Debout avec Haïti! Justice, dignité et réparations, réclament les manifestants

Le dimanche 17 novembre à Montréal, près de 200 personnes de la communauté haïtienne et leurs nombreux alliés ont marché dans les rues de Montréal pour dénoncer l'ingérence des puissances étrangères, dont le Canada, en Haïti et leur soutien au gouvernement corrompu de Jovenel Moïse. L'action organisée par Solidarité Québec-Haïti voulait aussi souligner l'héroïque lutte du peuple haïtien pour son droit d'être. Les slogans Justice ! Dignité ! Réparations ! ont retenti tout au long de la marche.

Au début et à la fin de la marche qui s'est terminée devant le consulat haïtien, iI y a eu de nombreuses interventions. Tous ont parlé d'une seule et même voix pour dénoncer l'ingérence étrangère en Haïti dont celle du gouvernement canadien. Le peuple haïtien n'est pas un peuple misérable et asservi, ont-ils dit. C'est un peuple fier et digne qui a toutes les capacités de diriger son pays. Ce qui l'en empêche, ce sont les gouvernements corrompus imposés par les puissances néolibérales. À plusieurs reprises, les slogans et les interventions ont dénoncé les prétendus sauveurs avec leur aide intéressée pour imposer l'asservissement du peuple haïtien. « Nous sommes ici pour défendre la cause juste du peuple haïtien. Il y a des pays, les États-Unis, le Canada et la France qui disent que nous avons choisi le gouvernement en place. C'est faux. Nous ne l'avons pas choisi. Depuis plus de deux mois, le peuple haïtien est dans la rue. Il y a eu plus 300 morts. Les écoles sont fermées. Et ici, le Canada continue de dire que nous les avons choisis. Ce sont des faux amis et des amis comme cela, on n'en a pas besoin. », a dit un des intervenants.

Une autre intervenante a dit : « On veut dénoncer le sale rôle du gouvernement canadien en Haïti et l'hypocrisie de ce gouvernement. Il a financé l'élection en Haïti à coup de millions, une ingérence totale dans les affaires d'un pays, alors que durant l'élection fédérale, il n'a cessé de faire des sorties contre les dangers de l'ingérence étrangère dans l'élection. En 2004, il a été impliqué dans le coup d'État contre le président Aristide avec les États-Unis et la France. La politique étrangère ne nous appartient pas et ne nous représente pas. C'est à nous de décider quelle sorte de relation on veut avec les autres pays. Nous avons une responsabilité de nous adresser à la politique étrangère canadienne alors que le gouvernement est impliqué contre la Bolivie, le Venezuela, et d'autres. »

Un hommage a été rendu aux jeunes, aux femmes et aux travailleurs décédés depuis le début des soulèvements en Haïti, de même qu'à tous ceux et celles qui sont morts sous le duvaliérisme. « Aujourd'hui, c'est la troisième édition du duvaliérisme. Nous avons une responsabilité. On ne peut rester silencieux car des gens tirent avantage de ce silence. Nous devons dire à ceux qui sont là pour nous représenter ici au Canada, montrez que vous êtes Haïtiens quand vous avez un pouvoir d'influence. » a dit un des organisateurs de Solidarité, Frantz André. Il a salué la jeunesse haïtienne aujourd'hui qui se bat et qui nous donne espoir.

Plusieurs ont pris la parole pour saluer la bataille de Vertières, le 18 novembre 1803, dont le 216e anniversaire allait être célébré le lendemain de la marche. Cette bataille dirigée par Jean-Jacques Dessalines pour libérer le peuple haïtien de l'esclavage et mettre fin au pouvoir colonial a signifié la mise en déroute et la défaite de l'armée napoléonienne. Elle a signifié l'élimination de l'esclavage et a mené à la proclamation de l'indépendance haïtienne et la formation de la première république noire au monde, la République d'Haïti le 1er janvier 1804. Aujourd'hui, cette bataille n'est pas terminée.

Un autre intervenant a dit : « Est-ce que le peuple haïtien a droit à la santé, à l'éducation et à la dignité ? Oui. C'est cela que nous demandons à ces puissances impérialistes qui soutiennent le gouvernement en Haïti et qui nous dénient toute forme d'humanité, qui dénient le droit d'être des êtres humains comme tous les peuples sur la terre. Aussi longtemps que ce peuple n'a pas droit à son humanité et à sa dignité, on doit continuer ce combat. Pourquoi Jovenel Moïse est toujours en Haïti ? C'est qu'il a soutenu et soutient les puissances étrangères qui ne veulent pas de changements en Haïti. Le peuple haïtien a droit à la dignité, le droit d'être maître chez lui et le droit à la souveraineté. Nous avons le droit de le demander et de demander aux gouvernements étrangers, canadien, français, étasunien de ne pas s'ingérer dans les affaires intérieures de notre pays. Ils s'ingèrent et après ils disent que c'est nous qui sommes responsables de la situation en Haïti, c'est nous le peuple haïtien qui sommes corrompus. On appelle cela l'« aide au développement » et, derrière toute cette mascarade, se trouvent des mains qui tiennent les ficelles de la misère en Haïti. Le peuple haïtien n'est pas responsable. Il faut continuer le combat jusqu'au bout. Vive la lutte du peuple haïtien ! »

Un activiste a invité tous les manifestants à la projection du film « Haïti portrayed » de Elaine Brière le dimanche 24 novembre à 18 h à la maison d'Haïti. Le film parle du rôle du gouvernement canadien en Haïti. Ce sera l'occasion de s'instruire, de poursuivre les discussions et d'échanger sur la politique étrangère canadienne qui doit changer de direction.



(Photos: TML)


Cet article est paru dans

Volume 49 Numéro 33 - 30 novembre 2019

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