Le cabinet du gouvernement libéral est
assermenté
Un exercice de relations publiques pour donner l'impression que le gouvernement minoritaire est représentatif
- Peggy Morton -
Le nouveau cabinet de Justin Trudeau a été assermenté
lors d'une cérémonie le 20 novembre à Rideau Hall, présidée par la
gouverneure générale Julie Payette. Le cabinet a été élargi de 31
à 37 membres, incluant le premier ministre. Sept sont nouveaux au
cabinet. Trois anciens ministres n'ont pas été reconduits dans leur
fonction et deux n'ont pas été réélus.
Dix-sept membres viennent de l'Ontario, dix du Québec,
quatre de la Colombie-Britannique, un du Manitoba et un de chacune des
provinces de l'Atlantique. Il y a un nombre égal de femmes et d'hommes,
comme dans le premier cabinet de Trudeau.
Plusieurs membres du cabinet précédent se sont vu
attribuer de nouveaux rôles. Le changement le plus remarquable a été la
nomination de Chrystia Freeland aux postes de vice-première ministre et
de ministre des Affaires intergouvernementales, chargée de travailler
avec les provinces. Freeland demeure également responsable des
relations entre le Canada et les États-Unis, y compris l'adoption de la
nouvelle version de l'accord de l'ALÉNA par le Congrès américain. Les
médias monopolisés ont laissé entendre que le rôle de Freeland
consistait à exercer ses « compétences diplomatiques
considérables » afin de développer de meilleures relations avec
les premiers ministres des provinces, notamment Doug Ford de l'Ontario,
François Legault du Québec, Jason Kenney de l'Alberta et Scott Moe de
la Saskatchewan. Que ces « compétences diplomatiques
considérables » aient été exercées au cours de la dernière
législature au nom des oligarques mondiaux qui contrôlent l'économie
canadienne est un sujet qui ne doit pas être discuté tout comme le fait
que Freeland a rendu des services inestimables à l'impérialisme
américain en matière de guerre et de paix et qu'elle a entraîné
le Canada dans cette conspiration pour provoquer un changement de
régime illégal au Venezuela, en Bolivie et dans d'autres pays.
Des reportages dans les médias ont mis en lumière la
composition du nouveau cabinet en ce qui concerne le nombre de membres
provenant du Québec et des différentes régions du Canada, ce qui serait
fait pour veiller à ce que toutes les régions du Canada, ainsi que le
Québec, soient écoutés et représentés. Les « voies ensoleillées »
par lesquelles Trudeau a dit qu'il gouvernerait en 2015 ont fait
place à la promesse de « bien écouter » et de « réparer les pots
cassés », pour citer le National Post. Des experts des
affaires politiques font remarquer que le gouvernement Trudeau devra
faire preuve d'habileté pour négocier des questions telles que la taxe
sur le carbone et une forme d'assurance-médicaments avec les
gouvernements provinciaux. L'oléoduc Trans Mountain a été déclaré une
affaire réglée, au mépris du fait que les nations autochtones n'ont pas
donné leur consentement. On laisse entendre que si Freeland peut
conclure un accord avec le gouvernement Trump, elle peut conclure des
ententes avec les gouvernements provinciaux. En d'autres termes, les
marchandages et les ententes conclues en coulisses sont à l'ordre du
jour, à commencer par les négociations commerciales avec les États-Unis
qui ont donné aux oligarques mondiaux ce qu'ils voulaient.
La Presse canadienne cite le gouvernement Legault au
Québec et la mairesse de Montréal qui ont salué l'augmentation du
nombre de ministres québécois. « L'importance du Québec est confirmée,
a déclaré Christian Dubé, président du Conseil du Trésor du Québec. Je
pense que c'est une très bonne nouvelle pour nous tous. » La
mairesse Valérie Plante a déclaré qu'elle comptait sur les six
ministres montréalais pour que la ville ait une voix forte au sein du
cabinet sur des questions telles que la mobilité et le logement,
rapporte Radio-Canada. La mairesse dit avoir « confiance que l'ensemble
des élus saura mettre la partisanerie de côté afin de travailler
ensemble sur les dossiers prioritaires ».
Le premier ministre de l'Alberta, Jason Kenney, a
déclaré sur tweeter : « Le gouvernement de l'Alberta espère
trouver un terrain d'entente avec le gouvernement fédéral afin de créer
des emplois et de stimuler la croissance, en partie par le
développement responsable des ressources, et d'assurer l'équité au sein
de la fédération canadienne. »
« J'ai notamment hâte de travailler avec [Jim Carr] dans
ses nouvelles fonctions de représentant spécial pour les Prairies, avec
Chrystia Freeland comme ministre des Affaires intergouvernementales [et
avec Seamus O'Regan], en tant que ministre des Ressources
naturelles », écrit Kenney.
En même temps, Kenney a donné une version du «
pare-feu » autour de l'Alberta de Stephen Harper, dont un régime
de retraite distinct pour l'Alberta, et a fait de la démagogie sur ce
qu'il appelle l'iniquité des arrangements de la péréquation négociés
par le gouvernement Harper dans lequel il a joué un rôle dirigeant.
Le premier ministre de l'Ontario, Doug Ford, a également
félicité les membres du nouveau cabinet en disant que son équipe se
réjouissait de travailler avec Ottawa pour « bâtir une Ontario et un
Canada plus forts et plus prospères ».
Jim Carr, ancien ministre de la Diversification du
commerce international et auparavant ministre des Ressources
naturelles, a été nommé « représentant spécial » de Trudeau pour
les Prairies. Carr a presque immédiatement déclaré qu'il pensait qu'il
était possible de modifier la réglementation régissant les grands
projets énergétiques et miniers.
En plus des nominations au Cabinet, Pablo Rodriguez a
été nommé leader parlementaire et Kristy Duncan leader parlementaire
adjointe, tandis que Mark Holland reste le whip en chef du
gouvernement. Les commentateurs soulignent que le rôle du leader à la
Chambre et de son équipe revêt plus d'importance dans un parlement
minoritaire, où le gouvernement a besoin du soutien des conservateurs,
du Bloc québécois ou du NPD pour faire adopter des projets de loi.
Parmi les changements au cabinet il y a la nomination de
Bill Blair, qui était ministre de la Sécurité frontalière et de la
Réduction du crime organisé, au poste de ministre de la Sécurité
publique, précédemment occupé par Ralph Goodale, qui a perdu son siège.
Le ministre de la Sécurité publique est responsable de la GRC, de
l'Agence des services frontaliers du Canada, du Service correctionnel
du Canada et du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS).
En tant que chef de police de Toronto, Blair a présidé lors du G20
de 2010 à une des violations les plus violentes et les plus
massives des droits de la personne perpétrées par la police au Canada,
notamment des actes répandus de violence et d'abus des droits de la
part de la police et l'arrestation illégale de quelque 1 150
personnes. Sa nomination est un autre signe inquiétant de la direction
que prend ce gouvernement.
En plus de la fraude selon laquelle les travailleurs
canadiens s'entredéchirent avec le « Québec bashing » et le «
Alberta bashing », les médias monopolisés racontent maintenant que
les gouvernements provinciaux représentent les revendications et les
aspirations du peuple et que le gouvernement fédéral s'est assagi et
est maintenant d'humeur à réparer les pots cassés. La réalité est que
le peuple est en mouvement contre ces mêmes gouvernements et qu'il
exprime son opposition résolue à leur offensive néolibérale antisociale
et à la destruction de toute autorité publique.
La fraude que le gouvernement Trudeau consultera les
Canadiens et fera les choses d'une nouvelle manière a été complètement
mise à nu. On dit maintenant qu'« écouter les Canadiens » signifie
que le gouvernement fédéral va conclure des marchandages avec les
gouvernements provinciaux. Au-delà de ce discours creux, il y a la
réalité qu'il n'y a pas de politique, mais seulement une lutte pour la
domination et le pouvoir, ainsi que le diktat de l'oligarchie
financière. Ce qui est promu, ce sont les marchandages négociés dans le
dos du peuple. C'est une preuve de plus que les « institutions
démocratiques » sont dépassées et un poids énorme sur la société.
Les Canadiens ont déjà beaucoup d'expérience avec les
libéraux et leur prétention de faire les choses autrement, de
consulter, d'écouter les Canadiens, etc., et la réalité de la
domination des intérêts privés par le recours aux pouvoirs de police.
Ils ne vont pas se croiser les bras et attendre face à ce gouvernement.
Il est temps de prendre nous-mêmes les choses en main maintenant en
continuant de parler en notre propre nom. C'est l'exigence d'une
véritable démocratie, du renouveau démocratique qui est à l'ordre du
jour.
Cet article est paru dans
Volume 49 Numéro 32 - 23 novembre 2019
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