«Rebâtir en mieux» - le socialisme pour les riches
Le discours du Trône et le programme de payer
les riches du gouvernement Trudeau montrent à quel
point la situation est devenue absurde. Qui aurait
pensé que le gouvernement paierait la majeure
partie des salaires des travailleurs des
entreprises privées[1] ?
Quand le gouvernement Trudeau déclare que «
l'heure n'est pas à l'austérité », il le
démontre aussitôt en ouvrant encore plus grandes
les écluses des stratagèmes pour payer les riches
et de l'emprunt sans limites auprès des prêteurs
privés[2].
Dans son adresse à la nation le soir du 23
septembre, le premier ministre a introduit l'idée
d'un pacte entre le gouvernement et le peuple,
comme si le contrat social pouvait être remplacé
par une « nouveau pacte » sans que personne en
décide. « Il existe un pacte entre le gouvernement
et la population qui l'a élu pour la servir,
dit-il. Vous devez savoir que vous pouvez compter
sur nous tout comme vous pouvez compter les uns
sur les autres. »
Parler d'un « pacte » entre le gouvernement
et le peuple d'une manière aussi désinvolte montre
l'arrogance du gouvernement Trudeau et son manque
d'égards pour les Canadiens. Le « pacte » de
Trudeau est une variante de sa devise « nous
sommes tous ensemble dans le même bateau »,
en laquelle personne ne croit sauf peut-être les
apologistes des stratagèmes pour payer les riches
et des institutions échues de la démocratie
libérale[3].
Le discours du Trône explique :
« L'heure
n'est pas à l'austérité. Le Canada est entré dans
cette crise en meilleure position financière que
ses pairs. Et le gouvernement met à profit sa
capacité financière pour investir dans des
initiatives comme la Prestation canadienne
d'urgence et la Subvention salariale d'urgence du
Canada et ainsi apporter aux Canadiens, aux
entreprises et à l'ensemble de notre économie le
soutien nécessaire pour traverser la tempête. Les
Canadiens ne devraient pas avoir à choisir entre
leur santé et leur travail, tout comme ils ne
devraient pas avoir à s'endetter alors que leur
gouvernement peut mieux les soutenir. [...] Ce
gouvernement préservera les avantages fiscaux du
Canada et restera guidé par les valeurs de la
viabilité et de la prudence. [...]
« Étant donné les faibles taux d'intérêt, les
banques centrales ne peuvent pas en faire
davantage pour aider. Il existe un consensus
mondial sur le fait que les gouvernements doivent
en faire plus. Les gouvernements peuvent y arriver
en conservant le faible coût des emprunts pour les
décennies à venir. Ce gouvernement préservera les
avantages fiscaux du Canada et restera guidé par
les valeurs de la viabilité et de la
prudence. »
L'autre mantra pour justifier l'économie qui paie
les riches comme seule option pour faire face à la
pandémie, « redémarrer » l'économie et «
rebâtir en mieux » est l'encensement de la
soi-disant classe moyenne.
Dans son discours du Trône, le gouvernement
affirme :
« Le troisième pilier consiste à rebâtir en mieux
afin de créer un Canada plus fort et plus
résilient. Pour ce faire, nous devons continuer à
renforcer la classe moyenne et aider les personnes
qui travaillent fort pour en faire partie, et
continuer à créer des emplois et à mettre en place
une compétitivité à long terme fondée sur une
croissance propre. Nous devons également bâtir des
communautés plus sécuritaires pour tout le
monde. »
Le discours libéral sur la lutte contre les
inégalités et le renforcement de la classe moyenne
sert à tromper les travailleurs en leur faisant
croire que dans ce système néolibéral, il est
possible d'avoir entre nous tous un nouveau
contrat social si les travailleurs renoncent à
leurs préoccupations et cessent de lutter pour
leurs droits, pour une nouvelle direction de
l'économie, pour faire du Canada une zone de paix
et pour humaniser l'environnement naturel et
social. La définition de cette « classe
moyenne » reste nébuleuse, mais on nous
laisse généralement entendre qu'il s'agit d'une
couche de personnes en difficulté vivant au-dessus
de la « classe ouvrière », qui font partie
d'une espèce en ascension vers une condition
meilleure et dont les libéraux ont besoin plus que
jamais.
Le discours du Trône prétend proposer une sorte
de projet d'édification nationale basé sur le
développement de technologies dites propres. Il
dit :
« Du nickel au cuivre, le Canada dispose des
ressources nécessaires à ces technologies propres.
Ces ressources, jumelées à l'expertise canadienne,
représentent l'avantage concurrentiel du
Canada. »
Cela signifie mettre toutes ces ressources et
l'expertise du pays à la disposition des
oligopoles. C'est ce qu'on appelle « rebâtir en
mieux » et assurer l'avantage concurrentiel
du Canada – un slogan à la mode
tiré du lexique des agences de marketing. Il est
totalement incohérent pour le commun des mortels,
mais il suffit de savoir qu'être concurrentiel est
« une bonne chose », que c'est désirable, que
tout doit être fait pour maintenir l'avantage
concurrentiel.
Dans son allocution après le discours du Trône,
le premier ministre décrit plus précisément le
socialisme pour les riches que son gouvernement
veut mettre en place :
« Votre employeur a
peut-être été en mesure de vous garder au travail
ou de vous réembaucher parce que la Subvention
salariale d'urgence du Canada l'a aidé à verser
votre salaire. Les gens ont encore besoin de ce
programme, alors on le prolonge jusqu'à l'été
prochain. Ou encore, vous êtes peut-être un
propriétaire d'entreprise qui a besoin d'une aide
supplémentaire jusqu'à ce que la situation
s'améliore. Pour vous, entre autres mesures, on
bonifie le Compte d'urgence pour les entreprises
canadiennes. »
Un gros merci de la part des oligarques qui
contrôlent le Silver Hotel Group, qui
possède 20 hôtels au Canada, dont Hilton,
Delta et Novotel dans toutes les grandes villes.
Les exploitants d'hôtels sont parmi les plus
grands abuseurs de la classe ouvrière canadienne.
Deepak Ruparell, président de Silver Hotel Group,
a dit à propos de l'extension du programme de
subventions salariales : « C'est un grand
soulagement parce que cela signifie que nous
pouvons continuer de fonctionner. Sans cela, nous
envisagerions de licencier plus de personnes et de
fermer les portes. »
Quand il s'engage à payer les riches avec le
slogan « rebâtir en mieux », le gouvernement
Trudeau ne veut pas dire en mieux pour les
Canadiens, il ne veut pas dire mettre l'économie
sous leur contrôle, mais faire en mieux pour les
oligarques mondiaux, les oligopoles et leurs
cartels et coalitions qui parcourent la planète
pour devenir plus riches et plus puissants et pour
empêcher la classe ouvrière de s'organiser pour
changer la situation en sa faveur.
« Rebâtir en mieux » signifie que des
montagnes d'argent public seront versées aux
oligarques mondiaux de l'automobile pour leur
permettre de rééquiper leurs usines pour produire
des véhicules électriques. Cet argent public a
d'ailleurs déjà commencé à couler : quelques
jours à peine avant le discours du Trône, le
gouvernement a promis un demi-milliard de dollars
à la compagnie Ford du Canada.
« Rebâtir en mieux » signale que de vastes
sommes d'argent public iront aux grandes
entreprises de la construction pour construire des
infrastructures et des maisons « vertes » et
pour rénover des bâtiments et des quartiers
entiers. L'argent public est garanti pour rendre
les riches mondiaux plus riches et plus puissants.
Le discours du Thrône veut « aider plus de femmes
à retourner sur le marché du travail » grâce
à un système national de garderies promis depuis
longtemps. Cela apaise les craintes dans le monde
des affaires au sujet de la réduction du marché du
travail actif à cause de la crise, ce qui
entraînerait une pression sur les entreprises pour
qu'elles répondent aux réclamations de la classe
ouvrière à la valeur qu'elle produit.
Le gouvernement s'engage à mettre de l'argent
public à la disposition de l'industrie du
transport aérien, les autres entreprises présentes
dans le transport, du tourisme et du secteur de la
vente au détail et, bien sûr, de l'industrie
pharmaceutique mondiale contrôlée par les
impérialistes américains. Le gouvernement Trudeau
tente de se faire passer pour un sauveur en
promettant des millions de dollars pour l'achat de
vaccins à tel ou tel géant pharmaceutique mondial
sans qu'on se demande pourquoi le Canada n'a pas
lui-même la capacité de produire un vaccin contre
la COVID-19 et d'autres médicaments modernes. La
petite île indépendante de Cuba teste déjà avec
succès son propre vaccin contre la COVID-19.
Le discours de l'époque Reagan et Thatcher sur la
force de la libre entreprise, la compétitivité sur
le marché mondial, la volonté et la concurrence
des entrepreneurs pour devenir riches sur le dos
des travailleurs et la nature comme garantie de
prospérité a maintenant été remplacé par des
appels directs à l'intervention de l'État pour
payer les riches.
L'économie socialisée a besoin de coopération
pour l'avantage réciproque de toutes ses
composantes et tous ses secteurs. Ses échecs
montrent le besoin d'une nouvelle direction qui
résoudra la crise en faveur du peuple.
Notes
1. Le projet de loi C-2
déposé le 24 septembre prévoit que les chômeurs et
les travailleurs sous-employés, mais pas les
monopoles qui reçoivent de l'argent pour payer
leurs travailleurs, vont devoir rembourser 50
cents sur le dollar de tout ce qui dépasse 38
000 $ par année pour les années fiscales 2020
et 2021.
2. Les Canadiens ont connu
des dépenses déficitaires, justifiées par
l'affirmation qu'il y aura des « retombées
économiques », mais il n'y en a pas eu. Ils
ont également fait l'expérience de l'austérité
comme moyen pour les oligarques financiers et les
impérialistes d'empocher des sommes énormes au
moyen de partenariats public-privé, de
privatisations, etc. Les résultats sont évidents
pendant la pandémie. Aujourd'hui, à un moment où
la contraction de l'économie rend de nombreuses
sphères d'activité économique non rentables pour
les riches, ils ont besoin de ce type
d'intervention de l'État pour créer des
opportunités de faire des coups d'argent à
nouveau. La preuve que le capitalisme fonctionne
est que cela fonctionne ! Cela n'a rien à voir
avec le bien-être du peuple.
3. La pandémie a clairement
montré que ce sont des phrases creuses. Ce sont
les travailleurs pauvres, les travailleurs issus
de minorités nationales et les femmes qui sont les
plus exposés au danger de la COVID-19. Et
maintenant, avec une deuxième vague en cours, sans
répit en vue pour les travailleuses et
travailleurs en soins de première ligne six mois
après le début de la pandémie, les écoles ont
rouvert sans que des mesures adéquates aient été
prises pour assurer la distnaciation physique des
élèves avec d'autres précautions nécessaires. Le «
pacte » entre le gouvernement et le peuple ne
veut pas dire la même chose pour tout le monde.
(Photos: LML, Unite Here 40)
Cet article est paru dans
Volume 50 Numéro 60 - 26 septembre 2020
Lien de l'article:
«Rebâtir en mieux» - le socialisme pour les riches
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