Sur le décès
d'Eusebio Leal, l'historien de la Ville de La
Havane
La tendre et réconfortante union de l'amour et de l'espoir pour la patrie
- Radio Havana -
C'est avec tristesse que, le 31 juillet, la
nation cubaine a appris le décès du docteur
Eusebio Leal Spengler, l'historien renommé et
vénéré de la ville de La Havane. Leal a consacré
sa vie à la préservation de l'authentique
patrimoine historique et culturel de Cuba et de
son peuple. Il l'a fait par ses enseignements et
par ses écrits, et, notamment, par son travail
indispensable de préservation et de restauration
du coeur de la magnifique Havane historique – la
Havana Vieja.
Eusebio Leal était membre du Comité central du
Parti communiste de Cuba et député élu à
l'Assemblée nationale du pouvoir populaire de
Cuba. LML publie ci-dessous un
hommage à sa vie et à son oeuvre rendu par
l'équipe de rédaction de Radio Havana.
La page blanche semble impossible à remplir en ce
moment. Aucun mot ne peut combler le vide ni
décrire la tristesse et le choc éprouvés par les
Cubains lorsqu'ils ont appris la nouvelle, eux qui
l'ont tant aimé et admiré.
Ces années furent des années de travail intense,
de sauvetage de notre patrimoine, de restitution
d'une partie de notre identité à celles et ceux
d'entre nous qui sommes nés sur l'île. Nous ne
pouvions imaginer tout l'effort qui a animé une
telle entreprise, ni le nombre d'années de
sacrifice et de lutte incessante. Eusebio Leal
Spengler y a consacré sa vie.
Sa disparition physique nous afflige, nous
bouleverse. Nous le pensions un homme immortel, un
homme qui serait toujours là pour préserver non
seulement la Vieille Havane mais le patrimoine
cubain dans son ensemble, qu'il aimait tant. Mais,
une fois de plus, la mort nous a joué un tour.
« Nous faisons
partie des grands défis et des grands
moments », disait à l'occasion ce grand
homme. Il n'en faisait pas seulement partie, il
était un témoin, un créateur d'idées, de rêves, de
réalités. Il a combattu les moulins à vent mais il
en est venu à bout. Il était un Don Quichotte de
notre époque.
En 1981, par décision du gouvernement, le
Bureau de l'Historien de la Ville de La Havane a
relevé l'immense défi d'entreprendre le premier
plan de restauration. Derrière cet énorme effort,
après tant d'années à le promouvoir, se trouvait
Leal. Et il l'a réalisé avec succès pendant des
décennies, nourrissant une réalité teintée de
rêve, restaurant sa splendeur à la capitale et
alimentant la spiritualité de chaque être humain,
petit à petit, transformant notre perception d'une
ville qui a déjà cinq siècles d'existence.
Comme il le disait lui-même, un travail comme
celui-ci, de portée internationale et qui apporte
une reconnaissance publique, ne peut être accompli
que dans une révolution comme la nôtre, avec le
soutien d'un dirigeant comme Fidel. Et notre
historien a vécu dans une période fébrile et
féconde qui a commencé en 1959, au moment où
le processus de changements révolutionnaires, de
renouvellement des domaines de la société cubaine
a commencé. Cette idée réaffirme sa profonde
conviction révolutionnaire : « Nous sommes
les gardiens, les héritiers et les continuateurs
de l'héritage culturel, social et politique de la
nation. »
Héros du Travail de la République de Cuba, Cubain
maintes fois récompensé de médailles et de
doctorats honorifiques, Leal a été, grâce à son «
intendance de gladiateur », le découvreur et
le re-découvreur, à chaque jour et pendant
plusieurs années, de sa Havane, de notre Havane.
Dès son plus jeune âge, il rêvait de restauration,
ce qu'il a réalisé à un très haut niveau. Il a eu
la chance d'avoir Emilio Roig de Leuchsenring, le
premier historien de la Ville de la Havane, comme
professeur et guide, qui l'a imprégné de la
vitalité et de l'amour pour la capitale, au point
où il a déclaré : « Sans Emilio Roig, il n'y
aurait pas d'Eusebio Leal. »
Amoureux des livres, chrétien, patriote militant,
fils entier de son époque, Leal, comme l'a dit la
docteure Ana Cairo, est un grand exemple de
l'humanisme révolutionnaire de Cuba, car il a mené
la polémique, a accédé à de nouvelles
connaissances, les a partagées, a écouté les gens
et a été sensible à leurs besoins spirituels.
Continuons de citer la docteure Cairo qui, avec
sa perspicacité habituelle, disait : « Leal
est un exemple des plus belles qualités, le
représentant d'une génération autodidacte, mais
dont les humbles origines n'ont pas mené à la
marginalité, deux choses qui aujourd'hui semblent
aller de pair. Il a montré par son exemple qu'on
peut être pauvre et avoir de l'éducation, de la
civilité et de la culture [...] Leal doit
continuer d'être un modèle pour la société
cubaine. »
Dans tout ce que
Leal a fait, dans tout ce qu'il a défendu, nous ne
pouvons oublier sa vision patriotique, ancrée dans
les idées de Marti, « cette tendre et
réconfortante union de l'amour et de l'espoir pour
la patrie », grâce auxquelles il a réalisé
des transformations inestimables dans notre pays.
En ce sens, Eduardo Torres-Cuevas, un autre de
nos plus profonds intellectuels, a affirmé –
répétant lui aussi une phrase de Marti : « Je
crois que Leal était l'un des hommes les plus
vrais et les plus inestimables de notre
époque...Il comprenait la réalité et oeuvrait à
changer ce qui devait être changé de cette
réalité, tout en saisissant l'utilité du travail,
l'utilité de la vertu. Et cela exigeait de lui -
ce qui était naturel pour lui - une éthique
professionnelle et humaine qui imprégnait tout son
travail. Il me serait difficile pour moi de parler
de façon fragmentée de l'oeuvre de Leal. D'une
façon ou d'une autre, son oeuvre a touché à de
vastes domaines, et je dirais que l'ampleur de son
oeuvre était le résultat de l'utilité de sa
vision, d'une utilité non pragmatique, de ce qu'il
fallait faire et de comment le faire, de comment
produire des transformations profondément utiles.
Nous parlons d'une utilité qui se rapporte
principalement aux valeurs. »
Au Salon du Livre qui a été dédié à Leal,
l'historien de la Ville de La Havane a déclaré
qu'il aurait aimé que la vie soit plus longue pour
qu'il puisse en faire encore davantage, parce que
ce qu'il avait accompli jusque-là lui semblait
maigre. Mais, par une anecdote, il a conclu que
tout cela n'était pas en vain. Il a dit : «
Il y a quelques jours, alors que je marchais sur
une esplanade de la Vieille Havane, un père m'a
approché avec son jeune fils pour que celui-ci me
dise bonjour. Je lui ai demandé : et toi,
qu'est-ce que tu veux faire lorsque tu seras plus
vieux ? Et le garçon de me répondre :
Moi ? Un historien.
« C'est pour cela qu'Eusebio Leal a gardé un
esprit élevé et qu'il est toujours plein
d'énergie. Des historiens avant lui l'ont fait, le
docteur Roig l'a fait. C'était mon tour, ce sera
le tour des autres. Ils viendront avec d'autres
noms [...] Il faut avoir confiance que ce nous
avons semé et ce que nous avons accompli, a-t-il
conclu, portera ses fruits dans les nouvelles
générations. »
Cet article est paru dans
Volume 50 Numéro 51 - 8 aout 2020
Lien de l'article:
: La tendre et réconfortante union de l'amour et de l'espoir pour la patrie - Radio Havana
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