Dossier
Une leçon du gouvernement libéral sur comment profiter des plus vulnérables pour ensuite refiler ses responsabilités
- Diane Johnston -
Un reportage de John Paul Tasker de la CBC
publié le 25 mai 2020 expose le fait que
la compagnie Revera, un des plus importants
entrepreneurs de résidences pour aînés et de soins
de longue durée au Canada, est une filiale
appartenant entièrement à l'Office
d'investissement des régimes de pensions du
secteur public (PSP), « une société d'État
canadienne qui investit des fonds pour les régimes
de pensions des membres de la fonction publique,
des Forces armées canadiennes, de la Gendarmerie
royale du Canada et de la Force de réserve ».
Le PSP a été établi en 1999 pour investir
les fonds des régimes de pension et générer un
rendement pour financer le revenu de retraite des
fonctionnaires. Le PSP gère un actif de 168
milliards de dollars. Il est un des plus
importants investisseurs institutionnels au pays,
avec des bureaux à Montréal, à New York, à Londres
et à Hong Kong.
Revera est
propriétaire et gestionnaire de douzaines de
propriétés partout au Canada. Il a aussi
d'importantes participations aux États-Unis et au
Royaume-Uni, avec un portefeuille d'appartements
pour aînés, soins à domicile et résidences de
soins de longue durée.
Revera se décrit comme étant « un important
propriétaire, gestionnaire, développeur et
innovateur dans le secteur des aînés. Grâce à son
portefeuille de partenariats, Revera a plusieurs
milliards d'actifs et est propriétaire et
gestionnaire de plus de 500 propriétés
partout au Canada, aux États-Unis et au
Royaume-Uni. Avec près de 50 000
employés, Revera sert plus de 55 000
aînés. »
Au Québec, Revera est le propriétaire conjoint
de 33 résidences gérées par Groupe Sélection
et est actionnaire majoritaire de Sunrise Senior
Living. Dans un communiqué de presse en date
du 25 mai, le Conseil central de Montréal
métropolitain de la Confédération des syndicats
nationaux (CCMM-CSN) et la Fédération de la santé
et des services sociaux (FSSS-CSN) ont sévèrement
condamné le refus du Groupe Sélection de verser
les montants rétroactifs au 15 mars aux
travailleurs de la santé des résidences pour aînés
privées de la prime de 2 dollars de l'heure
que le gouvernement Legault leur avait accordée
le 15 mars.
L'article nous apprend qu'en Ontario, un recours
collectif de 50 millions de dollars a été
intenté contre Revera au début de mai au nom des
familles des victimes de la COVID-19 dans les
établissements de longue durée de la compagnie.
Celle-ci est poursuivie pour négligence et rupture
de contrat. Les demandeurs allèguent que les
établissements n'avaient pas « les protocoles
d'hygiène ni les tests adéquats pour prévenir la
propagation de la COVID-19 ».
Un recours collectif de 25 millions de
dollars a aussi été intenté contre la compagnie
relativement à sa gestion du centre de soins de
longue durée McKenzie Towne à Calgary, où 21
résidents sont décédés de la COVID-19 et 63
autres ont été infectés, ainsi que 44
employés. Le 25 mai, pendant la mise à jour
sur la réponse fédérale à la COVID-19, la
journaliste de la CBC Julie Van Dusen a demandé au
président du Conseil du Trésor Jean-Yves Duclos si
Revera était toujours sous la responsabilité de
l'Office d'investissement des régimes de pensions
du secteur public, qui relève de lui, ce que
Duclos a confirmé. La journaliste lui a alors
demandé s'il était en pourparlers directs avec
Revera sur la question d'améliorer les conditions
dans ses établissements « considérant qu'un
recours collectif important pèse contre lui et
considérant tous les décès de la COVID ».
« Il y a deux choses, a répondu Duclos. La
première est que je ne peux commenter les
circonstances spécifiques et les détails d'une
poursuite ou d'un recours collectif. Ce serait,
évidemment, inapproprié pour un ministre d'en
parler. Mais je peux dire cependant, et vous le
savez très bien et c'est très important, que nous
sommes extrêmement attristés des circonstances
difficiles [...] vécues par nos aînés depuis
quelques semaines. Nous savons que ceci requiert
un niveau de leadership qui appuie fermement la
responsabilité et la juridiction absolument
importantes des provinces et des territoires. Et
bien que nous soyons conscients du fait que le
gouvernement fédéral doit travailler
respectueusement, nous avons fait savoir plus
d'une fois que nous voulons faire tout ce que nous
pouvons pour appuyer le travail des provinces et
des territoires dans la gestion du secteur de la
santé. »
C'est le genre de double langage libéral que les
Canadiens doivent endurer durant les séances
d'information quotidiennes du gouvernement. Il est
typique d'une autorité corrompue de ne pas parler
franchement et de refuser de prendre la
responsabilité sociale de quoi que ce soit. Où les
fonds de pension sont investis est un gros
problème au Canada. Ce sont d'importantes sommes
d'argent qui sont investies dans des entreprises
odieuses, mais tout cela est rejeté du revers de
la main comme des « décisions d'affaires » et
présenté frauduleusement en disant que ce qui est
bon pour les affaires est prétendument bon pour
les Canadiens. Cela montre comment l'autorité ne
cadre pas avec les conditions et que cette
autorité n'est pas apte à gouverner.
Cet article est paru dans
Volume 50 Numéro 37 - 30 mai 2020
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