La résistance augmente en force et en détermination partout aux États-Unis

Les attaques violentes des forces de police fédérales ne parviennent ni à intimider ni à réprimer la rébellion


Portland, 25 juillet 2020

Alors que les forces de police fédérale étaient toujours à Portland, Oregon, la dernière semaine de juillet et étaient également déployées à Chicago, Seattle, Albuquerque, Kansas City ainsi que dans d'autres villes, le large mouvement de résistance qui persiste maintenant depuis plus de deux mois après la mort de George Floyd aux mains de la police au motif raciste a répondu par des actions encore plus importantes et plus déterminées. Des manifestations de solidarité avec Portland et de soutien aux revendications contre la brutalité policière raciste et l'impunité et pour l'égalité ont eu lieu dans de nombreuses villes la fin de semaine du 25 et 26 juillet. Des manifestations ont eu lieu à Oakland et Los Angeles, en Californie, à Chicago, Cleveland, Boston, New York, Louisville, au Kentucky, Omaha, au Nebraska, Richmond, en Virginie, Aurora, au Colorado et Austin, au Texas.

Depuis, les actions se sont poursuivies dans de nombreux endroits, notamment à Portland, où tous les soirs des milliers de personnes manifestent, défiant les gaz lacrymogènes, les balles en caoutchouc, les grenades assourdissantes et la violence des forces de police fédérales, de l'État et de la ville. Le Mur des vétérans (Wall of Vets) est également une caractéristique importante du mouvement de résistance à Portland. Le réseau KPTV de Portland rapporte:

« Les porte-paroles du Mur des vétérans disent que leur mission et leur message sont simples: ils soutiennent les manifestants pacifiques et se tiennent debout comme un bouclier entre eux et ceux qui, selon eux, violent ces droits.

« Nous avons vu le Mur des mamans, le Mur des papas et maintenant et le Mur des vétérans, un groupe d'anciens combattants de l'armée américaine, former ensemble un mur humain pour protéger des manifestants pacifiques.

« Nous sommes ici en tant qu'anciens combattants progressistes et nous n'avons jamais eu de voix auparavant et je pense que nous sommes maintenant unis pour défendre ce que nous croyons être juste', dit Tessa Terry, une ancienne combattante et organisatrice du chapitre de Portland du Mur des vétérans.

« Elle dit qu'il faut se concentrer sur le mouvement Black Lives Matter.

« C'est troublant de voir ce qui arrive aux citoyens et encore plus troublant de voir que les troupes fédérales sont là', explique-t-elle.

« Son mari LeShan Terry, qui est également un ancien combattant, se joint à elle et aux autres anciens combattants aux manifestations tous les soirs.

« C'est pour montrer que ce n'est pas violent de notre côté et qu'il y a de l'agitation qui est faite contre nous. Le Mur des vétérans se tient ‘au repos' pour dire ‘vous nous tirez dessus et nous ne sommes pas violents', explique-t-il.

« Les deux ainsi que leurs camarades anciens combattants ont pris des gaz lacrymogènes pendant plus de 50 nuits. »



Le Mur de vétérans, debout en position « au repos » entre la police et les manifestants. Derrière eux (deuxième rangée de photos) se trouve le Mur des mamans.

Les conflits entre les autorités fédérales et les autorités de l'État persistent. La gouverneure de l'Oregon, Kate Brown, a annoncé le retrait à compter du 30 juillet d'une partie des forces fédérales, dont celles du Service de contrôle de l'immigration et des douanes (ICE) et des unités d'élite spéciales de l'Agence des douanes et de la protection des frontières (BORTAC), mais que malgré les appels à leur retrait, d'autres agents fédéraux resteraient. Le secrétaire à la Sécurité intérieure, Chad Wolf, a déclaré : « Le département continuera à garder en place à Portland notre personnel supplémentaire de maintien de l'ordre jusqu'à ce que nous soyons sûrs que le tribunal fédéral Hatfield et les autres édifices fédéraux ne seront plus attaqués ».

Le 29 juillet, Portland a connu le plus grand déploiement de forces fédérales contre des manifestants non seulement devant le tribunal fédéral, mais également venant de deux directions des rues avoisinantes. Plus de 5 000 personnes, jeunes, travailleurs, mères et anciens combattants manifestaient pour exiger le retrait des forces fédérales, la fin des violences des forces fédérales et locales et pour la satisfaction de leurs revendications de changement en faveur du peuple. Le niveau de la résistance a également augmenté alors que des moyens sont développés pour lutter contre les forces policières.

« Nous sommes venus ici en t-shirts et en dansant avec des cerceaux et d'autres trucs, et ils ont commencé à nous tirer des gaz lacrymogènes, alors nous sommes revenus avec des masques à gaz, et ils ont commencé à nous tirer dessus, alors nous sommes revenus avec des gilets, et ils ont commencé à nous viser à la tête, alors nous avons commencé à porter des casques, et maintenant ils nous traitent de terroristes », a déclaré un organisateur. Les manifestants utilisent de bâtons de hockey et des raquettes de tennis pour relancer les grenades lacrymogènes par-dessus la clôture, des parapluies pour se protéger et des souffleurs de feuilles pour disperser les gaz.

Alors que tous les soirs les gens font face à une violence brutale et aux tirs de gaz lacrymogènes, les forces fédérales armées en tenue antiémeute et masquées sont entièrement protégées par une clôture métallique noire de 2,5 mètres de haut érigée le 22 juillet. Toute cette violence vise à disperser et à intimider les manifestants et également à détruire les efforts des manifestants pour affirmer eux-mêmes les droits humains à l'alimentation, aux soins de santé, au droit de conscience et de réunion.

« Nous ne tenons pas notre ville en otage. Nous disons que nous sommes la ville », a souligné un organisateur.

La clinique médicale mobile « Breonna Taylor Memorial Medical Utility Vehicle » 

À Portland, les gens ont leurs propres médecins qualifiés et également leur propre véhicule d'urgence : le « Breonna Taylor Memorial Medical Utility Vehicle » du nom de la technicienne d'urgence médicale (TUM) noire tuée par la police de Louisville, dans le Kentucky, plus tôt cette année. C'est une clinique médicale mobile, installée à l'arrière d'un camion d'occasion par un collectif d'infirmières et des TUM de Portland. Elle est équipée d'un défibrillateur, de casques et de bouteilles de solution saline et d'eau pour soigner les effets des gaz lacrymogènes. Le collectif a décidé de créer une clinique mobile qui pourrait se garer en bordure des manifestations afin de pouvoir porter secours aux blessés en quelques minutes et, si nécessaire, les conduire rapidement vers un hôpital ou une ambulance à proximité, ce qu'ils ont fait à plusieurs reprises pour les personnes touchées par des balles en caoutchouc. Les soins médicaux sont fournis gratuitement, une revendication des manifestants dans tout le pays, surtout en cette période de crise de la COVID-19 et des échecs du gouvernement sur ce front.

Seattle et d'autres villes ont également mis en place de tels services médicaux mobiles d'urgence.

De plus, les gens s'organisent pour que la nourriture soit fournie gratuitement en s'appuyant sur leurs propres forces. Par exemple, le Portland's Riot Ribs, avec une dizaine de grills et des dons réguliers de la communauté a fourni des hamburgers et des côtes levées tout au long des actions et a résisté à plusieurs reprises aux efforts de la police fédérale et locale pour les empêcher de faire leur travail et pour les fermer. Ils ont résisté au gaz lacrymogène et à la confiscation de leur nourriture et de leur équipement.

Il y a aussi la cantine roulante de Black Lives Matter qui fournit gratuitement aux manifestants des barres alimentaires, des bouteilles d'eau et des pommes tous des dons à emporter. Les gens fournissent également des ordinateurs portables pour aider les gens à remplir leur formulaire de demande de prestations de chômage. Des « cercles de chaises » sont organisés pour permettre des « conversations libres », des discussions et accueillir les artistes et les muralistes. Les manifestants les décrivent comme un sanctuaire d'amour et de compassion.

« Quand vous voyez toute l'énergie qu'il y a là, les choses qu'ils chantent, ça me rend émotif, ça me fait sentir désiré, apprécié et respecté. J'ai l'impression que, pour la première fois de ma vie, je compte plus que physiquement », a déclaré un Afro-Américain.

Dans tout le pays, les gens s'organisent pour mener des actions encore plus unies, sans se laisser intimider par la violence de la police fédérale et locale et les tentatives de les criminaliser. Les gens prennent de plus en plus conscience que les mécanismes de gouvernance existant à tous les niveaux sont à la fois dysfonctionnels et nuisibles. À Portland, cela s'est traduit par l'accord qui prévoit que la police d'État travaille désormais sous l'égide de la police fédérale tout en prenant le commandement de la police locale. Une telle structure de commandement est ce que recherche le gouvernement fédéral alors qu'il n'a pas l'intention de mettre fin à la violence des forces de police à tous les niveaux.

Mais ces millions de personnes en action ont un appui généralisé et croissant. Ils revendiquent une direction nouvelle pour le pays, une direction qui favorise la majorité et non les intérêts privés intéressés d'une minuscule minorité. La résistance cristallise la nécessité de l'époque d'investir le peuple du pouvoir et de la démocratie populaire, et tout indique qu'elle perdurera.


Le Mur des infirmières se rassemble pour la manifestation du 25 juillet 2020.

C'est cet effort commun et cette recherche d'arrangements qui affirment le droit humain à l'existence et la position selon laquelle la lutte pour les droits de tous et de toutes est la voie à suivre qui effraient le plus les élites dirigeantes et c'est la raison de ce déchaînement de violence de tous les corps policiers dans le but de les anéantir. Il est clair pour tout le monde que la brutalité et la violence lancées contre le peuple, vague après vague, ont pour but de l'épuiser et de détruire la résistance. Mais elles ne peuvent pas écraser la résistance, car la volonté d'être du peuple l'emporte. Ce grand moment de reddition de compte contient en lui les germes d'une démocratie pour le peuple, où c'est le peuple qui décide de ce qui arrive, et non ceux qui gouvernent d'en haut et veulent que le peuple se soumette à des conditions et à une autorité qui lui sont inacceptables.


Cet article est paru dans

Volume 50 Numéro 50 - 5 août 2020

Lien de l'article:
La résistance en force et en détermination partout aux États-Unis: Les attaques violentes des forces de police fédérales ne parviennent ni à intimider ni à réprimer la rébellion - Kathleen Chandler


    

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