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Le gouvernement fédéral ne peut échapper à sa responsabilité envers les peuples autochtones


Les Jeunes autochtones pour les Wet'suwet'en créent un espace cérémonial sur la pelouse
de l'Assemblée législative de la Colombie-Britannique, le 4 mars, et demandent au premier ministre et au gouvernement de la province d'être redevables de leurs actes et de venir les rencontrer. (T. Coste)

Il y a beaucoup de spéculation au sujet du contenu de l'accord conclu entre les représentants des gouvernements fédéral et provincial et les chefs héréditaires wet'suwet'en et d'autres personnes lorsqu'ils se sont rencontrés à Smithers, dans le nord de la Colombie-Britannique, du 27 au 1er mars. L'ex-député néodémocrate Nathan Cullen a été sollicité par le gouvernement de la Colombie-Britannique pour faciliter les pourparlers. Les rapports indiquent que les réunions ont mené à une entente entre les Wet'suwet'en et les gouvernements fédéral et provincial sur la reconnaissance des droits et des titres ancestraux. Les Wet'suwet'en ne vont pas divulguer les détails de l'entente avant les discussions au sein de la nation wet'suwet'en, devant débuter bientôt.

Selon les reportages, l'entente ne traite pas du problème toujours non résolu du pipeline de Coastal GasLink. La construction et l'exploitation du pipeline sur le territoire des Wet'suwet'en n'ont toujours pas le consentement des chefs héréditaires.

Ces derniers demandent depuis le début du mois de janvier que les premiers ministres Trudeau et Horgan les rencontrent, en tant qu'égaux, dans un rapport de nation à nation, et cette demande a été refusée à de multiples reprises par les deux premiers ministres. Une des jeunes qui a pris la parole lors de la conférence de presse devant l'Assemblée législative de la Colombie-Britannique le 26 février a bien expliqué la raison. Elle a dit : « La raison pour laquelle John Horgan et Trudeau refusent de rencontrer ces chefs, c'est que dès qu'ils les rencontrent, ils viennent d'affirmer que les chefs sont les dirigeants et propriétaires légitimes de leurs propres territoires. Nous savons tous que cela n'a pas de sens d'un point de vue économique que Trudeau et Horgan ne rencontrent pas les chefs, alors nous devons nous demander pourquoi ils refusent. Le fonds de l'affaire est qu'ils ne veulent pas donner à notre peuple la reconnaissance que nous possédons nos propres territoires, car alors chaque fois qu'ils voudront faire passer un projet sur nos terres, nous allons pouvoir dire non. »

Devant la poursuite des actions de solidarité et de perturbation à travers le pays, Justin Trudeau ne cesse de dire que son gouvernement veut une « solution pacifique et durable », mais il refuse de reconnaître la cause profonde du problème qu'il prétend vouloir résoudre. Lorsque le chef du NPD, Jagmeet Singh, lui a demandé le 26 février à la Chambre des Communes s'il s'engageait à rencontrer les chefs héréditaires wet'suwet'en, il a rejeté le blâme pour la situation actuelle sur les Wet'suwet'en. Il a dit : « J'ai déjà expliqué qu'il existe plusieurs voix au sein de la communauté wet'suwet'en : il y a des chefs héréditaires, des chefs élus de même que des dirigeants de la communauté. Un premier ministre qui s'assoirait trop rapidement avec un des groupes s'ingérerait dans le travail qu'ils doivent faire, sans ingérence extérieure, pour déterminer leur voie vers l'avant. Je suis bien sûr ouvert à un engagement constructif, mais d'une façon appropriée. »

En parlant ainsi, Trudeau laisse entendre que le problème est que les Wet'suwet'en sont divisés et qu'ils ont besoin de s'entendre entre eux. Il oublie toutefois de mentionner cet élément crucial que le gouvernement fédéral a créé un soi-disant troisième niveau de gouvernement élu afin de maintenir le pouvoir décisionnel hors de l'atteinte du peuple. Ceux qu'il appelle les représentants élus représentent la Couronne et non le peuple. Leur rôle est de faire en sorte que le peuple accepte tout et se taise, tout cela au nom de la démocratie. En ce qui concerne les dirigeants d'affaires et d'autres représentants d'intérêts spéciaux, personne ne leur a jamais demandé d'être les porte-paroles des gens. Les deux systèmes de gouvernance, la loi ancestrale sur le territoire non cédé et les conseils de bande élus imposés par la Loi sur les Indiens sur les réserves, ne sont pas compatibles, car le premier n'est pas reconnu tandis que le deuxième fait partie intégrante de la dépossession des peuples autochtones. Il doit être abrogé parce qu'il fait partie du legs colonial.

En ce qui concerne les différences d'opinion, elles existent dans toute la société canadienne au sujet des enjeux relatifs au développement des ressources et à la façon de maintenir et d'humaniser l'environnement naturel et social. Tant que les gouvernements de divers niveaux ne permettront pas que se tienne une discussion de manière à ce que les communautés puissent explorer leurs options sur la base de leur propre perspective et en établissent leurs propres points de référence, ces différences ne peuvent pas être résolues. Les gens sont donc montés les uns contre les autres bien qu'ils aspirent aux mêmes choses, à savoir un moyen de subsistance, un développement durable et un environnement naturel et social sain. Au lieu de permettre la discussion et que le peuple tire les conclusions qui s'imposent, le gouvernement de la Colombie-Britannique est en train d'imposer le pipeline de Coastal GasLink bien que les chefs héréditaires n'aient pas consenti au tracé du pipeline sur le territoire dont ils ont la responsabilité. Le gouvernement provincial a délivré les permis pour Coastal GasLink bien que la compagnie n'ait pas obtenu ce consentement. Le gouvernement a forcé l'application de la décision au moyen d'une force d'occupation militarisée de la GRC qui harcèle les gens de manière illégale et s'ingère dans la vie de ceux qui vivent et travaillent sur le territoire. La GRC a lancé deux assauts violents et chassé des Wet'suwet'en de leur propre territoire. C'est le comble de l'arrogance que de suggérer que le « problème » est « les divisions chez les Wet'suwet'en » et que Trudeau, le dirigeant du gouvernement canadien, aide à améliorer la situation en ne « s'assoyant pas trop rapidement avec un des groupes ».

Lorsque les premiers ministres Trudeau et Horgan parlent de réconciliation, ils veulent dire que les peuples autochtones doivent se réconcilier avec le libre accès à leur territoire pour les entreprises de ressources, tandis que les gouvernements fédéral et provincial agissent comme leurs agents et la GRC comme leur homme de main. Tant que cette façon de voir les choses dominera, les enjeux fondamentaux ne seront pas traités et la lutte des peuples autochtones pour affirmer leurs droits va se poursuivre.

L'accord qui a été conclu à Smithers a créé l'espoir que le gouvernement fédéral et celui de la province reconnaissent les droits ancestraux des Wet'suwet'en, 23 ans après la décision de la Cour suprême dans le cas Delgamuukw qui a demandé aux gouvernements provinciaux et fédéral d'en arriver à un règlement politique du déni historique des droits ancestraux des peuples autochtones. Que l'accord conclu à Smithers soit accepté ou non par les Wet'suwet'en, le problème demeure l'enjeu immédiat, à savoir le pipeline Coastal GasLink. Le travail qui avait été suspendu par Coastal GasLink pendant les pourparlers a repris le 2 mars bien que les chefs héréditaires et les défenseurs de la terre du camp Unist'ot'en continuent de déclarer leur opposition. La GRC, qui s'était retirée pendant les pourparlers, a aussi repris ses patrouilles sur le territoire wet'suwet'en.

Les blocus ferroviaires en Ontario et au Québec ont été levés la semaine dernière, mais les actions en appui aux réclamations des Wet'suwet'en, dont les débrayages étudiants dans tout le pays le 4 mars, se poursuivent. Lors d'une de ces actions, des centaines d'étudiants se sont joints aux jeunes autochtones qui ont occupé les marches de l'Assemblée législative de la Colombie-Britannique pour exprimer leur appui à la juste position des défenseurs de la terre wet'suwet'en.


Cet article est paru dans

Volume 50 Numéro 13 - 7 mars 2020

Lien de l'article:
Soutenons les droits ancestraux Des peuples autochtones: Le gouvernement fédéral ne peut échapper à sa Responsabilité envers les peuples autochtones - Barbara Biley


    

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