La détérioration des conditions sociales aux États-Unis

La nécessité d'une politique indépendante de la classe ouvrière et d'une direction prosociale antiguerre pour l'économie

Dans une série d'articles, les médias de masse ont dressé un sombre tableau des conditions de vie inhumaines aux États-Unis. Ils ont décrit les conditions sociales intenables de nombreuses personnes dans les villes de la Californie et du nord-ouest, de New York et d'ailleurs. Ville après ville, des milliers de personnes vivent dans les rues et dans les parcs, avec un accès limité à des installations sanitaires et aux autres services publics. La situation du logement des travailleurs de la Silicon Valley est si désespérée qu'Apple a décidé d'investir 2,5 milliards de dollars pour construire des logements locatifs pour ses travailleurs et d'autres sur des terrains qu'elle possède à San Francisco.

Le New York Times a détaillé de graves problèmes sociaux en matière de soins de santé, d'éducation, de logement et l'influence corruptrice des gros capitaux du système des partis cartellisés démocrate et républicain. Les articles laissent entendre que l'inégalité de la richesse sociale entre riches et pauvres est le problème fondamental et non le symptôme d'un problème plus profond, et qu'une répartition de la richesse accumulée est nécessaire pour résoudre les problèmes sociaux.

D'autres articles réfutent cette approche et affirment que le « rêve américain » de devenir riche et de faire « chacun pour soi » a permis à la nation de dominer les affaires mondiales et que la répartition de la richesse est contraire au « mode de vie américain ». Le conflit est souvent présenté comme une différence dans les visions du monde et les énoncés de politique des deux partis cartellisés établis et au sein du Parti démocrate.

Les articles sur l'inégalité des richesses s'appuient, entre autres, sur les recherches récentes des économistes Emmanuel Saez et Gabriel Zucman, qui figurent dans leur livre Le Triomphe de l'injustice : Comment les riches esquivent les impôts et comment faire pour qu'ils les payent, dans lequel ils soutiennent que la concentration de la richesse dans les mains de quelques-uns est devenue si grande qu'elle devient intenable, ce qui entraîne des problèmes sociaux non résolus que seule une augmentation de l'impôt pour les riches peut résoudre.

Les données révèlent que 400 familles américaines possèdent actuellement plus de richesses sociales que la population totale de personnes d'ascendance africaine, soit environ 48 millions, plus le quart de celles d'ascendance latino-américaine et hispanique, soit un autre 14 millions. La tranche la plus riche des 0,1 % a accaparé une partie presque trois fois plus grande de la richesse sociale des États-Unis, passant de 7 % à 20 %, entre la fin des années 1970 et 2016, tandis que la tranche inférieure des 90 % a vu sa part de la richesse passer de 35 % à 25 %.

Les 130 000 familles les plus riches des États-Unis détiennent maintenant presque autant de richesse sociale que les 117 millions de familles les plus pauvres réunies. Le 1 % supérieur possède 42 % de l'ensemble de la richesse sociale du pays. Les articles ne précisent pas ce qui constitue la richesse à part donner des références générales sur la propriété d'actions et d'obligations, la propriété de sociétés et de biens immobiliers, des maisons, des voitures, des revenus disponibles, etc.

De cette masse de richesses accumulées et d'investissements, de propriété de biens et de sociétés et de postes de cadres dirigeants et d'administrateurs, les individus les plus riches, qui représentent 1 % de la population totale, réalisent des revenus annuels correspondant à 20 % du total des revenus déclarés aux États-Unis. Cependant, les revenus déclarés par la grande majorité des travailleurs ne proviennent pas des investissements et de la propriété, mais de la vente de leur capacité de travail à ceux qui possèdent et contrôlent l'économie socialisée.

Selon les recherches sur les impôts effectuées par Saez et Zucman, les familles dans la tranche du 0,1 % les plus riches vont devoir 3,2 % de leur richesse et de leurs revenus totaux en impôts fédéraux, étatiques et locaux pour 2019, tandis que les 99 % de la tranche inférieure vont devoir 7,2 % de leur richesse et de leurs revenus accumulés.

Les données et les analyses sont centrées sur la possession et la distribution de la richesse sociale sous forme d'argent. À partir de là, l'analyse aboutit à la conclusion que l'augmentation de la charge fiscale des riches réglera les problèmes auxquels le peuple fait face. Mais le manque d'argent est-il la cause des terribles conditions et problèmes sociaux ?

Saez et Zucman invoquent une période de l'histoire des États-Unis, du début de la Deuxième Guerre mondiale aux années 1970, où les riches payaient beaucoup plus d'impôts et où leur part de la richesse était le tiers de celle qu'ils contrôlent aujourd'hui. Or, cela n'a pas mené à la réalisation du droit de tous à la santé, à l'éducation, au logement, à des installations sanitaires et à la sécurité durant la retraite et lorsqu'ils sont blessés, malades ou handicapés. L'augmentation des fonds entre les mains du gouvernement par rapport à la richesse sociale totale pendant et après la Deuxième Guerre mondiale a mené à la militarisation de l'économie américaine. L'élite dirigeante des États-Unis n'a pas utilisé l'augmentation des fonds pour garantir les droits des Américains avec des programmes sociaux étendus et des services publics gratuits, mais pour établir des milliers de bases militaires aux États-Unis et dans le monde entier, mener des guerres incessantes sous le drapeau impérialiste de « l'endiguement du communisme » et construire son arsenal d'armes modernes, notamment des flottes militaires, des avions de guerre, des chars, de l'artillerie, des fusils d'assaut et un grand nombre de bombes et de missiles nucléaires.

L'État des États-Unis ne manque pas d'argent. Son budget de guerre annuel s'élève à environ un billion de dollars et des milliards de plus sont consacrés à la « sécurité intérieure », à d'innombrables agences d'espionnage et de police internes et externes, à l'ingérence « diplomatique » dans les affaires souveraines d'autrui, aux stratagèmes pour payer les riches pour la grande entreprise, à la propagande impérialiste pro-guerre, à l'armement de mercenaires et aux prisons pour incarcérer plus de deux millions de ses citoyens.

La recherche et la série d'articles dans les médias de masse qui mènent à la conclusion que la cause de l'impossibilité de résoudre les problèmes est le manque d'argent ne tiennent pas compte des rapports de production dépassés entre la classe ouvrière et l'oligarchie financière et de la contradiction entre le caractère socialisé de l'économie et son contrôle par des intérêts privés concurrents, qui sont la racine du problème de l'inégalité et du manque de pouvoir des travailleurs face à leurs conditions. Ceux qui travaillent et vendent leur capacité de travail aux riches n'ont aucun contrôle économique ou politique sur l'économie et n'ont accès qu'à la partie de la valeur nouvelle qu'ils produisent qui leur est versée en salaires et par les programmes sociaux qui existent en échange de leur capacité à travailler.

Les riches qui possèdent et contrôlent les forces productives, la direction de l'économie et le système politique de partis cartellisés des partis démocrate et républicain exproprient la valeur ajoutée de la valeur nouvelle que les travailleurs produisent. La fiscalité est devenue un moyen général de l'oligarchie financière pour reprendre aux travailleurs ce qui leur a été payé en échange de leur capacité de travailler. L'élite dirigeante des factions concurrentes de l'oligarchie financière et leurs représentants politiques contrôlent la manière dont cette valeur est distribuée et utilisée. Les rapports de production dominants dictent le contrôle des impérialistes dominants sur l'économie et sa direction. La politique du système de partis cartellisés des partis démocrate et républicain reflète le contrôle et la domination des factions concurrentes de l'élite dirigeante.

La plupart des programmes sociaux, comme l'éducation et les soins de santé, augmentent la valeur de la capacité de travailler de la classe ouvrière. Les entreprises qui consomment cette valeur devraient la payer non pas sous forme d'impôts, mais en payant directement les institutions qui produisent la valeur. Pour accroître la valeur reproduite individuelle et sociale, il faut prendre des mesures pour accroître les investissements dans les programmes sociaux et les services publics gratuits, augmenter les salaires, les pensions et les avantages sociaux des travailleurs, arrêter de payer les riches et donner une nouvelle orientation antiguerre et prosociale à l'économie.

La classe ouvrière des États-Unis fait face à une lutte de classe pour s'organiser comme force sociale viable capable de défendre ses droits, d'obliger les riches à augmenter la valeur reproduite que les travailleurs reçoivent en échange de leur capacité de travail et, par sa propre politique indépendante, d'ouvrir la voie du renouveau démocratique et à une nouvelle direction de l'économie.

Le programme politique indépendant et le projet d'édification de la nation de la classe ouvrière et de ses alliés pour se donner le pouvoir par le renouveau démocratique doivent comprendre l'augmentation des investissements dans les programmes sociaux et des services publics gratuits pour garantir les droits de tous et de toutes, ainsi que des actions pour arrêter de payer les riches et pour démanteler l'économie de guerre et donner à l'économie une nouvelle direction prosociale. Cela peut être accompli par le développement de la politique indépendante organisée de la classe ouvrière et de sa propre pensée, conception du monde et ordre du jour contre la politique, la conception du monde et l'ordre du jour des riches et leur système politique de partis cartellisés des factions concurrentes de l'oligarchie financière.

La classe ouvrière et ses alliés doivent développer leur propre politique indépendante, leurs médias, leur voix et leur personnalité démocratique. Ils ne peuvent pas compter sur les riches et leurs représentants politiques du système de partis cartellisés et des médias de masse pour agir ou parler en leur nom, pour résoudre les problèmes sociaux auxquels le pays fait face, donner une nouvelle direction prosociale et antiguerre à l'économie et au pays et ouvrir la voie à l'émancipation de la classe ouvrière.

(VOR, 13 décembre 2019. Traduction: LML. Photos : VOR, Future Boston All)


Cet article est paru dans

Volume 49 Numéro 41 - 21 décembre 2019

Lien de l'article:
La détérioration des conditions sociales Aux États-Unis - Voice of Revolution


    

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