Les récents développements en Amérique latine et dans les Caraïbes

Résistance grandissante à la destruction néolibérale, la terreur d'État et aux coups d'État d'inspiration impérialiste


Marche à Anzoategui, au Venezuela, le 15 novembre 2019, en appui à Evo Morales
et pour dénoncer le coup d'État en Bolivie

Au cours des deux dernières semaines, les peuples bolivien et chilien ont poursuivi leurs luttes courageuses pour faire valoir leurs droits face à la répression brutale des forces de l'État. Le 21 novembre, ils ont été rejoints par les Colombiens qui ont organisé une grande grève nationale dans des villes et villages du pays contre l'offensive antisociale du gouvernement néolibéral et belliciste d'Ivan Duque. Ils ont également affronté la réaction violente de l'armée et de la police militarisée, en particulier de la détestée escouade antiémeute. De grandes manifestations se sont poursuivies tous les jours depuis.

À mesure que la confrontation de l'ancien et du nouveau s'intensifie dans la région, les jeunes et les travailleurs en particulier relèvent le défi et sont en train de convaincre les couches intermédiaires de rejoindre la cause de ceux qui se battent pour leurs droits et les droits de tous. Cela se voit par le fait que toutes les tentatives des oligarques soutenus par l'étranger de prendre des mesures exceptionnelles et d'utiliser leur monopole du pouvoir d'État pour terroriser les forces du peuple dans l'espoir de les soumettre ne fonctionnent pas. Les meurtres, les blessures infligées, les détentions arbitraires, les disparitions et les persécutions sous toutes leurs formes n'ont servi qu'à accroître l'indignation du peuple et sa détermination à continuer de résister et de faire pression pour que ses revendications soient satisfaites et que justice soit rendue.

Chili


Banderole à la manifestation du 16 novembre 2019 à Santiago, au Chili, disant :
« Le Chili sera le tombeau du néolibéralisme ».

Une grève générale a eu lieu les 26 et 27 novembre, la troisième depuis le début des manifestations de masse il y a six semaines. Les travailleurs de différents secteurs de l'économie ont rejoint les mouvements sociaux et les forces politiques organisés sous la forme d'une table ronde sur l'unité sociale pour défiler à Santiago et dans d'autres villes et établir des barrages routiers dans certaines zones. Des centaines de milliers de travailleurs y auraient participé, y compris ceux des mines, des installations portuaires, de l'éducation et du transport.

Le secrétaire général de la Centrale des travailleurs unitaire du Chili, Nolberto Diaz, a déclaré que la grève avait été déclenchée parce que le gouvernement, contrairement à ce qu'il avait annoncé, n'avait engagé aucun dialogue avec les mouvements sociaux ni répondu à leurs demandes, ajoutant que si Piñera et les parlementaires étaient incapables de trouver une solution à la demande des Chiliens, ils devraient se retirer et organiser des élections anticipées.

Gabriela Flores, présidente de la Fédération nationale des fonctionnaires municipaux de la santé, a déclaré : « Nous, les travailleurs, ne resterons pas assis les bras croisés, pas plus que la population. Comment est-il possible que les conseillers [de Piñera] soient si aveugles et sourds qu'ils n'entendent pas ce que le peuple demande et se contentent de faire adopter des lois pour accroître la répression ? »

Le 26 novembre, le jour où le ministère de l'Intérieur a annoncé que la police avait arrêté 915 personnes, Piñera a présenté un projet de loi autorisant le recours à l'armée pour « protéger les infrastructures publiques critiques » (largement interprété par leur retour dans les rues) sans avoir besoin de déclarer un état d'exception comme il était obligé de le faire lorsqu'il militarisait les rues en prévision des premières actions de protestation du 18 octobre. Peu après, durant neuf jours, les forces armées ont agi au côté de la police (carabineros), faisant usage de la force létale, de la torture, du viol et d'autres mesures extrêmes, en particulier contre les jeunes que le président décrit comme l'ennemi à vaincre.

Au cours des dix derniers jours, Amnestie Internationale et Human Rights Watch ont tous deux publié des rapports accablants faisant état de la brutalité avec laquelle la police et l'armée chiliennes ont attaqué les manifestants et d'autres personnes qui se trouvaient tout simplement à proximité d'actions dans les rues, pendant et après la levée de l'état d'exception. Dans une déclaration publiée le 21 novembre, Amnestie Internationale écrit :

« L'intention des forces de sécurité chiliennes est claire : blesser les manifestants afin de décourager les manifestations, allant même jusqu'à recourir à la torture et à la violence sexuelle contre les manifestants. Au lieu de prendre des mesures pour mettre un terme à la très grave crise des droits humains, les autorités, sous le commandement du président Sebastian Piñera, ont poursuivi une politique de punition pendant plus d'un mois, ajoutant encore plus de personnes au nombre effarant de victimes, qui continue de croître à ce jour », a déclaré Erika Guevara-Rosas, directrice de la section des Amériques d'Amnestie Internationale.[1]

Puis, le 26 novembre, Human Rights Watch (HRW) a publié son rapport documentant des abus et violations des droits humains similaires par la police, ainsi que des statistiques fournies par différentes autorités chiliennes. Il indique que le bureau du procureur général enquêtait sur 26 décès survenus au cours des manifestations et citait un rapport du ministère de la Santé indiquant que des services médicaux d'urgence avaient été dispensés à 11 564 personnes blessées entre le 18 octobre et le 22 novembre, dont 1 200 blessés graves. Il dit que l'utilisation de fusils à plombs ciblant le visage était la principale cause des plus de 220 blessures oculaires recensées en date du 17 novembre, 16 personnes ayant perdu la vue d'un oeil et 34 ayant des lésions oculaires graves pouvant entraîner la cécité partielle ou totale. Depuis lors, des personnes ont perdu la capacité de voir et l'organisme rapporte le cas d'un adolescent dont les yeux ont été physiquement détruits.

Selon HRW, la police a arrêté plus de 15 000 personnes du 18 octobre au 19 novembre et « détenu » 2 000 autres pour avoir enfreint le couvre-feu imposé pendant l'état d'urgence. Le 21 novembre, l'Institut national des droits de l'homme avait déposé 442 plaintes pénales contre des procureurs au nom de victimes pour blessures, traitements cruels, tortures, viols, meurtres et tentatives de meurtre qui auraient été commis par les forces de sécurité. Selon l'organisme, des centaines d'autres personnes auraient été maltraitées et humiliées dans les postes de police. Par ailleurs, l'agence Reuters a rapporté le 26 novembre que les procureurs avaient déclaré étudier 2 670 plaintes d'abus commis par les forces de sécurité.

La conclusion à laquelle est parvenu HRW, largement considéré comme fonctionnant de concert avec le département d'État américain, était seulement que le Chili avait un besoin urgent d'une « réforme de la police », ce qui a sans doute permis à Piñera de pousser un soupir de soulagement puisqu'il avait déjà son agneau sacrificiel. La veille, il avait rencontré HRW au sujet de ses recommandations et il avait congédié son cousin et ministre de l'Intérieur discrédité Andres Chadwick, qui assumait déjà la responsabilité politique de l'assassinat extrajudiciaire par la police il y a plus d'un an du dirigeant de la communauté mapuche Camillo Catrillanca, et avait récemment qualifié les manifestants de « criminels ». Le 27 novembre, la Chambre des représentants du Chili a également voté la destitution de Chadwick.

En dépit de tout ce à quoi ils sont soumis, les Chiliens ne sont pas intimidés et continuent de sortir dans la rue en grand nombre pour se battre pour leurs justes revendications, notamment pour punir les responsables des torts causés à tant de citoyens et réclamer une réparation pour les personnes tuées et blessées ainsi que la convocation d'une assemblée constituante qui habilite le peuple à rédiger et à approuver une nouvelle constitution pour le pays afin de remplacer celle actuellement en vigueur imposée par la dictature de Pinochet, et qui consacre le modèle économique et social néolibéral qu'ils rejettent.

Bolivie


Manifestation de masse à El Alto, Bolivie, le 16 novembre 2019

La semaine qui s'est terminée le 23 novembre a été marquée par un massacre au cours duquel au moins 10 hommes, principalement de jeunes hommes, ont été abattus par les forces de sécurité de l'État qui ont attaqué un blocus pacifique à la centrale à gaz de Sekata, à El Alto. Des témoins ont déclaré croire que de nombreuses autres personnes ont été tuées et que les forces de l'État ont tout simplement fait disparaître les corps pour tenter de réduire le nombre de décès rapportés. La fermeture de l'accès aux centrales à gaz et les nombreux barrages routiers mis en place dans le pays font partie de la résistance nationale au coup d'État. Cela a empêché le carburant de quitter l'usine pour alimenter la capitale voisine, La Paz.

Cette semaine a également été marquée par de grandes mobilisations quotidiennes à travers le pays d'ouvriers et de familles révoltés réclamant justice pour les personnes assassinées à El Alto et dans un massacre similaire commis la semaine précédente contre des travailleurs soutenant Evo Morales à Cochabamba. Ce massacre a eu lieu un jour à peine après la proclamation de la « présidente par intérim », Jeanine Añez, qui a publié un décret exemptant les membres des forces armées de toute responsabilité pénale pour les actes commis dans le cadre du « rétablissement de l'ordre public ». Et pour comble d'insulte, une grande procession funéraire pour les personnes tuées à El Alto a été attaquée par des soldats dans des chars d'assaut et dispersée de force à l'aide de gaz lacrymogènes.

Plus de 30 meurtres documentés, des centaines de blessés et plus d'un millier de détentions et de disparitions sont à l'origine de la répression : jeunes autochtones, paysans et autres travailleurs dont les organisations constituent la principale base d'appui du président légitime du pays, Evo Morales. La dictature qui se fait passer pour un gouvernement intérimaire a publié des mandats d'arrêt contre Evo et d'autres membres influents du Mouvement vers le socialisme (MAS) en inventant contre eux des accusations de sédition, de terrorisme et d'incitation à des actes criminels. Cela s'ajoute aux maires et autres élus locaux affiliés au MAS déjà contraints de quitter leurs fonctions et/ou détenus pendant le coup d'État. Les gens sur le terrain en Bolivie décrivent cette campagne comme une chasse aux sorcières généralisée.

La censure des médias fait également partie de l'équation. Deux jours après le massacre d'El Alto, qui a fait l'objet de nombreux reportages, TeleSUR a été averti par la société de télécommunications publique Entel que son signal serait immédiatement interrompu en Bolivie. Le fournisseur privé a dit à RT version espagnole de s'attendre à ce qu'il en soit de même à compter du 2 décembre. Des attaques similaires à l'encontre d'organisations de médias nationales et internationales et de journalistes seraient largement répandues, alors que les Boliviens se voient menacer d'être accusés de sédition s'ils présentent les forces derrière le coup sous un mauvais jour.

Depuis plus d'une semaine, le Sénat et la Chambre des députés de l'Assemblée législative plurinationale ont engagé des négociations sur un projet de loi proposé par la majorité du MAS pour la création de nouveaux tribunaux électoraux nationaux et régionaux et la convocation d'élections générales. Un accord a été conclu et la Loi électorale temporaire exceptionnelle pour la réalisation des élections générales a été promulguée le 23 novembre. Actuellement, la fausse présidente Áñez et la législature sont en train de nommer (dans son cas) et d'élire (dans le cas de la législature) de nouvelles autorités électorales. Ils disposeront de 120 jours pour déclencher des élections une fois que les nouveaux tribunaux nationaux et régionaux auront été établis et qu'ils auront mis en place un échéancier. Ni Evo Morales ni Alvaro Garcia Linera ne sont autorisés à se représenter.

Le fait que l'adoption d'une loi complémentaire garantissant les droits constitutionnels de tous les citoyens boliviens soit bloquée par Áñez qui la considère comme une « loi d'impunité », entrave la capacité des autres membres du MAS d'exercer leur droit de participer aux élections ou à la vie politique de manière générale. Le projet de loi interdirait les détentions arbitraires et les persécutions politiques, y compris celles que son gouvernement de coup d'État pratique depuis le premier jour et que ceux qui sont derrière elle n'ont aucune intention de cesser. Il suffit de rappeler à quel point la législation a été efficace pour empêcher Lula de se présenter à la dernière élection présidentielle au Brésil, et la même chose a été tentée contre l'ancien président Correa en Équateur.

Le 26 novembre, le commandant en chef des forces armées a remis à Añez son prix du Grand mérite militaire et lui a attribué le rang de capitaine général pour services rendus. Ne voulant pas en rester là, Añez a déclaré qu'elle était reconnaissante aux forces armées de ne pas avoir hésité à se joindre au coup d'État et que leur présence avait contribué à « pacifier » le pays. Elle a assuré le commandant que, malgré le caractère temporaire de son « mandat », son intention était de redonner aux militaires le rôle et le prestige qui les caractérisaient depuis toujours et qu'elle travaillerait avec les pays amis pour ramener le plus haut niveau de programmes de formation pour eux. Un jour plus tard, il a été annoncé que la Bolivie avait rétabli ses relations diplomatiques avec Israël.

Également le 26 novembre, une assemblée de mouvements sociaux opposés au coup d'État s'est tenue à Cochabamba, au siège de la Fédération des producteurs de coca dirigée par Evo. Une résolution a été adoptée qui réaffirme notamment le soutien moral et matériel des participants à leur frère Evo Morales Ayma, président de l'État plurinational de Bolivie ; réaffirme l'état d'urgence en cours et annonce la cessation temporaire de ses actions de protestation pour vérifier si le gouvernement du putsch respecte ses engagements signés et les autres accords conclus avec les secteurs sociaux mobilisés du pays ; appelle l'Assemblée législative et l'exécutif du gouvernement de facto à approuver immédiatement la loi garantissant l'exercice des droits civils, politiques et constitutionnels fondamentaux aux autorités politiques et aux dirigeants syndicaux élus ; et exige la libération immédiate des détenus et l'arrêt de toutes les persécutions et détentions illégales. Les participants à l'assemblée s'engagent également à maintenir l'unité dans la lutte politique et sociale pour la justice sociale.

Le vice-président de l'organisation hôte, les Six Fédérations du Trópico de Cochabamba, a déclaré qu'il existait toute une stratégie en place pour faire perdre au MAS les prochaines élections. Compte tenu de la situation difficile, il a appelé toutes les sections du parti à se préparer à se battre pour les élections sans épuiser le mouvement dans des manifestations et des barrages routiers. Une réunion d'urgence du MAS a été convoquée ce week-end pour décider qui seront ses candidats.

Colombie


Bogota, Colombie, le 21 novembre 2019

Les énormes manifestations qui ont eu lieu quotidiennement dans la capitale, Bogota, et dans d'autres régions de la Colombie depuis le 21 novembre auraient atteint des dimensions insurpassées depuis des décennies. Ce qui a commencé comme une initiative principalement des centrales syndicales du pays, des étudiants et des retraités de tenir une journée de grève nationale pour demander la fin du « paquetazo » (ensemble d'énoncés politiques) néolibéral de mesures d'austérité et de privatisation, de corruption endémique et d'engagements non tenus du gouvernement Duque, a rapidement pris une tout autre ampleur avec la participation de dizaines de milliers de personnes qui ont continué de descendre dans les rues et de faire jour et nuit un tintamarre avec des casseroles. Les manifestants demandent l'arrêt de la criminalisation des protestations, le retrait de l'armée dans le maintien de l'ordre, que le gouvernement mette fin à l'impunité pour les meurtres commis contre des dirigeants sociaux et d'anciens guérilleros des FARC, qu'il mette en oeuvre l'accord de paix avec les FARC et que des négociations soient entamées avec l'ELN.


Les enseignants appellent au démantèlement de l'escouade antiémeute, à Bogota, le 27 novembre. Sur la bannière, on peut lire: « Nous n'avons pas choisi d'être enseignants pour voir nos étudiants se faire tuer ».

Ce qui a fait déborder le vase a été l'assassinat par l'escouade antiémeute d'un élève de 18 ans qui a été touché à la tête par un projectile - le tout enregistré sur vidéo. Le meurtre a provoqué l'indignation partout au pays. Dilan Cruz devait obtenir le 25 novembre son diplôme du secondaire et s'était joint à la manifestation pour s'opposer au sous-financement de l'éducation publique après s'être vu refuser un prêt qu'il avait demandé pour pouvoir fréquenter l'université. Un de ses amis a déclaré au quotidien colombien El Espectador : « Nous marchions et l'ESMAD nous a lancé des grenades assourdissantes et des bombes de gaz lacrymogène. Dilan s'est avancé pour disperser une bombe de gaz lacrymogène, parce qu'elle avait atterri à côté de personnes âgées. C'est à ce moment-là qu'on lui a tiré dessus. » « Ils disent que c'était une balle en caoutchouc », a ajouté son ami. Selon des rapports médico-légaux, il s'agirait d'un sachet rempli de plombs tirés à bout portant. Il était la quatrième personne tuée par les forces de sécurité lors des manifestations. Mais la répression se poursuit avec Duque, tout comme son homologue chilien tout aussi impopulaire, espérant pouvoir résister à la tempête en utilisant la force, encouragé par les propos du secrétaire d'État américain Mike Pompeo plus tôt cette semaine, qui l'a félicité sur son compte Twitter pour son traitement des manifestations.

Le 28 novembre, des représentants du Conseil régional des peuples autochtones du département du Cauca (CRIC) se sont joints à ceux qui manifestaient à Bogota. Les membres de leur garde indigène prévoyaient se rendre dans les prochains jours dans la capitale depuis différentes parties du Cauca pour ajouter leurs voix aux revendications exprimées par les autres.


Neuvième journée consécutive de manifestations à Bogota, le 29 novembre

Ne touchez pas à la Dominique !

Luis Almagro, secrétaire général de l'Organisation des États américains (OÉA), s'est mis récemment à cibler l'État insulaire de la Dominique, dans les Caraïbes, où des élections générales doivent avoir lieu le 6 décembre. Le 19 novembre, le ministre des Affaires étrangères et du Caricom de la Dominique a informé le Conseil permanent de l'OÉA lors d'une séance extraordinaire que le Parti ouvrier unifié qui fait partie de l'opposition avait empêché toute tentative de débattre plus tôt des propositions de réforme électorale, commençait maintenant à répandre des mensonges sur des troubles et le manque de sécurité sur l'île. En même temps, elle tente elle-même d'inciter à la violence pour donner l'impression que le pays serait dans le chaos et ingouvernable et que les conditions n'étaient pas réunies pour la tenue des élections le 6 décembre. Dans une entrevue accordée à TeleSUR le 27 novembre, le premier ministre Roosevelt Skerrit a laissé peu de doute sur le fait que des agents étrangers provenant des États-Unis et de l'OÉA encourageaient l'opposition à faire cela. Il a dit :

Le premier ministre Roosevelt Skerrit

« Ils (OÉA) ciblent certains États membres. La Dominique fait partie de ces pays et mon gouvernement en fait partie. Donc, le problème n'est pas la tenue d'élections libres et équitables - il ne s'agit pas non plus du processus électoral. Ils (OÉA) ont attendu cette occasion pour mettre en oeuvre cette stratégie. C'est donc quelque chose qui se prépare depuis trois ou quatre ans. »

Skerrit a ajouté qu'il estimait que le principal facteur de motivation de la croisade de l'OÉA pour délégitimer son gouvernement était de le punir pour avoir toujours voté contre la non-ingérence dans la région, et plus particulièrement contre les résolutions de l'OÉA sur le Venezuela.

La ministre Baron a informé l'OÉA dans son exposé que la Dominique envisage d'inviter le CARICOM, le Commonwealth [britannique], les Nations unies et le Centre Carter à observer son élection et était ouverte à l'inclusion de l'OÉA. Mais elle lui a d'abord demandé d'émettre des déclarations condamnant toute utilisation de la violence lors de cette élection et invitant toutes les parties à s'abstenir de déclarations susceptibles de constituer une ingérence dans les affaires souveraines des pays. Et dans le cas des États membres qui ne mettent pas en oeuvre les recommandations de l'OÉA, qu'il n'y ait pas présomption que leurs élections ne sont pas libres et équitables.

Baron a déclaré qu'elle retenait son indignation face aux tentatives de déstabilisation de la Dominique et des élections, alors que la Dominique fait d'énormes efforts pour surmonter les terribles effets de l'ouragan Maria et remettre le pays sur pied, reconnaissant l'aide reçue de nombre pays présents dans la salle.

S'adressant à un rassemblement de partisans le 23 novembre, le premier ministre Skerrit a souligné que la Dominique n'était pas à vendre et que personne ne pouvait lui dire quoi faire, répétant à plusieurs reprises : « Ne touchez pas la Dominique ! » Il a rappelé aux Dominicains qu'une situation dangereuse s'est créée dans la région avec l'imposition d'un « gouvernement » non élu, une tentative de coup d'État au Venezuela et un coup d'État en Bolivie, tous deux soutenus par Almagro. Il a déclaré que la lutte cette fois n'était pas pour se faire réélire, mais pour défendre le pays contre des intérêts étrangers qui ne se soucient pas du peuple mais cherchent à prendre le contrôle du pays.

La position juste des Dominicains patriotes, exprimée par le premier ministre Skerrit et la ministre Baron, a reçu le soutien de l'Alliance bolivarienne des peuples de notre Amérique (ALBA-TCP) qui, dans sa déclaration du 21 novembre, a exprimé le « malaise de ses membres face aux déclarations du secrétaire général de l'OÉA, Luis Almagro, qui prétend imposer à la Dominique une mission électorale de ladite organisation; cela constitue non seulement un acte d'ingérence inadmissible dans les affaires intérieures de la Dominique, mais également un dépassement inacceptable de l'exercice de ses fonctions »

La déclaration a ensuite fait référence à « la performance controversée de la dernière mission d'observation électorale de l'OÉA en Bolivie, entachée d'actes d'une impartialité politique douteuse, qui remet en cause son autorité technique et décourage ouvertement son intervention ».

« En ce sens, poursuit-elle, les pays membres de l'ALBA-TCP mettent en garde la communauté internationale, et en particulier la communauté des Caraïbes, contre l'application de la même forme de violence et de mort utilisé en Bolivie contre le Commonwealth de la Dominique et dont les buts et objectifs semblent être d'imposer un changement inconstitutionnel du gouvernement du premier ministre Roosevelt Skerrit. »

Dans sa déclaration d'appui, le CARICOM rappelle qu'aucun État membre n'est tenu d'inviter l'OÉA à observer ses élections. D'autres dirigeants des Caraïbes, dont Gaston Browne, premier ministre d'Antigua-et-Barbuda, et Ralph Gonsalves, premier ministre de Saint-Vincent-et-les Grenadines, ont également exprimé leur soutien à la position du gouvernement dominicain. Le premier ministre Gonsalves a ajouté que l'OÉA et son secrétaire général, Luis Almagro, étaient des ennemis des forces démocratiques et progressistes du continent.

Les jeunes empêchent le secrétaire général de l'OÉA
de parler au Paraguay

Plus tôt ce mois-ci, des organisations sociales, politiques et étudiantes ont mis à sa place Luis Almagro en l'empêchant de parler à l'Université pacifique de l'Asuncion, où il était censé prononcer un discours sur la « Démocratie et le développement ». À son approche en véhicule de l'endroit où il devait donner son discours, des jeunes portant des pancartes et des drapeaux l'ont encerclé et ont crié qu'il n'était pas le bienvenu, qu'il était responsable du coup d'État en Bolivie et qu'il avait du sang sur les mains. Almagro s'est ravisé et est reparti sans sortir du véhicule.

Note

1. Pour le texte complet du rapport, cliquer ici.

(Sources : BBC, El Universal, Nodal, teleSUR, WSWS, Prensa Latina. Photos M. Teruggi, redfish stream, Fecode, teleSUR, PPC-PY, Frente Guasú. Caricatures: C.Latuff)


Cet article est paru dans

Volume 49 Numéro 33 - 30 novembre 2019

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Les récents développements en Amérique latine et dans les Caraïbes: Résistance grandissante à la destruction Néolibérale, la terreur d'État et aux coups d'État D'inspiration impérialiste - Margaret Villamizar


    

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