Le projet de loi 61: utilisation de la pandémie et de la relance de l'économie pour renforcer les pouvoirs arbitraires de l'État
Le juin, le gouvernement Legault a déposé le
projet de loi 61, Loi visant la relance de
l'économie du Québec et l'atténuation des
conséquences de l'état d'urgence sanitaire
déclaré le 13 mars 2020 en raison de
la pandémie de la COVID-19. Le but déclaré
du projet de loi est d'atténuer les conséquences
de l'état d'urgence sanitaire en accélérant la
construction de 202 projets publics
d'infrastructure, tels les écoles, les résidences
pour personnes âgées, les routes et le transport
en commun, pendant une période de deux ans. Le
projet de loi donne l'option au gouvernement de
décréter que d'autres projets publics ou privés
sont couverts par celui-ci. Selon le premier
ministre François Legault, les pouvoirs conférés
par le projet de loi, qui ont été largement
dénoncés comme étant arbitraires, sont essentiels
à la relance de l'économie après des semaines de
fermeture imposées en raison de la pandémie.
Pris dans son
ensemble, le projet de loi est une vaste tentative
de renforcer les pouvoirs arbitraires de l'État et
de priver encore plus les travailleurs et le
peuple de toute voix sur les affaires qui les
concernent, en utilisant la pandémie et la relance
de l'économie comme prétexte. Il prive aussi
encore plus l'Assemblée nationale et ses membres
de tout pouvoir législatif, en concentrant tout
pouvoir décisionnel entre les mains des ministres
pour servir des intérêts privés étroits. Le projet
de loi 61 confère au gouvernement le pouvoir
d'étendre l'état d'urgence sanitaire sans égard à
ce que prescrit la Loi sur la santé publique
et sans examen de la part du public et même des
membres de l'Assemblée nationale.
L'arrêté ministériel par lequel a été décrété
l'état d'urgence sanitaire le 13 mars a donné
le pouvoir arbitraire à l'exécutif gouvernemental
d'annuler toutes les ententes négociées avec les
travailleurs de la santé et des services sociaux.
L'exécutif a utilisé ce pouvoir pour changer
unilatéralement les conditions de travail dans le
secteur de la santé et des services sociaux.
L'extension de ce pouvoir arbitraire pour une
période indéfinie est une attaque grave contre les
travailleurs et leurs droits qui ne doit pas
passer !
En plus de l'attaque contre les travailleurs du
secteur public, le projet de loi 61 donne
tout pouvoir à l'exécutif gouvernemental d'annuler
et d'enfreindre les lois et la réglementation
existantes sous prétexte d'accélérer la relance de
l'économie. Le projet de loi 61 permet à
l'exécutif gouvernemental d'annuler les clauses de
la Loi sur la santé publique, de la Loi
sur la qualité de l'environnement, de la Loi
sur l'expropriation et de la Loi sur
les contrats des organismes publics, et
accorde l'immunité face à toute poursuite contre
les ministres du gouvernement et de toute autre
personne qui a recours à cette loi.
Le projet de loi 61 confère à l'exécutif
gouvernemental le pouvoir d'éliminer comme bon lui
semble la réglementation environnementale, la
réglementation concernant l'expropriation des
personnes au nom des projets économiques et la
réglementation qui concerne l'octroi des contrats
publics à des entreprises privées pour la
construction des projets d'infrastructure, tout en
accordant l'immunité face à toute poursuite pour
tout méfait. On ne doit pas permettre cet
accaparement d'un plus grand pouvoir exécutif.
Une crise comme la pandémie ne doit pas être
utilisée pour attaquer le peuple, violer ses
droits et l'exclure de manière encore plus
violente du pouvoir décisionnel. Les travailleurs
doivent examiner cette situation et intensifier
leur lutte pour s'investir du pouvoir pour que les
problèmes causés par la pandémie puissent être
résolus en leur faveur, pas en faveur des riches.
La pandémie est une nouvelle preuve de la
nécessité d'une nouvelle direction de l'économie,
une direction qui est décidée par le peuple et qui
est sous son contrôle.
Les travailleurs et le peuple demandent que ce
projet de loi régressif soit retiré immédiatement.
Ceux qui ont présenté ce projet de loi antiouvrier
et antisocial et qui insistent pour le faire
adopter afin de fournir à l'exécutif
gouvernemental des pouvoirs arbitraires encore
plus grands doivent être déclarés inaptes à
gouverner et démis de leurs fonctions.
La manoeuvre du gouvernement du Québec
pour faire adopter le projet de loi 61
Le projet de loi 61 a été présenté le 12 juin, 9
jours seulement avant le jour officiel de
l'ajournement des travaux de l'Assemblée nationale
pour l'été. Le premier ministre François Legault,
Christian Dubé, alors président du Conseil du
trésor, et d'autres porte-paroles du cabinet ont
demandé avec arrogance qu'il soit adopté à toute
vapeur avant l'ajournement.
Bien que le gouvernement Legault soit majoritaire
à l'Assemblée nationale, le consentement unanime
des trois partis de l'opposition et des députés
indépendants de l'Assemblée nationale était requis
pour que le principe de la loi soit adopté, ce qui
permet de le traiter en comité et de passer aux
lectures subséquentes. Il existe une règle de
procédure de l'Assemblée nationale en vertu de
laquelle le consentement unanime des députés est
requis pour l'adoption du principe d'un projet de
loi lorsque celui-ci est présenté après la mi-mai
avant l'ajournement pour l'été.
Dans un effort pour obtenir le consentement
unanime des membres de l'Assemblée nationale, le
gouvernement Legault a présenté 18 amendements la
veille de l'ajournement. La tentative de Legault
d'« adoucir » le projet de loi n'a pas réussi à
obtenir le consentement unanime des députés pour
l'adoption de son principe. L'opposition populaire
au projet de loi était si forte que, selon
plusieurs commentateurs, il aurait été suicidaire
pour les autres partis et membres de l'Assemblée
nationale de se plier à cette manoeuvre du
gouvernement Legault. Il est probable que lorsque
l'Assemblée nationale reprendra ses travaux en
septembre le gouvernement Legault utilisera sa
majorité pour faire adopter le principe du projet
de loi, en dépit de l'opposition croissante du
peuple.
Cet article est paru dans
Volume 50 Numéro 44 - 7 juillet 2020
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