La situation actuelle chez Cargill à High River, en Alberta

Neuf cent huit des 2 000 travailleurs de l'usine de Cargill à High River, en Alberta, ont maintenant été déclarés porteurs de la COVID-19, avec 631 cas déclarés rétablis. Au moins sept travailleurs sont hospitalisés et cinq sont aux soins intensifs. Un employé de Cargill et un proche contact sont décédés. Il y a 1 385 cas de la COVID-19 à High River, qui compte moins de 14 000 habitants. High River est à environ 60 km au sud de Calgary et les travailleurs de Cargill vivent à Calgary ainsi qu'à High River. La situation est également extrêmement grave à l'usine JBS de Brooks, qui compte 390 cas confirmés et 456 cas dans la communauté. Si on les additionne, 42 % de tous les cas albertains sont liés à ces usines détenues par des monopoles étrangers géants qui contrôlent l'industrie de l'emballage de la viande et transforment ensemble 70 % du boeuf canadien.

L'usine de High River a été fermée il y a deux semaines, après que les travailleurs aient débrayé en grand nombre. Malgré le nombre croissant de travailleurs qui ont été testés positifs de jour en jour, Cargill a annoncé que l'usine rouvrirait ses portes le lundi 4 mai. En réponse, la section locale 401 des Travailleurs unis de l'alimentation et du commerce (TUAC) a demandé un arrêt de travail à la Commission de santé-sécurité au travail de l'Alberta (Alberta Occupational Health & Safety - AOHS) et a déposé une plainte pour pratique déloyale de travail, désignant Cargill et le gouvernement de l'Alberta comme intimés.

Le gouvernement de l'Alberta déclare qu'il requiert des services essentiels dont la transformation des aliments, qu'il respecte les lignes directrices en matière de distanciation sociale et les autres mesures visant à limiter la propagation du coronavirus. Cependant, Cargill a été autorisée à continuer de forcer ses employés à travailler coude à coude sous prétexte que l'entreprise faisait ce qui était « possible », d'harceler les travailleurs pour qu'ils reviennent au travail même s'ils étaient malades et de fournir des équipements de protection individuelle comme des écrans faciaux seulement aux superviseurs, mais pas aux travailleurs.

Le 29 avril, Cargill a déclaré dans un communiqué qu'il avait le soutien de l'AOHS pour rouvrir ses opérations. Le syndicat rappelle que la compagnie avait dit que c'était sécuritaire quand 38 travailleurs avaient été testés positifs. La section locale 401 des TUAC a demandé la fermeture de l'usine à ce moment-là, mais il a fallu 18 jours pour que l'usine soit définitivement fermée.

Un représentant de Migrante rapporte qu'environ 500 travailleurs de l'usine sont des travailleurs étrangers temporaires. Les TUAC ont négocié des clauses dans leur convention collective qui exigent que l'employeur nomme des travailleurs étrangers temporaires pour le Programme des candidats des provinces pour obtenir la résidence permanente, sur la base que s'ils sont assez bons pour travailler, ils sont assez bons pour rester. La majorité des travailleurs de l'usine sont d'anciens et de nouveaux travailleurs étrangers temporaires, la majorité venant des Philippines, et d'autres d'Asie, d'Afrique et d'Amérique latine.

La section locale 401 des TUAC a publié un sondage sur son site Web en quatre langues auquel 600 personnes ont répondu questions : 1) Pensez-vous que l'usine devrait rouvrir ? et 2) Avez-vous peur d'aller travailler ? Sur le site Web on rapporte que 80 % des travailleurs ont dit non à la réouverture le 4 mai et que 85 % disent craindre pour leur santé et celle de leurs familles s'ils retournent au travail.

Le président de la section locale 401, Tom Hesse, a clairement indiqué que même si le syndicat reconnaît qu'il est illégal de faire la grève pendant la durée d'une convention collective, les travailleurs ont le droit de refuser un travail dangereux. Les travailleurs de Cargill sont très conscients de leur droit de refuser un travail dangereux, et le syndicat appuiera ceux qui exercent ce droit, a-t-il déclaré.

Hesse a fait les déclarations suivantes à propos des démarches légales du syndicat :

« Cargill et le gouvernement de l'Alberta ont ignoré nos appels à une approche centrée sur les travailleurs pour assurer la sécurité de l'usine. Les rapports d'inspection des services de santé de l'Alberta ne nous ont pas été communiqués et les inspections faites par AOHS ont omis les graves préoccupations que nous avons soulevées.

« La raison d'être d'un syndicat est de constituer une représentation forte et sans réserve. L'une des raisons pour lesquelles les syndicats existent est de promouvoir et de défendre le droit à la santé et à la sécurité au travail.

« Notre objectif et notre rôle sont d'utiliser toutes les voies légales à notre disposition pour garder l'usine de Cargill High River fermée jusqu'à ce que nous puissions garantir la sécurité des travailleurs qui y sont employés et que leurs voix aient été entendues.

« Les travailleurs du secteur alimentaire ont peur d'aller travailler dans l'environnement actuel. Ils n'ont pas la sécurité économique dont ils ont besoin pour se rétablir et ils sont terrifiés à l'idée de transmettre cette maladie à leurs familles et à leurs communautés. Alors qu'ils tentent de se rétablir, leur employeur et le gouvernement disent qu'ils doivent retourner au travail. Cela met leur vie en danger de façon imprudente et met les intérêts de leurs patrons au premier plan ... » On rapporte qu'une réunion a finalement eu lieu le 2 mai dans l'usine avec le syndicat et les services de santé de l'Alberta présents.

Dans une entrevue au réseau CBC le 2 mai, Hesse a dit qu'une audience d'urgence se tiendrait au Conseil des relations de travail de l'Alberta pour empêcher l'ouverture de l'usine le 4 mai, ajoutant que l'on ne sait pas combien de temps le processus prendra. Une demande faite par les TUAC le 30 avril au ministère de la Santé et de la Sécurité au travail de l'Alberta pour émettre un ordre d'arrêt de travail pour fermer l'usine est restée sans réponse.

Hesse a ensuite raconté l'expérience des travailleurs d'une usine de transformation de viande aux États-Unis, qui a rouvert ses portes après avoir été fermée pendant deux semaines. Les infections à COVID-19 ont doublé et des travailleurs sont morts. Le syndicat ne veut pas que cela se produise ici. L'usine de Cargill ayant la plus grande éclosion liée au travail en Amérique du Nord, l'usine ne doit pas rouvrir jusqu'à ce que tout soit mis en place pour que les travailleurs puissent retourner en toute sécurité.

Aucun pays civilisé ne renverra ses gens au travail dans ces circonstances, a ajouté Hesse, affirmant que si la procédure judiciaire échoue, un grand nombre de travailleurs refuseront de travailler dans un lieu dangereux et que le syndicat les conseille sur leurs droits à ce sujet.


Cet article est paru dans

Volume 50 Numéro 29 - 2 mai 2020

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