'agir, est beaucoup trop élevé. »

Il a ensuite donné le compte rendu suivant des événements tumultueux qui ont conduit à la Deuxième Guerre mondiale et à ses terribles pertes de vies humaines :

« Nos parents et grands-parents ne se souviennent que trop bien de ce que la vie était dans les années 1930 et 1940. Les économies se sont effondrées. Les gouvernements – et les systèmes de gouvernement – se sont effondrés. Des millions de personnes sont mortes. »

Poursuivant sur le thème du « nous », qui comprendrait non seulement l'ensemble des Canadiens, mais aussi présumément tous les peuples du monde, il dit :

« Nos parents et grands-parents ont choisi de se relever et de rebâtir. Ils ont mis sur pied des institutions multilatérales comme les Nations unies. Ils ont créé des institutions financières internationales comme la Banque mondiale, le FMI et d'autres institutions de Bretton Woods.

« Et ils ont jeté les bases d'un ordre international fondé sur des règles grâce auquel nous avons connu une période de prospérité commune sans précédent durant la seconde moitié du XXe siècle. »

Ainsi, au lieu d'analyser la cause de la crise, Justin Trudeau déforme les grands événements du XXe siècle pour non seulement couvrir les forces et les institutions responsables de la crise, mais pour également les présenter comme la solution. Il a refusé de dire que la crise est le résultat des destructions et du pillage impérialistes des ressources mondiales, de l'exploitation et de l'oppression impitoyables des peuples du monde qui sont imposés par les institutions financières que son gouvernement soutient. Il n'a rien dit des guerres d'agression, des coups d'État et du recours aux sanctions par les impérialistes américains et l'OTAN, leur alliance militaire agressive dont le Canada est partie intégrante, imposés aux peuples du monde depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale. De la même façon, il a ignoré honteusement le rôle que le système impérialiste d'États joue dans l'asservissement, la pauvreté et l'appauvrissement grandissant des pays d'Asie, d'Afrique, d'Amérique latine et des Caraïbes, ainsi que dans l'instauration et le soutien de gouvernements corrompus.

Au lieu de cela, Trudeau a déclaré que le problème est que :

« Aujourd'hui, toutes ces institutions ne sont plus en mesure de faire ce pour quoi elles ont été conçues, à savoir défendre le multilatéralisme et le droit international, protéger les droits de l'homme et ouvrir les marchés. »

« C'est là ce que la crise du COVID-19 a mis en exergue, sans l'ombre d'un doute. Que les choses doivent changer, et pas seulement sur la scène mondiale, mais aussi à la maison », a-t-il ajouté.

Projetant sa mauvaise conscience sur les 193 membres de l'ONU dont les conditions ne sont pas celles du Canada, il laisse entendre clairement qu'assumer la responsabilité des « échecs » ne fait pas partie de son ADN. Trudeau déclare : « Nous n'en faisons pas assez pour les personnes les plus vulnérables – que ce soient les personnes âgées qui meurent dans des établissements de soins de santé, ou les personnes sans-abri pour qui chaque soir est une lutte. Nous n'allons pas assez loin pour éliminer l'injustice systémique, qu'il soit question de racisme envers les Noirs ou les Autochtones, d'homophobie ou de sexisme.

« Dans les difficultés de nos citoyens, nous pouvons voir les échecs de nos institutions – de notre monde. »

Bien que la COVID-19 ait engendré une crise humanitaire et que de nombreux pays soient maintenant au bord du gouffre, le discours de Trudeau contient un double langage néolibéral pour détourner les revendications des peuples du monde pour s'investir du pouvoir et pour le renouveau démocratique afin de remplacer les institutions démocratiques libérales anachroniques du XIXe siècle qui mettent le pouvoir décisionnel entre les mains d'élites qui gouvernent au nom du peuple pour servir les riches et empêchent le peuple de trouver des solutions.

Justin Trudeau a mis en garde contre la menace des changements climatiques et a dit qu'il faut « une nouvelle façon de penser » qu'il s'agisse du climat, des inégalités ou de la santé. Il a lancé un appel éhonté à renforcer le pouvoir des élites au nom de l'élimination de « l'impasse » dans les organes de décision.

« Trop souvent, l'action concertée est bloquée. Les besoins des citoyens sont niés en raison de l'impasse dans les organes de décision », a accusé Justin Trudeau.

« Et pourquoi ? Parce qu'il y a peu de conséquences pour les pays qui ignorent les règles internationales. Pour les régimes qui pensent que la puissance fait la force. Peu de conséquences pour les pays où les personnalités de l'opposition sont empoisonnées alors que les cyberoutils et la désinformation sont utilisés pour déstabiliser les démocraties.

« Peu de conséquences lorsque des citoyens innocents sont détenus arbitrairement et que les libertés fondamentales sont réprimées. Lorsqu'un avion de civils est abattu depuis le ciel. Quand les droits des femmes ne sont pas traités comme des droits de la personne. Quand personne n'a aucun droit. »

Il s'agit d'une tentative effrontée de légitimer le rôle du Canada dans la détention arbitraire de citoyens innocents, son mauvais traitement flagrant des libertés fondamentales des peuples autochtones, des migrants, des réfugiés et des adversaires politiques, mais aussi son propre rôle dans les bombardements de civils. C'est une menace à peine voilée contre les pays qui refusent de se soumettre au système impérialiste d'États. Accuser les autres de ce que font les impérialistes eux-mêmes, y compris le Canada, est la plus basse forme de louange de soi. Justin Trudeau devrait se rappeler que les faits sont têtus. Ce que font l'État canadien et ses services de renseignement n'est pas chose du passé.

Cette défense des institutions et des valeurs démocratiques libérales anglo-américaines est un discours néolibéral méprisable avec lequel Justin Trudeau et ses proches collaborateurs du gouvernement canadien pensent qu'ils réussiront à couvrir ce qu'ils font avec leur « groupe de Corée », leur « groupe de Lima », l'Organisation des États américains, l'OTAN, l'utilisation de doctrines criminelles comme la responsabilité de protéger, les « interventions humanitaires » pour mener et justifier des coups d'État « constitutionnels », les sanctions et les agressions criminelles. Cette demande de restructurer les institutions internationales pour établir un contrôle impérialiste anglo-américain sur la prise de décision est justifiée au nom de l'urgence de la situation et de l'obligation de rendre des comptes. Ce qu'est la responsabilité et à qui les organes de gouvernement doivent rendre des comptes, qui les établit, leur but et au service de qui ils sont, tout cela est laissé dans l'ombre.

« La seule façon d'arranger les choses, la seule façon de bâtir un avenir meilleur pour nos enfants et nos petits-enfants, c'est de travailler ensemble. En nous défendant les uns les autres, quelles que soient les lignes dessinées sur des cartes », a dit Justin Trudeau.

Il a terminé son discours par ces mots ;

« Nous devons comprendre nos possibilités et nos responsabilités pour agir réellement, ensemble. Pour nous protéger les uns les autres, pour nous soutenir les uns les autres. »

« Si nous relevons ce défi, je sais que, comme nos grands-parents l'ont fait il y a 70 ans, nous jetterons les bases d'un monde meilleur. »

Ce que doivent faire les peuples du monde pour « se protéger les uns les autres », cela, Justin Trudeau ne le dit évidemment pas dans cette promotion éhontée d'un soi-disant nouvel ordre mondial impérialiste. La restructuration des institutions internationales pour permettre le contrôle impérialiste anglo-américain sur les affaires du monde ne fera que prolonger la putréfaction, la corruption et le pouvoir amoral du système impérialiste d'États, tout cela au nom de grands idéaux. Elle aggravera les dangers que font peser les forces impérialistes contrerévolutionnaires sur les peuples du monde.

(Les citations de Justin Trudeau sont tirées de son allocution « PM Speaking Notes for the United Nations General Assembly Virtual Address, September 25, 2020 »)


Cet article est paru dans

Volume 50 Numéro 62 - 3 octobre 2020

Lien de l'article:
L'allocution éhontée de Justin Trudeau à l'Assemblée générale des Nations unies - Hilary LeBlanc


    

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