L'illusion qu'une société juste peut être créée par la voie néolibérale
- K.C. Adams -
La voie néolibérale perpétue l'inégalité sociale
et le privilège de classe. La vie elle-même l'a
prouvé de manière sans équivoque. Que penser alors
de la nouvelle offensive qui laisse entendre que
le problème de l'inégalité sociale peut être
résolu par la voie néolibérale ?
Un idéal d'une vision libérale de la société est
ce qu'on appelle une société juste. Bien sûr c'est
précisément ce modèle de société qui est en crise
profonde aux États-Unis, en Europe et dans des
pays comme le Canada. Et pourtant, l'illusion est
créée que si seulement le problème des inégalités
peut être surmonté, alors nous pouvons réaliser le
rêve d'une société juste. Comment le problème des
inégalités peut-il être surmonté ? En
enchâssant l'égalité des chances, du moins c'est
ce qu'affirme la sagesse néolibérale.
La restructuration
néolibérale de la société a intensifié la tendance
à l'enrichissement des riches et à
l'appauvrissement des pauvres. Lorsque ce discours
est tenu par ceux qui cherchent à perpétuer la
voie néolibérale, le but n'est pas de créer une
société plus juste, mais de masquer l'objectif des
sociétés néolibérales de payer les riches, de
rendre les monopoles les plus puissants
concurrentiels sur les marchés mondiaux et de
politiser les intérêts privés en détruisant
l'autorité publique. C'est précisément cette
offensive antisociale brutale visant à éliminer
toute trace d'une autorité publique en faveur du
droit de monopole qui accélère la tendance à
l'enrichissement des riches et à l'appauvrissement
des pauvres.
Une richesse obscène s'accumule à un pôle, tandis
que les rangs des pauvres grandissent, comme le
montre, entre autres, l'augmentation du
pourcentage de personnes vivant dans la pauvreté
extrême. Loin d'être réduites, les inégalités ont
atteint des niveaux sans précédent, non seulement
dans les pays opprimés d'Asie, d'Afrique et
d'Amérique latine et dans les Caraïbes où
prospèrent les oligarchies possédant une richesse
obscène, mais également dans les citadelles
impérialistes.
D'abord, il est important de comprendre ce que
l'on entend par inégalité.
L'inégalité est naturelle et sociale. Les
inégalités découlent d'une part, de la grande
variété des capacités naturelles des individus, et
d'autre part, des privilèges de classe qui
existent dans le système social capitaliste et sa
division entre la classe ouvrière et les
détenteurs de la richesse sociale accumulée.
L'inégalité naturelle est liée aux capacités
naturelles. L'inégalité sociale est liée aux
privilèges de classe hérités par droit héréditaire
ou acquis par droit naturel.
L'inégalité naturelle des personnes n'est pas
quelque chose qu'il faut chercher à changer ou à
exploiter, mais plutôt protéger afin que chacun
trouve sa place dans la société et contribue au
meilleur de ses capacités. Même si l'impression
est créée que cela est réalisé en veillant à ce
que chacun bénéficie de « l'égalité des
chances », ce n'est pas le cas. La société
doit garantir l'épanouissement des capacités
naturelles de tous et empêcher que par les
privilèges de classe elles soient refoulées ou
utilisées à mauvais escient à des fins intéressées
et étroites. Dans les conditions actuelles, alors
que l'État n'est pas entre les mains des
travailleurs, cela ne peut être fait qu'en
s'attaquant aux inégalités sociales ou en
restreignant les privilèges de classe et en
privant l'élite dirigeante du pouvoir d'utiliser
l'État et son pouvoir économique et politique pour
opprimer et exploiter les autres et les priver de
leurs droits et besoins.
Beaucoup d'études statistiques démontrent que
l'appartenance de classe a un impact important sur
l'épanouissement, la négation ou la perte des
capacités naturelles. Les inégalités sociales sont
un obstacle au développement général des capacités
individuelles, qui pour beaucoup de gens peuvent
être perdues, pour eux, pour l'intérêt général de
la société et pour le bien public. La classe
ouvrière et ses représentants politiques refusent
ce gaspillage et luttent pour les droits de tous
et le pouvoir de tous d'être maîtres de leur
destin. Tous les êtres humains ont des droits du
fait de leur humanité et à cet égard le droit de
tous et chacun de contribuer à la société au
meilleur de leurs capacités et, en retour, la
garantie de leurs droits et besoins de manière
harmonieuse par la société sont fondamentaux.
Lorsque des membres de la classe ouvrière
parviennent, en raison de leurs capacités
naturelles ou d'autres facteurs, à briser le «
plafond de verre » des privilèges de classe,
ils sont encouragés par la richesse et le statut à
rejoindre l'élite capitaliste, à adhérer à son
idéologie, à défendre sa politique et à utiliser
leurs privilèges de classe nouvellement acquis
pour consolider leur position et celle des autres
membres de la classe dirigeante en opposition aux
intérêts de la classe ouvrière.
Paradoxalement, la négation de l'inégalité
sociale pour des individus choisis de la classe
ouvrière renforce et consolide les inégalités
sociales au sein de la société dans son ensemble.
Elle nourrit une section de travailleurs dévoués à
leurs privilèges de classe nouvellement acquis,
qui utilisent leurs ressources considérables et
leur influence nouvellement acquises et le pouvoir
de l'État pour priver le collectif de l'humanité
d'exercer son droit d'exister selon les capacités
et besoins de chacun et les intérêts de la
société. Une fois que les membres de cette section
ont par le droit naturel surmonté leur inégalité
sociale individuelle, ils deviennent des
idéologues des inégalités sociales et des
privilèges de classe, partagent le « rêve
américain » ou « canadien » et défendent
leurs privilèges de classe avec un zèle fanatique.
Pour s'opposer à la rébellion des travailleurs
contre leur appauvrissement, le principe libéral
par excellence de l'égalité des chances est
présenté comme la clé de la création d'une société
juste. Il faut, disent les néolibéraux, rallier
ceux qui croient que dans une société juste, le
dur labeur doit être récompensé.
Les néolibéraux appellent le peuple à changer
l'inégalité des chances en créant l'illusion que
certains individus, par droit naturel, peuvent se
joindre à ceux qui ont hérité de positions de
pouvoir et de privilèges de classe par droit
héréditaire ou acquis leurs positions, cette
richesse et ce pouvoir, par le soi-disant droit
naturel. Ils disent que l'inégalité des chances
nie aux gens, surtout ceux qui travaillent fort et
possèdent des capacités, la possibilité de
réaliser leur rêve d'ascension sociale à un statut
professionnel avec des revenus élevés ou de
devenir des détenteurs des richesses sociales
accumulées, abandonnant la classe ouvrière, pas
seulement sa position de classe, mais aussi et
surtout la pensée, la conception du monde,
l'idéologie et la politique de classe.
Selon cette vision du monde, l'inégalité des
chances injuste cause encore plus d'inégalité et
de perte d'espoir d'accéder au rêve qui, selon
elle, est ce qui motive chaque individu sur la
terre, soit l'acquisition de richesse sociale et
du privilège de classe. La solution est «
l'égalité des chances » ou la « mobilité
intergénérationnelle » pour renforcer le
statu quo des privilèges de classe et des
inégalités collectives en entretenant le rêve
qu'il est possible de surmonter les inégalités
sociales en travaillant fort ou en gagnant à la
loterie ou en se livrant à des activités
criminelles ou la corruption.
La position
néolibérale sur les inégalités nie leur réalité
dans les conditions naturelles et sociales.
L'inégalité naturelle n'est pas une faiblesse
humaine, mais une source de grande force et de
possibilités d'avancement de tous les êtres
humains et des intérêts généraux de la société.
L'inégalité sociale et les privilèges de classe
sont des expressions de la division de la société
en classes sociales antagonistes. Ils vont
continuer d'être une condition de vie rétrograde
tant et aussi longtemps que les classes sociales
et les privilèges de classe demeureront intacts.
La classe dirigeante utilise sa richesse sociale
accumulée et l'État capitaliste pour priver les
travailleurs de leurs droits et les empêcher
d'ouvrir la porte du progrès de la société, du
renouveau démocratique et du pouvoir souverain.
Elle veut les empêcher de créer les conditions de
l'égalité sociale et de l'épanouissement de
tous : de chacun selon leurs capacités, à
chacun selon ses droits et besoins garantis par la
société
La voie néolibérale perpétue l'inégalité sociale
et le privilège de classe. Afin d'arrêter la lutte
du peuple pour s'investir du pouvoir et l'amener à
pratiquer la conciliation avec les programmes
d'austérité antisociale, on crée des illusions sur
le système capitaliste lui-même, en disant qu'il
peut être réparé et que la seule alternative pour
le faire est la voie néolibérale.
Cet article est paru dans
Volume 50 Numéro 59 - 19 septembre 2020
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