Des organisations pressent le gouvernement fédéral de cesser de refouler aux États-Unis les demandeurs d'asile

Lorsque, le 23 juillet, la juge Anne Marie McDonald de la Cour fédérale du Canada a invalidé les articles de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés (LIPR) et du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés (RIPR) qui désignent les États-Unis comme un « tiers pays sûr », elle a suspendu sa déclaration d'invalidité pour une période de 6 mois pour donner au Parlement le temps de répondre.

Le 29 juillet, les trois organisations qui ont participé à titre de demandeurs dans la cause entendue devant un tribunal fédéral avec des ressortissants de divers pays, à savoir le Conseil canadien pour les réfugiés, Amnistie internationale Canada et le Conseil canadien des Églises, ont adressé une lettre [1] au premier ministre Trudeau, à la vice-première ministre et aux ministres concernés appelant le gouvernement fédéral à :

- arrêter immédiatement de refouler des demandeurs d'asile aux États-Unis et à suspendre l'Entente sur les tiers pays sûrs ;

- accepter le jugement du tribunal et s'abstenir de faire appel.

Dans la lettre, elles font remarquer que la juge McDonald « a fondé sa décision sur les nombreuses preuves qui lui ont été présentées de violations des droits de la personne aussi graves que lourdes de conséquences relativement à la détention aux fins d'immigration aux États-Unis », dont elle a conclu qu'il s'agit d'une forme de punition « immédiate et automatique » pour les demandeurs d'asile qui se voient refuser l'entrée au Canada sous le régime de l'ETPS.

Les organisations soulignent aussi que la décision de la Cour fédérale « offre au gouvernement une occasion cruciale d'agir de manière décisive et d'assumer la responsabilité qui lui échoit de mettre fin à des années de violations graves des droits des demandeurs d'asile qui cherchent à obtenir une protection aux postes-frontières terrestres officiels entre le Canada et les États-Unis. ».

Le 29 juillet également, les trois organisations ont publié une déclaration publique [2] qui souligne que la décision repose « sur les nombreuses preuves qui lui ont été présentées de violations des droits de la personne aussi graves que lourdes de conséquences relativement à la détention aux fins d'immigration aux États-Unis, et en particulier sur ce qu'ont vécu des personnes renvoyées par le Canada aux États-Unis dans le cadre de l'entente sur les tiers pays sûrs ».

Faisant valoir que le gouvernement devrait immédiatement cesser de renvoyer les demandeurs d'asile aux États-Unis, elles expliquent en outre que « plus on continuera d'appliquer l'ancienne réglementation, plus il y aura de personnes qui courront le risque d'être renvoyées aux États-Unis pour y être emprisonnées et maltraitées ».

« Pour la même raison, poursuivent-elles, le gouvernement devrait s'abstenir d'interjeter appel, ce qui prolongerait une situation intolérable. »

« En tout état de cause, soutiennent-elles, le respect des droits des demandeurs d'asile aux États-Unis constitue actuellement une crise des droits humains, ajoutant que le Canada ne saurait, un jour de plus, se faire complice de ces violations de droits profondément troublantes, encore moins pendant six mois. »

Elles soulignent également le fait que « lorsque les réfugiés pourront présenter leur demande d'asile aux postes-frontières terrestres officiels, cela mettra également un terme aux traversées sur le chemin Roxham  ».

« Les Canadiennes et les Canadiens sont profondément troublés par le traitement réservé aux réfugiés et aux migrants aux États-Unis ; or depuis quelques années, la situation s'est aggravée », ajoutent-elles.

« Nous ne pouvons continuer de refouler des personnes aux États-Unis en sachant qu'elles seront traitées d'une manière fondamentalement injuste et qu'elles subiront un préjudice grave et durable », écrivent-elles en conclusion.

Notes

1. Lettre en référence au jugement de la cour fédérale en ce qui a trait à l'Entente sur les tiers pays sûrs, produite par le CCR, AI et CCE

2. Des organismes demandent au gouvernement fédéral d'arrêter immédiatement de refouler aux États-Unis les demandeurs et demandeuses d'asile

(Photos: A. Poane, Solidarité sans frontières) 


Cet article est paru dans

Volume 50 Numéro 51 - 8 aout 2020

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