La criminalisation de la dissidence des Noirs doit cesser, les monuments rendant hommage aux racistes et au racisme doivent être retirés

Une lettre ouverte en appui à Black Lives Matter Toronto, aux personnes arrêtées et aux artistes

Nous, un groupe d'artistes, de gestionnaires, de conservateurs et professionnels du monde des arts, voulons exprimer notre préoccupation et notre colère face à la criminalisation de manifestations pacifiques, d'interventions artistiques, de la dissidence et des actions des Noirs. Black Lives Matter Toronto (BLMT) a récemment organisé une intervention pacifique pour mettre en lumière comment la société canadienne rend hommage au racisme et à la violence coloniale avec des monuments en hommage à Egerton Ryerson, John A. Macdonald et le roi Edward VII. Cette manifestation a été perturbée par un énorme déploiement de tactiques d'intimidation et de harcèlement policiers. 

Plus de vingt policiers ont pris en souricière trois des participants qui ont été arrêtés et retenus pendant plus de 16 heures sans aucune explication ni confirmation. Ils n'ont pas eu accès à un avocat pendant une période de cinq heures. Ces artistes ont été détenus sans accès à des soins médicaux et sans médicaments essentiels. Lorsqu'interrogée, la police a dit des faussetés et a changé sa version des faits à de nombreuses reprises au cours de la journée. BLMT a appelé à un rassemblement à 18 heures pour exiger la libération des artistes détenus. À 17 h 24, la police a publié un communiqué de presse pour dire que deux des trois artistes avaient été libérés. Les membres de BLMT n'ont pas été en mesure d'entrer en contact avec leurs collègues « libérés ». Après le départ des journalistes, vers 20 h, la police a changé sa position et dit que tous les trois étaient toujours détenus.

Les monuments en question ne peuvent être qualifiés que de racistes. Egerton Ryerson était le principal architecte du système des pensionnats indiens au Canada, un système génocidaire qui a terrorisé plusieurs générations d'enfants et de familles autochtones. Il a aussi appuyé le système scolaire ségrégé qui séparait les enfants noirs des enfants blancs.

Sir John A. MacDonald a créé et encouragé des politiques génocidaires et il a présidé à une politique visant à affamer intentionnellement des communautés autochtones qui a fait plus de 10 000 victimes entre 1800 et 1855. MacDonald était proche de la Maafa, le commerce d'esclaves, dans les Amériques et appuyait ouvertement la Confédération favorable à l'esclavage pendant la Guerre civile américaine.

La statue du roi Edward VII est un monument colonial qui a d'abord été érigé dans un square public à Delhi en Inde. Renversée par le peuple indien au moment de l'Indépendance, elle a été déménagée au Canada par des intérêts privés et érigée, contre le gré du conseil municipal de l'époque, dans un des espaces le plus en vue de Toronto.

L'intervention artistique contre les monuments a une histoire bien établie. Les monuments ne sont pas des symboles historiques, ils sont des symboles d'emphase intentionnelle. Les réponses artistiques à ces monuments sont à la fois une affirmation de liberté d'expression politique et une pratique artistique reconnue.

Nous affirmons que ces monuments rendent hommage au legs de violence raciale, de ségrégation et de génocide et que leur présence dans l'espace public rappelle que la vie et l'histoire des Noirs et des Autochtones ne sont pas mises en valeur dans les espaces que nous partageons tous. Ces monuments incarnent des systèmes oppresseurs sanctionnés par l'État et contribuent à perpétuer l'insécurité, l'emprisonnement et la mort aux mains de la police des Noirs et des Autochtones.

Ces monuments doivent être retirés. Nous affirmons que l'action de BLMT et de ses alliés samedi [le 18 juillet] était une intervention artistique pour briser le récit de la suprématie blanche. Il n'y a pas de place pour ces monuments dans notre société. La criminalisation des personnes qui participent à des manifestations exigeant leur retrait et le définancement de la police ne fait que consolider le racisme anti-Noirs et anti-Autochtones profondément enraciné dans les forces policières de Toronto.

Avec Black Lives Matter Toronto, nous exigeons :

- le retrait de ces monuments ;

- que cessent la criminalisation de manifestations pacifiques et la surveillance continue de BLMT ;

- le retrait de toutes les accusations contre les détenus liés à l'intervention : Jenna Reid, Danielle Smith et Daniel Gooch ;

- que soit immédiatement réduit d'au moins 50 % le budget actuel de 1,1 milliard de dollars de la police de Toronto (au lieu du 10 % de compressions proposé par les conseillers de la ville de Toronto) ;

- la mise sur pied d'équipes d'intervention et d'appui en cas de crises de santé mentale et auprès des personnes ayant un handicap qui seront dirigées par des personnes noires et autochtones ;

Les membres de BLMT sont des gens, surtout des jeunes, qui ont décidé de s'engager parce qu'ils croient aux valeurs de décence, de démocratie et de justice. Nous exigeons un leadership à un moment critique qui évolue vers un mouvement pour la justice sociale — un mouvement qui reflète vraiment les préoccupations des communautés concernées et fondé sur l'intégrité, l'amour, la compassion et une véritable égalité pour tous.

Pour ajouter votre nom en tant que signataire de cette lettre, écrire à artistsXforXblackXlives@gmail.com.

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(23 juillet 2020)


Cet article est paru dans

Volume 50 Numéro 49 - 1er août 2020

Lien de l'article:
La criminalisation de la dissidence des Noirs doit cesser, les monuments rendant hommage aux racistes et au racisme doivent être retirés - Artistes en appui à la vie des Noirs


    

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