Tentative méprisable du gouvernement québécois de négocier en pleine pandémie
- Pierre Soublière -
La convention collective des employés du secteur
public, représentant 500 000
travailleurs, arrivait à échéance le 31 mars.
Dans un geste que des éditorialistes — qui ont
l'habitude de mettre leurs gants blancs avec le
gouvernement Legault — ont qualifié d'indécent,
celui-ci a déclenché un blitz de négociation dans
un contexte de pandémie pour tenter d'imposer le
statu quo pendant les trois prochaines années.
Plusieurs dirigeants syndicaux ont soulevé que le
temps ne se prête vraiment pas aux négociations
alors que tout le monde y met du sien pour
résoudre les problèmes aux premières lignes, y
compris protéger les travailleurs et la population
dans la lutte contre la pandémie. En fait, comme
un dirigeant syndical l'a fait valoir, cet
entêtement de la part du gouvernement du Québec à
vouloir négocier à tout prix a nui aux discussions
qui ont constamment lieu précisément sur ces
questions de vie et de mort. En agissant ainsi, le
gouvernement lui-même a tenté d'imposer aux
travailleurs des conditions qui ne sont pas
conformes à ses propres directives de santé
publique. Comme Andrée Poirier, présidente de
l'Alliance du personnel professionnel et technique
de la santé et des services sociaux (APTS), l'a si
bien dit : « Ironiquement, des
discussions intensives se sont amorcées
aujourd'hui, dans le cadre des négociations pour
le renouvellement des conventions, pour justement
déterminer les mesures à prendre pour assurer la
protection des techniciens et des professionnels
du réseau de la santé et des services sociaux. Ces
mesures doivent être prises en cohérence avec les
consignes de la santé publique, et non dépendre
d'un processus de négociation où la partie
patronale cherche à tout prix à minimiser les
coûts pour le gouvernement. »
Depuis le début de
la pandémie, les syndicats mettent de l'avant des
revendications qui viennent de leurs membres qui
sont aux premières lignes. Parmi ces
revendications, il y a d'abord et avant tout
l'équipement de protection individuelle nécessaire
dans les divers endroits de travail, mais aussi,
la protection du personnel dans les établissements
de soins de longue durée, la perte de traitement
du personnel en isolement, les directives
contradictoires et changeantes dans les endroits
de travail, la perte de vacances pour ce qui est
du personnel infirmier. Dans certains cas, les
travailleurs de la santé qui ont été envoyés à la
maison pour y rester en quarantaine sont rappelés
avant que celle-ci ne soit terminée et obligés de
travailler avec des patients qui sont
particulièrement vulnérables au coronavirus.
Dans certains cas, le syndicat a réussi à obtenir
une protection de base comme à la Buanderie
centrale de Montréal où les travailleurs ont
maintenant des mesures et de l'équipement pour se
protéger. Les syndicats revendiquent aussi des
primes de reconnaissance que certains appellent
les « primes d'anges gardiens » - le terme
préféré du gouvernement Legault pour les
travailleurs de la santé - pour rappeler au
gouvernement que ces « anges » sont faits de
chair et d'os et ont besoin d'une protection
concrète pour se protéger, eux et leurs patients.
Ils font aussi valoir que les travailleurs de
premières lignes ne sont pas que les médecins et
les infirmiers, mais tous ceux qui travaillent
dans des secteurs connexes tels que les
ambulanciers qui, en fait, sont aux toutes
premières lignes, les travailleurs de cuisine, de
buanderie, etc.
Un grand nombre d'établissements dans le secteur
de la santé sont privés et ne sont pas syndiqués.
La situation y est encore plus éprouvante et
inquiétante puisque les travailleurs ne sont pas
bien informés et n'ont pas une organisation qui
leur permet de faire connaître leurs besoins dans
une démarche collective. C'est ce qui rend la
manoeuvre sournoise du gouvernement Legault encore
plus méprisable. Comme l'a dit une infirmière, il
s'agit d'une « diffamation de notre
profession ». C'est aussi un geste
profondément antisocial et anachronique qui est
motivé par une vieille hargne contre ces mêmes
organisations qui ont exprimé et prouvé leur
entière collaboration dans la lutte contre la
pandémie de la COVID-19 et qui parlent au nom des
mêmes travailleurs dont le gouvernement prétend
reconnaître la contribution et l'altruisme.
Cet article est paru dans
Volume 50 Numéro 22 - 8 avril 2020
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Tentative méprisable du gouvernement québécois de négocier en pleine pandémie - Pierre Soublière
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