Un point tournant dans l'histoire et notre décision du 1er septembre 1985
Cette année marquera le 35e anniversaire
de la décision prise par le Parti communiste du
Canada (marxiste-léniniste) le 1er
septembre 1985 de bâtir la presse de masse
du parti. Ce fut une décision capitale que le
Parti continue à mettre en oeuvre à ce jour.
Afin d'apprécier l'importance de cette décision,
LML republie ci-dessous le texte du
discours prononcé par le camarade Hardial Bains
lors de la 13e conférence consultative du
Parti, qui s'est tenue à Toronto les 28
et 29 avril 1991. Hardial Bains a
souligné :
Quelle a été la décision que avons-nous prise
le 1er septembre 1985 ? Notre
analyse était que nous étions à un point tournant
et qu'aucune force ne pouvait agir comme avant.
Que faire dans ces circonstances ? Que devait
faire le Parti pour être fidèle à sa propre
analyse et qu'il puisse agir de façon
nouvelle ? Le Parti a lancé l'appel à bâtir
la presse de masse du Parti. La décision de
développer un mouvement pour les idées éclairées
faisait partie de ce travail. Nous devions nous
débarrasser de tous les obstacles, de tout ce qui
pouvait nous empêcher d'atteindre cet objectif,
entre autres, nous débarrasser de la psychologie
de la peur que le Parti ne peut pas accomplir de
grandes choses. Pendant les quinze années qui ont
précédé la décision de bâtir la presse de masse du
Parti, nous avions fait un grand nombre de choses
de moindre envergure, mais continuer de cette
façon aurait fait dégénérer le Parti. Nous avions
accumulé des forces au cours de ces quinze ans, et
nous étions maintenant en mesure d'utiliser ce qui
avait été accompli pour aller de l'avant.
Le parti communiste est une institution très
complexe. On ne peut le décrire en termes
simplistes. Ses caractéristiques en tant que
contingent le mieux organisé et le plus avancé de
la classe ouvrière et en tant qu'état-major de la
classe ouvrière, doivent être développés dans la
vie réelle. En 1985, nous avons voulu nous
assurer que ces traits soient développés
davantage, qu'ils ne restent pas lettres mortes,
mais le Parti n'était pas encore en mesure de
surmonter les pressions qui entravaient le
développement de ces aspects.
La réunion du 1er septembre 1985 tenue
pour célébrer le quinzième anniversaire de la
presse du Parti a pris la décision de bâtir la
presse de masse du Parti.
Quand notre Parti a entrepris son travail pour
mettre en oeuvre les décisions du 1er
septembre 1985, son premier acte a été de bâtir la
presse sans-parti, qui allait démontrer comment le
Parti sait diriger sur une base large. Ainsi
lorsque nous disons que nous sommes les plus
avancés et les mieux organisés, l'une des preuves
est l'édification de la presse sans-parti. Le Ve
Congrès, tenu en 1987, réaffirma la méthode
de notre Parti selon laquelle une chose porte un
nom dans la mesure où elle possède une qualité.
Ainsi, pour porter le titre d'être humain, il faut
d'abord posséder les qualités propres aux êtres
humains. Il en va de même pour un parti politique.
Ses composantes, ses organisations, doivent être
les plus avancées, les mieux organisées et
posséder les qualités d'une avant-garde avant de
pouvoir l'appeler un parti d'avant-garde.
Dans les années soixante, quand nous appelions
les éléments avancés à se joindre à nous pour
bâtir un tel parti, il était nécessaire de
répéter quels traits ce parti devait avoir. On
peut tracer un portrait à grands traits avant même
que la chose ne voit le jour, mais si on ne fait
que parler de ce portrait sans créer la chose en
pratique, cela signifie qu'on affirme l'existence
d'une chose qui n'existe pas dans la réalité. Non
seulement cette chose n'existe-t-elle pas
vraiment, mais les affirmations au sujet des
caractéristiques qu'il doit posséder, les
descriptions de la physionomie idéale qu'il doit
avoir faussent sérieusement la réalité. Cela
revient à ne pas veiller à ce que le Parti soit en
pratique le contingent le plus avancé et
l'avant-garde de la classe, à détruire ce Parti.
Si l'opinion publique au Canada et dans le monde
ne nous considère pas comme les plus avancés, à
quoi bon affirmer que nous le sommes ? A quoi
bon répéter que notre Parti est le plus avancé et
l'avant-garde ? Avec le travail de la presse
sans-parti, au moins quelques travailleurs,
quelques intellectuels sauront que nous soutenons
les positions les plus avancés, que nous sommes
l'avant-garde, les mieux organisés, que nous ne
sommes ni fanatiques ni dogmatiques. On peut
trouver la preuve de la décision du 1er
septembre 1985 non seulement dans ce travail,
mais aussi sur tous les autres fronts du travail
du Parti.
Célébration des succès remportés dans la
construction de la presse de
masse du Parti à Toronto le 31 août 1986
Nous pourrions donner de nombreux exemples, mais
limitons-nous à celui-ci. Comme vous le savez
tous, l'an dernier et cette année, 1990
et 1991, ont été des années cruciales pour
nous, des années au cours desquelles nous avons
tous ensemble discuté de divers sujets, en
particulier du Parti et du rôle du membre au sein
du Parti. Quel rôle le membre joue-t-il dans le
Parti ? Quelles qualités un membre du Parti
doit-il posséder ? Pourquoi est-il nécessaire
de travailler dans une organisation de base du
Parti ? Pourquoi faut-il renforcer les
Comités régionaux ? Quel est le rapport entre
ces organisations et le Comité central ? Nous
pouvons penser que du bon travail a été fait, mais
un ouvrier d'usine sera-t-il du même avis ?
Un intellectuel dira-t-il : « Oui, vous avez
fait du très bon travail » ? Ou bien
dira-t-il qu'il ne sait pas ?
Nous devons travailler de façon à ce qu'ils le
sachent. Si nous ne prenons pas le tournant
nécessaire, vous verrez ce que diverses autres
personnes qui sont en ligne derrière nous vont
nous faire. Imaginez-vous au volant d'une voiture
à une intersection, dans la voie pour tourner, et
que vous refusez de tourner ; tous les
conducteurs qui vous suivent vont se mettre à
klaxonner. On entend monter ces voix. Elles
veulent savoir : « Pourquoi ne tournez-vous
pas ? » La guerre du Golfe a été un test
pour de nombreuses personnes. Il est intéressant
de constater qu'ils voulaient négocier le
tournant, mais à reculons. Ce n'est pas ce qu'on
appelle tourner. Faire marche arrière signifie
s'éloigner de la solution des problèmes cruciaux
quel que soit le stade de développement du
mouvement. Ce n'est pas de ce genre de point
tournant dont il est question ici.
Notre participation à la lutte contre le recours
à la force dans le Golfe Persique a été honorable.
Il s'agit d'une bonne et nécessaire intervention.
Le Parti s'est gagné des amis. Qui plus est, les
gens considèrent que la position du Parti était
juste. Mais quand nous avons pris en 1985 la
décision de bâtir la presse de masse du Parti,
s'agissait-il pour nous de trouver une réponse
favorable parmi le peuple et de l'amener à nous
décerner une médaille d'honneur. Malheureusement,
camarades, certains se sont contentés de ce genre
de chose. Non seulement en étaient-ils satisfaits,
mais ils se répandaient en théories diverses,
faisaient des discours. Ils nous faisaient la
leçon quand nous les rencontrions. Mais ils
avaient oublié la décision du 1er
septembre 1985, décision réaffirmée par le Ve
Congrès du Parti.
Le Parti célèbre 19 ans de la presse du
Parti en août 1989
|
Il est impossible de parler de la participation à
un front de travail sans considérer la mise en
oeuvre de la décision clé. Quelle était cette
décision de 1985, outre l'analyse que nous
étions à un point tournant où aucune force ne
pouvait agir comme avant et qu'il était nécessaire
de bâtir la presse de masse du Parti ?
Essentiellement, elle se résume à une
phrase : le Parti doit être à l'avant-garde
de la société. Peut-on dire que nous y sommes
arrivés ? Peut-on dire que partout notre
Parti se trouve à l'avant-garde ? Il y a
encore des camarades qui nous demandent de définir
l'avant-garde. Pour eux tout se réduit à une
définition claire d'une chose, parce qu'ils
considèrent toujours le Parti comme une idée, un
endroit où clarifier diverses opinions, une
association d'individus qui se rassemblent pour
discuter de choses et d'autres.
Je voudrais vous parler de questions touchant à
notre travail dans une ville. Dans cette ville,
notre organisation existe sous une forme ou une
autre depuis très longtemps. Nous y menons un
travail soutenu depuis plus de vingt ans. Cette
ville possède certaines traditions progressistes
et révolutionnaires, bien que certaines soient
marquées par l'influence anarcho-syndicaliste.
Néanmoins, sur les questions démocratiques
importantes, en termes de réponse de masse à la
situation, cette ville ne cède sa place à aucune
autre. Je m'y trouvais le 14 avril et je me suis
rendu compte que le Parti ne s'y porte pas très
bien. Comment le Parti peut-il aller mal alors que
nous avons pris la décision de développer le
mouvement pour les idées éclairées il y a cinq ans
et demi maintenant ? Nous avons souvent
demandé à l'organisation de cette ville comment
allait le travail. Que faites-vous à tel ou tel
sujet, notamment sur les questions démocratiques
comme la lutte contre les visites de navires de
guerre américains et soviétiques, la lutte contre
le racisme, etc. ? Mais ils ne répondent pas.
Ils disent que le Parti est au courant. Mais où
est ce Parti qui est au courant ? On ne peut
le trouver nulle part, car quand on leur demande
des réponses, ils disent qu'ils réfléchissent.
Est-ce une réponse ? Est-ce un exemple de
travail acharné au cours des cinq dernières années
et demie pour mettre en oeuvre les décisions que
nous avons adoptées et qui ont été ratifiées par
le Congrès en 1987 ? Est-ce que
l'organisation dans cette ville a mobilisé les
membres de notre Parti afin de mener à bien cette
tâche ?
Réfléchir est très bien, mais il est encore mieux
de réfléchir tout en mettant en oeuvre les
décisions prises. Ils devraient au moins avoir ce
niveau de conscience. Malheureusement, je dois
vous dire que ce n'est pas le cas. Mais quand on
parle de cela avec les camarades de l'endroit, ils
sont tout heureux de ce qu'ils font. Dans les
années soixante, nous avions l'habitude de dire
des gens qui s'engagent dans de telles activités
qu'ils se regardent le nombril. Autrement dit, si
quelqu'un leur demande ce qui se passe, ils se
regardent le nombril. Nous devons regarder à
l'extérieur. Nous devons avoir recours à toutes
nos ressources afin d'analyser notre situation, de
tirer les conclusions qui s'imposent, d'établir
objectivement l'impact de nos actions sur la
classe, sur le peuple et sur le mouvement là-bas.
On peut ensuite en faire le bilan. Quels résultats
avons-nous obtenus avec telle action ? Quel
autre geste devons-nous poser ?
En 1968, notre organisation a décidé que la
tâche la plus importante dans les conditions de
l'époque était de créer le Parti, et que le
premier pas vers la création d'un tel Parti était,
entre autres, la création des instruments de
propagande de la classe ouvrière. Créer les
instruments de propagande de la classe ouvrière ne
signifiait pas que nous ne participions pas aux
luttes économiques ; cela ne voulait pas dire
non plus que nous ne participions pas à la lutte
politique. Cela ne signifiait pas non plus que
nous ne traitions pas de théorie et que nous ne
menions pas une lutte idéologique à outrance
contre le révisionnisme et l'opportunisme. Cela
signifiait que ce point était devenu crucial et
que tout reposait maintenant sur lui.
Notre Parti a été fondé en 1970 à la suite
d'un travail couronné de succès sur ce front, au
cours duquel des camarades se sont avancés pour la
cause de la classe ouvrière, pour la cause du
communisme. Dès ce moment, nous avons dû affronter
des attaques venant de deux côtés : celles de
l'État et celles des révisionnistes et des
opportunistes. Il est évidemment difficile de
convaincre quelqu'un qui n'a pas connu ces
événements qu'au Canada des centaines de personnes
furent arrêtées pour leurs convictions
idéologiques et politiques, qu'elles furent
emprisonnées, que les révisionnistes et les
opportunistes ont ouvertement collaboré avec
l'État, et que le dirigeant du Parti et sa famille
ont été la cible des attaques les plus brutales.
Que devait faire le Parti dans ces
circonstances ? En plus d'avoir entrepris
d'ouvrir la voie sur les questions
organisationnelles et idéologiques, en particulier
la question politique du Québec et d'autres sujets
reliés, le Parti devint le fer de lance d'une
campagne héroïque, celle du mouvement de
résistance, au cours de laquelle personne ne
capitula face aux attaques de l'État. Aucun de
nous n'avait de l'expérience dans cette forme de
lutte à l'époque.
Je me souviens du premier jour où un camarade fut
arrêté à Montréal. Nous ne savions pas ce qui
allait lui arriver. Nous avions le pressentiment
qu'il serait taillé en pièces ou brûlé vif. Tout
pouvait lui arriver. Au total, de 1970
à 1973, on enregistra près de 3 000
arrestations de nos camarades. Tous nos principaux
cadres et militants ont passé en moyenne de six à
neuf mois en prison. Le Parti est sorti de cette
lutte renforcé et plus uni. Pendant que nous
menions cette lutte, une autre nous a été imposée,
un complot ourdi par un Parti au pouvoir dans un
pays étranger qui se donnait de grands airs. Ce
parti ne voulait pas du Parti que nous, Canadiens,
avions formé pour nos propres buts politiques, à
partir de nos propres convictions idéologiques et
avec des formes organisationnelles que nous avions
nous-mêmes élaborées. Ce parti et ceux qui le
suivaient voulaient plutôt donner leur bénédiction
au monde entier et transformer divers partis en
leurs officines. Ils créèrent une situation où un
parti devait être reconnu par eux comme «
authentique » et devenir leur agent ou
s'éteindre. C'était là leur message. En
décembre 1973, un homme de Vancouver annonça
qu'il savait de sources internes que ce parti
étranger ne nous reconnaissait plus. Ce devait
être une arme puissante contre nous, une arme
qu'ils utilisaient partout pour désorienter,
détourner et désintégrer les forces progressistes.
Manifestation à Toronto en mars 1977 après le
IIIe congrès du Parti contre la persécution
politique du PCC(M-L) à la suite de l'arrestation
de 17 militants du Parti juste avant le
congrès.
En 1971, ce parti étranger avait déjà tenté
de diviser et désintégrer notre Parti. Rejetant la
division, nous avons connu un vigoureux
développement de l'unité des forces communistes et
progressistes. Pratiquement tous ceux et celles
qui se disaient progressistes et communistes se
joignirent à nous. Plusieurs sont ici aujourd'hui.
Ce parti étranger ne parvint donc pas à ses fins,
et la lutte s'engagea.
Quand il devint clair que le Parti ne pouvait
être détruit par les attaques de l'État, des
services secrets ou des provocateurs
opportunistes, des rumeurs se mirent à circuler
que le PCC(M-L) n'était pas un vrai parti et qu'il
fallait en construire un autre. Cette lutte dura
dix longues années. Les pires choses furent
écrites contre nous, et des actes ignobles furent
commis dans le but de détruire le Parti.
En 1982, leurs auteurs déclarèrent tous que
le marxisme-léninisme ne marche pas. En d'autres
mots, ils voulaient éliminer le marxisme-léninisme
au Canada. Ce qu'ils finirent par admettre
ouvertement.
Au cours de cette période d'attaques par les
opportunistes, nous avons mené la lutte pour le
Parti sur deux fronts. Premièrement, nous avons
maintenu notre position de principe en faveur de
l'unité du Parti et avons continué de lancer
l'appel à tous de s'unir à l'intérieur d'un seul
parti. S'ils ne pouvaient se résoudre à cela, ils
pouvaient s'unir en prenant part à l'unité dans
l'action. Nous avons ouvert diverses avenues pour
établir une unité beaucoup plus large.
Deuxièmement, nous avons pris les mesures
nécessaires pour nous renforcer sur le plan
théorique et idéologique. Nous avons fondé notre
institut idéologique, qui a mené ce vigoureux
travail. En 1977, nous avons proclamé notre
victoire.
Bien sûr ils ont tous éclaté de rire. Ils ont dit
que le Parti n'était pas très grand, qu'il ne
comptait que « six ou sept » membres. Mais
ces gens-là n'en comptaient même pas un seul.
Pourquoi ? Parce que quand ils se
rassemblaient, « plusieurs » d'entre eux
disaient : « Nous ne savons pas ce qui se
passe ». Aucun d'entre eux ne défendait leur
organisation. En d'autres mots, ils n'avaient pas
de membres du tout. Ces faits sont vérifiables.
En mars 1977 eut lieu le IIIe Congrès. S'il
passera à l'histoire comme une grande victoire, il
est également un exemple de l'infamie de l'État
qui arrêta dix-sept d'entre nous juste avant le
Congrès dans un coup monté pour tenter de saboter
notre travail. Au même moment, des centaines de
personnes de Montréal vinrent de l'avant pour
s'unir sous la bannière du Parti. La clôture du
Congrès reste jusqu'à aujourd'hui l'un des plus
grands rassemblements politiques de l'histoire de
Montréal.
La tâche du Parti devint de surmonter les
conséquences néfastes du maoïsme. Ce travail,
amorcé en 1976-1977, fut élaboré davantage
lors de notre Congrès extraordinaire tenu en avril
1978 et alla plus loin. C'est notre Parti qui eut
l'honnêteté et le courage de reconnaître que
certaines choses que nous avions faites étaient
incorrectes et devaient être corrigées. Elles
devaient être corrigées parce que nous ne sommes
pas nés infaillibles. Nous n'avons jamais critiqué
le fait que nous étions des enfants à notre
naissance. Cela aurait été saugrenu. Mais certains
aspects devaient être critiqués et éliminés afin
que notre Parti puisse aller de l'avant. Ainsi,
ont été écartées l'attitude subjective à l'égard
de la révolution, voulant que quelques activités
ou quelques actions militantes soulèveraient
spontanément les masses du peuple. L'idée qu'il
n'est pas nécessaire de passer par toute une
période de processus politique a été abandonnée,
etc. Dans le domaine de l'organisation interne du
Parti, il existe encore beaucoup de pression
contre le centralisme démocratique, ou pour
déclarer que le centralisme est absolu. En
d'autres mots, nous avons des gens qui
disent : « Nous n'allons rien faire avant que
le centre nous le dise. » Ou encore : «
Comment se fait-il que le centre a pris cette
décision ? » Ces positions apparaissent
lorsque, dans les régions locales, une atmosphère
apolitique prévaut et que les décisions ne sont
pas prises. Notre parti n'est d'accord avec aucune
de ces positions. Il considère les deux positions
comme des diversions. Ni l'une ni l'autre ne tente
d'aller au coeur d'un processus décisionnel qui
met les gens en position de défendre les décisions
qu'ils prennent.
Lors du Congrès de 1982, dans le contexte du
début de la récession et alors que les luttes
menées avaient finalement éliminé les groupes
maoïstes, le Parti prit en main de mettre
davantage en oeuvre le mot d'ordre du IIIe
Congrès, de bolcheviser le Parti, c'est-à-dire
d'augmenter l'influence et le caractère de masse
du Parti et développer son rôle dirigeant. C'est
dans le cadre de développer le caractère de masse
du Parti, une décision pleinement et légalement
sanctionnée par le IVe Congrès et réaffirmée
le 1er septembre 1985, que nous avons
entrepris de bâtir la presse de masse du Parti.
En bref, telle est notre histoire consciente. La
branche dont nous parlions peut-elle nous raconter
son histoire ? Quelles tâches ses membres
ont-ils adoptées ? Sont-ils dignes du nom de
détachement le plus organisé, le plus avancé,
d'avant-garde de la classe ? S'ils ne savent
même pas ce qu'ils ont fait et les résultats
qu'ils ont obtenus, comment peuvent-ils connaître
leur histoire ? Que fait cette branche ?
Pourquoi existe-t-elle ? Est-ce seulement
pour l'amour d'une idée ?
Notre classe ouvrière a besoin de comités
régionaux qui à toutes fins pratiques doivent agir
comme des partis, car le Canada est un grand pays
dont les conditions varient d'une région à
l'autre. On ne peut pas fonctionner de la même
façon dans toutes les conditions, dans tous les
coins du Canada. Mais se retrouver dans une
situation où une branche qui a une histoire de
plus de vingt ans et qui a produit les principaux
dirigeants de notre Parti et ses principaux
militants, ceux qui viennent des années soixante,
ne connaît pas sa propre histoire, ce n'est pas
acceptable ! Ils pourraient au moins
reprendre les positions du Parti connues de longue
date.
Ils veulent une organisation qui se rassemble
sans but, où chacun peut donner des avis sur ce
que devrait être le but de l'organisation. Le
Parti ne peut accepter cela. Nous avons un but. Si
quelque chose n'est pas clair pour nous
aujourd'hui, nous trimons dur et clarifions
l'affaire le lendemain, mais nous ne mettons pas
des siècles à mener un programme à des fins de
clarification. Ce n'est pas possible, car la
clarté est un terme relatif. Un jour nous
identifions clairement le problème devant nous, le
lendemain la situation change et il faut encore
travailler à y voir clair. C'est comme si nous
étions à nouveau revenus à la case départ.
Camarades, depuis 1985, quand nous avons
hissé la bannière des idées éclairées, une
polarisation s'est produite. Certains masquent
leur opposition en disant : « Eh bien, nous
n'avons tout simplement pas le temps. Si nous
avions le temps, nous ferions toutes ces choses
dont vous parlez là. » Le Parti leur
répond : « C'est très bien que vous n'ayez
pas le temps. Si vous aviez du temps, imaginez
seulement tout ce que vous auriez pu gâcher. Parce
que le manque de temps ne veut pas dire que vous
devriez être malhonnêtes et manquer de sincérité,
que vous devriez agir comme des escrocs. » Si
quelqu'un n'aime pas ce que nous avons fait, qu'il
le dise - dites-le nous ! Peut-être nous
sommes nous trompés. Mais il ne faut pas laisser
pourrir cet excellent travail que les gens
apprécient et aiment. Nous avons une
responsabilité.
Quand nous songeons à l'année 1985, la
question suivante nous vient à l'esprit :
quelle était la signification profonde de cette
décision ? S'agissait-il d'une décision
particulière, pertinente strictement à ces
quelques jours et visant strictement à fonder un
magazine - ou avait-elle une plus grande
portée ? Elle avait une portée bien plus
grande qu'on s'imagine. Si cette décision n'avait
pas une plus grande signification, pourquoi
aurions-nous passé tout ce temps à la mettre en
oeuvre ?
Des camarades de tout le pays sont venus joindre
la presse de masse du Parti, le poing levé. Des
camarades de partout en Ontario viennent encore
faire du travail volontaire à cet endroit quand
ils ont du temps libre. Même de l'extérieur de la
région, de partout au pays, des camarades prennent
des vacances - et même de longues vacances - pour
aider à ce travail. Ils seraient des idiots de
l'avoir fait si cette décision n'a pas une plus
grande portée. Que ce ne soit que pour établir une
base technique, une presse à cet endroit. Loin de
là. Cette signification plus grande a des
conséquences pratiques, immédiates, dont nous
parlerons plus tard. Mais la plus grande
signification générale, la conséquence pratique
générale, est que nous devons lancer l'appel et
répondre à la demande du peuple d'avoir une presse
qui traite de ses intérêts, qui se préoccupe
sérieusement et non de façon mécanique de ses
intérêts. Toutes les organisations du Parti, tous
les camarades doivent faire leur travail dans le
même esprit. Les tâches doivent être accomplies
suivant ce que le peuple veut, ce dont il a
besoin, et pas seulement suivant ce que nous
voulons.
Si la décision du 1er septembre 1985
n'avait été fondée que sur ce que nous voulions,
nous aurions dit, pourquoi nous en faire. Nous
avons déjà une presse, pourquoi nous donner tant
de peine ? Nous pouvons même annuler cette
conférence, nous joindre aux autres qui disent que
le marxisme a eu tort sur telle ou telle question.
Nous aussi nous pourrions adopter une attitude
critique, tout liquider et rentrer chez nous. Nous
n'avons jamais voulu faire cela. Ce travail, en
termes de travail de Parti, a une profonde
signification. Ce travail pour les idées
éclairées, comme tout autre travail, n'a pas pour
seul but de recruter des membres. Il a pour but
d'amener diverses personnes à se pencher sur leurs
préoccupations, qu'elles se joignent ou non à
nous. En d'autres mots, le but n'est pas limité.
Ce travail a un but très vaste et très profond.
De la même façon, les organisations de base et
les comités régionaux, comme nous en avons discuté
maintenant et au cours de la période récente,
doivent travailler avec confiance pour la même
politique, c'est-à-dire répondre aux
préoccupations du peuple, présenter l'analyse de
ses préoccupations, aider le peuple à s'organiser,
et être aux premiers rangs de cette organisation.
Le Parti devrait être à la tête. Le Parti doit
être à la tête, pas de façon banale ou
sentimentale, en montrant que nous ne faisons pas
seulement parler de ces propositions, que nous
sommes prêts à les mener à bien en actes. Ainsi
toutes les organisations du Parti ne feront plus
qu'un avec la classe ouvrière, avec le peuple, et
ne resteront pas détachées. Aucune activité ne
peut être décrite comme une activité strictement
du Parti. Cela n'existe pas. Tout notre travail,
toutes nos activités sont menées pour la classe,
pour le peuple. Ce que nous faisons a une grande
signification pour le sort de la classe et du
peuple.
Nous n'avons qu'une vérité, mais notre attitude à
son égard n'est pas mécanique. Ce n'est pas parce
que c'est la vérité que nous oublions pour autant
les préoccupations du peuple, que nous oublions
les tactiques, les formes d'organisation et les
slogans nécessaires pour obtenir des résultats.
Ceux qui le font parlent de vérité, mais ce qu'ils
appellent vérité n'est pas la vérité, c'est du
dogmatisme et du fanatisme. Si quelqu'un passe son
temps à répéter que nous sommes pour la
démocratie, que nous voulons toutes ces choses,
mais qu'il ne développe aucune tactique et ne fait
rien pour atteindre ces objectifs, alors il n'y
aura pas de vérité, mais un mensonge du calibre
des forces obsolètes du déni. [...]C'est facile de
faire des discours, de les faire écrire en grand
et de pontifier mais quels sont les
résultats ? Il n'y en a pas.
Nous ne sommes pas d'accord avec ce genre de
vérité. Les décisions du 1er
septembre 1985 ont eu une profonde
signification pour notre travail, pas seulement le
travail de la presse de masse du Parti, mais pour
tout le travail. Par exemple, nous n'organisons
pas pour que les travailleurs adoptent notre ligne
comme but séparé des intérêts des travailleurs.
Nous organisons les travailleurs pour qu'ils
défendent leurs intérêts. Nous voulons l'unité des
travailleurs dans leur propre intérêt, de sorte
que quand ils défendent leurs intérêts et
acquièrent de l'expérience à le faire, ils
apprennent aussi à organiser, à mettre sur pied
des organisations plus grandes et plus avancées,
et que finalement ils se soulèvent pour mettre fin
à ce système d'esclavage salarié. Voilà ce que
nous voulons.
Nous devons tout faire afin de créer et de
développer une telle situation. Si on abandonne ce
but, alors la décision du 1er
septembre 1985 n'a plus de sens. En
définitive, elle aura l'air d'une plainte sans
importance. Généralement parlant, nous ne voulons
pas nous retrouver avec une situation dans le
Parti où les gens clés dans une région mènent le
travail pendant que tous les autres les regardent.
Nous n'aimons pas cela parce que lorsque tout le
Parti travaille, quand tout le Parti est à
l'unisson, nous pouvons obtenir de meilleurs
résultats d'une portée plus grande et atteindre la
victoire que nous désirons dans la période
actuelle.
Cette attitude - que quelqu'un d'autre sait, que
quelqu'un d'autre va donner la ligne - va à
l'encontre de la décision de 1985. Nous ne
sommes pas comme ceux qui disent que les gens
peuvent se libérer d'eux-mêmes, spontanément. Nous
avons un Parti qui a ses instances qui
fonctionnent et prennent leurs décisions. Mais
comment se fait-il que les organisations ailleurs
ne savent pas quelles sont les préoccupations du
Parti ? Elles ne peuvent comprendre ces
préoccupations que si elles ne font qu'un avec
nous lors de la prise de décision. Si un membre ne
participe pas au travail du Parti, alors le moment
venu, cette personne causera des problèmes. Il y a
des moments où la direction à ces niveaux ne
prêtent pas attention à la politique concernant le
travail et la formation des membres. Dans ce
contexte, une personne pourrait être autour du
Parti pendant des années et ne jamais devenir un
communiste. Si nous menons notre travail, si nous
sommes enthousiastes et nous accueillons tout le
monde avec le même esprit de mener le travail à
bien, si nous nous pratiquons à la critique et à
l'auto-critique, alors si quelqu'un ne veut pas
faire le travail, il ou elle ne sera pas capable
de rester autour. Mais si vous adoptez une autre
attitude, cela se produira.
Camarades, ne laissons pas ces questions de
l'édification de la presse de masse du Parti à des
positions strictement idéologiques. Parlons
ouvertement et faisons concrètement le bilan tout
en développant ce travail. A partir de là,
répondons à la situation qui est à un point
tournant. Nous avons déjà pris ce tournant. Nous
ne sommes pas en retard sur la situation. Nous
sommes bien en avant d'elle. Nous avons déjà mis
en oeuvre divers aspects de la décision prise
le 1er septembre 1985. Nous avons déjà
fait beaucoup d'autre travail dont nous faisons le
bilan.
Allons de l'avant. Le temps travaille pour nous.
L'initiative est entre nos mains.
Cet article est paru dans
Volume 50 Numéro 53 - 15 août 2020
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Un point tournant dans l'histoire et notre décision du 1er septembre 1985
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