Le soleil ne se couche jamais sur les Forces armées canadiennes
- Yves Engler -
La plupart des Canadiens seraient surpris
d'apprendre que le soleil ne se couche jamais sur
les Forces armées dont ils sont les contribuables.
Ce pays n'est pas officiellement en guerre et
pourtant plus de 2 100 soldats canadiens
sont déployés ici et là dans le monde. Selon les
Forces armées, ces soldats participent à 28
missions internationales.
Il y a 850
troupes canadiennes en Irak et dans les environs.
Deux cents membres de forces spéciales hautement
qualifiées ont formé des forces kurdes et leur
fournissent du soutien au combat, ces mêmes forces
qui sont souvent accusées de nettoyage ethnique
dans les régions de l'Irak qu'elles ont capturées.
Un détachement d'hélicoptères tactiques, des
officiers du renseignement et un hôpital militaire
ainsi que 200 Canadiens, à partir d'une base
au Koweït, appuient les forces spéciales en Irak.
Avec la mission des forces spéciales, le Canada
commande la mission de l'OTAN en Irak. La
brigadière générale Jennie Carigan commande près
de 600 soldats de l'OTAN, dont 250
Canadiens.
Un nombre comparable de troupes est stationné sur
les frontières de la Russie. Près de 600
Canadiens font partie d'une mission de l'OTAN
dirigée par le Canada en Lettonie et 200
soldats font partie d'un projet de formation en
Ukraine. Soixante-quinze membres du personnel des
Forces armées canadiennes sont présentement en
Roumanie.
Certaines opérations plus limitées sont cependant
hautement politiques. Sous l'égide d'Opération
Proteus, une douzaine de soldats contribuent au
Bureau de coordination de sécurité des États-Unis,
un soutien à l'appareil de sécurité mis en place
pour protéger l'Autorité palestinienne de la
colère populaire en raison de son acquiescement à
la colonisation israélienne continue.
Par le biais de l'Opération Fondation, 15
soldats contribuent aux efforts anti-terroristes
des États-Unis en Moyen-Orient, en Afrique du Nord
et en Asie du Sud-Ouest. En tant que participant à
l'Opération Fondation, le brigadier-général A.R.
Day, par exemple, dirige le Centre d'opérations
aérospatiales conjointes dans la base de l'armée
américaine d'Al Udeid au Qatar.
Au nombre des 2 100 soldats mentionnés
par l'armée, il faut ajouter les centaines, sinon
les milliers, de membres du personnel naval qui
patrouillent les points chauds partout dans le
monde. Récemment, un ou deux navires canadiens —
avec près de 200 membres du personnel chacun
— ont patrouillé l'Asie de l'Est. Les navires
apportent un renfort à la campagne des États-Unis
pour isoler la Corée du nord et appliquer les
sanctions de l'ONU. Ces navires canadiens ont
aussi participé à des exercices belliqueux «
liberté de naviguer » dans les eaux
internationales que revendique Pékin dans le sud
de la mer de Chine, le détroit de Taiwan et l'est
de la mer de Chine.
Un navire canadien patrouille aussi la mer
d'Arabie et le golfe Persique. Récemment, des
navires canadiens sont aussi entrés dans la mer
Noire, aux frontières de la Russie. Des navires
canadiens sont aussi fréquemment déployés dans les
Caraïbes.
Il faut ajouter aux 2 100 soldats les
colonels appuyés par des sergents et parfois un
second officier qui sont des attachés militaires
basés dans 30 postes diplomatiques partout
dans le monde (et qui ont des accréditations
transfrontalières dans les pays voisins).
Aussi, 150 membres du personnel militaire
sont stationnés dans le quartier général du
Commandement de défense aérospatiale de l'Amérique
du Nord au Colorado et un nombre plus restreint au
centre de NORAD près de Tampa Bay, en Floride. Ces
bases soutiennent des frappes américaines dans
plusieurs endroits.
Des dizaines de soldats canadiens sont stationnés
dans les quartiers généraux de l'OTAN à Bruxelles.
Ils assistent cette organisation dans ses
déploiements internationaux.
Il est possible qu'il y ait des déploiements qui
ne sont pas mentionnés ici. Des dizaines de
soldats canadiens participent à des programmes
d'échange avec les États-Unis et d'autres armées
et certains pourraient participer à des
déploiements à l'étranger. Aussi, les forces
spéciales canadiennes peuvent être déployées sans
que cela soit rendu public, comme cela s'est
produit à de nombreuses reprises.
L'ampleur de l'intervention militaire
internationale est incompatible avec l'idée d'une
force qui défend le Canada. C'est pourquoi des
représentants militaires parlent de l'importance
d'une « défense vers l'avant ». Selon Protection,
sécurité Engagement, qui énonce la politique
de défense du gouvernement canadien de 2017,
le Canada doit « répondre activement aux menaces à
l'étranger pour assurer la stabilité au
pays » et « la défense du Canada et des
intérêts canadiens requiert [...] un engagement
actif à l'étranger ».
Évidemment, cette logique peut servir à justifier
la participation du Canada à d'infinies activités
militaires dirigées par les États-Unis. Voilà la
vraie raison pour laquelle le soleil ne se couche
jamais sur les Forces armées canadiennes.
Cet article est paru dans
Volume 49 Numéro 41 - 21 décembre 2019
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