Le nouveau cabinet du gouvernement libéral et la politique de l'absurde

Le gouvernement Trudeau a créé un ministère de la Prospérité de la classe moyenne et nommé la députée d'Ottawa-Vanier, Mona Fortier, au poste de ministre.[1] Dans une interview accordée à l'émission The Current de la CBC Radio, la ministre a dit qu'elle n'avait pas encore reçu sa lettre de mandat du premier ministre et qu'elle ne pouvait donc pas parler de ce que son ministère fera. L'intervieweuse lui a demandé de définir la classe moyenne et, selon la transcription de l'entrevue donnée par la CBC, elle a répondu : « Eh bien, nous savons que nous voulons une économie très forte pour tous. Et pour avoir une classe moyenne forte, il faudra continuer à mettre en place des mesures et à aider ceux qui veulent rejoindre la classe moyenne à avoir accès à ces programmes. »

Puis : « Eh bien, je définis la classe moyenne comme étant ceux qui peuvent se permettre leur mode de vie. Ils ont une qualité de vie. Et ils peuvent envoyer leurs enfants jouer au hockey ou participer à différentes activités.

« C'est avoir un coût de la vie où vous et votre famille pouvez faire ce que vous voulez. Je pense donc qu'il est vraiment important que nous examinions comment nous pouvons rendre notre vie plus abordable maintenant.

« Et c'est, pour moi, quelque chose pour laquelle nous allons mettre en place des mesures et faire de réels efforts, avec mes collègues, pour avoir une économie forte. »

Le baragouinage de la ministre de la Prospérité de la classe moyenne s'explique par l'idéologie intéressée et frauduleuse de l'élite dirigeante et la non-pertinence de son poste, qui n'est qu'un artifice pour qu'une femme siège au Cabinet. Puisque son expérience est surtout dans le domaine des communications, Fortier pourrait avoir été choisie pour son habileté à dire des choses et à détourner l'attention de la réalité des crises économiques récurrentes et du fait que l'oligarchie financière a donné au gouvernement Trudeau le mandat de payer les riches et non pas d'accroître l'affluence et l'influence des membres de la classe ouvrière mieux rémunérés qui sont en fait poussés dans une insécurité de plus en plus grande.

Les femmes ne peuvent atteindre la dignité quand elles se laissent manipuler dans la conviction aristocratique que déformer les conditions concrètes peut faire disparaître des problèmes, tels que la crise économique cyclique imminente ou la guerre qui bouleversent la vie de tout le monde. Dire des sottises à propos d'une prétendue classe moyenne pour perpétuer la perception d'abondance des travailleurs, qui auraient un certain contrôle sur leur vie puisqu'ils peuvent inscrire leurs enfants au hockey, n'aide pas lorsque l'oligarchie financière attaque ces mêmes travailleurs avec des demandes de concessions ou détruit leurs moyens de subsistance, comme cela a été le cas dans de nombreux secteurs manufacturiers et maintenant dans l'industrie forestière en Colombie-Britannique. La capacité de bien parler ne change pas le fait que les partis cartels, y compris le Parti libéral de Trudeau et son gouvernement minoritaire, ne peuvent pas avoir à coeur les intérêts de la vaste majorité des travailleurs canadiens puisqu'ils représentent l'oligarchie financière et obéissent à ses ordres.

Le système des partis cartels a concentré le pouvoir dans le bureau du premier ministre, qui agit pour le compte de puissants intérêts privés. Les Canadiens ont assisté à une démonstration brutale de la force du cabinet du premier ministre lorsque Trudeau a limogé deux femmes ministres de son cabinet précédent, la ministre de la Justice et la présidente du Conseil du Trésor, car elles ne voulaient pas garder le silence sur ce qu'elles considéraient être un arrangement corrompu en développement avec SNC-Lavalin pour lui éviter des poursuites pénales.

Le système des partis cartels rabaisse le niveau de l'activité et du discours politiques. L'antidote est que les travailleurs et leurs alliés s'affirment, deviennent des acteurs politiques de plein droit et s'expriment politiquement avec leur voix, leur pensée et leur programme. Être un acteur politique de plein droit signifie s'unir aux autres pour s'attaquer aux problèmes économiques, politiques et sociaux tels qu'ils se présentent dans leur réalité objective et lutter pour des solutions qui favorisent les intérêts des travailleurs et du peuple, assument la responsabilité sociale et contribuent à l'édification nationale.

Les femmes sont confrontées à des problèmes particuliers en tant que reproductrices de la vie et victimes d'abus ; elles doivent défendre leur dignité en tant que femmes en étant politiques et informées. Elles doivent se joindre à d'autres dans une lutte organisée pour affirmer notre droit à tous d'exercer un contrôle sur les décisions qui nous affectent. La lutte pour affirmer ce droit en pratique apporte l'affirmation, le pouvoir et la dignité.

Être un acteur politique à part entière sur les questions qui touchent votre vie fait avancer le facteur humain/conscience sociale dans la bataille pour le renouveau démocratique. Être un acteur politique à part entière façonne positivement la personnalité démocratique de tous ceux qui sont activement engagés dans cette lutte.

À titre d'information : la classe ouvrière canadienne

La classe ouvrière canadienne est de loin la classe sociale la plus nombreuse. Elle existe dans une relation sociale dialectique avec l'oligarchie financière. La classe ouvrière vend sa capacité de travail à l'oligarchie financière. Par ce fait, les oligarques prennent le contrôle de la valeur d'usage de la capacité de travail et prennent aussi le contrôle de ce que les travailleurs produisent. L'oligarchie financière représente une infime minorité de la population qui s'est constituée en une classe sociale supranationale sans attachement particulier au Canada, si ce n'est comme exploiteuse de ses ressources naturelles, de ses moyens de production et de sa classe ouvrière.

Dans le cadre de cette relation sociale oppressive, les travailleurs doivent s'organiser pour se défendre et pour défendre leurs droits et leur bien-être. Cela signifie qu'ils doivent s'organiser pour se donner un pouvoir par une activité politique indépendante qui vise le renouveau démocratique et pour développer et diffuser leur conscience sociale avancée et leurs institutions indépendantes, de sorte que la classe ouvrière devienne une force sociale invincible tant dans la défense de ses droits que dans la construction du nouveau.

La lutte de classe dans ce rapport social avec l'oligarchie financière comprend une mobilisation politique de masse des travailleurs et de leurs alliés pour le renouveau démocratique et une nouvelle direction pour l'économie pour que l'État arrête de payer les riches et augmente les investissements dans les programmes sociaux et les services publics et pour faire du Canada une zone de paix avec un gouvernement antiguerre.

En construisant le nouveau, la classe ouvrière a la responsabilité sociale historique de vaincre sa relation sociale oppressive avec l'oligarchie financière et de lui nier son rôle de classe sociale dominante qui gagne sa vie en achetant la capacité de travail de la classe ouvrière.

En se libérant de la relation sociale oppressive avec l'oligarchie financière, la classe ouvrière se renouvelle avec une personnalité démocratique distincte, en tant que classe sociale contrôlant l'économie et se dotant d'une politique d'édification nationale. La nouvelle classe qui contrôle sa capacité de travail et ce qu'elle produit a la responsabilité sociale de faire progresser la société vers l'émancipation complète de la classe ouvrière et l'élimination de la société de classes non seulement au Canada, mais dans le monde entier en unité avec toute l'humanité.

Le rapport social entre la classe ouvrière et l'oligarchie financière

La classe sociale est définie en fonction de comment un groupe de personnes gagne sa vie dans un rapport avec d'autres durant une période historique donnée et dans un mode de production donné. Durant la période romaine classique de l'esclavage, il y avait les maîtres et les esclaves et dans le mode de production médiéval, le rapport social entre les paysans et les seigneurs. Les classes sociales naissent et disparaissent avec le développement des forces productives et les transformations révolutionnaires du mode de production.

Le terme « classe moyenne » est apparu à l'époque médiévale ou féodale, lorsque, comme produit du développement des forces productives, une classe sociale est apparue qui a acquis la capacité d'acheter la capacité de travail des autres en dehors des stricts rapports de production et des lois de l'époque médiévale.

Les progrès des méthodes de production dans l'agriculture et la fabrication ont remis en cause la petite production du mode féodal et ses rapports sociaux. Ces développements ont libéré de nombreux paysans et compagnons des rapports de production traditionnels. Pour survivre, ceux qui se sont retrouvés sans terre ou sans corporation ont commencé à vendre leur capacité de travailler quotidiennement ou régulièrement à ceux qui avaient acquis les moyens matériels et financiers de l'acheter. Ainsi a commencé la longue relation sociale entre une petite classe sociale constituée de ceux qui achètent la capacité de travail des autres et le grand nombre de ceux qui vendent leur capacité de travail pour gagner leur vie.

À l'époque médiévale, l'aristocratie féodale était généralement désignée par le terme classe supérieure, tandis que les masses essentiellement pauvres, notamment les paysans, les compagnons et les ouvriers de métier et d'autres, étaient généralement appelées classes inférieures.

Le terme classe moyenne s'est associé à ceux qui avaient acquis les moyens d'acheter la capacité de travailler en dehors des règles et des lois du régime médiéval, et souvent en opposition à eux. Les membres de la classe moyenne émergente n'étant ni de nobles aristocrates ni des paysans de classe inférieure, ils ont acquis le nom de classe moyenne au sens courant du terme.

Une caractéristique importante de cette nouvelle classe moyenne sociale était qu'elle n'existait que dans un rapport avec une nouvelle classe sociale émergente qui n'avait ni terre ni position héréditaire, qui n'avait que sa capacité de travail. Cette classe sociale était « libre » de vendre à la classe moyenne sa capacité de travailler à l'heure, à la journée, ou à terme parce qu'elle était « affranchie » de la terre et de toute autre possession matérielle productive en dehors des limites féodales.

Les nouveaux rapports de production entre ceux qui achetaient la capacité de travail des autres et ceux qui vendaient leur capacité de travail se sont développés principalement dans des zones urbaines protégées ou dans des villes marchandes devenues des centres d'opposition au contrôle féodal. Les villes étaient connues en Europe dans plusieurs langues sous le nom de « bourg » et les membres de la classe moyenne qui dominaient les « bourgs » sont devenus les « bourgeois ».

Avec l'invention de la machine à vapeur et son application à la production, la grande production industrielle a rapidement supplanté la petite production féodale et a vite fait de la classe ouvrière, principalement issue de la paysannerie ruinée, la classe sociale la plus nombreuse. Après le renversement politique de l'élite dirigeante féodale, la bourgeoisie ou « classe moyenne » a pris le contrôle de l'État et de la société et est devenue la classe dirigeante. La classe supérieure constituée de l'aristocratie foncière a depuis été intégrée ou bien à la nouvelle élite dirigeante, ou bien à la classe ouvrière. Les rapports de production se sont simplifiés en deux grandes classes : ceux qui vendent leur capacité de travail, la classe ouvrière, et ceux qui achètent la capacité de travail de la classe ouvrière, la bourgeoisie, qui ne pouvait plus être considérée comme une classe moyenne.

La période naissante des rapports de production entre la classe ouvrière et la bourgeoisie a vite cédé la place à l'impérialisme. La richesse sociale s'est concentrée entre les mains d'un nombre de plus en plus restreint de personnes et les secteurs financier et industriel ont fusionné et se sont répandus au monde entier, transformant la bourgeoisie en une puissante minorité de dirigeants appelée oligarchie financière. La classe ouvrière est devenue instruite et a acquis l'expérience de la lutte de classe en s'engageant dans ses propres projets d'édification nationale en Union soviétique et ailleurs et par d'innombrables batailles pour défendre ses intérêts et ses droits à l'intérieur du système impérialiste d'États. La classe ouvrière est sur le point de mettre fin à sa relation sociale oppressive avec l'oligarchie financière par la révolution.

Aucune classe moyenne n'existe entre les deux principales classes sociales sous l'impérialisme. Un petit groupe de personnes sans stabilité a un pied dans chaque classe sociale. D'autres personnes extrêmement vulnérables qui ne peuvent plus travailler pour diverses raisons peuvent subir ce qu'on appelle une mort civile sans autre moyen de gagner leur vie que par le biais d'organismes de bienfaisance, de programmes sociaux ou par d'autres moyens.

Les conditions objectives existent pour résoudre le rapport social dialectique entre la classe ouvrière et l'oligarchie financière et faire progresser la société vers l'émancipation de la classe ouvrière et l'élimination des classes sociales. Cette révolution sociale ne peut être accomplie que par les efforts de la classe ouvrière elle-même en préparant les conditions subjectives de la révolution et en résolvant ainsi le rapport social dialectique avec l'oligarchie financière.

Note

1. Selon des informations sur le site Web du gouvernement du Canada, la ministre de la Prospérité de la classe moyenne, Mona Fortier, a été élue pour la première fois à la Chambre des communes lors d'une élection partielle en 2017. Avant de se lancer en politique, elle a siégé sur plusieurs conseils d'administration d'organismes à but non lucratif et a été directrice des communications pour un collège francophone à Ottawa jusqu'en 2015, année où elle a créé et géré sa propre entreprise de conseil en communications. Elle était coprésidente de la plateforme de campagne 2019 du Parti libéral.


Cet article est paru dans

Volume 49 Numéro 33 - 30 novembre 2019

Lien de l'article:
Le nouveau cabinet du gouvernement libéral et la Politique de l'absurde - K.C. Adams


    

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