États-Unis

La procédure de destitution, la responsabilisation et la bataille de la démocratie

Le 18 décembre 2019, la Chambre des représentants, où les représentants du Parti démocrate sont majoritaires, a voté pour la destitution du président Donald Trump en adoptant deux motions : dans l'une, Trump est accusé d'abus de pouvoir et dans l'autre d'obstruction au Congrès. Selon le Règlement du Sénat, un procès de destitution commence le lendemain du jour où la Chambre dépose les articles de destitution à moins que ce jour ne soit un dimanche. Une fois que le Sénat est saisi, il doit d'abord voter sur les règles pour le procès de destitution et déterminer quels seront les témoins appelés/autorisés à comparaître. Les républicains détiennent une majorité de 53-47 au Sénat, et 67 voix sont nécessaires pour condamner un président.

Toutefois, après avoir voté la mise en accusation du président, les démocrates à la Chambre ont pris la décision de retarder la transmission des chefs d'accusation au Sénat. La présidente de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, a parlé de la crainte que les républicains qui dominent le Sénat ne tiennent pas un « procès équitable ». En clair, les démocrates ne sont ni d'accord avec les règles que les républicains cherchent à établir pour le procès au Sénat, ni avec les témoins proposés, s'il y en a. C'est la première fois qu'une procédure de destitution d'un président est entamée alors que les deux chambres du Congrès ne sont pas dominées par le même parti. Il n'est pas clair si les tractations qui ont lieu donneront satisfaction à l'un ou l'autre des partis dans cette affaire. Étant donné la façon dont les factions rivales parmi les dirigeants et leurs représentants s'alignent actuellement, peu de gens pensent que la destitution du président réussira. Entre temps les deux chambres devraient prendre un congé de deux semaines pour la période des fêtes.

Cependant, il ressort clairement du spectacle qui se donne à la Chambre des représentants que la procédure de destitution ne force pas le président à rendre compte de ses actes et que le tout sert à priver le peuple américain d'un point de vue qui favorise sa lutte pour s'investir du pouvoir.

« Le président doit rendre des comptes, personne n'est au-dessus de la loi », a annoncé Nancy Pelosi. La procédure de destitution est présentée comme un mécanisme qui permet d'exiger des comptes et, plus généralement, cette procédure est censée envoyer le message au public que le « système fonctionne » et qu'il n'est pas nécessaire de lutter pour de nouveaux arrangements.

En fait, les dispositions actuelles ne règlent pas les luttes intestines entre les factions de la classe dirigeante. Le scénario deguerre civile entre les factions dirigeantes aux États-Unis, ainsi que les chefs d'accusation très limités de destitution qui sont présentés - abus de pouvoir, mais seulement en ce qui concerne l'affaire Ukraine/Biden, et obstruction de la justice - font douter que la procédure de destitution obligera le président Trump à rendre des comptes.

Cela est particulièrement vrai en ce qui concerne les crimes qui préoccupent le plus le peuple, qui sont complètement absents des chefs d'accusation bien que les preuves soient accablantes. Il s'agit notamment des actes criminels de séparation des familles et des camps d'internement des enfants, même de bébés. Il y a également les crimes de guerre, ceux commis contre le Yémen, l'Irak et l'Afghanistan avec l'utilisation de drones et d'armes chimiques et d'autres armements. Ils comprennent la punition collective de populations entières en utilisant des sanctions comme celles imposées au Venezuela, à Cuba, à la République populaire démocratique de Corée, à l'Iran et à bien d'autres pays.

Voice of Revolution, le journal de l'Organisation marxiste-léniniste des États-Unis, indique que les gens à travers le pays, ainsi que ceux qui résident à l'étranger, mènent des batailles pour les droits et exigent des changements sur ces questions.[1] On lit dans le journal :

« La procédure de destitution ne force pas le gouvernement à rendre des comptes alors qu'il refuse de le faire. Parmi les nombreuses actions qui ont eu lieu, on compte les manifestations aux États-Unis et les milliers d'autres internationalement pour défendre la Terre Mère le 29 novembre et la poursuite des manifestations hebdomadaires partout à travers le pays, la continuation des actions communes des deux côtés de la frontière sud pour défendre les migrants ainsi que le récent verdict de non-culpabilité d'un militant qui a aidé deux jeunes migrants à traverser le désert en Arizona, les actions contre la guerre, notamment contre l'OTAN à Londres, à New York et ailleurs, les grèves des enseignants qui prennent leurs responsabilités sociales sur des problèmes comme l'itinérance et le manque de conseillers et d'infirmières dans leurs écoles et bien d'autres encore.

« Ces batailles pour la démocratie contribuent aux efforts déployés partout au pays pour faire entendre la voix des revendications du peuple et pour l'affirmation de ses droits. Elles mettent en évidence également la question centrale de la bataille de la démocratie d'aujourd'hui, de qui décide, la minorité ou la majorité ? La bataille de la démocratie est la bataille pour faire avancer le contenu et la forme de la démocratie et mettre en place les institutions qui la servent pour qu'elle corresponde à l'époque moderne. Il faut donner au peuple, à la majorité, le pouvoir de gouverner et de décider. C'est cette démocratie qui mettrait en place les moyens pour que soit respectée la volonté antiguerre et prosociale du peuple qu'expriment les nombreuses actions, réunions, pétitions, grèves. C'est précisément ce que les dirigeants s'efforcent d'empêcher. La procédure de destitution fait partie de cet effort visant à entraîner tout le monde à prendre parti pour et contre pour un camp ou l'autre, tout en tentant de détourner la lutte du peuple pour devenir lui-même le décideur.

« La démocratie à l'américaine assure la domination d'une petite minorité sur la majorité, problème que la destitution ne résoudra pas. Elle ne règle pas non plus le problème de la responsabilisation. La Constitution et la loi actuelle ne prévoient aucun mécanisme qui permette au peuple de tenir le président responsable de ses crimes. Le ministère de la Justice dit depuis longtemps qu'il est inconstitutionnel de porter des accusations contre un président en exercice et il ne l'a pas fait. Un citoyen ne peut pas non plus arrêter un président en exercice, car une telle tentative serait bloquée par les services secrets et des accusations portées contre le citoyen.

« La nécessité d'un mécanisme par lequel le peuple peut tenir le président responsable des crimes amène au premier plan la nécessité de faire avancer la bataille de la démocratie - la bataille pour de nouvelles institutions de gouvernance, une nouvelle constitution, qui inclut la responsabilisation. Les gens n'aiment pas du tout le fait que le gouvernement, en particulier le président, ait la capacité de commettre des crimes en toute impunité. Même les élections, qui permettraient, dit-on, de régler ce problème, ne permettent pas de porter des accusations criminelles. En effet, comme la destitution, il s'agit d'un autre mécanisme où le peuple ne décide pas du résultat ; le résultat est décidé par la minorité qui domine.

« La bataille de la démocratie est la lutte pour le pouvoir politique, la bataille pour de nouveaux arrangements qui permettent au peuple de gouverner et de décider. Une nouvelle constitution et les nouvelles institutions devraient servir à harmoniser les relations humaines du présent, l'ensemble des relations entre les êtres humains et entre les êtres humains et la nature. L'harmonisation et la responsabilisation sont interreliées et c'est pourquoi cette question doit également être abordée. Les pas faits aujourd'hui dans cette direction comprennent l'intensification des luttes organisées pour que le peuple, les individus et les collectifs qui le composent, puissent s'exprimer en leur nom, exprimer leurs préoccupations et défendre leur propre ordre du jour pour apporter les changements nécessaires. Cela comprend la discussion et le débat sur le problème de l'imputabilité, ce qu'il faut pour la rendre possible et comment y parvenir en rapport avec l'avancement de la bataille du peuple pour gouverner et prendre des décisions. »

Note

1. Voice of Revolution, 13 décembre 2019


Cet article est paru dans

Volume 49 Numéro 41 - 21 décembre 2019

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États-Unis: La procédure de destitution, la Responsabilisation Et la bataille de la démocratie


    

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